Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Je dirais bien au rapporteur que cela ne mange pas de pain ! (Sourires.)

J’ai été un peu elliptique dans l’explication de mon amendement. Il faut bien comprendre que les commissions de coordination constituent une avancée très importante de ce projet de loi et elles répondent à une inquiétude qui a été exprimée par un certain nombre de décisionnaires locaux, en particulier les présidents de conseils généraux qui sont en charge de politiques à destination des personnes âgées et des personnes handicapées. La question est de savoir comment, à travers les agences régionales de santé, vont se faire la coordination et l’écoute.

Ces commissions de coordination organisent le travail collectif nécessaire entre les autorités publiques compétentes dans le domaine de la prévention et du médico-social afin de renforcer les complémentarités. Ainsi, la commission du conseil médico-social va permettre de mieux articuler au quotidien l’action de l’agence régionale de santé et celle des conseils généraux.

Je comprends bien M. le rapporteur quand il dit que cela va de soi, mais il s’agit d’une innovation de gouvernance qui mérite un certain nombre d’explications. Les débats que nous venons d’avoir sur les différents amendements, monsieur le rapporteur, justifient pleinement que nous explicitions le contenu de la commission de coordination pour éviter les confusions qui pourraient exister entre les décideurs publics et les opérateurs.

Dans ces conditions, ne pourriez-vous pas, monsieur le rapporteur, vous rallier à ma proposition ?

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Merci, madame la ministre, de ces explications qui nous ont enfin permis de comprendre tout l’intérêt de cet amendement. C’est avec grand plaisir que nous l’adopterons. J’en serai heureux pour le Sénat et pour la démocratie.

Mme la présidente. La parole est à M. Yves Daudigny, pour explication de vote.

.

M. Yves Daudigny. Voilà deux fois en peu de temps que je suis pleinement convaincu par les propos de Mme la ministre. Je veux dire combien nous soutenons cet amendement, qui traduit dans les faits la volonté d’atteindre une plus grande cohérence des actions dans le secteur médico-social.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Alain Milon, rapporteur. Madame la présidente, après cet appel au peuple de la part de Mme la ministre, je me range à la grande sagesse de notre assemblée.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 1329.

(L'amendement est adopté à l'unanimité.)

M. François Autain. C’est un grand succès !

Mme la présidente. L'amendement n° 1027 rectifié, présenté par M. Desessard, Mme Voynet, MM. Le Menn et Cazeau, Mmes Alquier et Blondin, M. Botrel, Mme Campion, M. Chastan, Mme Chevé, MM. Daudigny et Daunis, Mmes Demontès et Durrieu, MM. Fauconnier et Fichet, Mme Ghali, M. Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, M. Jeannerot, Mmes Printz et Le Texier, MM. Mirassou et Rebsamen, Mme Schillinger, M. Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Dans le sixième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 1432-1 du code de la santé publique, après les mots :

santé au travail

insérer les mots :

, de la santé environnementale

La parole est à M. Jean Desessard.

M. Jean Desessard. Cette question a déjà été soulevée la semaine dernière mais elle s’inscrit aujourd’hui dans un contexte différent. Vous aviez refusé mon amendement au motif qu’il ne fallait pas découper la santé en morceau : santé environnementale, prévention, santé au travail, santé à l’école. Une telle énumération figure pourtant à l’article 26, puisqu’il y est dit que les commissions de coordination sont compétentes « dans les domaines de la prévention, de la santé scolaire, de la santé au travail, de la protection maternelle et infantile ». Il convient donc d’ajouter la santé environnementale.

La semaine dernière, je comprenais que l’on puisse considérer que la santé environnementale était comprise dans la santé en général ; aujourd’hui, je demande qu’elle soit mentionnée particulièrement.

On me répondra que la santé environnementale, c’est aussi la santé au travail, la santé à l’école, la prévention ! Soit, mais il n’en demeure pas moins qu’elle n’est pas réductible à l’une ou à l’autre, comme je l’ai expliqué la semaine dernière. J’entends par santé environnementale l’attention qui est portée aux produits qu’on utilise, dans la mesure où ils peuvent, à long terme, causer des pathologies. Par exemple, les agriculteurs doivent être très attentifs aux pesticides et aux insecticides ; dans les entreprises on fait attention aux produits qu’on utilise ; chez soi, la même attention doit être accordée aux produits ménagers. Pour toutes ces raisons, les agences de santé doivent engager une démarche volontariste pour évaluer la dangerosité d’une utilisation passive de tous ces produits.

Certes, la santé à l’école et la santé au travail sont importantes, mais elles ne se confondent avec la santé environnementale, qui est un concept nouveau lié au développement d’un ensemble de produits sources de pathologies.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Milon, rapporteur. Par cohérence, la commission émet un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Je voudrais rassurer M. Desessard, dont je connais l’implication dans les questions de santé environnementale et dont je partage les préoccupations.

Bien entendu, je confirme de nouveau que la santé environnementale fera partie des sujets que traitera la commission de coordination sur la prévention, de même qu’elle entre dans le champ de compétences des ARS. C’est un point que nous avons déjà abordé lorsque nous avons étudié l’architecture des responsabilités de cette dernière. Aussi, dès lors qu’est mise en place une commission chargée d’articuler entre elles les différentes politiques publiques en faveur de la santé, dès lors que l’activité de cette commission portera sur la prévention, elle en traitera évidemment toutes les dimensions, y compris le volet de la santé environnementale.

Par ailleurs, monsieur Desessard, je me demande même si le fait de traiter la santé environnementale dans une autre commission que celle qui s’occupe des questions de prévention ne pourrait pas avoir un effet pervers, à savoir la ghettoïser plutôt que de la mettre au cœur de ces politiques de prévention.

C’est un point que je me permets de souligner.

Mme la présidente. Monsieur Desessard, l'amendement n° 1027 rectifié est-il maintenu ?

M. Jean Desessard. Madame la ministre, je vous remercie de vos explications, mais je maintiens mon amendement.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. C’est votre droit !

M. Jean Desessard. Je le maintiens pour plusieurs raisons.

La santé environnementale, ce n’est pas de la prévention. La prévention consiste à éviter qu’une pathologie, dont on a préalablement identifié les causes, ne se propage. Une politique de santé environnementale, quant à elle, consiste par exemple à déterminer l’ensemble des cancers qui peuvent survenir dans une région donnée et à en identifier les causes. Ainsi, on peut mener des recherches dans le milieu agricole sur les cancers qui sont apparus récemment chez les agriculteurs. Il s’agit là d’une démarche supplémentaire qui intègre les aspects environnementaux. Pour autant, il n’est pas exclu que l’un et l’autre de ces domaines puissent être complémentaire.

Madame la ministre, vous affirmez que l’écologie étant désormais prise en considération par tout un chacun, il convient de ne pas la traiter à part comme une spécialité. Pour ma part, mon vœu le plus cher serait que tel soit le cas. Or, à défaut d’être constamment placée au cœur des débats, l’écologie est vite oubliée ! Bien sûr, on peut toujours organiser des Grenelle, mais encore faudrait-il que les lois censées les mettre en œuvre aboutissent ! Or, au lieu de cela, le plan de relance est arrivé !

Vous ressortez des tiroirs la prise de conscience écologique quand cela vous arrange. En réalité, les politiques environnementales manquent de moyens, ce qui est particulièrement grave.

Que M. le rapporteur ne tienne pas compte de mon amendement peu importe puisque je ne suis pas élu par ses électeurs mais par un certain nombre de personnes qui accordent une grande importance à l’écologie. Notre mode de développement productiviste génère des problèmes de santé. Vous êtes persuadés que ce qui est bon pour les patrons l’est aussi pour la société. Et tant pis si le contribuable doit supporter le coût des traitements nécessités par l’utilisation de ces multiples produits pathogènes !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Pas de caricature ! Vous me décevez, monsieur Desessard !

M. Jean Desessard. Notre logique est différente. ; ce n’est pas grave, je ne siège pas du même côté de l’hémicycle que vous. Moi, j’estime qu’il est extrêmement important pour la défense de l’environnement d’être attentif à ce que l’on produit. Vous, vous considérez les choses différemment. Mais, dans plusieurs années, vous aurez à supporter les conséquences de votre politique.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 1027 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 997 rectifié bis, présenté par MM. Leroy, Doligé, Sido, Lambert, César et Huré, est ainsi libellé :

Compléter le dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 1432-1 du code de la santé publique par les mots :

dans le respect des compétences qui leur sont dévolues et en coordination avec eux

Cet amendement n'est pas soutenu.

L'amendement n° 915, présenté par MM. Autain et Fischer, Mmes David, Hoarau, Pasquet et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :

Compléter le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 1432–2 du code de la santé publique par une phrase ainsi rédigée :

Cette communication est rendue publique.

La parole est à M. François Autain.

M. François Autain. Je crois me souvenir que cet amendement a été accueilli plutôt favorablement par la commission, ce dont je me réjouis.

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. N’anticipez pas ! (Sourires.)

M. François Autain. Il vise à ce que le compte rendu de la mise en œuvre de la politique régionale de santé élaborée par le directeur général de l'agence régionale de santé devant le conseil de surveillance de celle-ci soit rendu public. Le texte du projet de loi ne le prévoyait pas, ce qui est sans doute un oubli.

Il s’agit là d’une mesure de transparence et de bons sens. La commission a déjà comblé une lacune du texte en adoptant une disposition similaire pour les conférences régionales de santé. Aussi, mes chers collègues, j’espère que vous accepterez d’en faire autant pour la mise en œuvre de la politique régionale de santé en adoptant notre amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Milon, rapporteur. La commission s’en remet à la sagesse du Sénat.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 915.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 923 rectifié, présenté par MM. Autain et Fischer, Mmes David, Hoarau, Pasquet et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :

Compléter le troisième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 1432-2 du code de la santé publique par une phrase ainsi rédigée :

Elle comprend une annexe retraçant la totalité des opérations de reconversion mentionnées au 2 de l'article L. 1431-2 et détaillant l'incidence financière sur la dotation régionale mentionnée aux articles L. 314-3 et L. 314-3-3 du code de l'action sociale et des familles.

La parole est à Mme Isabelle Pasquet.

Mme Isabelle Pasquet. Comme chacun a pu le constater, le principe de fongibilité asymétrique qu’avait introduit l’Assemblée nationale a disparu dans la version du texte adoptée par la commission des affaires sociales, à tout le moins en apparence.

La fongibilité asymétrique conférait aux directeurs régionaux d’ARS le pouvoir aujourd’hui dévolu par la loi organique relative aux lois de finances aux directeurs de programmes et de missions du budget de l’État.

Cela dit, la question de la reconversion des dépenses entre activités hospitalières et activités médico-sociales illustre bien ce qu’est la démarche suivie par le Gouvernement. Le non-dit de ce projet de loi, c’est évidemment le recours à d’autres solutions que l’hôpital public pour répondre aux attentes de la population en matière sanitaire et sociale.

Pour résumer sommairement, vous dites que l’hôpital coûte cher, qu’il est lourd à gérer et, de plus, qu’il est un foyer de contestation sociale. De votre point de vue, il faut donc lui rogner les ailes et réduire autant que faire se peut son implication dans la gestion sanitaire et sociale du pays.

M. Guy Fischer. Voilà la vérité !

Mme Isabelle Pasquet. Ce qu’attendent de ce projet de loi ses concepteurs, ce sont des économies de gestion qui reportent vers le secteur médicosocial, vers le privé, sinon vers le caritatif, une bonne part de ce que fait aujourd’hui l’hôpital public.

On commence par transformer en établissements de moyen et long séjour les hôpitaux ruraux ou ceux qui sont faiblement pourvus en activités de chirurgie et de médecine, et on finit par laisser croître et embellir l’offre d’établissements privés d’accueil des personnes âgées ou dépendantes, sans omettre de valoriser le maintien à domicile et les emplois de service.

De fait, à la situation de dépendance des personnes les plus vulnérables, on recherche la solution la plus acceptable sur le plan comptable, portée évidemment par un moins-disant social, du point de vue des personnels s’entend, qui rend cette solution parfois parfaitement inadaptée.

La fongibilité asymétrique, ce n’est rien d’autre qu’une manière de gérer la pénurie de structures d’accueil des personnes en souffrance et de doubler cette gestion de la pénurie d’une recherche continue de la moindre qualité de l’emploi et d’une plus grande prise en charge par les assurés sociaux et leurs familles eux-mêmes de leur affection ou de leur situation.

Il importe donc que les conférences régionales soient éclairées sur les orientations et les choix faits dans le cadre de ces politiques de reconversion des dépenses.

Tel est l’objet de cet amendement, que nous ne pouvons que vous inviter à adopter.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Milon, rapporteur. Cet amendement est bien conçu ; en revanche, les arguments qui le sous-tendent sont plus contestables.

Il paraît utile qu’un document retrace les opérations de conversion qui auront bénéficié du système de fongibilité asymétrique et leur incidence sur les dépenses consacrées au médico-social.

En commission, nous avons formulé deux observations. Premièrement, cette annexe devrait être incorporée à l’état financier transmis au conseil de surveillance aux termes de l’article L. 1432–3 du code de la santé publique. Deuxièmement, cet amendement n’est pas cohérent avec le texte de la commission, qui a reporté – mais peut-être les auteurs de cet amendement l’ignorent-ils – à l’article L. 1434–10–1 les dispositions relatives à la fongibilité asymétrique des dépenses sanitaires et médicosociales.

Aussi, je suggère à leurs auteurs de rectifier cet amendement de manière à insérer correctement dans le code de la santé publique les dispositions qui y sont visées. Le cas échéant, la commission s’en remettra à la sagesse du Sénat.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État chargée de la solidarité. Je confirme les propos de M. le rapporteur : la fongibilité asymétrique n’a pas été supprimée, mais, pour des raisons d’organisation, elle a été insérée dans une autre partie du texte.

Par ailleurs, l’inscription dans la loi de ce principe de fongibilité asymétrique constitue la meilleure des garanties. En outre, comme l’a dit M. le rapporteur, les opérations de fongibilité seront recensées au niveau national et pourront être identifiées dans chaque région, puisqu’elles feront l’objet d’un abondement de l’enveloppe médico-sociale. Par conséquent, la CNSA, comme le comité de pilotage national des agences régionales de santé, pourra suivre ces opérations puisque l’annexe sera bien transmise au conseil de surveillance. Les garanties de suivi seront données tant à la CNSA qu’au conseil de surveillance des ARS.

Mme la présidente. Madame Pasquet, l'amendement n° 923 rectifié est-il maintenu ?

Mme Isabelle Pasquet. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L'amendement n° 923 rectifié est retiré.

Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 1138, présenté par M. Vanlerenberghe, Mmes Dini et Payet, M. J. Boyer et les membres du groupe Union centriste, est ainsi libellé :

Au début du cinquième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 1432-2 du code de la santé publique, remplacer le mot :

arrête

par le mot :

prépare

La parole est à Mme Anne-Marie Payet.

Mme Anne-Marie Payet. L’objet de cet amendement est de confier au directeur général de l’agence régionale de santé la compétence de préparer, mais non d’arrêter lui-même, le projet régional de santé.

Mme la présidente. L'amendement n° 1160 rectifié, présenté par M. Barbier, Mmes Escoffier et Laborde et MM. Mézard, Milhau, de Montesquiou et Vall, est ainsi libellé :

Dans le cinquième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 1432-2 du code de la santé publique, remplacer le mot :

arrête

par le mot :

élabore

La parole est à M. Gilbert Barbier.

M. Gilbert Barbier. Cet amendement vise, comme le précédent, à confier au directeur général de l’agence régionale de santé la compétence d’élaborer, mais non d’arrêter, le projet régional de santé.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Milon, rapporteur. L’architecture du projet régional de santé est un peu complexe, mais il nous semble que ce projet, constitué des différents documents énumérés à l’article L.1434-2 du code de la santé publique, devra d’abord être cohérent avec le CPOM conclu entre le directeur général de chaque agence et ses ministres de tutelle. Si tel est le cas, il semble logique que le directeur général, responsable de l’exécution du CPOM, arrête lui-même le projet régional de santé.

La commission souhaite donc le retrait de ces amendements. À défaut, elle y sera défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Ces amendements nous ramènent à la discussion que nous avons eue voilà environ une demi-heure sur les responsabilités des différents acteurs.

Revenons-en aux fondamentaux : qu’est-ce que le projet régional de santé ?

Le projet régional de santé précise la manière dont les politiques nationales de santé vont être mises en œuvre dans les régions.

Je ne vois pas qui peut avoir plus de légitimité que le directeur général de l’ARS pour arrêter – les mots ont un sens – ce programme régional de santé.

Cela ne m’empêche pas d’entendre les observations de Mme Payet et de M. Barbier. Le projet régional de santé doit en effet émaner de la démocratie sanitaire à laquelle ils aspirent. Le texte prévoit un processus de copréparation avec les acteurs concernés. Les différentes composantes du projet régional de santé feront l’objet de propositions, de concertations, d’avis de la part des conférences du territoire, de la conférence régionale de santé et de l’autonomie, des commissions de coordination, du conseil de surveillance des agences régionales de santé.

L’établissement du projet régional de santé est donc, vous pouvez le constater, bordée par de nombreux avis, concertations et travaux.

Ne croyez-pas que je le regrette. Cette copréparation me paraît au contraire tout à fait légitime. Elle donne un droit de regard et d’intervention tant aux élus locaux qu’aux différents acteurs, aux usagers et aux professionnels du monde de la santé. C’est, il faut en être conscient, une avancée majeure de la démocratie sanitaire qui est ainsi actée dans ce projet de loi.

Mesdames, messieurs les sénateurs, aujourd’hui, les acteurs locaux, qu’ils soient élus, membres d’une association ou professionnels de santé – et je sais que certains d’entre vous assument ces trois missions – ne donnent aucun avis sur les politiques de santé, ou alors de façon tout à fait marginale.

Certains ont un droit de regard sur les politiques de santé publique, ou sur les politiques médico-sociales s’ils ont la chance d’être conseillers généraux. Mais pour le reste, vous n’avez pas votre mot à dire. Vous n’avez aucune visibilité sur les politiques de santé qui sont décidées.

Le présent projet de loi change radicalement les choses. Désormais, au travers de la participation de différents acteurs au conseil de surveillance de l’agence régionale de santé, à la conférence régionale de santé et de l’autonomie, les élus locaux donneront un avis sur le plan stratégique régional de santé, qui est le document fondamental dont j’ai fixé les principaux axes tout à l’heure. Ce progrès majeur et bien concret est inscrit au cœur du projet de loi.

Après la phase de copréparation, vient l’heure où il faut arrêter le programme régional de santé. Cette mission relève clairement de l’État et de l’assurance maladie. Dans la mesure où elle n’est pas décentralisée, elle incombe à l’État, en l’occurrence au directeur général de l’ARS.

Il s’agit là d’une question de responsabilité. Je constate que la plupart des acteurs de ce débat n’ont aucun objectif affiché de décentraliser l’organisation de la santé. Mesdames, messieurs les sénateurs, lorsque l’on se réfère au pacte de 1945, c’est bien que l’on souhaite que l’État assume sa fonction de solidarité.

Les acteurs qui, selon vous, devraient arrêter le projet régional de santé n’ont ni comptes à rendre aux électeurs, ni la responsabilité de lever les impôts ou les cotisations qui permettent de financer le système. Ils n’ont donc pas vocation à arrêter le programme régional de santé.

J’ai bien conscience d’avoir été un peu longue, et je demande au Sénat de bien vouloir m’en excuser, mais il s’agit d’un sujet très important. Copréparer le projet régional de santé se fera d’une façon démocratique que vous n’avez jamais connue jusqu’à présent. Mais ensuite, parce que c’est la responsabilité régalienne de l’État, c’est à son représentant d’arrêter ledit projet.

Sous le bénéfice de ces explications, je souhaite le retrait de ces amendements ?

Mme la présidente. Madame Payet, l’amendement no 1138 est-il maintenu ?

Mme Anne-Marie Payet. Non, je le retire.

Mme la présidente. L’amendement no 1138 est retiré.

Monsieur Barbier, l’amendement no 1160 rectifié est-il maintenu ?

M. Gilbert Barbier. Madame la ministre, si votre intervention montre comment doit être compris le projet de loi, reconnaissez que la rédaction de ce dernier est très succincte, pour ne pas dire brutale. Peut-être conviendrait-il d’envoyer à toutes les agences régionales de santé le compte rendu intégral de cette intervention afin qu’elles puissent s’y référer le moment venu.

Cela dit, je retire mon amendement.

Mme la présidente. L’amendement no 1160 rectifié est retiré.

L'amendement n° 1058, présenté par MM. Le Menn et Cazeau, Mmes Alquier et Blondin, M. Botrel, Mme Campion, M. Chastan, Mme Chevé, MM. Daudigny et Daunis, Mme Demontès, M. Desessard, Mme Durrieu, MM. Fauconnier et Fichet, Mme Ghali, M. Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, MM. Jeannerot et Lagauche, Mmes Printz et Le Texier, MM. Mirassou et Rebsamen, Mme Schillinger, M. Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Dans le cinquième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 1432-2 du code de la santé publique, après les mots :

Il arrête

insérer les mots :

, après avis du conseil de surveillance,

La parole est à M. Jacky Le Menn.

M. Jacky Le Menn. Madame la ministre, votre intervention démontre tout l’intérêt du projet régional de santé. Nonobstant les arguments que vous avez avancés pour rappeler son articulation avec les priorités nationales, je me demande pourquoi on ne sollicite pas l’avis du conseil de surveillance. D’autant que vous avez prévu que le conseil de surveillance se prononce pour avis sur le plan stratégique régional de santé.

Il me semble que, dans un souci de cohérence, de bonne articulation, le conseil de surveillance devrait émettre un avis sur le projet régional de santé. Le conseil de surveillance étant composé de personnalités d’une extrême compétence et présidé par le préfet, le saisir pour avis ne pourrait, me semble-t-il, que renforcer l’importance que vous voulez accorder à ce plan régional de santé.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Milon, rapporteur. Le conseil de surveillance étant déjà consulté sur le CPOM de l’agence sur le plan stratégique régional de santé, il ne serait pas illogique qu’il le soit également sur le projet régional de santé, même si, au bout du compte, il aura de nombreux avis à donner.

La commission s’en remet donc à la sagesse du Sénat.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Permettez-moi, afin de dissiper toute confusion, de rappeler l’architecture de la réforme et les responsabilités de chacun.

Monsieur Barbier, je reconnais que les textes législatifs sont parfois rédigés avec sécheresse et qu’ils peuvent receler des formules elliptiques qui demandent à être précisées.

Le secrétaire général a pour mission de mettre en œuvre la réforme. L’instance nationale que nous avons créée donnera bien entendu un certain nombre de consignes aux directeurs généraux des ARS, conformément aux explications que je vous ai apportées et qui donnent de la chair à un texte par nature sobre, ce qui est une qualité pour un texte législatif.

Le conseil de surveillance a pour rôle d’orienter les décisions stratégiques de l’agence. Celles-ci sont donc définies dans un document spécifique – le plan stratégique régional de santé – qui fixe les objectifs de santé pour la région, la stratégie de l’ARS pour remplir ses objectifs et ses priorités d’actions.

Le plan régional stratégique de santé est, je le répète une nouvelle fois, une innovation majeure de la réforme. Établir un diagnostic d’ensemble à l’échelle d’une région, le copréparer – comme le texte le prévoit – c’est avoir une politique adaptée, territorialisée. Pour élaborer une telle politique, il faut associer à la préparation de ce projet des acteurs qui, pour l’instant, n’ont jamais été consultés.

Il me semble qu’il ne faut pas aller plus loin. En effet, demander au conseil de surveillance de donner un avis reviendrait à le mêler à l’opérationnel. Il perdrait alors de sa cohérence. Faire approuver les schémas et les programmes qui sont les composantes du projet régional de santé par le conseil de surveillance reviendrait à lui conférer une mission propre à un conseil exécutif.

Je conçois que cela puisse nous opposer, mais je voudrais, comprenez-le, que ma réforme soit en prise directe sur l’action opérationnelle de l’agence.

Vous en appelez à la responsabilité régalienne de l’État en matière de solidarité et j’ai cru comprendre que nous étions tous d’accord sur cette vision. C’est pourquoi il ne faut pas confondre conseil de surveillance et conseil exécutif.

Le conseil de surveillance de l’agence régionale de santé n’a pas à examiner le détail des choses, à entrer dans la gestion du quotidien. Ce serait un facteur d’inertie considérable. Les membres du conseil de surveillance n’ont évidemment pas vocation à assurer une gestion au jour le jour.

Le conseil de surveillance est un organe délibérant, distinct de l’exécutif, et il doit le demeurer. Nous serons plus opérationnels et plus efficaces si chacun remplit son rôle. Il faut laisser de la respiration à l’ARS, ne pas y introduire de l’inertie. Il ne faut pas déresponsabiliser l’agence régionale de santé ni son directeur. Il faut au contraire, et c’est l’objet du présent projet de loi, mettre chacun devant ses responsabilités.

En revanche, il est nécessaire d’évaluer les résultats. C’est la mission du conseil de surveillance. Le projet de loi prévoit que, au moins deux fois par an, le directeur général de l’agence régionale de santé rend compte de sa politique régionale au conseil de surveillance. Cette démarche a d’ailleurs été étendue à la conférence régionale de santé et de l’autonomie.

Mesdames, messieurs les sénateurs, il m’a semblé utile de rappeler les responsabilités de chacun des acteurs afin de bien expliciter les raisons qui, vous l’aurez compris, me conduisent à émettre un avis défavorable sur cet amendement.