M. Jean-Louis Carrère. Vous avez raison ! C’est le dévoiement de l’esprit mutualiste !

Mme Nicole Bricq. C’est un argument que nous avons beaucoup entendu !

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Il y a eu des pannes de gouvernance et des décisions qui n’ont malheureusement pas donné les fruits attendus. Nous devons aujourd’hui assumer cette situation.

L’organe central aura la charge de gérer le patrimoine du groupe, de trouver des synergies. Il faut donc permettre la cohérence des orientations qui seront prises par les réseaux des caisses d’épargne et des banques populaires.

L’organe central comprendra dix représentants des caisses. Ces sociétaires devront assumer leurs responsabilités. Mes chers collègues, j’en appelle à vos souvenirs : n’avons-nous pas connu des technostructures qui, parfois, se sont substituées aux sociétaires eux-mêmes ?

Le mouvement mutualiste a sa place dans notre paysage économique et financier, mais cela suppose que les sociétaires assument leurs prérogatives.

M. Yvon Collin. Absolument !

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Carrère, pour explication de vote.

M. Jean-Louis Carrère. Le groupe Caisse d’épargne s’est laissé aller, en des temps pas très anciens, à ce que j’appelle le dévoiement de l’esprit mutualiste. Sur ce point, monsieur le président de la commission, votre analyse est tout à fait conforme à la réalité et je ne peux qu’y souscrire.

Face au dispositif que l’on nous propose, nous devons veiller à préserver la gouvernance.

Je m’interroge, mes chers collègues : est-ce dévoyer la gouvernance d’un groupe à vocation mutualiste que d’autoriser la validation des décisions de l’organe central par les caisses régionales ou par les banques régionales ?

M. le rapporteur nous disait tout à l’heure, à juste titre, qu’il suffisait d’une petite majorité pour s’assurer d’un certain nombre de votes risquant d’entraîner le dévoiement. Considérez-vous que la nomination définitive, par une fédération ou une autre structure, de dix délégués dans un organe central qui ne sera plus soumis au contrôle des banques ou des caisses régionales soit la meilleure des garanties d’une bonne gouvernance ? Pour ma part, je crois que non !

En agissant dans la précipitation, nous préparons pour le futur groupe un avenir qui n’est conforme ni à l’histoire ni aux valeurs des sociétaires des deux groupes actuels.

Monsieur le secrétaire d’État, en procédant ainsi, vous prenez le risque de porter un coup à l’évolution du nouveau groupe, qui est appelé à être le deuxième groupe bancaire français.

Je vous demande, avec calme et modération, de bien vouloir considérer l’objet de ces deux amendements : ils visent simplement à faire valider les décisions du groupe par la majorité des caisses régionales et des banques régionales. Est-ce vraiment révolutionnaire ?

M. Jean-Louis Carrère. Les décentralisateurs que vous êtes devenus – les convertis sont extraordinaires – considèrent-ils vraiment que le fait de confier à des caisses régionales la possibilité de valider des projets de direction puisse nuire à l’évolution de la banque ?

Certains de nos collègues exercent ou ont exercé les fonctions de président de caisse régionale. Je leur demande s’ils verraient un problème à ce que les caisses régionales, qui ne sont pas représentées par les dix membres qui siègent à l’organe central, valident les décisions. Ce serait là, me semble-t-il, la garantie d’un meilleur état d’esprit et d’une plus grande volonté de servir l’intérêt que l’on veut marquer en créant ce groupe.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 10 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 2.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 6, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

À la fin du cinquième alinéa (4°) du texte proposé par le 1° du I de cet article pour l'article L. 512-107 du code monétaire et financier, remplacer les mots :

de branche

par les mots :

sur tout ou partie de son périmètre

La parole est à Mme Nicole Bricq.

Mme Nicole Bricq. Cet amendement porte sur l’organisation des relations du travail dans le nouveau groupe. Il s’agit d’un message en direction des salariés du futur groupe qui attendent que la loi protège leurs droits et non qu’elle ajoute un simulacre de branche professionnelle dans des entreprises qui relèvent d’un même groupe.

La discussion générale et les réponses qui ont été apportées à nos amendements ne m’ont pas éclairée sur la position du Gouvernement et de sa majorité au sujet de la décentralisation, ou de la centralisation ! Le caractère mutualiste et coopératif est intrinsèquement lié à la décentralisation, à la régionalisation.

En l’occurrence, on veut créer quatre branches professionnelles, alors que l’on soutient par ailleurs la nécessité d’avoir un organe central fort.

Je m’interroge donc sur la vision du Gouvernement en matière de centralisation. Nous ne connaissons pas non plus la vision stratégique à moyen terme du futur président-directeur général du groupe.

En refusant la discussion, vous acceptez de fait la mise en cause du caractère mutualiste. Monsieur le rapporteur, vous souhaitez un vote conforme et, à cette fin, vous vous êtes interdit de déposer des amendements, ce qui est dommage pour la représentation nationale.

Nous avons bien compris que l’on ne souhaite pas s’embarrasser du contrepoids que peuvent constituer les salariés. Ils sont parties prenantes de l’entreprise, mais encore faut-il qu’ils soient présents au bon niveau, c’est-à-dire là où se prennent les décisions.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur. Je partage la surprise et l’incompréhension de Mme Bricq, mais pas sur le même point.

Voilà un instant, vous nous reprochiez de vouloir créer un système trop centralisé, car, selon vous, la maîtrise de la stratégie des deux réseaux ne devait pas se faire au niveau de l’organe central.

Pour ce qui concerne l’organisation des relations sociales, nous présentons un dispositif décentralisé qui s’articulera en quatre branches selon le statut d’origine des établissements. Et vous nous demandez plus de centralisation !

Mme Nicole Bricq. Vous nous dites que c’est au niveau de l’organe central que se prendront les décisions !

M. Philippe Marini, rapporteur. Alors, quand faut-il centraliser et quand faut-il décentraliser ?

Nous donnons à chaque branche la garantie de conserver sa culture propre !

Mme Nicole Bricq. C’est ça !

M. Philippe Marini, rapporteur. D’ailleurs, les organisations syndicales sont attachées à leur spécificité : les banques populaires d’un côté, les caisses d’épargne de l’autre.

Vous souhaitez une négociation globale. J’admets avoir quelque difficulté à percevoir la cohérence de vos positions.

Mme Nicole Bricq. C’est de la décentralisation à géométrie variable !

M. Philippe Marini, rapporteur. La majorité de la commission adhère à la démarche du Gouvernement (Ah ! sur les travées du groupe socialiste.)

Mme Nicole Bricq. On ne s’en était pas aperçu !

M. Philippe Marini, rapporteur. … qui consiste à distinguer quatre branches autonomes en matière de relations sociales : les caisses d’épargne, les banques populaires, l’AFB et le Crédit maritime, qu’il ne faut pas oublier.

M. François Marc. Dites plutôt que vous sciez la branche !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Je souhaite le retrait de cet amendement ; à défaut j’y serai défavorable, pour des raisons identiques à celles de M. le rapporteur.

J’ajoute que la précision qui est proposée introduit de la confusion. La notion de tout ou partie du périmètre de l’organe central est en effet mal définie et de portée juridique incertaine.

M. Marini, à la page 59 de son rapport, présente un tableau comparatif des dispositions législatives afférentes au statut et aux missions des organes centraux actuels et du futur organe central du groupe. Ce tableau montre que notre volonté est seulement d’intégrer dans le futur groupe les mesures législatives qui s’appliquent dans les deux réseaux des banques populaires et des caisses d’épargne. Je ne comprends pas votre souhait de restreindre certaines de ces mesures. Pour notre part, nous continuons de penser que doit subsister cette définition de la représentation au sein des relations du travail.

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Carrère, pour explication de vote.

M. Jean-Louis Carrère. L’expression employée par M. le rapporteur me permet de comparer sa dialectique à l’utilisation d’un pipeline qui se terminerait par un goutte-à-goutte, comme ceux que l’on utilise dans certaines cultures agricoles… Mais ne voyez dans mon propos aucune méchanceté !

Monsieur le rapporteur, quand cela vous arrange, vous en appelez à la décentralisation, mais lorsque c’est nous qui demandons la décentralisation afin que soit préservé l’esprit mutualiste, vous défendez la centralisation des pouvoirs à l’extrême.

Je ne partage pas votre point de vue, mais je comprends que, l’urgence aidant, la volonté de voter un texte conforme vous amène même à renoncer à des amendements qui sont sous-tendus par les mêmes arguments que ceux que vous invoquez. Cela pose quelques problèmes.

Je n’épiloguerai pas. Vous refusez une forme de rationalisation des relations du travail. Or les personnels sont très inquiets par la fusion actuelle eu égard à l’ancienne gestion. Il serait sage, monsieur le secrétaire d’État, que vous puissiez les rassurer : que va-t-il advenir des personnels des deux groupes ? C’est une vraie préoccupation !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Monsieur le sénateur, je veux tout de suite apaiser vos inquiétudes : comme je l’ai indiqué lors de la discussion générale, le président François Pérol vient d’adresser une lettre aux organisations de salariés pour couper court aux rumeurs auxquelles vous faites allusion : aucun licenciement n’est prévu !

Mme Nicole Bricq. Ce n’est pas vrai !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 6.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L'amendement n° 28, présenté par MM. Vera et Foucaud, Mme Beaufils et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

I. - Au sixième alinéa (5°) du texte proposé par le 1° du I de cet article pour l'article L. 512-107 du code monétaire et financier, supprimer les mots :

réaliser des opérations de titrisation ou émettre des instruments financiers,

II. - Compléter ce même 5° par un alinéa ainsi rédigé :

« Celles-ci sont limitées aux opérations en lien avec les missions que lui confère la loi n°           du     relative à l'organe central des caisses d'épargne et des banques populaires et uniquement pour les opérations qui ne peuvent pas être effectuées au sein des banques régionales.

La parole est à M. Bernard Vera.

M. Bernard Vera. Par cet amendement, nous manifestons notre opposition à la mise en œuvre des outils financiers qui ont conduit les caisses d’épargne et certaines de leurs filiales – on pense évidemment à Natixis – aux pires difficultés et qui ne peuvent donc décemment être retenus dans le cadre de la réalisation du plan de fusion.

Ni la banque populaire ni la caisse d’épargne, de par leur statut, n’ont vraiment vocation à réaliser des opérations comme la titrisation ou l’émission d’instruments financiers, celles-ci relevant plutôt de la spécificité de leur filiale commune, la banque de financement et d’investissement Natixis.

On peut s’interroger sur ce nouveau pouvoir octroyé au nouvel organe central.

Certes, il est sans doute souhaitable que celui-ci soit agréé comme établissement de crédit. Mais de là à l’autoriser à faire de la titrisation et du trading pour son compte propre…

Le Gouvernement et M. Pérol ont probablement l’idée de suivre l’exemple du Crédit agricole avec Calyon. Comment ne pas relever que, à l’inverse des caisses d’épargne et des banques populaires, qui ne sont pas cotées, contrairement à Natixis, le Crédit agricole est en bourse, alors que sa banque de financement et d’investissement ne l’est pas ?

Nous savons tous à quelles hauteurs se tiennent aujourd’hui les actions de Natixis : alors que leur prix de vente initial était de 19,50 euros, elles se situent aujourd’hui entre 1,50 et 1,60 euro environ, soit une baisse de plus de 80 % en un an. Cette situation a entraîné des recours contentieux d’associations de porteurs d’actions dits minoritaires, c’est-à-dire la foultitude des petits porteurs abusés et alléchés par les opérations publicitaires de l’automne 2006, qui ont perdu une bonne part de leurs économies et de leurs placements. Ils ont objectivement été abusés.

Les opérations de titrisation que l’on pourrait mener dans le cadre des activités du nouvel organe central ont évidemment un but : tenir les ratios de solvabilité, ajuster les bilans et rendre ainsi la mariée un peu plus belle.

Le problème, c’est que la pratique a montré que la titrisation était souvent une habile opération de partage de risques, au corps défendant de celui qui prête et au bénéfice quasi exclusif de celui qui emprunte.

L’autre problème de cet outil financier, c’est qu’il constitue en lui-même une forme de pari sur l’avenir et sur la valorisation future des titres qui sont ainsi transformés.

Nous pensons même que la titrisation, dans le cas qui nous préoccupe, aura un objectif très simple : permettre, au bénéfice de sa mise en œuvre, de favoriser la réévaluation des actifs du groupe constitué par la fusion, et rendre notamment un peu plus liquides les créances douteuses détenues dans le bilan de Natixis.

M. le président. L'amendement n° 4, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Compléter le sixième alinéa (5°) du texte proposé par le 1° du I de cet article pour l'article L. 512-107 du code monétaire et financier par les mots :

celles-ci sont limitées aux opérations en lien avec les missions que lui confère le présent article du code monétaire et financier et uniquement pour les opérations qui ne peuvent pas être effectuées au sein des banques régionales ;

La parole est à Mme Nicole Bricq.

Mme Nicole Bricq. Il s’agit toujours du même débat sur la centralisation et la décentralisation.

Cet amendement vise à ce que toutes les activités opérationnelles qui ne constituent pas un service direct à l’activité des caisses régionales et des banques régionales fassent l’objet d’une validation par celles-ci.

Nous souhaitons que le principe de subsidiarité entre, d’une part, les banques régionales et les caisses régionales, et, d’autre part, l’organe central, soit respecté.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur. Je voudrais convaincre nos collègues de retirer ces amendements, pour des raisons strictement techniques.

Vous voudriez limiter les fonctions de l’organe central en matière de garantie de la liquidité du groupe et des deux réseaux. Mais on ne peut pas imaginer qu’une banque populaire ou une caisse d’épargne, prise isolément, organise son propre refinancement. Ce serait beaucoup trop cher et cela se retournerait contre ses intérêts économiques.

À l’origine, c’était la Caisse des dépôts et consignations qui assurait ce refinancement. Et la première loi portant réforme des caisses d’épargne et de prévoyance, dite loi Taddei – on l’a un peu oublié aujourd’hui, mais il a joué un rôle important à son époque – a créé des sociétés régionales de financement, les SOREFI, qui étaient détenues à 50 % par les caisses d’épargne de la région et à 50 % par la Caisse des dépôts et consignations.

À partir de ce moment-là, c’est-à-dire dès les années quatre-vingt, il a été nécessaire d’assumer collectivement les fonctions de refinancement de garantie de la liquidité du réseau.

Du côté des banques populaires – c’est encore plus ancien –, il existait une caisse centrale des banques populaires, avant même l’existence de la Banque fédérale des banques populaires, qui est plus récente.

Et vous voudriez revenir sur ce dispositif technique, dont la nécessité est évidente ? Je pense que la formulation de l’amendement n° 4 excède votre pensée.

S’agissant de l’amendement n° 28, il me semble que nous n’interprétons pas les termes de la même façon. MM. Foucaud et Véra s’inquiètent de l’utilisation des opérations de titrisation. Mais la mention qu’ils souhaitent supprimer est celle par laquelle l’organe central contrôlerait les opérations de titrisation réalisées par les établissements du réseau. Si l’on retire cette mention, des banques populaires ou des caisses d’épargne pourraient réaliser, à titre individuel, des opérations de titrisation dans des conditions dangereuses. Il faut bien qu’il y ait une discipline, une régulation, en quelque sorte. C’est la fonction de l’organe central.

Pour ces raisons, et sachant qu’il ne s’agit que de considérations techniques, la commission souhaiterait que ces amendements puissent être retirés.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Le Gouvernement partage l’avis émis par M. le rapporteur.

Afin d’assurer sa mission, l’organe central sera chargé de prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir la liquidité du groupe et en assurer un pilotage efficace. Pour cela, il doit avoir un droit de regard sur toutes les opérations de titrisation ou d’émission d’instruments financiers des établissements qui le composent. (M. Jean-Louis Carrère s’exclame.)

Le pilotage des liquidités du groupe doit être le plus efficace possible. Les amendements proposés priveraient l’organe central d’un pouvoir de contrôle dans ce domaine.

Je précise aussi que le code monétaire et financier prévoit des dispositions similaires pour la Caisse nationale de Crédit agricole et la Banque fédérale des banques populaires. Donc, il n’y a rien de neuf sous le soleil…

Il ne me semble pas pertinent de restreindre aujourd’hui les compétences de l’organe central. C’est pourquoi je souhaite que ces amendements soient retirés.

M. le président. Madame Bricq, l'amendement n° 4 est-il maintenu ?

Mme Nicole Bricq. Monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, vous savez bien de quoi il est question !

Vous venez de nous dire que l’organe central devait être capable d’assurer la liquidité du groupe. Effectivement, c’est bien de cela qu’il s’agit : nous l’avons développé au cours de la discussion générale. Mais comment s’y prendra-t-il ? Dans le contexte très grave où se trouve ce groupe financier, dont les comptes sont obérés principalement par Natixis, l’aide de l’État devra être remboursée d’ici à cinq ans, voire avant.

En outre, la rémunération de l’État pour les sommes engagées est très élevée, puisqu’elle est de l’ordre de 8 %. Et vous savez très bien que rien ne nous garantit que les pertes du premier trimestre ne se reproduiront pas ultérieurement.

Il existe donc un problème de liquidités et de solvabilité. Si l’État a apporté son secours aux banques, c’est parce qu’il fallait relever le Tier One : il se situe aujourd’hui aux alentours de 9,4 %, ce qui est à peu près normal, mais jusqu’à quand ? Tout le monde s’interroge !

Au travers de notre amendement, nous posons la question de savoir comment sera assurée cette liquidité s’agissant des relations entre l’organe central et les banques et caisses régionales.

Vous répondez à la question que vous voulez évacuer, mais en n’acceptant pas notre amendement, vous dites qu’il est possible de ponctionner les comptes des caisses régionales et les banques régionales.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Fourcade, pour explication de vote.

M. Jean-Pierre Fourcade. Je voterai contre ces amendements, parce que je les trouve dangereux.

Nous discutons non pas de l’avenir de Natixis, mais du rapprochement entre deux grands réseaux…

M. Jean-Pierre Fourcade. … qui constitueront le deuxième groupe bancaire français.

M. Jean-Pierre Fourcade. Ce groupe bancaire français travaille sur le marché international.

Par conséquent, si nous refusons à l’organe central les moyens de contrôler la solvabilité des établissements et de surveiller leurs opérations de titrisation, lesquelles ont entraîné de nombreux troubles dont un certain nombre d’opérateurs sont en train de payer les conséquences, nous risquons de détériorer les notations du nouveau groupe sur le plan international et de provoquer des difficultés de fonctionnement qui me paraissent aller très au-delà de l’objectif que nous visons, à savoir la constitution d’un organe central.

Ces deux amendements ne participent plus du tout du débat entre la centralisation et la décentralisation : il s’agit de la solidité du nouveau groupe ou du maintien de structures mal adaptées et mal notées sur l’ensemble du marché international.

M. le président. Monsieur Vera, l'amendement n° 28 est-il maintenu ?

M. Bernard Vera. Oui, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 28.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Madame Bricq, l'amendement n° 4 est-il maintenu ?

Mme Nicole Bricq. Oui, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 4.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 40, présenté par MM. Vera et Foucaud, Mme Beaufils et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Supprimer le dixième alinéa (9°) du texte proposé par le 1° du I de cet article pour l’article L. 512-107 du code monétaire et financier.

La parole est à M. Thierry Foucaud.

M. Thierry Foucaud. Cet amendement a pour objet de restreindre quelque peu les pouvoirs du nouvel organe central, qui sont, c’est le moins que l’on puisse dire, singulièrement étendus par le projet de loi.

Ainsi, dans le texte proposé pour l’article L. 512-107 du code monétaire et financier apparaît, entre autres, cette disposition que je ne peux manquer de rappeler ici : l’organe central des caisses d’épargne est chargé d’« approuver les statuts des établissements affiliés et des sociétés locales d’épargne ainsi que les modifications devant y être apportées ».

En résumé, le nouvel organe central voit croître et embellir ses pouvoirs, puisqu’il est habilité à approuver les statuts des établissements affiliés, donc aussi à les créer, et à procéder à l’expertise de la situation des sociétés locales d’épargne.

Dans sa rédaction actuelle, l’article L. 512-95, entre autres dispositions, confie à la Caisse nationale des caisses d’épargne, l’organe central actuel du secteur, les missions suivantes : « […] établir les statuts types des caisses d’épargne et de prévoyance et des sociétés locales d’épargne ».

Nous passons donc clairement d’un appui technique et logistique, relevant du champ de l’information pratique sur les dispositions légales en vigueur, à une disposition tendant à placer les sociétés locales d’épargne sous tutelle du nouvel organe central.

Or, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, l’article L. 512-92 du code monétaire et financier, relatif aux sociétés locales d’épargne, indique notamment : « Les sociétés locales d’épargne sont des sociétés coopératives, soumises aux dispositions de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération sous réserve des dispositions de la présente section. » Je vous invite d’ailleurs à relire l’intégralité de cet article, qui fait des sociétés locales d’épargne des structures souples, auxquelles chacun est libre de participer, à tel point, d’ailleurs, que l’article L. 512-93 accorde aux collectivités territoriales et à leurs groupements le droit d’adhérer à de telles sociétés.

Au demeurant, cette situation se comprend parfaitement au regard de la place particulière, que nous avons déjà soulignée, des caisses d’épargne dans le domaine du financement de l’économie locale et de l’aménagement du territoire.

Par conséquent, si le 9° du texte proposé par le 1° du I de l’article 1er pour l’article L. 512-107 du code monétaire et financier est adopté, nous nous retrouverons avec un organe central qui va mettre sous tutelle un groupement librement constitué de coopérateurs, d’autant plus librement constitué qu’il a vocation à être désintéressé.

Nous ne pouvons accepter ce qui s’apparente à une mise en question du statut coopératif des caisses d’épargne et de leur mode de fonctionnement.

Approuver de telles dispositions reviendrait à dénaturer encore un peu plus la gestion et les objectifs du réseau des caisses d’épargne et, bien sûr, à les éloigner de ce qui fait leur originalité.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement, pour toutes les raisons déjà avancées.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État. Monsieur Foucaud, le Gouvernement partage l’avis de la commission.

Les mesures relatives au pouvoir d’agrément des statuts par l’organe central, que vous contestez aujourd’hui, existent et s’appliquent aux organes centraux à la fois des banques populaires et des caisses d’épargne.

Je le rappelle, aux termes de l’article L. 512-11 du code monétaire et financier, la Banque fédérale des banques populaires est chargée d’« approuver les statuts des banques populaires et leurs modifications ». La Caisse nationale des caisses d’épargne et de prévoyance établit les statuts types de celles-ci et des sociétés locales d’épargne. En la matière, il n’y a donc rien de nouveau dans le dispositif proposé.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 40.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 3, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Dans le dernier alinéa (12°) du texte proposé par le 1° du I de cet article pour l’article L. 512-107 du code monétaire et financier, après les mots :

caisses d’épargne

insérer les mots :

et les banques populaires

La parole est à Mme Nicole Bricq.

Mme Nicole Bricq. Les caisses d’épargne doivent assurer, de par la loi, des missions d’intérêt général, que la plupart d’entre nous connaissent puisqu’elles sont effectuées à un niveau très local. Ces établissements peuvent ainsi, compte tenu de leur caractère particulier, soutenir des initiatives sociales solidaires, soit par un apport de crédits, soit par des actions concrètes, telles que l’accompagnement de personnes en difficulté.

Ces missions d’intérêt général, bien que restreintes, n’ont toutefois pas disparu complètement à l’occasion de la banalisation du livret A. Elles ont d’ailleurs été confirmées par la loi de modernisation de l’économie, dont nous allons bientôt célébrer la première année d’existence.

Puisqu’un nouveau groupe est constitué – nous ne reviendrons pas sur la question de savoir s’il s’agit d’un rapprochement ou d’une fusion –, il convient de prévoir que les missions d’intérêt général exercées par une entité, les caisses d’épargne, puissent l’être aussi par l’autre, les banques populaires. À cette fin, nous proposons d’inscrire cette référence aux missions d’intérêt général dans le code monétaire et financier pour les deux réseaux concernés. Ce serait une manière d’homogénéiser la future entité.