M. Bruno Sido, rapporteur. Le constat de la nécessité de stopper la perte de biodiversité est aujourd’hui partagé par tous. J’en veux pour preuve l’adoption, à l’unanimité, de l’amendement nos 525 rectifié, présenté par Mme Blandin.

Nous assistons en effet, depuis quelques dizaines d’années, à la disparition d’espèces animales et végétales, et ce à une vitesse sans précédent. Nous perdons beaucoup de boulons. Or, les écosystèmes nous fournissent de nombreuses ressources et leur bon fonctionnement dépend de la diversité biologique.

La commission adhère globalement aux objectifs fixés à l’article 20 et suivants. Elle insiste toutefois sur la nécessité de ne pas rééditer les erreurs du passé – je pense à Natura 2000 – et d’associer en conséquence, très en amont, l’ensemble des acteurs, notamment les élus locaux, à la mise en œuvre des mesures, en particulier pour ce qui concerne la trame verte et bleue.

La commission propose donc, dans l’amendement n° 61 rectifié bis, outre des modifications rédactionnelles, d’insister sur le rôle des collectivités territoriales, d’une part, pour l’élaboration du volet local de la stratégie pour la biodiversité et, d’autre part, pour la définition des mesures de compensation dans la trame verte et bleue.

Cet amendement tend également à préciser, et c’est un élément important, que les mesures de compensation demandées au porteur de projet devront être proportionnées aux atteintes.

Enfin, la commission estime qu’un vrai débat devra impérativement se tenir au Parlement pour décider, au moment du projet de loi d’engagement national pour l’environnement, c’est-à-dire le Grenelle II, des meilleures modalités d’élaboration et de gestion de la trame verte et bleue qui devront être très largement décentralisées.

M. le président. Cet amendement est assorti de dix-neuf sous-amendements.

Les deux premiers sont identiques.

Le sous-amendement n° 148 rectifié est présenté par M. Le Grand.

Le sous-amendement n° 757 rectifié est présenté par Mme Blandin, MM. Raoul et Courteau, Mme Herviaux, MM. Raoult, Repentin, Ries et Teston, Mme Bourzai, MM. Guillaume, Antoinette, Gillot, S. Larcher, Lise, Patient, Tuheiava et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

Ces deux sous-amendements sont ainsi libellés :

Dans le deuxième alinéa de l'amendement n° 61 rectifié bis, remplacer les mots :

préserver et accroître la biodiversité sauvage et domestique

par les mots :

stopper la perte de biodiversité sauvage et domestique, restaurer et maintenir ses capacités d'évolution

Le sous-amendement no 148 rectifié n’est pas soutenu.

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour présenter le sous-amendement no 757 rectifié.

Mme Marie-Christine Blandin. J’ai longuement expliqué les raisons pour lesquelles je souhaitais la rectification de l’intitulé du chapitre Ier du titre II. Ce sous-amendement vise à apporter la même rectification au membre de phrase identique qui figure dans le corps de l’amendement no 61 rectifié bis. Il ne me paraît pas utile de développer davantage.

M. le président. Le sous-amendement n° 792, présenté par Mme Blandin, MM. Raoul et Courteau, Mme Herviaux, MM. Raoult, Repentin, Ries et Teston, Mme Bourzai, MM. Guillaume, Antoinette, Gillot, S. Larcher, Lise, Patient, Tuheiava et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après le troisième alinéa de l'amendement n° 61 rectifié bis, insérer un alinéa ainsi rédigé :

- l'évaluation des services rendus par la biodiversité à la collectivité, aux acteurs socio-économiques, avec les parties prenantes du Grenelle de l'environnement ;

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.

Mme Marie-Christine Blandin. Le sous-amendement n° 792 a trait à l’évaluation des services de la biodiversité et de leurs valeurs, qui a été passée par pertes et profits lors du passage de l’article 20 du projet de loi à l’amendement no 61 rectifié bis, au même titre, d’ailleurs, que la participation des parties du Grenelle à ce travail.

Or, s’il y a un point à faire connaître et à travailler, c’est bien la notion de service rendu. Si vous dites aux gens que le crapaud sonneur à ventre jaune a disparu, ils sourient ou ils haussent les épaules ; si vous leur dites que le crapaud qui mangeait les moustiques a disparu, ils voient les choses autrement.

Si vous déclarez que 30 % des bactéries lactiques ont disparu en vingt ans, cela ne les touche pas ; si vous leur dites que ces bactéries permettaient la fabrication du fromage, ils vous prêtent une autre attention.

Enfin, si vous leur expliquez que leurs maisons sont inondées parce que le marais voisin a été comblé, ils auront une autre vision des écosystèmes et soutiendront l’acquisition de 20 000 hectares de zones humides.

Au-delà de ces anecdotes, sachez que le collège employeur, avide d’indicateurs pour guider les stratégies, tout comme le collège syndical, au premier rang desquels les syndicats agricoles, soucieux de disposer d’outils pour négocier des gestions différenciées, étaient très demandeurs de ces évaluations.

À ce point du texte, nous avons considéré la biodiversité comme un tout, comportant les populations animales et végétales – l’espèce humaine n’est pas oubliée –, leur milieu de vie, leurs interactions et, désormais, les services rendus : pollinisation, évitement d’inondations, captation du carbone entre autres.

Si certains services se monnayent déjà – je pense à ces énormes camions qui traversent les États-Unis pour apporter en urgence des ruches au pied des vergers condamnés par la disparation des pollinisateurs –, nous sommes très loin du compte et des connaissances nécessaires pour faire ce compte ; songeons au phytoplancton, voire simplement aux terres retenues par une haie sur un terrain pentu. De toute façon, le but n’est pas d’avoir une vision comptable de la vie sur terre. Nous souhaitons en promouvoir la prise en compte dans les aménagements, les décisions publiques, le patrimoine arboré d’une ville, d’éventuels mécanismes de compensation, mais nous ne rangeons pas d’emblée les écosystèmes dans le système marchand, d’autant que nous sommes encore loin de maîtriser cette monnaie.

La notion de service est trop récente. Son utilisation s’est certes développée, mais aujourd’hui nous savons que 60 % des services écosystémiques sont utilisés de façon non durable. C’est de cela que nous devons nous préoccuper avant toute chose.

Le sous-amendement no 791 vise donc à supprimer le mot « valorisation », car il est ambigu. Il peut être interprété comme la recherche d’une augmentation de la valeur des services des écosystèmes, ce qui n’est pas toujours possible ni souhaitable. Je prendrai un simple exemple. Hier, valoriser une tourbière, c’était en faire un combustible à faible rendement et à fort dégagement de CO2. Faire cela aujourd’hui serait une erreur. La priorité actuelle est de mieux connaître les services rendus par les écosystèmes en termes biologiques.

En résumé, le sous-amendement no 792 vise à introduire la notion d’évaluation et le sous-amendement no 791 à supprimer les mots « de valorisation ».

M. le président. Le sous-amendement n° 791, présenté par Mme Blandin, MM. Raoul et Courteau, Mme Herviaux, MM. Raoult, Repentin, Ries et Teston, Mme Bourzai, MM. Guillaume, Antoinette, Gillot, S. Larcher, Lise, Patient, Tuheiava et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Dans le quatrième alinéa de l'amendement n° 61 rectifié bis, supprimer les mots :

de valorisation,

Ce sous-amendement est défendu.

Le sous-amendement n° 526 rectifié, présenté par Mme Blandin, MM. Raoul et Courteau, Mme Herviaux, MM. Raoult, Repentin, Ries et Teston, Mme Bourzai, MM. Guillaume, Antoinette, Gillot, S. Larcher, Lise, Patient, Tuheiava et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

 

Dans le premier membre de phrase du quatrième  alinéa de l'amendement n°61 rectifié bis, après le mot :

ruraux

insérer le mot :

, insulaires

La parole est à M. Serge Larcher.

M. Serge Larcher. Il s’agit d’un sous-amendement de précision.

Dans une énumération, nous savons l’écueil que constitue la tentation de l’exhaustivité. Il en est ainsi lorsque, au détour d’une phrase, on entame une liste de territoires.

D’autres types de territoires que ceux qui sont mentionnés mériteraient une approche spécifique : les zones humides, pour le service d’assèchement qu’elles rendent et de façon à valoriser encore plus leur réputation ; les zones périurbaines, où se fait lourdement sentir l’empreinte écologique de la ville, de ses transports, de ses apports d’énergie, de ses rejets, des loisirs de ses habitants, où les initiatives de maraîchage de proximité deviennent de plus en plus pertinentes ; des zones de captage, aux besoins de protection supérieurs ; des zones littorales fragilisées par l’évolution du trait de côte et, pour leur partie marine, déterminante pour la survie de la ressource piscicole, car c’est là, et là seulement, que se font les pontes – pour les tortues en particulier – et la croissance des alevins.

Mais il faut choisir. Il me semble juste de citer la spécificité des territoires ruraux, car la qualité du travail des agriculteurs est déterminante pour la biodiversité.

Il est juste également de mentionner la montagne, le législateur a même inséré cette notion dans une loi.

Nous proposons donc, pour notre part, d’ajouter une référence à la spécificité insulaire. C’est une demande forte des différentes catégories de collectivités d’outre mer, c’est aussi une nécessité pour la Corse et nos îles atlantiques.

Les îles cumulent souvent, d’une part, une très grande richesse terrestre et marine, liée à l’évolution particulière des écosystèmes isolés, à l’omniprésence près des côtes de zones d’alevinage et, en zone tropicale, de récifs coralliens ou de mangroves et, d’autre part, un déficit d’équipements de remédiation tels que des stations d’épuration aux normes ou des unités de tri et de recyclage des déchets.

En conséquence, faute d’investissements aussi qualitatifs qu’en métropole, les impacts des activités humaines sont plus dommageables à la biodiversité.

On pourrait aussi évoquer certaines tolérances inadmissibles à l’égard de substances prohibées en métropole : le chlordécone aux Antilles, certains pesticides utilisés au-delà des normes sur les fraises de Nouvelle-Calédonie, etc. Ces molécules, qui affectent la santé, sont aussi toxiques pour les écosystèmes. Voilà une autre triste spécificité de nos îles !

C’est pourquoi nous proposons de citer, entre les territoires ruraux et de montagne, les territoires insulaires.

M. le président. Le sous-amendement n° 793, présenté par Mme Blandin, MM. Raoul et Courteau, Mme Herviaux, MM. Raoult, Repentin, Ries et Teston, Mme Bourzai, MM. Guillaume, Antoinette, Gillot, S. Larcher, Lise, Patient, Tuheiava et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Dans le quatrième alinéa de l'amendement n° 61 rect. bis, après les mots :

de montagne

insérer les mots :

, du rôle que peut jouer la diversité intraspécifique des espèces de culture et d'élevage

La parole est à M. Marc Daunis.

M. Marc Daunis. Malgré sa relative simplicité, ce sous-amendement est important. Il vise deux objectifs particuliers.

D’une part, il tend à préciser que les mesures mises en place dans le cadre de la constitution des trames verte et bleue doivent prendre en compte les spécificités de l’ensemble des territoires, et non uniquement des territoires ruraux et de montagne.

D’autre part, il a pour objet de spécifier que l’activité agricole peut jouer un rôle de premier plan en matière de biodiversité, et ce en montagne comme ailleurs. Ainsi, nous constatons que le maintien de terres agricoles au niveau des espaces péri-urbains est de plus en plus fondamental.

Il y a là un enjeu important, d’où ce sous-amendement visant à introduire le membre de phrase suivant : « du rôle que peut jouer la diversité intraspécifique des espèces de culture et d’élevage ».

M. le président. Le sous-amendement n° 776, présenté par MM. Raoult, Raoul et Courteau, Mme Herviaux, MM. Repentin, Ries, Teston, Guillaume, Tuheiava et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après le mot :

protection ;

rédiger comme suit la fin du quatrième alinéa de l'amendement n° 61 rect. bis :

sans préjudice des dispositions relatives à l'évaluation environnementale, des mesures visant à compenser les atteintes aux continuités écologiques seront rendues obligatoire dans les documents de planification et les projets susceptibles d'avoir des conséquences dommageables sur la trame verte et bleue, selon des modalités définies par décret ;

La parole est à M. Roland Courteau.

M. Roland Courteau. La création d’une trame verte et bleue et sa reconnaissance législative doivent s’insérer autant que possible dans les dispositifs existants.

À ce titre, les documents de planification ainsi que les projets sont d’ores et déjà soumis au régime de l’évaluation environnementale tel que défini par le code de l’environnement. Ce régime prévoit des mesures d’évitement, de réduction et, en dernier lieu, de compensation sur l’ensemble des aspects environnementaux.

Il paraît important de préciser que ce dispositif n’est pas remis en cause dans le cadre de la trame verte et bleue et d’insister, uniquement pour la compensation, sur la spécificité de cette trame en termes de continuités écologiques. Tel est l’objet du présent sous-amendement.

Par ailleurs, la compensation vise à rétablir un équilibre rompu entre des intérêts complémentaires ou antagonistes.

L’ajout du terme « proportionnée » comme adjectif du terme « compensation » est au mieux redondant. Au pire, il soulève des interrogations quant à la nature même de la compensation. Dès lors, nous proposons de s’en tenir au seul terme « compensation », qui garantit par lui-même le retour à l’équilibre rompu par les atteintes portées à l’environnement.

M. le président. Le sous-amendement n° 794, présenté par Mme Blandin, MM. Raoul et Courteau, Mme Herviaux, MM. Raoult, Repentin, Ries et Teston, Mme Bourzai, MM. Guillaume, Antoinette, Gillot, S. Larcher, Lise, Patient, Tuheiava et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Dans le quatrième alinéa de l'amendement n° 61 rect. bis, remplacer les mots :

aux continuités écologiques dans le cadre de la trame verte et bleue

par les mots :

aux effectifs des espèces, aux milieux perturbés et à leur fonctionnalité, et aux continuités

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.

Mme Marie-Christine Blandin. Considérer que, si la réalisation d’un équipement entraîne des impacts négatifs sur les milieux naturels il suffit de compenser ces impacts, est une idée fort simple.

Cette idée est même un peu simpliste, bien qu’elle figure dans la loi du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature. Dans son article 2, celle-ci dispose que l’étude d’impact figurant dans le dossier soumis à enquête publique pour un certain nombre d’équipements doit comprendre au minimum une analyse de l’état initial du site et de son environnement, l’étude des modifications que le projet engendrerait et les mesures envisagées pour supprimer, réduire et, si possible, compenser les conséquences dommageables pour l’environnement.

Or, sauf cas vraiment exceptionnel, la compensation exacte des dommages est impossible, en raison soit d’une insuffisance de connaissances scientifiques, soit d’une impossibilité technique à la mettre en œuvre, soit d’un coût disproportionné par rapport à l’équipement ou à l’ouvrage. Par conséquent, de manière générale, elle n’empêchera pas une perte plus ou moins importante de diversité biologique.

De plus, il arrive fréquemment que des compensations prévues ne sont pas mises en œuvre, notamment lorsqu’elles demandent des efforts sur de nombreuses années.

Enfin, il existe actuellement une tendance consistant à vouloir compenser des impacts négatifs en un lieu donné par des actions sur des territoires éloignés, voire franchement lointains. Eh bien, non ! On ne compensera pas la perte du lys maritime sur la zone de l’incinérateur de Marseille en finançant un programme de sauvegarde de la pervenche de Madagascar !

La possibilité de compensation doit donc être limitée aux seuls cas dans lesquels l’équipement est réellement indispensable et alors qu’il est impossible de faire autrement. Ce n’est pas une solution de facilité !

Certes, lorsque des ouvrages ont un caractère vraiment essentiel, par exemple lorsqu’ils concernent la santé humaine ou la sécurité, il est préférable de prévoir une compensation des impacts négatifs, mais ce dispositif doit rester exceptionnel. Il ne doit pas aboutir, de façon déguisée, à ce que l’on puisse tout faire en échange de solutions à quelques euros, surtout lorsque l’on sait qu’elles ne fonctionnent pas.

Ce sous-amendement tend donc à limiter la possibilité de détruire, puis de compenser, à des projets cruciaux. Dans son article 6, la directive européenne concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages limite déjà cette possibilité, en cas d’atteinte aux espèces et aux écosystèmes fragiles et prioritaires, aux seuls programmes de santé humaine, sécurité publique et protection de l’environnement.

Je propose donc en fait deux sous-amendements qui se succèdent. L’un précise que la loi encadre le type de projets donnant lieu à compensation. L’autre détaille la nature de ces compensations. Il ne s’agit pas d’enrichir un territoire voisin avec cent grenouilles supplémentaires, il s’agit de restaurer un milieu !

M. le président. Le sous-amendement n° 795, présenté par Mme Blandin, MM. Raoul et Courteau, Mme Herviaux, MM. Raoult, Repentin, Ries et Teston, Mme Bourzai, MM. Guillaume, Antoinette, Gillot, S. Larcher, Lise, Patient, Tuheiava et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Compléter le quatrième alinéa de l'amendement n° 61 rect. bis par un membre de phrase ainsi rédigé :

la loi précise les catégories de programme ou de projets pour lesquels des compensations peuvent être acceptables ;

Ce sous-amendement est déjà défendu.

Le sous-amendement n° 777, présenté par MM. Raoult, Raoul et Courteau, Mme Herviaux, MM. Repentin, Ries, Teston, Guillaume, Tuheiava et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après le quatrième alinéa de l'amendement n° 61 rect. bis, insérer un alinéa ainsi rédigé :

- la réduction, à l'occasion du renouvellement des concessions ou des autorisations, des atteintes portées aux continuités écologiques par les ouvrages hydrauliques ou les grandes infrastructures linéaires, au regard des connaissances scientifiques et des moyens techniques disponibles ;

La parole est à M. Paul Raoult.

M. Paul Raoult. Dans le cadre des engagements pris par l’ensemble des parties lors du Grenelle de l’environnement, en particulier sur la constitution d’une trame verte et bleue et la conservation ou la restauration des continuités écologiques, il est important que l’État se révèle exemplaire à l’occasion du renouvellement des concessions ou des autorisations relatives aux ouvrages et infrastructures qui relèvent de sa compétence et qu’il veille ainsi à réduire les atteintes portées aux continuités écologiques. Tel est l’objet du présent sous-amendement.

La notion de trame verte et bleue est nouvelle. Il faudra la populariser, mais aussi l’intégrer à l’avenir dans notre manière d’aménager le territoire et la traduire dans les schémas de cohérence territoriale et dans les plans locaux d’urbanisme.

Ce concept est à la fois précis et imprécis dans la mesure où, dans ce domaine, les connaissances scientifiques ne sont pas complètes et celles des élus relativement peu importantes. Nous ne sommes jamais que le reflet de la population que nous représentons !

Cela signifie qu’un effort de tous sera nécessaire pour faire comprendre que, à l’heure actuelle, notre politique de protection de la nature ne doit plus se limiter aux milieux naturels exceptionnels, mais également englober les milieux naturels les plus banals et, par conséquent, s’appliquer sur l’ensemble du territoire.

Il faut ensuite prendre en compte les continuités écologiques. Les routes et les grands équipements linéaires ont fragmenté l’espace naturel et cette fragmentation a entraîné une diminution de la biodiversité car chaque espèce a besoin d’un habitat précis. En réduisant son habitat, vous la conduisez en réalité à la mort !

Nous devons donc conduire une réflexion globale en matière d’aménagement de l’espace, en y intégrant la nature dans son caractère exceptionnel, mais aussi dans sa banalité.

La problématique est identique pour la trame bleue : il suffit d’une interruption de l’espace naturel le long d’un cours d’eau pour que la continuité écologique soit rompue, la connectivité cassée et la richesse de tout l’environnement de la rivière entamée. Les réflexions autour de la question du barrage sont donc beaucoup plus importantes qu’on ne le croit.

De plus, il faut prendre en compte, non seulement la continuité écologique, mais aussi la transversalité écologique. Par exemple, le brochet se reproduit dans les espaces marécageux situés le long de la rivière. Par conséquent, si vous créez des berges insubmersibles et que le poisson ne peut pas traverser, vous le tuez !

Une analyse globale de l’organisation de l’environnement naturel est donc nécessaire, en même temps qu’une réflexion sur les différents aménagements du territoire qui peuvent être mis en œuvre. À mon sens, il s’agit d’une réflexion profonde, qui dépasse la banalité des termes « trame bleue » et « trame verte » et qui nous obligera à un effort certain lors de l’élaboration des SCOT et des PLU.

M. le président. Le sous-amendement n° 534 rectifié, présenté par Mme Blandin, MM. Raoul et Courteau, Mme Herviaux, MM. Raoult, Repentin, Ries et Teston, Mme Bourzai, MM. Guillaume, Antoinette, Gillot, S. Larcher, Lise, Patient, Tuheiava et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Dans le cinquième alinéa de l'amendement n° 61 rect. bis, remplacer le mot :

notamment

par les mots :

y compris

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.

Mme Marie-Christine Blandin. Ce sous-amendement est très simple et se défend rapidement.

Les stratégies locales cohérentes de la France s’appliquent sur tout son territoire, qu’il soit métropolitain ou ultramarin. Nous proposons simplement d’introduire le terme « y compris », qui renvoie plus nettement à cette idée d’intégration de toutes les régions, territoires et départements d’outre-mer. On les oublie trop souvent, alors même qu’ils sont encore plus concernés par la biodiversité que le territoire métropolitain !

M. le président. Le sous-amendement n° 533 rectifié, présenté par Mme Blandin, MM. Raoul et Courteau, Mme Herviaux, MM. Raoult, Repentin, Ries et Teston, Mme Bourzai, MM. Guillaume, Antoinette, Gillot, S. Larcher, Lise, Patient, Tuheiava et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Dans le cinquième alinéa de l'amendement n° 61 rect. bis, remplacer le mot :

régionales

par les mots :

locales cohérentes

La parole est à Mme Odette Herviaux.

Mme Odette Herviaux. Si vous le permettez, monsieur le président, nous souhaitons modifier une nouvelle fois ce sous-amendement. Il ne s’agirait plus de remplacer le mot « régionales », mais d’ajouter après ce mot les termes « et locales cohérentes »

M. le président. Il s’agit donc du sous-amendement n° 533 rectifié bis.

Veuillez poursuivre, ma chère collègue.

Mme Odette Herviaux. À l’heure de la décentralisation, alors que le principe de la république décentralisée a été reconnu dans la Constitution et que certaines collectivités ont été précurseurs en matière d’actions en faveur de la biodiversité, il nous semble pour le moins maladroit d’arrêter que le niveau local devrait décliner ce que le niveau national aurait décidé, ou alors qu’on nous dise carrément que la charge de planifier les stratégies locales incombera désormais aux préfets et que ceux-ci disposeront de la totalité des moyens nécessaires à la protection de la biodiversité dans les régions et départements.

Dans un souci de respect des dynamiques qui sont à l’œuvre ou en préparation sur le terrain et dans un souci de stratégie partagée, nous proposons donc cette nouvelle rédaction. Elle nous semble plus respectueuse des efforts déjà initiés et, pour beaucoup d’entre eux, déjà réalisés par l’ensemble des collectivités.

Le sous-amendement n° 796, présenté par Mme Blandin, MM. Raoul et Courteau, Mme Herviaux, MM. Raoult, Repentin, Ries et Teston, Mme Bourzai, MM. Guillaume, Antoinette, Gillot, S. Larcher, Lise, Patient, Tuheiava et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Compléter le cinquième alinéa de l'amendement n° 61 rectifié bis par un membre de phrase ainsi rédigé :

cette stratégie inclura les mesures pour appliquer les décisions, résolutions et recommandations adoptées par les Conférences des Parties des conventions internationales relatives à la biodiversité, et mettra en œuvre les programmes de travail de la Convention sur la diversité biologique ;

La parole est à M. Paul Raoult.

M. Paul Raoult. La France a ratifié de nombreuses conventions internationales qui l’engagent sur des décisions et des programmes : convention RAMSAR sur les zones humides, convention de Bonn sur les espèces migratrices et accords associés, convention CITES sur le commerce international de la faune et de la flore, convention relative au patrimoine mondial, convention alpine, convention OSPAR, convention des mers régionales, conventions d’Apia et de Nouméa, etc. Elle doit d'ailleurs rendre compte de ce qu'elle met en œuvre.

Par exemple, la convention sur la diversité biologique a prévu un nombre important de programmes de travail, notamment sur les forêts, les îles, les montagnes, les eaux côtières et marines, les aires protégées, les espèces exotiques envahissantes et les stratégies mondiales de conservation des plantes.

Ces programmes, qui font l’objet de nombreuses discussions avant leur adoption et sont soumis à des évaluations régulières sur les progrès réalisés, ont tous été approuvés et votés par la France.

Certes, de nombreuses actions préconisées sont mises en œuvre en France, mais elles ne le sont pas toutes, et en tout cas pas dans le cadre logique, cohérent et coordonné de ces programmes. La stratégie nationale de conservation de la diversité biologique en reprend plusieurs, mais de nombreuses actions sont ignorées.

Or, tant pour l’efficacité que pour le respect de nos engagements, un effort devrait être fait pour inclure complètement ces programmes de travail et le suivi de leur mise en œuvre dans l’ensemble de nos documents concernant la stratégie de conservation de la diversité biologique.

Il y a urgence, ne serait-ce que pour atteindre l'objectif de 2010 décidé par la convention sur la diversité biologique, à savoir enrayer la perte de biodiversité. La France souscrit à cet engagement européen, puisqu’elle l'a repris dans sa stratégie nationale sur la biodiversité.

Il est indispensable que la France soit en mesure de mettre en œuvre, sur son territoire, les décisions prises dans le cadre international qu'elle a elle-même approuvées.

Prenons l’exemple des zones humides. Il y a là un enjeu important. Nous avons signé la convention RAMSAR, mais les zones humides continuent de disparaître. Les efforts réalisés ici ou là sont malheureusement largement insuffisants. Or, si nous n’agissons pas, c’est la protection des champs captants qui sera remise en cause, puisque les zones humides jouent le rôle d’éponges et permettent de purifier les eaux superficielles qui vont ensuite s’infiltrer dans la nappe phréatique. Il est donc urgent de protéger ces zones humides et d’appliquer la convention RAMSAR.