M. le président. Les amendements nos 28 et 445 sont identiques.

L'amendement n° 28 est présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

L'amendement n° 445 est présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 2

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme Odette Terrade, pour présenter l’amendement n° 28.

Mme Odette Terrade. En cohérence, avec nos interventions précédentes, l’amendement n° 28 vise à supprimer le deuxième alinéa de l’article 1er, qui constitue le cœur de ce projet de loi en transformant La Poste en société anonyme à compter du 1er janvier prochain, soit un an avant l’ouverture totale à la concurrence des activités postales.

Ce processus est maintenant engagé depuis de nombreux mois, puisque, à l’automne dernier, le Président de la République a demandé à la commission Ailleret de faire des propositions concernant le statut de La Poste. Elle a donc suggéré la transformation de cette dernière en société anonyme, tout en précisant bien que cette société serait détenue à 100 % par des personnes publiques. C’est déjà un progrès par rapport à ce qui était annoncé au départ, à savoir une simple mise en bourse de ce « joyau de la République » !

Mais ces précautions oratoires n’ont, malheureusement pour le Gouvernement, pas suffi à convaincre les 2 300 000 personnes qui se sont déplacées le 3 octobre dernier pour lui faire entendre leur refus du changement de statut de La Poste.

Il faut dire que les citoyens sont de plus en plus exaspérés par les formules prononcées par votre majorité ainsi que par les promesses non tenues.

Je vous rappelle que GDF a été privatisé, alors que Nicolas Sarkozy affirmait qu’il n’en serait jamais ainsi. Il en a été de même pour France Télécom !

Lors de l’organisation de la votation citoyenne, nous avons eu l’occasion de discuter avec des personnes travaillant depuis de nombreuses années à France Télécom. Elles nous ont affirmé qu’elles ne voulaient pas que leurs collègues de La Poste vivent la même dégradation des conditions de travail, et que cela justifiait à leurs yeux l’importance du vote organisé par le Comité national de défense de La Poste.

France Télécom et La Poste sont deux entreprises qui évoluent en parallèle. Il est donc particulièrement important de regarder ce qui se passe chez France Télécom avant de nous prononcer sur La Poste.

Dès à présent, nous pouvons tirer des conclusions sur l’opportunité de la privatisation de La Poste.

Nous savons maintenant que l’intérêt d’un développement à l’international est limité, puisqu’il est facteur de pertes financières extrêmement lourdes.

Nous savons également que, dans une entreprise privée, la pression liée à l’objectif d’une rentabilité toujours plus grande a des conséquences dramatiques sur les personnels.

Pour finir, nous savons également que l’entrée de nouveaux opérateurs ne s’est pas faite au bénéfice des usagers, puisque France Télécom et les autres se sont entendus sur des tarifs élevés.

Est-ce cela que vous voulez pour La Poste ? Est-ce cela la modernité que vous appelez de vos vœux ?

Nous vous invitons une nouvelle fois à la lucidité. C’est pour garantir un service public de qualité produit par des agents performants qu’il ne faut pas transformer l’EPIC en société anonyme.

Tel est le sens de notre amendement.

M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, pour présenter l’amendement n° 445.

M. Roland Courteau. Avec cet amendement, qui complète les trois précédents de nos collègues, nous proposons de supprimer le deuxième alinéa de l’article 1er.

Cet alinéa dispose que la personne morale de droit public, La Poste, est transformée, à compter du 1er janvier 2010, en une société anonyme dénommée La Poste.

Nous sommes là « au cœur du cœur » de ce projet de loi ! À plusieurs reprises, je me suis longuement exprimé sur ce changement de statut que j’ai qualifié de dogmatique et qui ouvre toutes grandes les portes vers une prochaine privatisation.

Ce changement de statut est dogmatique, car, comme nous l’avons démontré à de multiples reprises, il n’est justifié ni par l’Europe, ni par des questions de financement.

Reconnaissez que, si l’on change de statut, c’est bien pour modifier la propriété. En fait, il s’agit là d’une dépossession du bien commun du plus grand nombre de Français, comme l’a d’ailleurs souligné hier notre collègue Daniel Raoul, qui est notre grand spécialiste.

Je sais bien que le sort de La Poste est décidé et ficelé depuis longtemps, la commission Ailleret n’ayant eu pour seule utilité que d’entériner les choix actés ailleurs. Mais, oui, nous nous opposons à cette transformation du statut de La Poste, car nous savons que cela va conduire à la privatisation et que toute privatisation mène inéluctablement à une recherche du profit maximal pour les actionnaires au détriment des missions de service public.

Voilà la vérité que doivent connaître les Français ! Ce ne sont pas les faux remparts que vous érigez qui stopperont le processus engagé ou qui feront croire qu’ils sont susceptibles d’y parvenir. Personne n’est dupe et personne ne vous croit !

Voilà les raisons pour lesquelles nous proposons de supprimer le deuxième alinéa et voulons conserver le statut actuel, lequel est réellement protecteur pour les missions de service public et tout à fait adapté pour affronter la concurrence.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Pierre Hérisson, rapporteur. Comme je l’ai indiqué précédemment, la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire a approuvé le changement de statut. Par conséquent, elle ne peut qu’être défavorable à l’amendement 24.

Elle est également défavorable à l’amendement n° 25, qui vise à supprimer l’alinéa d’introduction de l’article 1er, lequel insère un nouvel article 1-2 dans la loi du 2 juillet 1990, car, sans cette disposition, les alinéas suivants perdraient leur point d’ancrage.

Enfin, elle est également défavorable aux amendements identiques nos 28 et 445, qui visent à s’opposer à la transformation de La Poste en société anonyme dont votre commission approuve le principe.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Estrosi, ministre. Le Gouvernement est défavorable aux quatre amendements.

M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour explication de vote sur l'amendement n° 24.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Il nous semble nécessaire de revenir de manière plus explicite sur les fausses raisons avancées dans ce projet de loi pour organiser ultérieurement une vraie privatisation de La Poste !

Certes, de nombreux experts, ou désignés comme tels, ont produit des études, des analyses ou des rapports en tout genre. Nous ne contesterons pas la qualité de cette élite qui s’est « spontanément » mise à votre disposition pour changer le statut de « notre Poste », afin de moderniser celle-ci.

Je rappellerai simplement qu’une votation citoyenne organisée avec beaucoup de sérieux dans des conditions particulièrement difficiles, sans aucun support institutionnel, ni médiatique, a clairement rejeté votre projet de privatisation déguisée de ce service public de proximité.

Celui-ci est souvent le dernier qui subsiste dans les communes ou sur le territoire de nos concitoyens. En effet, vous avez déjà supprimé des gendarmeries, des commissariats, des perceptions, des subdivisions de l’équipement, des tribunaux, etc.

Supprimer un bureau de poste n’est pas si simple ! Il fallait bien trouver d’autres arguments ! Progressivement, vous avez donc réduit les services rendus aux usagers, limitant les heures d’ouverture des bureaux de poste : suppression de quelques heures d’ouverture ici ou là, suppression de postes de personnels fonctionnaires par le non-remplacement des départs en retraite, embauche de personnels contractuels corvéables et « licenciables ».

Vous proposez désormais le service minimum postal aux maires, en leur offrant, pour l’instant, quelques compensations financières. Mais les bureaux de plein exercice disparaissent les uns après les autres. Si nous comptons toujours environ 17000 « points de contact », moins de 11 000 sont encore des bureaux de poste et seule une minorité d’entre eux offre la totalité des services postaux. La tendance est depuis plusieurs années à la baisse : en 2007, l’opérateur public a perdu plus de 600 bureaux de poste, 25 000 emplois ont été supprimés depuis 2001 et la précarité s’étend.

La logique fondamentale de ce processus de privatisation, que vous dissimulez par des arguments généreux, constitue le fil conducteur de ce projet de réforme.

Avec ce projet de loi, vous faites le choix d’offrir un cadre légal à la privatisation, en ayant pour objectif non seulement d’aller plus vite, mais aussi de rationnaliser votre entreprise de destruction.

Les conclusions de la commission Ailleret nous éclairent sur les objectifs réels de ce changement de statut. Elles affirment sans ambiguïté qu’en transformant La « Poste » en société anonyme il s’agit en fait de diminuer les surcoûts liés aux missions de service public, notamment en termes d’aménagement du territoire.

L’État souhaite donc, pour atteindre les fameux « équilibres financiers » dont il a fait sa doctrine, une économie sur ses missions de service public ! Comment ne pas rappeler, dans ce contexte, que l’État doit déjà un milliard d’euros par an à La Poste, au titre de ces fameux surcoûts liés aux missions de service public ?

Les marges d’action de l’État existent pour sauver l’établissement public ; il suffit de rembourser les sommes qu’il doit à l’opérateur public.

Afin que La Poste demeure un grand service public répondant aux attentes et aux besoins de nos concitoyens, nous proposons des solutions concrètes, des solutions fondées sur la satisfaction de tous les besoins fondamentaux exprimés par les particuliers comme par les entreprises, et plus particulièrement les PME et les artisans, sur le rapprochement du service public postal des besoins de la collectivité nationale et sur l’ouverture et la démocratisation de sa gestion.

Telles sont les raisons pour lesquelles nous vous demandons de voter cet amendement.

M. le président. La parole est à M. René-Pierre Signé, pour explication de vote sur l'amendement n° 24.

M. René-Pierre Signé. Je voudrais revenir sur la suppression des agences postales, car je m’étonne de cette autodestruction de La Poste.

Les bureaux de poste sont maintenant installés dans les grandes surfaces de type Carrefour. Le directeur départemental de la Nièvre s’est d’ailleurs réjoui de constater que c’était le bureau établi à Carrefour qui fonctionnait le mieux !

Parallèlement à l’installation de bureaux de poste dans les magasins où les gens qui viennent faire leurs courses profitent bien évidemment de ce service, on « déshabille » de fait les zones rurales de leurs agences postales communales.

De plus, comme on réduit les heures d’ouverture de ces agences, comment voulez-vous qu’elles restent rentables ? On a alors beau jeu de raconter ensuite qu’elles subissent un déficit évident, car elles n’encaissent plus, en une matinée, qu’une trentaine d’euros de recettes !

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l'économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire. Monsieur le président, permettez-moi de répondre à notre collègue René-Pierre Signé.

Les agences postales en place sont dans les mairies.

M. René-Pierre Signé. Pas seulement !

M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l'économie. Si, mon cher collègue, une agence postale communale est toujours installée dans les locaux de la mairie, et sa présence ne peut être remise en cause, car elle a été décidée par contrat. Dans les grandes surfaces, ce ne sont que des points Poste.

C’est la raison pour laquelle j’encourage les maires qui rencontrent des difficultés pour maintenir un bureau de poste sur leur territoire à signer un contrat pour l’ouverture d’une agence postale communale.

M. Alain Gournac. Très bien !

M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l'économie. En zone de revitalisation rurale, La Poste verse aux communes qui mettent en place une agence postale communale une indemnité compensatrice mensuelle d’environ 930 euros par mois, ...

Mme Annie David. Mais pendant combien de temps ?

M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l'économie. ... dans le cadre d’un contrat signé pour une période de quinze ans renouvelable.

De plus, installer une agence postale communale, c’est aussi contribuer à développer les maisons de services publics.

Monsieur Signé, dans un département touristique comme la Nièvre, un point touristique peut même être installé à la mairie grâce à l’agence postale financée par contrat ! (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. le président. La parole est à Mme Béatrice Descamps, pour explication de vote.

Mme Béatrice Descamps. Mes chers collègues, certains d’entre vous ont-ils une agence postale communale dans leur commune ? (Murmures d’approbation.)

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. On s’est battu de longues années !

Mme Béatrice Descamps. Dans ma commune, une agence postale communale a, depuis des années, remplacé le bureau de La Poste, dont l’activité avait diminué.

Lorsque j’ai été élue maire, il y a une vingtaine d’années, le receveur des postes, qui avait un logement de fonction dans la mairie, tenait son bureau ouvert du matin au soir. Lorsqu’il est parti, le bureau de poste de ma commune est devenu dépendant de la commune voisine, qui est plus importante.

L’activité baissant, l’agence postale, qui était tenue à l’époque par des agents de La Poste, n’a bientôt plus ouvert que le matin. L’activité continuant de baisser, il a fallu choisir entre la fermeture pure et simple, la création d’une agence postale communale ou un point de contact au débit de tabac.

Le conseil municipal a opté pour une agence postale communale, qui est désormais située dans la mairie. Ses heures d’ouverture sont celles de la mairie. Comme vous, mes chers collègues, j’ai signé une convention, d’ailleurs défendue par l’Association des maires de France, qui m’assure le remboursement des trois quarts ou des quatre cinquièmes des frais restant à la charge de la commune.

M. Didier Boulaud. Quel aveu !

Plusieurs sénateurs de l’UMP. Écoutez-la !

Mme Béatrice Descamps. Il s’agit ici de mettre en évidence l’intérêt de ces agences postales communales.

À l’heure actuelle, les mairies des petites communes ne délivrent plus de copies conformes, de fiches d’état civil, ni même de passeports, car elles ne disposent pas des appareils de biométrie nécessaires.

Nos concitoyens ne se rendent plus à la mairie que pour demander un permis de construire – c'est-à-dire une fois dans leur vie ! – et pour acheter des tickets de cantine. Mais ils viennent, notamment les plus modestes, à l’agence postale communale pour envoyer ou récupérer un recommandé ou un colis et pour déposer ou retirer de l’argent. Aujourd’hui, nous connaissons nos administrés grâce à l’agence communale postale.

Selon moi, la pérennisation de ces agences est une excellente façon de défendre le service public. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. René-Pierre Signé. Elles sont privées de clients !

M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l'économie. Mais non !

M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin, pour explication de vote.

M. Martial Bourquin. Je remercie ma collègue Béatrice de l’UMP d’avoir aussi bien posé le débat.

Comment passe-t-on d’un bureau de poste de plein exercice à une agence postale communale, puis à un point Poste ? C’est simple ! Il suffit de réduire l’amplitude horaire, pour ne conserver que quelques heures d’ouverture par jour. Une fois observée une baisse de la fréquentation, on envisage la création d’une agence postale communale, qui recevra une indemnité compensatrice de 9 600 euros par an. Si cette solution paraît trop onéreuse et est refusée, un magasin de proximité se trouve alors chargé de cette tâche.

La logique adoptée est de diminuer volontairement l’activité. (Protestations sur les travées de lUMP.)

M. Alain Gournac. C’est faux !

M. Alain Fouché. C’est votre interprétation !

M. Martial Bourquin. Ne vous énervez pas, mes chers collègues !

Comme je siège dans une commission départementale de présence postale, c’est ce que je constate ! Au début, cette évolution, dont les maires, à l’instar de notre collègue Béatrice Descamps, ont parfois pris l’initiative, ne concernait que les communes rurales. Aujourd’hui, ce sont des communes de 5 000 à 9 000 habitants et des quartiers sensibles qui sont touchés.

Avec la transformation de La Poste en société anonyme, ce processus, qui est engagé depuis un certain temps, connaîtra une accélération extraordinaire. Observez ce qui s’est passé dans toutes les postes européennes ! Ces pratiques se sont généralisées, comme elles le seront en France dans l’ensemble des villes.

La Poste conservera certains centres importants, dont l’activité est rentable. Mais la plupart des bureaux de poste se transformeront en agences postales communales, lesquelles bénéficieront d’une subvention, qui disparaîtra par la suite. Ces agences seront, au final, totalement à la charge des communes. J’en suis même à me demander, mes chers collègues, si, dans certains cas, le coût des tournées des facteurs ne sera pas supporté par les collectivités locales !

M. Pierre Hérisson, rapporteur. N’importe quoi !

M. Martial Bourquin. Regardez ce qui s’est passé en Europe !

M. Pierre Hérisson, rapporteur. On n’est pas obligé de faire pareil !

M. Martial Bourquin. Le processus est engagé. Si nous votons la transformation de l’EPIC en société anonyme, il sera malheureusement irréversible.

M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l'économie. Nous allons la voter !

M. Martial Bourquin. Surtout, ce processus, qui se déploie aujourd’hui à un rythme modéré, risque de s’accélérer.

Or la présence postale est fondamentale.

M. Martial Bourquin. Le vieillissement de la population pose avec acuité la question de la proximité, y compris d’un point de vue économique. Ce texte est un véritable contresens sociologique !

Quelle contradiction entre le Grenelle de l’environnement et ce texte ! S’il est adopté, nos concitoyens seront obligés de prendre leur voiture pour aller à la poste ! Sans parler du fait que les personnes âgées sont parfois dans l’impossibilité de conduire !

Vous le savez comme moi, les facteurs jouent un rôle social essentiel, notamment dans le cadre des plans canicule.

Dans cette course à la rentabilité, le passage du facteur, y compris auprès des personnes les plus fragilisées, ne sera bientôt plus possible. À l’heure actuelle, leur parcours est chronométré.

M. Alain Gournac. Et alors ?

M. Martial Bourquin. Je ne considère pas cela comme un progrès, monsieur Gournac !

M. le ministre nous l’a dit, grâce au courrier électronique, la besace du facteur est plus légère qu’auparavant. Ce que l’on ne dit pas, c’est qu’il y a de moins en moins de facteurs, La Poste supprimant des milliers d’emplois.

Nous ne voulons pas en arriver à une telle situation. L’EPIC constitue une garantie dans ce monde libéral, …

M. Martial Bourquin. … où le chacun pour soi et la précarité gagnent du terrain. Le Secours catholique a fait hier une communication alarmante sur la situation de la pauvreté et de la précarité dans notre pays. Allons-nous aggraver cette situation ? Tel est bien l’enjeu de la présence postale ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l'économie. N’importe quoi !

M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume, pour explication de vote.

M. Didier Guillaume. Ce débat aurait davantage sa place dans le cadre de l’examen de l’article 2. Néanmoins, il a été introduit de belle façon par M. le président de la commission, dont je partage les arguments.

Toutefois, la situation que mon collègue Martial Bourquin vient de décrire est réelle. Pour une commune rurale, la création d’une agence postale communale est préférable à l’absence de toute présence postale, de même qu’il vaut mieux envisager un point de contact que rien du tout ! Nous nous battons tous en ce sens !

En tant que président, durant dix ans, de l’association des maires de mon département, je me suis battu, avec le directeur départemental des postes, pour y maintenir les points de contact, qui sont aujourd’hui au nombre de soixante-cinq.

Ce qui est en cause, c’est le délitement du service public, que mon collègue Martial Bourquin a très bien décrit.

En tant que gestionnaires, nous sommes tous conscients du fait qu’un bureau de poste dans lequel viennent trois, quatre ou cinq personnes par jour ne peut pas être ouvert toute la journée, tous les jours de la semaine.

M. Alain Gournac. Sur ce point, on est d’accord !

M. Didier Guillaume. Si les horaires d’ouverture changent tous les jours, les gens ne savent plus quand le bureau est ouvert et s’y rendent de moins en moins. Alors, on s’appuie sur les statistiques de fréquentation pour fermer le bureau de poste et ouvrir une agence postale communale.

Nous avons nous-mêmes accepté l’agence postale communale, solution qui semblait préférable au « rien du tout ». Mais, reconnaissons-le, il n’est pas logique que la municipalité paie pour le service public.

M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l'économie. Mais non !

M. Didier Guillaume. Si ! Le coût d’une agence postale communale n’est pas remboursé à 100 %. On sait très bien qu’il y a un résiduel.

M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l'économie. Mais non, il n’y a pas de résiduel !

M. Didier Guillaume. Notre collègue Béatrice Descamps l’a dit elle-même. Même si cette somme résiduelle n’est pas très importante, elle est bien réelle !

Je m’adresse à vous calmement, mes chers collègues, car je sais que nous pouvons nous retrouver sur ce sujet. Il faut le dire, nous préférons une agence postale communale, voire un point Poste, que rien du tout. Mais, reconnaissons-le, nous avons mis le doigt dans l’engrenage du délitement du service public.

Certes, nos concitoyens estiment qu’il est plus facile de récupérer un colis parmi des boîtes de conserve, car l’amplitude horaire du magasin est plus grande. Comment feront les gens pour effectuer des opérations réclamant une certaine confidentialité, notamment retirer ou déposer de l’argent ? Comment feront les personnes âgées qui habitent des villages reculés et qui ne peuvent plus conduire ?

Au bout du compte, Martial Bourquin l’a très bien dit, contrairement aux exigences fixées par le Grenelle de l’environnement, on éloigne les bureaux de poste de nos concitoyens, ce qui rend indispensable l’utilisation d’un véhicule. Quel progrès !

En tant qu’élus locaux, nous devons tenir le même discours au Parlement et dans nos départements.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Cela s’adresse à vous, chers collègues de la majorité !

M. Didier Guillaume. Oui, nous œuvrons pour l’évolution de La Poste dans nos départements ; oui, nous négocions avec le directeur départemental de La Poste pour maintenir nos points de contact ; oui, nous nous efforçons de maintenir des agences postales communales ; oui, nous nous battons parfois aussi pour ouvrir des points Poste : telle est, nous pouvons l’affirmer en tant que gestionnaires et élus locaux, la réalité du service public.

Dans le cadre de l’EPIC, nous en sommes déjà là ! Le jour où ce statut disparaîtra au profit de celui de société anonyme, que deviendra cet équilibre, face au risque d’une privatisation ?

M. Alain Gournac. C’est vous qui le dites !

M. Didier Guillaume. Nous ne sommes pas des oiseaux de mauvais augure. Observant simplement ce qui se passe sur le terrain, nous donnons l’alerte.

Monsieur Gournac, vous le savez très bien, nous nous battons tous, dans les territoires, pour que le maillage soit le meilleur possible.

M. Alain Fouché. Personne ne veut privatiser pour privatiser !

M. Didier Guillaume. Sur ce point, aucun procès d’intention ne peut être fait. Que l’on soit de gauche ou de droite, chacun, sur le terrain, prend ses responsabilités.

La transformation de l’EPIC en société anonyme, je le répète, posera, à terme, le problème de l’implantation de La Poste et du maillage territorial.

M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l'économie. Le projet de loi prévoit 17 000 points de contact !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Pierre Hérisson, rapporteur. J’ai déjà eu l’occasion de le dire hier, si nous voulons avoir un débat constructif, nous devons examiner les sujets article par article. M. Guillaume vient de le rappeler, cette discussion aurait dû intervenir sur l’article 2.

Aujourd’hui, La Poste a le statut d’EPIC. Certes, vous pouvez critiquer à loisir les méthodes de management de cet établissement public, mais vous ne pouvez pas contester le fait que le nombre d’agences postales communales est passé de 900 en 2002 à 5 000 à la fin de l’année 2009. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)

Ainsi, 5 000 conseils municipaux ont accepté, après délibération, sans contrainte aucune, de créer une agence postale communale, en s’appuyant sur les résultats des enquêtes de satisfaction.

Selon vous, nos concitoyens ont-ils le droit d’affirmer leur préférence pour un bureau de poste, une agence postale communale ou un relais Poste ?

En ma qualité de président de l’Observatoire national de la présence postale – un organisme au sein duquel siègent des élus de tous bords, qui connaissent parfaitement le dossier –, j’ai suivi le processus de modernisation de l’établissement public et je peux affirmer, en toute bonne foi, qu’il s’est plutôt bien déroulé.

Ainsi que le préconisait la loi du 20 mai 2005, le dialogue a eu lieu dans les commissions départementales de présence postale territoriale. Afin que nul ne soit contraint, il était possible de prévoir un statu quo et, en cas de besoin, de faire appel au représentant de l’État dans le département pour qu’il engage une médiation.

Alors que nous sommes passés de 900 à 4 600 agences postales communales, je crois savoir que le statu quo et la médiation du préfet n’ont été sollicités que dans moins de 1 % des cas.

Pour l’essentiel, la modernisation de l’EPIC a donc d’ores et déjà été réalisée.

M. René-Pierre Signé. Vous l’avez détruit !

M. Pierre Hérisson, rapporteur. Quant au problème de la cartographie de la présence postale territoriale, là non plus, il n’existe pas de contraintes. Des négociations sont conduites, des conciliations peuvent avoir lieu, mais, finalement, la seule chose qui doit nous guider, c’est la satisfaction de l’électeur-citoyen-contribuable.

Vous nous taxez de vouloir imposer un changement : nous ne l’imposons pas…

M. David Assouline. Vous l’accompagnez !

M. Pierre Hérisson, rapporteur. … ; nous en débattons et, surtout, nous cherchons la formule susceptible de satisfaire l’ensemble de la population. (Applaudissements sur les travées de lUMP – M. le président de la commission applaudit également.)