M. le président. La parole est à M. Gilbert Barbier, pour explication de vote.

M. Gilbert Barbier. On ne peut pas laisser dire que le conseil de surveillance, c’est le « tout État ». Je rappelle que le premier collège est composé de cinq représentants des collectivités territoriales : ce n’est pas l’État qui les désignera ! Le deuxième collège est composé des représentants du personnel, médical et non médical : je ne pense pas que le Gouvernement puisse directement influencer la nomination de ces représentants, qui émaneront plutôt des organisations syndicales.

Ainsi, sur les quinze membres du conseil de surveillance, dix ne seront donc désignées ni par l’État ni par l’ARS. Cette composition me paraît relativement équilibrée…

M. Jean-Pierre Godefroy. Le président du conseil de surveillance est tout de même issu du premier ou du troisième collège !

M. Gilbert Barbier. Enfin, je tiens à rappeler que la santé relève des obligations majeures de l’État : celui-ci soit donc être représenté au sein du conseil de surveillance. J’ajoute que, dans la plupart des cas, notamment dans les hôpitaux, le financement incombe à l’État ou à la sécurité sociale : il est normal qu’il occupe des sièges au conseil de surveillance, même à titre minoritaire.

M. le président. La parole est à M. Hugues Portelli, pour explication de vote.

M. Hugues Portelli. Je souhaite surtout m’exprimer sur la manière dont nous travaillons ce soir, monsieur le président.

Le déroulement de nos débats illustre parfaitement ce que pourrait donner une mauvaise application de la révision constitutionnelle adoptée l’an dernier. Nous en observons les conséquences négatives à l’occasion de la discussion de ce projet de loi, nous en avions apprécié les aspects positifs lors de la discussion du projet de loi pénitentiaire.

Le travail réalisé en commission est désormais fondamental. Lors de l’examen du projet de loi par la commission, celle-ci intègre au texte initial des amendements qu’elle adopte au terme d’un débat interne.

Ensuite, le texte de la commission est présenté en séance et la majorité de la commission demande au Gouvernement si ce texte lui convient ou non. Si le Gouvernement accepte ce texte, le débat en séance publique se déroule très simplement : l’opposition essaie de faire adopter les amendements que la commission a rejetés – ce qui est normal – et quelques amendements isolés sont également discutés.

Il y a quelques jours, j’ai assisté à une réunion au cours de laquelle le Premier ministre a déclaré que le compromis trouvé par la commission des affaires sociales lui convenait. J’en ai conclu – naïvement, sans doute ! – que le texte de la commission était avalisé par le Premier ministre. Or, ce soir, je constate que le Gouvernement – n’est-ce pas le même ? –dépose à nouveau des amendements !

M. Guy Fischer. Au moins une cinquantaine !

M. Hugues Portelli. J’en déduis que les déclarations du Premier ministre n’étaient pas tout à fait exactes, ou bien que le Gouvernement a changé d’avis, à moins que ce ne soit la commission.

Je dois avouer que tout cela me met extrêmement mal à l’aise ! (Applaudissements sur certaines trabées de l’Union centriste, ainsi que sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. Jean Desessard. Il faut nommer un directeur au Gouvernement ! (Sourires.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.

M. Jean-Pierre Sueur. J’ai présidé le conseil d’administration d’un hôpital pendant douze années et j’ai toujours apprécié le mode de fonctionnement de cette instance. Peu de membres étaient nommés par l’État ; en revanche, on y trouvait les représentants des médecins, des personnels, des collectivités locales, des usagers. Nous travaillions très bien dans ce pluralisme, personne n’avait le dessus sur personne, chacun avait sa place et était respecté. Je ne dis pas que tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes, mais un véritable pluralisme prévalait…

M. Gilbert Barbier. On a vu les déficits qui en résultaient !

M. Jean-Pierre Sueur. J’admets que l’on veuille maîtriser les dépenses de santé, mais cela passe-t-il par l’hyper-étatisme que vous voulez instaurer ?

Monsieur le président de la commission des affaires sociales, je tenais à saluer le travail remarquable réalisé par la commission puisque la majorité, voire l’unanimité de celle-ci a proposé que le collège des personnalités qualifiées comporte des membres désignés par le maire, le président du conseil général et l’État. Cette composition me paraît parfaitement conforme au pluralisme tel que je le conçois.

Le modèle de société qui inspire les rédactions successives de l’amendement du Gouvernement m’inquiète. Comme s’il fallait effectuer une reprise en main ! Mais je comprends peut-être mal, madame la ministre… En effet, beaucoup d’entre vous, dans la majorité, se réclament d’une philosophie libérale, en vertu de laquelle il est juste de faire confiance aux collectivités locales et aux différents acteurs de la société.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Mais ce ne sont pas eux qui paient !

M. Jean-Pierre Sueur. Votre manière d’agir représente une véritable régression.

Respecter le pluralisme n’empêche pas de passer les contrats qui permettent de maîtriser les dépenses de santé.

Décidément, je ne comprends pas cette régression par rapport au travail de la commission, lequel promouvait un véritable pluralisme. D’où mon étonnement, qui rejoint tout à fait celui de M. Portelli.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. M. Barbier a très bien répondu sur la répartition des collèges.

Je dirai seulement que, à un moment donné, nous avons bêtement pensé que les élus locaux pouvaient avoir une compétence en matière de désignation des personnalités qualifiées : après tout, ils représentent aussi les payeurs, ce qui pourrait leur conférer une certaine légitimité pour au moins partager la capacité de désignation. Mais je comprends que le Gouvernement, considérant qu’il est « le » payeur, après avoir nommé le directeur général de l’ARS, qui siégera au conseil de surveillance, et le directeur de l’hôpital,…

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. … souhaite aussi désigner les personnalités qualifiées. Ce n’est pas très choquant.

Chers collègues, la commission des affaires sociales n’est vêtue ni de certitudes ni de suffisance. Elle accepte parfaitement l’idée qu’il puisse exister d’autres vérités que la sienne et que la discussion est possible. Dès lors, pourquoi ne pas admettre la position du Gouvernement ?

Pour autant, doit-on en déduire que le Sénat se couche, comme cela a été dit, et qu’on assiste à une décadence ?

Très curieusement, ceux qui ont prononcé ces mots oublient que, durant nos travaux en commission, nous avons retenu plus d’une centaine d’amendements parmi tous ceux qu’avait proposés l’opposition. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

La simple remise en cause de la désignation du troisième collège au sein du conseil de surveillance reviendrait à se coucher et à entraîner la décadence de notre assemblée ?… Franchement, tout ce qui est exagéré est négligeable ! Je crois qu’il faut réserver ces grands mots à d’autres circonstances.

Par ailleurs, il est très difficile de comparer le projet de loi que nous discutons en ce moment au projet de loi pénitentiaire. Ce dernier, je le rappelle, a suscité en tout et pour tout le dépôt de 30 amendements.

M. François Autain. Cela n’a effectivement rien à voir !

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. J’ai participé aux travaux de la commission des lois par le passé et je connais sa façon de fonctionner. Quand on parle de la prison ou du code pénal, on ne peut pas discuter indéfiniment : les règles sont claires et certaines notions de droit incontournables.

Le présent projet de loi, lui, porte sur l’humain et aborde des points extrêmement sensibles. Cela justifie qu’il ait donné lieu à la présentation, non pas de 30 amendements, mais de 1 460 amendements devant la commission, et qu’il en soit resté plus de 1 200 après les travaux de celle-ci.

Par pitié, mes chers collègues, ne comparez pas l’incomparable !

J’ajoute que nous sommes en train de faire l’expérience de la réforme constitutionnelle, une expérience que personne n’a vécue jusqu’à présent.

Mme Marie-Thérèse Hermange. Avec, en plus, un texte compliqué !

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Je pense qu’on tiendra compte de cette expérience dans le cadre de la réforme du règlement du Sénat, du moins si nous parvenons à nous exprimer sur ce sujet car, malheureusement, les conclusions vont être rendues très vite.

M. Guy Fischer. Effectivement, le règlement sera approuvé le 2 juin.

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Je suis retenu dans l’hémicycle et je ne peux même pas être entendu par le rapporteur de la proposition de résolution. Je pense néanmoins qu’il faudra tenir compte de notre expérience.

Enfin, je ne crois pas que les amendements arrivent de-ci et de-là. Le Gouvernement et la commission ont la liberté d’essayer, à tout moment, de faire le meilleur boulot. C’est ce que nous nous efforçons de faire dans le respect de chacun et l’exercice n’est pas particulièrement simple. Je demande donc juste un peu de pitié à l’égard de ceux qui bossent depuis six mois sur ce dossier. (Applaudissements sur les travées de lUnion centriste, ainsi que sur quelques travées de l’UMP. – M. Gilbert Barbier applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Monsieur le président, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, je vous prie d’accepter mes excuses pour avoir perturbé les travaux en rectifiant oralement et de manière un peu trop rapide un de mes amendements. Il eût certainement été plus correct de vous transmettre d’emblée, monsieur le président, un texte écrit et je vous demande, à vous particulièrement, sur ce point précis, d’accepter mes excuses.

M. Jean Desessard. Très bien !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Mais il en va ainsi du cheminement du travail parlementaire… J’ai aussi voulu écouter un certain nombre d’entre vous, et c’est à la suite de notre échange que j’ai voulu amender mon propre travail, au lieu de camper sur des certitudes. Le travail parlementaire n’exclut pas une certaine souplesse et une certaine spontanéité. Il doit permettre à chacun, après avoir écouté les autres, de faire évoluer sa position. On ne peut pas, d’un côté, reprocher que les séances soient trop formatées à l’avance ou manquent totalement de spontanéité et, de l’autre, ne laisser aucun espace de respiration ou de liberté.

Toutefois, je comprends que cette démarche ait pu entraîner une perturbation et je vous réitère mes excuses.

Comment, jusqu’à présent, était composé le conseil d’administration ? Il comprenait également trois collèges : un collège des élus, un collège des personnels et un collège des personnalités qualifiées. Ces dernières étaient – et sont toujours – désignées par le préfet et par l’agence régionale de l’hospitalisation. Néanmoins, l’effectif de ce collège ne pouvait représenter que la moitié de celui des autres collèges. Ainsi, si le conseil d’administration d’un hôpital local comprend six représentants des élus et six représentants des personnels, seulement trois personnalités qualifiées y siègent.

Nous avons voulu donner une respiration à ce dispositif, justement pour permettre à des membres de la société civile de mieux participer à la surveillance de la gestion de l’hôpital.

Bien entendu, la représentation des élus n’est nullement réduite à la « portion congrue ». Le pourcentage de représentation de ces derniers est exactement le même que dans le système précédent. Il n’y a donc pas de régression par rapport à un modèle idéal !

Par ailleurs, je me permets de signaler à la Haute Assemblée qu’il s’agit d’un système dont la responsabilité incombe à l’État ; nous en débattons d’ailleurs à travers les projets de loi de financement de la sécurité sociale. Il s’agit donc bien d’une responsabilité régalienne.

Y a-t-il, dans vos collectivités territoriales, des domaines où des représentants des personnels, des personnalités qualifiées ont un poids aussi important dans la surveillance de ce qui dépend des financements locaux ? Vous ne l’accepteriez pas !

C’est donc, en l’espèce, un système profondément démocratique : un tiers des participants sont des représentants des collectivités territoriales et un autre tiers des représentants des personnels de l’hôpital ; il faut que le troisième tiers, celui des personnalités qualifiées, soient désignées, comme c’est le cas maintenant, par les représentants de l’État, c’est-à-dire le préfet et le directeur général de l’ARS.

Si les personnalités qualifiées étaient désignées par les collectivités territoriales, le dispositif serait complètement déséquilibré puisque, au final, dix membres sur quinze représenteraient, directement ou indirectement, ces collectivités.

Or, le sens du pacte de 1945, c’est bien celui d’un système relevant de la responsabilité de l’État ! D’ailleurs, lorsque notre système de santé rencontre des difficultés, c’est à l’État qu’on s’adresse, et cela est juste ! Mesdames, messieurs les sénateurs, si l’un de vos hôpitaux connaît un problème, vous interpellez la ministre de la santé. Quand un accident survient dans les établissements parisiens, comme cela s’est déjà produit, croyez-vous qu’on se tourne vers M. Delanoë ? Dans ce cas, c’est, la ministre de la santé qu’on interpelle, et l’on a raison, car c’est bien moi qui exerce cette responsabilité.

Il faut donc en revenir à la structuration des responsabilités qui est celle de notre système de santé.

Un beau jour, nous pourrions décider de régionaliser ce système, de fixer des objectifs régionaux des dépenses de l’assurance maladie, des sécurités sociales régionales, pour lesquelles les conseils régionaux arrêteraient le montant des cotisations d’assurance maladie. Mais alors, on changerait complètement de système.

Actuellement, notre système fait partie du pacte républicain. Nous en avons hérité de nos parents et de nos grands-parents, du Conseil national de la Résistance, et je crois qu’il faut revenir aux fondamentaux.

Monsieur Portelli, nous sommes effectivement en train d’« essuyer les plâtres ». Nous discutons, non pas du texte du Gouvernement, mais du texte issu des travaux de la commission des affaires sociales du Sénat. Le Gouvernement a le droit de faire valoir sa position sur des points importants pour lui. Vous conviendrez que je n’en ai pas abusé. Sur plus de 1 400 amendements examinés en séance plénière, seulement 60 amendements ont été déposés par le Gouvernement,…

M. Jean-Pierre Godefroy. Oui, mais ils changent tout !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. … alors que la commission des affaires sociales a effectué un travail très important de remodelage, parfois sur le fond, parfois sur la forme. Ces 60 amendements concernent des points qui nous paraissent cruciaux.

Dans le cadre de cette démarche gouvernementale, j’ai tenu à manifester un profond respect pour le travail de la commission des affaires sociales. Il me semble que le Sénat peut avoir le même respect pour les prérogatives du Gouvernement et pour la vision que celui-ci défend à travers ce texte très important. (M. Gérard Dériot applaudit.)

M. le président. Madame la ministre, je pense que le Sénat tout entier à été sensible aux propos que vous avez tenus au début de votre intervention, et je vous en remercie.

Je remercie également M. le président de la commission des affaires sociales d’avoir su recadrer le débat.

Je mets aux voix l'amendement n° 1177 rectifié.

Je suis saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l'une, du groupe socialiste et, l'autre, du groupe CRC-SPG.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 158 :

Nombre de votants 337
Nombre de suffrages exprimés 323
Majorité absolue des suffrages exprimés 162
Pour l’adoption 182
Contre 141

Le Sénat a adopté.

Je mets aux voix l'amendement n° 1276.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de huit amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 609 rectifié, présenté par MM. Chevènement, Mézard, Marsin, Milhau et Vall, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le sixième alinéa du texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 6143-5 du code de la santé publique :

« La présidence du conseil de surveillance est assurée par le représentant de la collectivité territoriale de ressort de l'établissement. Dans les établissements intercommunaux et interdépartementaux, le président du conseil d'administration est élu parmi les représentants des catégories mentionnées au 1°.

La parole est à M. Jean-Pierre Chevènement.

M. Jean-Pierre Chevènement. Nous venons de vivre une expérience qui nous laisse tous insatisfaits,…

M. Alain Milon, rapporteur. Pas tous !

M. Jean-Pierre Chevènement. … si j’ai bien entendu les propos de M. le président de la commission des affaires sociales, comme ceux de Mme la ministre.

La récente réforme institutionnelle a eu pour conséquence que nous délibérons non plus sur le texte du Gouvernement mais sur celui qui a été adopté par la commission. Cela crée évidemment des conditions de travail très difficiles, pour vous-même, madame la ministre, qui êtes l’une des victimes parmi d’autres de cette réforme, comme pour nous qui n’avons pas eu le temps d’étudier le rapport de la commission qui nous a été distribué trop tard.

Cela vient de ce que, au fond, le Gouvernement n’ose plus s’engager sur son texte. (Mme la ministre ne cache pas sa surprise.)

Je parle en général de l’effet de la réforme institutionnelle, madame la ministre, je ne vous mets pas personnellement en cause. Le fait est que, nous débattons à partir non pas du texte du Gouvernement – en l’espèce, celui que vous avez initialement présenté –, mais de celui qui est issu des travaux de la commission.

Il y a là quelque chose qui relève de la crise de l’autorité : le Gouvernement n’ose plus imposer le débat sur son propre texte. Il paraît faire une concession au Parlement en lui donnant la possibilité d’amender son texte, mais ce qu’il donne d’une main, il le reprend de l’autre. Voilà la source de notre insatisfaction.

Est-il possible de réparer quelque peu l’éviction des collectivités territoriales de la désignation des personnalités qualifiées ? Les collectivités ont en effet leur point de vue à donner. Il me semble que nous devrions en rester à ce que le système actuel a de bon.

Les conseils d’administration sont, à l’heure actuelle, généralement présidés par le maire ou, quand l’établissement est interdépartemental ou régional, par un élu du niveau concerné. L’objet de cet amendement est de maintenir cette situation.

L’organisation de l’hôpital public, colonne vertébrale de notre système de santé, a déjà fait l’objet de très nombreuses réformes : tarification à l’acte, organisation en pôles, dont la mise en place est loin d’être terminée.

Votre projet de loi marque un bouleversement complet de la gouvernance du système hospitalier, bouleversement se traduisant par une présence de l’État que nous ressentons comme excessive.

Mme Marie-Thérèse Hermange. Et si vous nous parliez de votre amendement…

M. Jean-Pierre Chevènement. C’est pourquoi je propose que le président du conseil de surveillance soit élu parmi les représentants des collectivités territoriales.

Les élus, madame la ministre, sont marginalisés par votre projet. Si, vis-à-vis des médecins, vous avez mis de l’eau dans votre vin, ce n’est pas le cas vis-à-vis des élus.

Les collectivités offrent souvent les terrains qu’elles viabilisent. Les élus jouent un rôle d’intercesseurs vis-à-vis tant des personnels hospitaliers que des usagers. Ils sont utiles et il me semble que le Sénat, en tant que défenseur des collectivités locales, devrait faire respecter le principe selon lequel le président du conseil de surveillance reste un élu.

Je vais prendre un exemple précis pour étayer ma thèse.

Je ne suis pas médecin, mais j’ai été maire de Belfort pendant vingt-quatre ans et j’ai présidé très longtemps, d’abord, le conseil d’administration de l’hôpital de Belfort, puis, par alternance avec le maire de Montbéliard, M.  Souvet, qui a longtemps siégé dans cet hémicycle, le conseil d’administration de l’hôpital de Belfort-Montbéliard.

L’expérience nous a enseigné que les initiatives devaient partir du terrain et être prises en charge par celui-ci. Vous le savez bien, madame la ministre, puisque vous proposez la coopération des établissements. C’est ce que nous avons d'ailleurs fait dans ma région en fusionnant deux grands hôpitaux distants de vingt kilomètres l’un de l’autre. Les deux présidents et le conseil d’administration du centre hospitalier de Belfort-Montbéliard ont ensuite décidé d’y adjoindre les plateaux techniques de deux cliniques privées. Tout cela va, en principe, dans le sens des évolutions que vous souhaitez.

L’aire urbaine de Belfort-Montbéliard compte 350 000 habitants ; il est évident qu’en supprimant les doublons par la création d’un plateau technique unique nous renforçons l’attractivité de l’hôpital, suscitant la venue des meilleurs médecins, par le regroupement de services jusque-là dispersés. Nous favorisons l’implantation d’équipements médicaux de pointe et nous pouvons espérer améliorer l’égalité d’accès aux soins, qui est loin d’être acquise dans notre région, où sont implantées de grandes entreprises industrielles, telles Peugeot ou Alstom.

M. le président. Veuillez conclure, s’il vous plaît !

M. Jean-Pierre Chevènement. J’en termine, monsieur le président, mais je n’ai pas abusé jusqu’ici de la parole.

Il serait à la fois logique et conforme à la justice sociale de renforcer la place des élus locaux. Nous demandons que le président du conseil de surveillance soit élu parmi les représentants des catégories mentionnées au 1° du texte proposé pour l’article L. 6143-5 du code de la santé publique, c’est-à-dire parmi les représentants des collectivités territoriales.

Ce qui vaut à Belfort-Montbéliard vaut forcément aussi ailleurs. L’hôpital public n’a rien à gagner, madame la ministre, à se couper de la démocratie locale.

M. le président. L'amendement n° 324, présenté par MM. Mirassou, Le Menn et Cazeau, Mmes Alquier et Blondin, M. Botrel, Mme Campion, M. Chastan, Mme Chevé, MM. Daudigny et Daunis, Mme Demontès, M. Desessard, Mme Durrieu, MM. Fauconnier et Fichet, Mme Ghali, M. Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, MM. Jeannerot et Lagauche, Mmes Le Texier et Printz, M. Rebsamen, Mme Schillinger, M. Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Remplacer la première phrase du sixième alinéa du texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 6143-5 du code de la santé publique par deux phrases ainsi rédigées :

Le conseil de surveillance a pour président le président de la structure intercommunale ou le maire de la commune d'implantation du centre de santé publique. Les centres psychiatriques sont présidés par le président du conseil général de leur département d'implantation.

La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.

M. Jean-Pierre Godefroy. Notre amendement va dans le même sens que celui de M. Jean-Pierre Chevènement. Comme lui, nous estimons souhaitable que l’on en reste à la situation actuelle, c’est-à-dire que le maire, ou le président du conseil général s’il s’agit d’un établissement départemental, soit président de droit du conseil de surveillance.

Madame la ministre, vous avez tout à l’heure parlé des anciens conseils d’administration en rappelant que les élus locaux étaient à peu près deux fois plus nombreux que les personnalités qualifiées. Mais je souligne que les membres de la commission médicale d’établissement y siégeaient aussi.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. En effet ! J’y reviendrai.

M. Jean-Pierre Godefroy. La meilleure solution serait donc d’en rester là.

Ma crainte, madame la ministre, c’est qu’en prévoyant une élection entre deux collèges on n’introduise dans l’hôpital des enjeux éventuellement politiques qui n’ont rien à y faire.

Le maire, président de droit, détenait sa légitimité du suffrage universel et personne n’envisageait de la remettre en cause. À partir du moment où il y a élection, des dérives sont possibles. On votera pour une personnalité qualifiée afin d’empêcher que soit élu le candidat du premier collège des collectivités territoriales…

Un autre avantage du système actuel est que le maire avait l’obligation d’être impartial et qu’il était un arbitre. Ayant moi-même présidé le conseil d’administration de l’hôpital de Cherbourg pendant vingt et un ans, j’ai, en de nombreuses occasions, rendu des arbitrages, dont ne se sont d’ailleurs pas plaints les directeurs successifs. C’est notre légitimité en tant que président de droit parce que élu du suffrage universel qui nous permettait d’assurer ces arbitrages.

Il vaudrait peut-être mieux élire, comme le disait M. Chevènement, le président au sein du collège. Toutefois, nous pensons que la formule jusqu’ici en vigueur avait un certain nombre d’avantages.

J’ai créé, avec mes collègues, une communauté hospitalière de territoire il y a une dizaine d’années.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. De quel type ?

M. Jean-Pierre Godefroy. Il s’agissait d’une communauté hospitalière de territoire avant l’heure ; nous sommes allés jusqu’à la fusion.

Cela n’a été possible, madame la ministre, que grâce à l’entente entre les deux présidents des conseils d’administration, qui étaient des maires. Nous avons demandé aux deux commissions médicales d’établissement d’établir un projet médical commun. C’est ainsi que nous avons pu fusionner les établissements, mais cela a pris près de dix ans.

Or, dès lors que le président sera élu, des problèmes risquent de se poser qui freineront les rapprochements. Par rapport à ce que vous souhaitez faire à travers les communautés hospitalières de territoire, les maires peuvent jouer un rôle déterminant.

Voulez-vous laisser penser que les maires qui présidaient ces conseils d’administration étaient de mauvais gestionnaires ? Pourtant, ils sont souvent reconnus comme de très bons gestionnaires de leur ville. Ce n’est pas la faute des conseils d’administration s’il y a des difficultés dans les hôpitaux. Bien souvent, au contraire, nous nous sommes retroussé les manches pour éviter les dérives budgétaires !

Il y a là, je le dis comme je le pense, une suspicion vis-à-vis des maires ou des présidents de conseils généraux qui est fort déplaisante.