M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Luc Chatel, secrétaire d’État. Monsieur Arthuis, la réponse à votre question réside à mon avis dans une industrie plus compétitive et plus innovante.

Mme Nicole Bricq, membre du groupe de travail. Oui !

M. Luc Chatel, secrétaire d’État. Nous n’avons pas tiré un trait sur l’industrie française.

Mme Nicole Bricq, membre du groupe de travail. Nous avons quinze ans de retard !

M. Luc Chatel, secrétaire d’État. Le Président Sarkozy dit souvent qu’un pays sans usine est un pays qui ne croit pas à l’avenir de son économie. Toutes les mesures que le Gouvernement a mises en œuvre depuis deux ans vont dans le sens de l’amélioration de la compétitivité et de l’incitation à l’innovation des entreprises.

M. Jean Arthuis, coprésident du groupe de travail. Cela ne suffit pas !

M. Luc Chatel, secrétaire d'État. La suppression de l’impôt forfaire annuel permet de redistribuer un milliard d’euros et d’améliorer ainsi la compétitivité de nos entreprises. En triplant le crédit d’impôt recherche et en le portant à 30 %, nous mettons en place le meilleur système d’innovation incitatif des pays de l’OCDE.

Mme Nicole Bricq. On fera le bilan !

M. Luc Chatel, secrétaire d'État. Ce dispositif devrait faire remonter de 0,2 à 0,3 point le pourcentage du PIB consacré à l’investissement en recherche et développement, ce qui permettrait de faire passer le niveau actuel de 2,2 %-2,3 % à 2,5 %-2,6 %. Certes, nous n’atteignons pas encore les objectifs de Lisbonne. Sans doute faudra-t-il aller plus loin et imaginer d’autres mesures incitatives en matière d’innovation ; mais ce dispositif fiscal favorise d’ores et déjà la compétitivité de notre industrie. Je rencontre régulièrement des industriels : hier encore, le président de Sanofi Aventis m’a dit que ces mesures avaient guidé son choix d’investir en France plutôt que dans d’autres pays européens.

Mme Nicole Bricq. Sauf que les PME en sont exclues !

M. Luc Chatel, secrétaire d'État. En accordant, dans le cadre du plan de relance, une exonération de charges sociales à toutes les entreprises de moins de dix salariés qui embauchent un nouveau salarié, nous faisons un autre geste pour doper la compétitivité de nos entreprises et encourager l’investissement.

Les dispositifs d’accompagnement de trésorerie, qui représentent 11 milliards d’euros dans le cadre du plan de relance, relèvent de la même logique. En période de crise, il est important d’orienter l’argent des entreprises vers les besoins les plus urgents, qui consistent à soutenir l’activité et l’investissement.

M. Jean Arthuis, coprésident du groupe de travail. C’est du ravaudage !

M. Luc Chatel, secrétaire d'État. Il nous faut donc des mesures structurelles.

M. Jean Arthuis, coprésident du groupe de travail. Des mesures fortes !

M. Luc Chatel, secrétaire d'État. Nous avons commencé à en prendre, et nous continuerons.

Il nous faut aussi du volontarisme. C’est ainsi que, dans le cadre du pacte automobile, nous avons exigé des donneurs d’ordres du secteur automobile qu’ils mettent fin à des pratiques trop souvent constatées par le passé, qui consistaient à exiger de leurs sous-traitants la délocalisation d’une partie de leur production dans des pays à bas coûts. Faire valider ce code de bonnes pratiques par l’ensemble des parties fut un combat très difficile à mener, sans doute le plus difficile de ce pacte automobile, mais nous avons réussi à obtenir la fin de ce type de comportement.

Monsieur Marini, non seulement nous avons l’intention de coopérer avec certains pays dans le cadre de l’OCDE, mais nous avons la volonté d’obtenir une coopération de tous les États, y compris en matière d’entraide administrative. Je note d’ailleurs, à titre d’exemple, que le Luxembourg a décidé de traiter de la même manière les questions d’entraide administrative et les questions d’entraide judiciaire, ce qui n’était pas le cas précédemment. Et, bien sûr, avancée importante et attendue de longue date, le secret bancaire ne pourra plus être opposé !

Enfin, je partage vos réflexions sur la question européenne. J’attache beaucoup d’importance au débat qui va nous occuper pendant les deux prochains mois sur la vision européenne économique en matière de coopération commerciale vis-à-vis de l’extérieur.

Je relève, certes, inquiétude, désarroi et souffrance chez les salariés victimes de la conjoncture. Et je pense, comme vous, que la situation deviendra plus difficile encore si nous voyons s’amorcer des signes de reprise. En effet, il y a toujours un décalage entre le moment où l’on ressent les premiers frémissements de la reprise économique et l’impact réel de cette dernière sur le tissu économique. Malheureusement, il y aura encore pendant quelque temps des restructurations industrielles qui justifieront l’engagement de l’État que j’ai évoqué tout à l’heure.

En me gardant de crier victoire trop tôt et en demeurant extrêmement prudent, à l’instar de Christine Lagarde, je tiens à souligner l’évidence d’indicateurs qui, aujourd’hui, se tiennent. La consommation des ménages en est un, qui mérite d’être souligné.

De plus, le déstockage des entreprises témoigne d’une situation plutôt saine, qui devrait entraîner un rebond technique sur le plan industriel. Et, depuis quelques semaines, les conditions de financement s’améliorent plutôt. Je vois dans ces trois éléments des signes d’encouragement, même si, encore une fois, le Gouvernement veut rester très prudent en la matière. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. le président. La parole est à M. le coprésident du groupe de travail.

M. Jean Arthuis, coprésident du groupe de travail. Je me réjouis de la qualité du débat que nous avons eu ce matin et du fait que la crise nous conduise à approfondir nos réflexions parlementaires sur les voies et moyens nous permettant de la surmonter.

Monsieur le secrétaire d’État, je tiens à vous remercier pour votre présence, votre écoute et la qualité des précisions que vous avez bien voulu nous livrer à l’occasion de ce débat.

Je me réjouis aussi de l’initiative prise par le président Gérard Larcher, qui nous a invités à constituer un groupe de travail composé de douze députés et de douze sénateurs réunis au-delà des considérations partisanes, dans le respect de la diversité des familles politiques présentes au Parlement. Ce faisant, une autre forme de réflexion parlementaire est apparue, qui, en dépassant les clivages traditionnels, nous a permis de parvenir à un diagnostic partagé et à la formulation de propositions consensuelles. Nous sommes ainsi sortis des tranchées partisanes. Sans doute le caractère supranational de la crise nous y a-t-il poussés. En tout cas, ce travail doit être poursuivi et approfondi.

Nous avons pu également, nous, parlementaires, prendre la mesure de nos obligations en matière monétaire et financière qui restaient, jusque-là, le fait de quelques spécialistes. Plutôt adeptes de l’autorégulation, les acteurs du monde financier se donnaient rendez-vous à Bâle ou ailleurs pour y définir, entre gens de bonnes manières, entre spécialistes, les guides de bonnes pratiques. Et, de temps en temps, on venait au Parlement parce qu’il fallait transcrire une directive européenne ou mettre au point quelques textes de nature législative. Mais peut-être chacun d’entre nous n’avait-il pas les éléments d’information suffisants pour pouvoir, de retour dans sa circonscription ou son département, présenter à ses concitoyens les enjeux de ces innovations dans le code monétaire ou financier.

La crise nous a fait prendre conscience de la nécessité de nous réapproprier les problématiques en matière monétaire et financière. Mesurant les limites de l’autorégulation, nous avons vu la nécessité pour l’État de se remettre au cœur du dispositif en vue de rétablir la confiance. Nous mesurons aussi à quel point chaque État, pris isolément, est incapable d’assumer ses prérogatives. En effet, faute de consensus supranational, les dispositions que nous prendrons pourront nous apporter les satisfactions intellectuelles les plus intenses, mais elles resteront sans effet parce que les acteurs économiques, eux, ignorent aujourd’hui les frontières !

Si le G20 a été, à mon sens, une vraie réussite, il reste un ensemble d’annonces. Toute la difficulté, maintenant, c’est de faire vivre chacune de ces annonces. La remarque vaut, en particulier, pour la lutte contre les paradis fiscaux, contre ces espaces non coopératifs.

À cet égard, je crois qu’il faut s’accorder sur la définition du paradis fiscal. Qu’est-ce qu’un paradis fiscal ? Du temps de la vignette automobile, le département de la Marne a été momentanément un paradis fiscal. Mais ce paradis fiscal ne pratiquait pas le secret bancaire ! Or la vraie difficulté réside dans le secret et la non-coopération. Aujourd’hui massivement investis dans la dépense publique, les États prennent tous conscience du fait que les paradis fiscaux et le secret bancaire ne peuvent être les complices de l’évasion fiscale et de la perte de ressources, mettant ainsi en cause le pacte républicain.

Des discussions hier encore impossibles se concrétisent. De ma rencontre récente avec nos collègues luxembourgeois, je retiens une discussion, certes un peu vive, mais surtout la réalité d’échanges sur des sujets que nous n’aurions jamais osé aborder voilà quelques années.

M. Gérard Larcher. C’est exact !

M. Jean Arthuis, coprésident du groupe de travail. Les mentalités évoluent. Il faudra aller jusqu’au bout. Politiquement, ce sera très difficile.

C’est vrai aussi en matière de supervision prudentielle, en matière de contrôle des marchés, des acteurs et des produits. Il est quand même extraordinaire que les institutions financières aient pu ainsi se faire piéger par des agences de notation ! Faute de connaître le contenu du « paquet cadeau », elles s’en remettaient aux appréciations de ces dernières !

Hier matin, nous avons entendu le président du directoire de la Caisse nationale des caisses d’épargne, directeur général de la Banque fédérale des banques populaires, nous expliquer comment Natixis, ce fleuron de la créativité financière bancaire (Sourires.), a perdu 400 millions d’euros dans l’affaire Madoff ! Bien sûr, les dirigeants disent n’y être pour rien puisqu’ils sont passés par des fonds, eux-mêmes incorporés dans des fonds, qui étaient dans d’autres fonds…

M. Philippe Marini, corapporteur du groupe de travail. Ils n’avaient rien compris !

M. Jean Arthuis, coprésident du groupe de travail. On imagine les masses de commissions qui en ont résulté ! Il faut aussi que ce petit monde financier sorte de sa cupidité, qui a été également l’un des facteurs de déclenchement de la crise. Tout cela va devoir évoluer dans les mois qui viennent.

Mais, au fond, pour être crédibles, les Européens ne devraient-ils pas commencer par essayer de transcrire et de faire appliquer au sein de l’Union européenne toutes les dispositions qu’ils recommandent au monde entier ? Sommes-nous capables de convaincre le Luxembourg, l’Autriche, la Suisse, Monaco, Andorre et quelques autres encore ?

M. Jean Arthuis, coprésident du groupe de travail. Commençons par faire le ménage chez nous ! Nous serons d’autant plus crédibles sur le plan mondial que nous aurons fait vivre tous ces principes au sein de l’Union européenne. Voilà un beau projet !

Monsieur le secrétaire d‘État, notre groupe de travail, encouragé par les présidents de nos deux assemblées et par le Président de la République, va poursuivre sa tâche. Nous essaierons de faire un peu de diplomatie parlementaire en nous rendant au Luxembourg, en Autriche, en Suisse, à Monaco, voire en Andorre.

M. Philippe Marini, corapporteur du groupe de travail. Autant de séjours agréables ! (Sourires.)

M. Jean Arthuis, coprésident du groupe de travail. Nous essaierons de visualiser ce que peuvent être des paradis fiscaux ou des espaces non coopératifs. Voilà qui doit nous rassembler au-delà de nos convictions partisanes.

Au fond, peut-être cette crise était-elle nécessaire pour que nous cessions de marcher sur la tête, de nous raconter des histoires et de faire vivre une politique virtuelle !

Monsieur le secrétaire d’État, je tiens à vous remercier à nouveau de votre présence, tout comme je remercie les nombreux sénateurs qui, ce matin, ont tenu à participer à ce débat sur la crise financière internationale. (Applaudissements sur les travées de lUMP. – M. Jean-Pierre Chevènement applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Luc Chatel, secrétaire d'État. Je voudrais, à mon tour, rendre hommage à la Haute Assemblée. Je commencerai par remercier MM. Arthuis et Marini pour le travail de fond qui a été conduit dans le cadre de ce groupe de réflexion constitué sur l’initiative du président Gérard Larcher, dont je salue la présence parmi nous ce matin.

Ce groupe a joué un rôle très important. Il a permis, au-delà des différences constatées sur les travées des différents groupes parlementaires, de partager parfois un constat, en tout cas des objectifs pour aboutir à des propositions unanimes. Il a ainsi conforté la position de la France.

Le Président de la République a en effet eu à négocier dans des conditions très difficiles dans le cadre du G 20, d’abord avec ses homologues européens, puis avec ses homologues mondiaux. La position commune que vous avez défendue a conforté celle du Président de la République. Elle a permis de faire bouger d’autant plus les lignes sur le plan international et d’obtenir un certain nombre d’avancées. Je voulais vous en remercier.

Je tiens enfin à vous féliciter pour la qualité du débat de ce matin. Attendu dans le cadre de la mise en œuvre de la réforme constitutionnelle, cet exercice, qui renforce la démocratie parlementaire et l’équilibre des pouvoirs, est beaucoup plus lisible pour nos concitoyens compte tenu de l’interactivité des débats, malheureusement trop souvent absente des échanges parlementaires. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. le président. Mes chers collègues, l’ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à douze heures trente, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Gérard Larcher.)

PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher

M. le président. La séance est reprise.

6

Questions d’actualité au Gouvernement

M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.

Je rappelle que l’auteur de la question de même que la ou le ministre, pour sa réponse, disposent chacun de deux minutes trente. Je suis sûr que tous auront à cœur de respecter cette règle.

les licenciements boursiers

M. le président. La parole est à Mme Annie David. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.)

Mme Annie David. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s’adresse à M. le secrétaire d’État chargé du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme et des services.

Alors que l’entreprise Caterpillar affichait un bénéfice de plus de 3,5 milliards d’euros pour l’année 2008, ce groupe industriel a eu l’indécence d’annoncer la suppression de 20 000 emplois pour l’année 2009, dont 733 dans le département de l’Isère !

« Une année horrible », affirmait le PDG de Caterpillar France… Mais horrible pour qui ? Visiblement, seulement pour les salariés, car les actionnaires ont bénéficié, à travers ces suppressions, d’une augmentation de 17 % de leur dividende !

Horrible, oui, le choix de la direction d’accroître la fortune de quelques privilégiés au détriment des centaines de familles ! Horrible encore, le comportement insolent de cette direction qui assigne en justice le comité d’entreprise ! Fort heureusement, elle a été déboutée.

M. Robert Hue. Tout de même !

Mme Annie David. Passé la stupeur et l’émoi, c’est l’indignation et la colère qui se sont emparées des salariés de Caterpillar, Continental, Molex, Freescale et de bien d’autres entreprises. Chez Faurecia, les salariés viennent de vivre des événements dramatiques : agressés par des vigiles, trois d’entre eux sont aujourd’hui hospitalisés.

Or tous ces salariés luttent pour préserver leurs emplois et la pérennité des sites industriels. Et cette lutte porte un nom : la lutte des classes, qui a aujourd'hui toute sa pertinence face à la rengaine libérale du « chacun pour soi » ! (Exclamations sur les travées de lUMP.)

Votre « dialogue social » est devenu une coquille vide, qui contraint les salariés à défendre leur emploi et leur dignité par leurs seuls moyens, car ils refusent d’être licenciés, ils refusent de disparaître en silence ou encore de plier devant le chantage du « travailler plus pour gagner plus », sachant qu’il s’agit en fait de travailler plus pour gagner moins ! Par leurs actions, c’est l’ensemble de la société qu’ils défendent contre les méfaits des patrons voyous !

La responsabilité du Gouvernement est grande dans la situation économique et sociale gravissime que nous connaissons.

L’heure n’est plus au bilan ou à l’analyse, mais à l’action ! Il faut enfin accorder des droits nouveaux aux salariés pour qu’ils soient impliqués dans les choix de gestion de l’entreprise et en finir avec les stocks-options, « retraites chapeaux », « parachutes dorés » et autres instruments de spéculation !

Mme Annie David. Il faut défendre l’emploi par la loi. C’est pourquoi, avec mon groupe, j’ai déposé une proposition de loi visant à modifier le code du travail pour imposer une mesure de justice sociale : l’interdiction des licenciements boursiers.

M. le président. Veuillez poser votre question, madame David !

Mme Annie David. Le sacrifice des salariés au profit des actionnaires doit en effet cesser !

Ma question est la suivante : allez-vous enfin entendre l’exigence populaire et unitaire d’un changement de politique qui s’est exprimée le 29 janvier, le 19 mars et qui s’exprimera avec autant d’ampleur, si ce n’est plus, demain, 1er mai ? Allez-vous légiférer en ce sens, ou appeler les parlementaires de votre majorité à voter la proposition déposée par les sénateurs communistes et du Parti de gauche ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)

M. René-Pierre Signé. Ils n’écoutent pas et, de toute façon, ils ne peuvent pas répondre !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme et des services.

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État. Madame le sénateur, il faut aborder sans idéologie les difficultés humaines que rencontrent aujourd’hui les salariés. (Rires et exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Les idéologues, c’est vous !

M. Robert Hue. La « révolution libérale » !

M. René-Pierre Signé. Tout pour les riches !

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État. Je voudrais vous rappeler quelques vérités que vous n’avez pas évoquées.

Premièrement, la crise actuelle n’affecte pas spécialement la France : elle est mondiale. Dès lors, pointer du doigt, comme vous le faites, les responsabilités du Gouvernement me semble pour le moins outrancier.

Deuxièmement, dans cette crise que nous traversons comme tous les autres pays, les petites et moyennes entreprises sont aussi frappées. Or vous n’avez parlé que des grands groupes et des profits boursiers. Il faut penser aussi aux PME. Le Gouvernement, lui, ne les a pas oubliées, et la France a été le premier pays à lancer – dès le 4 octobre dernier – un plan de soutien en leur faveur ; vous ne l’avez pas mentionné.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. On vous parle des grands groupes !

M. Robert Hue. Les patrons voyous, ce sont ceux des multinationales !

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État. Je voudrais également souligner, madame le sénateur, que l’action du Gouvernement dans ce domaine, sous l’impulsion du Président de la République, a été caractérisée par une extrême réactivité, au point que beaucoup de pays nous ont imités, qu’il s’agisse du plan de refinancement des banques, du plan de relance ou du Fonds d’investissement social.

M. René-Pierre Signé. Et les « retraites chapeaux » ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État. Or vous n’avez pas fait état de ces mesures. Vous n’avez pas parlé non plus des mesures sociales qui ont été proposées et votées par notre majorité. (Protestations sur les travées du groupe CRC-SPG.)

Permettez-moi de vous le dire, madame le sénateur, j’aimerais que votre groupe politique, lorsqu’il s’agit d’adopter des mesures sociales indiscutables, ne soit pas aux abonnés absents, comme c’est systématiquement le cas ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées de lUMP et de lUnion centriste.)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous êtes hors sujet !

paralysie des universités

M. le président. La parole est à M. Jacques Legendre.

M. Jacques Legendre. Madame la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, je tiens à m’exprimer aujourd’hui avec une particulière gravité sur un sujet qui angoisse bien des familles et désespère de nombreux étudiants : le blocage de certaines universités.

M. René-Pierre Signé. À qui la faute ?

M. Jacques Legendre. Cette situation devient catastrophique pour des milliers d’étudiants qui craignent de ne pouvoir passer leurs examens, de perdre une année et peut-être, singulièrement pour les moins favorisés, de devoir mettre un terme à leurs études.

M. David Assouline. On nous la fait à chaque fois !

M. Jacques Legendre. Dans le moins grave des cas, les examens risquent d’être repoussés au mois de septembre.

Et que dire de la situation de nombreux étudiants étrangers ayant engagé des frais pour un séjour universitaire en France qui ne se conclura peut-être pas par l’obtention d’un diplôme ?

M. David Assouline. Il veut nous faire pleurer !

M. Jacques Legendre. Ils avaient choisi la France. Ils avaient rêvé de faire leurs études à Paris, à la Sorbonne. Ils devaient devenir ensuite, dans leur pays, les témoins de l’excellence française. Croit-on qu’ils seront demain les ambassadeurs de la culture de notre pays, qui aura ainsi trahi leur confiance ?

Croit-on que ces blocages vont faire progresser nos universités dans le classement de Shangaï ?

Il est légitime que nous débattions et que, parfois, nous nous opposions vivement sur la politique universitaire à conduire. Mais est-il raisonnable, est-il légitime de porter un tel préjudice à l’enseignement supérieur français, pour lequel nous avons tous de grandes ambitions ?

M. René-Pierre Signé. C’est à cause de l’entêtement de la ministre !

M. Jacques Legendre. On a justifié ce mouvement par la volonté d’obtenir des moyens supplémentaires : j’ai eu la curiosité d’examiner les moyens attribués aux universités lilloises, dans le département dont je suis l’élu.

Lille 1 voit les moyens qui lui sont alloués augmenter de 992 500 euros, soit trois fois plus qu’en 2008, tandis que triplent ses crédits de mise en sécurité. Et pourtant, on bloque l’université !

Lille 2 voit ses crédits de moyens augmenter de 25 %. Et pourtant, certains enseignants font de la rétention de notes !

Lille 3 voit son allocation de moyens majorée de 6,5 %, soit nettement plus que l’an dernier. Et pourtant, là aussi, on appelle au blocage !

Pourquoi un tel acharnement, au risque de mettre en péril l’avenir des étudiants ?

M. Charles Gautier. La question !

M. Jacques Legendre. Que penser des incidents qui se multiplient, au cours desquels les étudiants hostiles au blocage sont molestés, pris à partie ?

M. le président. Veuillez poser votre question, mon cher collègue ! (La question ! sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)

M. Jacques Legendre. Madame la ministre, pouvez-vous nous dire quelles mesures vous entendez prendre pour sauver ce qui peut être sauvé de l’année universitaire,…

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Répondez aux revendications !

M. Jacques Legendre. … assurer aux étudiants la liberté d’étudier et poursuivre la politique de réformes qui a pour but de permettre au maximum d’étudiants de réussir leurs études et à notre pays de demeurer une des grandes nations de la société du savoir ? (Applaudissements sur les travées de lUMP et de lUnion centriste.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. Bernard Frimat. Surprise par la question ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)

Mme Valérie Pécresse, ministre. Monsieur le président Legendre, je suis entièrement mobilisée pour organiser les rattrapages de cours dans les universités qui, depuis deux mois, ont connu des perturbations. D’ores et déjà, une trentaine d’entre elles organisent des cours de rattrapage et certaines ont prévu de décaler de quelques semaines les examens ; ceux-ci auront donc bien lieu.

Ma responsabilité de ministre est double.

Je suis d’abord responsable vis-à-vis des étudiants et, plus particulièrement, des plus fragiles d’entre eux. C’est pourquoi j’ai saisi les recteurs et les directeurs des centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires pour qu’ils aménagent les conditions de la vie étudiante de manière à permettre aux intéressés de ne pas souffrir de ces décalages de cours et d’examens, qu’il s’agisse du versement des bourses ou des conditions d’occupation des logements étudiants.

Je suis par ailleurs responsable de l’image de l’université française et de la qualité des diplômes nationaux. À cet égard, je vous le dis, nous serons intransigeants : il ne sera pas question de brader les diplômes délivrés cette année ! (Applaudissements sur les travées de lUMP.) Aucun diplôme ne sera décerné sans rattrapage de cours !

Aujourd’hui, après la réécriture du décret statutaire relatif aux enseignants-chercheurs, après l’annonce par le Premier ministre de la sanctuarisation des emplois universitaires, après l’ouverture d’une très large concertation sur la réforme de la formation des maîtres,…

M. François Marc. Que de temps perdu !

Mme Valérie Pécresse, ministre. … de plus en plus de voix, parmi les étudiants et les enseignants-chercheurs, s’expriment majoritairement en faveur de la reprise des cours !

Je souhaite que, dans ce mouvement, les motifs politiques ne prennent plus le pas sur les motifs universitaires ! (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. René-Pierre Signé. C’est un souhait politique !

Mme Valérie Pécresse, ministre. C’est pour cette raison que je ne comprends toujours pas le silence du parti socialiste sur les violences,… (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)

M. David Assouline. Arrêtez, ce n’est pas de votre niveau !

Mme Valérie Pécresse, ministre. … les blocages, les séquestrations de présidents d’université, les menaces et, pire encore, sur l’appel totalement irresponsable, lancé hier par la coordination nationale des universités, à bloquer et boycotter les examens ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées de lUMP. –Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. Charles Gautier. Provocation !