M. Roland Courteau. Exactement !

M. Michel Teston. Dans cette perspective, elle doit recevoir les moyens nécessaires. Je rappelle d'ailleurs, chers collègues de la majorité, que nous avons fait voter hier, contre l’avis de la commission et du Gouvernement, un amendement visant à assurer le financement intégral et pérenne de ces quatre missions de service public !

Nous sommes donc farouchement opposés à l’adoption de cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.

M. Daniel Raoul. Peut-être suis-je un peu naïf, mais je suis surpris de voir que la majorité, à travers cet amendement, ne fait qu’apporter de l’eau à notre moulin, à nous qui dénonçons la dégradation du service public dans nos communes.

M. Daniel Raoul. Je suis très étonné que M. Cornu ait eu le courage de déposer un tel amendement. J’ignore s’il témoigne ainsi de sa propre naïveté ou de ses dons de voyance… Je vous laisse juges, mes chers collègues, mais, connaissant M. Cornu, j’imagine qu’il fait plutôt preuve de clairvoyance et qu’il est en train de parer au feu, c’est-à-dire de trouver des solutions de repli en créant une quatrième catégorie de points de présence postale.

M. Gérard Cornu. Mais non !

M. Daniel Raoul. Monsieur le ministre, vous avez évoqué hier le rôle du maire en tant qu’agent de l’État. On peut comprendre, à la limite, l’implication du maire s'agissant des agences postales communales – le maire exerce là une double mission, la sienne propre et celle d’un agent public par délégation, son personnel étant mis à disposition –, même si un risque de contentieux existe déjà dans ce cas, je tiens à le souligner.

Dans les points de présence postale, aucun agent de l’État n’intervient : c’est l’épicier, le boulanger ou le tenancier du bar, si cher à M. Desessard (Sourires) qui animera le point Poste. Mais on est en droit de s’interroger tout de même sur l’étendue de la responsabilité juridique d’une personne privée ainsi chargée d’un service public.

Alors, a fortiori, mes chers collègues, dans le cas d’un point de retrait tel que proposé par l’amendement n° 186 rectifié ter, je vous laisse imaginer les contentieux qui naîtront si, par exemple, un colis n’est pas livré ou est livré en mauvais état !

Monsieur Cornu, je ne voudrais pas noircir trop le tableau, mais proposer la création d’une quatrième catégorie de présence postale me paraît indécent à l’heure où tous, quelle que soit notre appartenance politique, nous nous efforçons de défendre le service public postal...

Je ne comprends pas ce qui vous anime, à moins que vous n’en soyez réduit à jouer le pompier de service, sachant que les problèmes se poseront immanquablement. (M. Gérard Cornu proteste vigoureusement.)

M. Bruno Sido. Quelle mauvaise foi !

M. le président. La parole est à Mme Françoise Henneron, pour explication de vote.

Mme Françoise Henneron. Chers collègues de l’opposition, je crois que nous ne sommes pas sur la même longueur d’onde ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

Mme Odette Terrade. C’est sûr !

M. Roland Courteau. Ajoutez des antennes-relais ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)

Mme Françoise Henneron. Je prendrai l’exemple de la commune dont je suis l’élue, qui compte 1 700 habitants mais où il n’y a pas de bureau de poste, ni d'ailleurs aucune autre implantation postale.

M. Roland Courteau. À qui la faute ?

Mme Françoise Henneron. Je ne vois vraiment pas pourquoi nous ne pourrions pas y créer, grâce à cet amendement, un point de dépôt où les gens pourraient venir retirer leurs colis ou leurs lettres recommandées !

Mme Éliane Assassi. Et que se passera-t-il quand on aura tué les communes ?

Mme Françoise Henneron. Laissez-moi terminer, madame Assassi !

M. Alain Gournac. Laissez parler les autres ! Faites preuve de tolérance !

Mme Françoise Henneron. Cet amendement serait tout à fait adapté aux circonstances : les personnes qui, après une journée de travail, rentrent chez elles le soir et trouvent dans leur boîte aux lettres un petit message leur indiquant qu’elles ont reçu un colis ou une lettre recommandée, ne seraient plus obligées de parcourir des kilomètres pour aller les retirer !

C’est cela, le service public, et je ne comprends pas l’attitude de nos collègues de l’opposition ! (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. le président. La parole est à M. Michel Boutant, pour explication de vote.

M. Michel Boutant. Je vais tenter de parler sans trop m’enflammer.

M. Bruno Sido. Mais en vous dépêchant !

M. Michel Boutant. J’observe quelque analogie entre un certain nombre de replis de la sphère publique et l’accueil qui est réservé à cet amendement.

Si je remonte un peu dans le temps, je me souviens que les opérateurs de téléphonie sans fil devaient couvrir la totalité du territoire… Qu’en est-il aujourd'hui ? Si les départements ne prenaient pas à leur charge l’installation de relais supplémentaires, cet objectif serait hors d’atteinte !

Je pourrais aussi évoquer le haut débit,…

M. Bruno Sido. Ce ne sont pas des services publics !

M. Michel Boutant. … pour lequel la situation est la même.

En ce qui concerne La Poste, de bureau de poste en point relais et de point relais en point de retrait, c’est le principe même de la distribution du courrier qui est en train d’être remis en cause !

Car, quand les points de retrait seront en passe d’être mis en place, à qui fera-t-on appel dans ces communes de dix-huit ou trente-deux habitants qu’évoquait M. le ministre voilà un instant ? Comme ces communes n’ont en général plus de commerces, ce sera donc aux mairies d’œuvrer, elles qui ne sont ouvertes qu’une ou deux demi-journées par semaine, et nous ne serons pas plus avancés !

Et que demandera-t-on ensuite ? Que le personnel communal aille distribuer le courrier ? Et ainsi, par glissement successif, on aura en quelque sorte exonéré La Poste des obligations inhérentes à sa mission, pour les transférer aux communes. Or celles-ci, je vous le signale en passant, chers collègues, auront de moins en moins de moyens pour exercer leurs missions et leurs compétences, compte tenu des textes que nous examinerons dans quelques semaines ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Gérard Cornu, pour explication de vote.

M. Gérard Cornu. Certains orateurs soupçonnent derrière cet amendement je ne sais quelle machination. Or il n’y a là que du pragmatisme ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

Chers collègues, examinez bien cette disposition : elle ne vise que « les communes ne disposant pas de point de contact au sens du I du présent article ».

Mme Odette Terrade. C’est tout le problème !

M. Gérard Cornu. Quelles sont les collectivités concernées ? Ce sont celles qui n’ont ni bureau de poste, ni agence postale communale, ni même relais Poste, puisqu’il n’y a pas de commerçant ! Pour elles, cette disposition serait véritablement un « plus » ! (Mme Françoise Henneron approuve.)

Nous voulons faire en sorte que, dans nos villages, nos concitoyens ne soient pas obligés de parcourir dix ou quinze kilomètres pour aller faire la queue à la poste le samedi matin, parce que, toute la semaine, ils quittent leur domicile le matin et n’y rentrent que le soir !

Je suis seulement pragmatique, parce que je m’inspire de situations que j’ai vécues, de même que Mme Henneron, qui a cosigné cet amendement.

Dans la commune dont je suis le maire, et qui compte 850 habitants, j’ai voulu implanter une agence postale communale, mais cela n’a pas été possible, voilà tout. Et comme certains de nos concitoyens souhaitaient pouvoir retirer leurs lettres recommandées à la mairie, qui, elle, est ouverte, j’ai souhaité que cette solution, tout de même beaucoup plus simple, leur soit offerte. Or La Poste ne pouvait s’engager dans cette voie parce qu’il fallait pour cela une modification législative...

C’est à partir de ce cas concret que j’ai rédigé cet amendement. On affirme souvent qu’il est nécessaire de se servir de son expérience locale pour légiférer ; c’est pour cette raison, je le dis au passage, qu’il est important que les parlementaires exercent un mandat local.

Mme Éliane Assassi. Cela n’a rien à voir avec notre sujet !

M. Gérard Cornu. Cet amendement ne vise qu’à traduire dans la loi l’expérience locale que je partage avec les maires des 22 000 communes de France qui, aujourd'hui, sont privées de toute solution.

Au surplus, le conseil municipal n’est pas obligé de s’engager dans cette voie. Il en a la possibilité s’il souhaite rendre service aux administrés.

J’espérais qu’un tel amendement serait consensuel. Je prends acte du refus de nos collègues de l’opposition de permettre aux 22 000 communes de France ne disposant pas d’un point de contact postal de se doter d’un accès au courrier. Je le regrette, mais, en tout cas, ils auront ainsi montré très clairement qu’ils ne veulent pas faciliter la vie de ceux de nos concitoyens qui vivent sans présence postale ! (Applaudissements sur les travées de lUMP. – Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. le président. La parole est à M. Jean-François Voguet, pour explication de vote.

M. Jean-François Voguet. Il est tout de même extrêmement paradoxal de demander aux collectivités territoriales d’être encore plus présentes dans le service public,…

M. Gérard Cornu. Celles qui le souhaitent !

M. Jean-François Voguet. … alors que, dans quelques semaines, nous serons amenés, ici même, à travailler sur la suppression de la taxe professionnelle, qui représente un quart de leurs ressources !

Paradoxal, oui, car, dans le même mouvement, nous allons être amenés à débattre de la réforme des collectivités territoriales, qui a pour unique but de réduire la dépense publique.

Le Premier ministre s’est exprimé clairement à ce sujet : « Les collectivités locales doivent se mettre au diapason de l’État et faire des économies budgétaires. Il est insupportable de constater que les dépenses des collectivités locales augmentent alors que celles de l’État diminuent. »

M. David Assouline. L’État est dix fois plus endetté !

M. Jean-François Voguet. Le Premier ministre conclut : « Il faut encore faire baisser les dépenses publiques. »

J’en prends à témoin les nombreux maires qui siègent ici : les collectivités locales sont à bout de souffle. Or le Gouvernement leur demande de charger encore davantage leurs budgets, alors qu’elles sont confrontées à des difficultés de plus en plus grandes et qu’elles ne peuvent déjà plus répondre aux besoins essentiels de la population, notamment de ceux qui souffrent le plus.

Ce que vous souhaitez est impossible, cher collègue, notamment pour les petites collectivités locales ! Il y a donc une certaine incohérence, pour ne pas dire plus, à proposer un dispositif qui n’est pas tenable en l’état.

M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin, pour explication de vote.

M. Martial Bourquin. Madame Henneron, vous avez déploré l’absence de bureau de poste dans votre ville de 1 700 habitants. Je suis d’accord avec vous et je partage votre indignation : c’est profondément inadmissible ! (M. Jean Desessard applaudit.)

Nous sommes là, vraiment, au cœur du débat.

Ces anomalies sont impensables. Regardez l’évolution sociologique de notre société : pourrons-nous longtemps tolérer l’existence de véritables « zones blanches » postales ?

La solution de Gérard Cornu, pour qui j’ai beaucoup d’amitié, n’est pas pertinente. Ce n’est pas en créant une nouvelle catégorie de points de contact que nous réglerons le problème. Peut-être que, dans certaines communes, des points de contact suffiront. Mais peut-être que, dans d’autres, il faudra un bureau de poste de plein exercice ou des solutions spécifiques. Ce qui est sûr, c’est que les zones blanches ne doivent plus exister.

Madame Henneron, je redoute que votre commune ne soit plus un cas isolé et que les exemples semblables à celui que vous évoquez ne se multiplient.

Dans ma ville, qui compte 15 000 habitants, se trouve un quartier sensible de 4 000 habitants. Si je n’avais pas racheté des locaux pour permettre l’installation de La Poste, ce quartier ne compterait sans doute pas aujourd'hui de bureau de poste.

M. Martial Bourquin. Cela ne peut plus durer !

Lors de la discussion générale, Michel Teston a réclamé une évaluation du coût de la présence postale et a demandé à l’État de prendre toutes ses responsabilités : il faut que, dans votre ville, madame Henneron, comme dans certains quartiers sensibles ou dans certaines communes rurales, une présence postale soit systématiquement assurée, sous quelque forme que ce soit.

À l’inverse de Gérard Cornu, je ne pense pas que les points de contact soient la seule solution. On peut envisager, outre bien sûr l’installation de bureaux de plein exercice, l’implication, avec l’avis des maires, des maisons des services publics. De toutes les manières, gardons-nous d’inscrire aujourd'hui dans la loi que les points de contact sont la solution à tous les problèmes. Pour ma part, je n’ai pas envie que, demain, des bureaux de plein exercice deviennent des points de contact. Adopter cet amendement reviendrait à ouvrir cette porte !

Encore une fois, chers collègues, nous sommes au cœur du débat ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. le président. La parole est à M. Daniel Dubois, pour explication de vote.

M. Daniel Dubois. Monsieur Boutant, je suis entièrement d’accord avec vous : il ne devrait plus exister de zones blanches en téléphonie mobile dans notre pays. C’est une évidence.

Mais qui a vendu les fréquences de téléphonie mobile ? (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)

M. Bruno Sido. Et à quel prix ?

M. Daniel Dubois. Oui, qui les a vendues à un prix dérisoire ?

M. Didier Guillaume. Cela n’a rien à voir ! Ce n’est pas le sujet !

M. Daniel Dubois. Bien sûr que si ! Vous avez la mémoire courte !

M. Jean Desessard. Quel rapport ?

M. Daniel Dubois. Laissez-moi vous expliquer. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

Au moment où les fréquences de téléphonie mobile ont été vendues, il aurait suffi de prévoir cette condition dans le cahier des charges, puisqu’il s’agissait d’un appel d’offres. C’est ce qu’ont fait la Belgique et les pays voisins : ils l’ont imposée et cela s’est fait sans difficultés. Quand vous êtes en voiture et que vous téléphonez avec votre portable, vous n’avez aucun problème de réseau en Belgique ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

Mme Odette Terrade. C’est interdit, le téléphone au volant !

M. David Assouline. Avez-vous un kit « mains libres » ?

M. Daniel Dubois. Si la France connaît ces fameuses zones blanches, c’est tout simplement parce que le Premier ministre d’alors, Laurent Fabius, avait besoin d’argent et qu’il n’a pas imposé de contraintes aux opérateurs. Voilà ce qui explique ce « gruyère français », mes chers collègues ! (Vives exclamations sur les mêmes travées.)

M. Alain Gournac. C’est vrai !

M. Daniel Dubois. Il faut avoir un peu de mémoire ! (Très bien ! sur les travées de lUMP.)

Et qui a exigé des antennes-relais afin de couvrir les zones blanches et de régler les problèmes que vous aviez laissés pendants ? Pas vos équipes, mais bien celles des gouvernements suivants !

M. le président. La parole est à M. Michel Bécot, pour explication de vote.

M. Michel Bécot. Je soutiendrai l’amendement de Gérard Cornu, dont on a sans doute mal saisi l’enjeu.

Mme Odette Terrade. Oh si, nous avons compris !

Mme Éliane Assassi. Nous avons même très bien compris !

M. Michel Bécot. Il concerne les petites communes qui n’auront jamais de points Poste.

La disposition ici proposée apportera un peu plus de sécurité aux personnes qui, parce qu’elles travaillent, ne peuvent retirer leurs colis dans la journée. C’est tout !

M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote.

Mme Éliane Assassi. Chers collègues de la majorité, j’espère que vous vous souviendrez de ce débat et des propos de Jean-François Voguet lorsque nous aborderons ici même la réforme des collectivités territoriales et la disparition du fameux « millefeuille institutionnel » : les communes que vous évoquez en seront les premières victimes !

Mme Isabelle Debré. Vous remarquerez que nous ne vous avons pas interrompue !

Mme Éliane Assassi. Cela m’arrive aussi !

M. le président. La parole est à M. Bruno Sido, pour explication de vote.

M. Bruno Sido. Cet amendement me semble tout à fait intéressant. Moralement, je me considère comme l’un de ses cosignataires !

Mes chers collègues, la comparaison que vous établissez avec les services de téléphonie mobile ou l’Internet n’est pas pertinente, car, faut-il le rappeler, ce ne sont pas des services publics.

M. Daniel Raoul. Pas encore !

M. Bruno Sido. Or La Poste est un service public, sans contestation possible.

Vous feignez d’ignorer que les mairies peuvent être ouvertes sans personnel. Heureusement, d’ailleurs, que, dans nos petites communes rurales, le maire ouvre lui-même la mairie et gère lui-même son courrier, courrier qu’il a d’ailleurs reçu chez lui, je le signale !

Il faut savoir ce qui se passe au fin fond de nos campagnes. Certaines communes n’ont en effet qu’une dizaine d’habitants ; j’en connais une dans mon département qui n’en compte que neuf !

Il ne me semblerait pas du tout anormal que le facteur ne vienne pas pour rien et puisse déposer le courrier quelque part. C’est pour cette raison d’ailleurs que j’aurais préféré le verbe « organiser » en lieu et place du verbe « créer », qui figure dans l'amendement. Cela pourrait faire l’objet d’un sous-amendement.

Cet amendement ne précise pas que le point de retrait est la mairie. Ce peut être ailleurs : chez un particulier, chez le maire, ou autre. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. Bruno Sido. Avoir la possibilité d’aller chercher un paquet ou un recommandé après une journée de travail créerait ce lien social que nous cherchons à maintenir dans nos petites communes.

Monsieur Bourquin, vous avez raison de vous étonner qu’une commune de 1 500 habitants ne compte pas de bureau de poste et je vous félicite d’avoir acheté des locaux pour permettre l’installation d’un bureau de poste dans l’un des quartiers de votre ville.

Cependant, là encore, vous feignez d’ignorer les conditions dans lesquelles les postes ont été créées en milieu rural, voilà plus d’un siècle : c’est bien le fruit de la volonté politique des communes, qui ont mis à la disposition les bâtiments et les infrastructures nécessaires.

M. Bruno Sido. Voilà l’histoire de La Poste ! Il faut à la fois la volonté nationale de permettre la distribution du courrier jusqu’à l’échelon local le plus petit et la volonté locale des communes d’apporter le meilleur service à leurs habitants. Cet amendement propose une version moderne, si je puis dire, de dispositifs qui existaient voilà près de deux siècles.

Pour toutes ces raisons, je voterai des deux mains cet amendement.

M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.

M. David Assouline. Dans ce débat, des rapprochements ont été tentés avec la couverture du territoire par la téléphonie mobile.

Monsieur Dubois, vous avez comparé la situation de la France et celle de la Belgique. Une telle démarche montre bien que vous ne connaissez pas plus la topographie de la Belgique que celle de la France, ou bien alors vous mélangez tout !

M. Daniel Dubois. Je suis voisin !

M. Adrien Gouteyron. Il la connaît certainement mieux que vous !

M. David Assouline. Et même ceux qui ne connaissent pas la Belgique doivent malgré tout se rappeler cette chanson où il est question du « plat pays qui est le mien »...

L’installation d’antennes est beaucoup plus facile et moins onéreuse dans un « plat pays » que sur un territoire comme la France, où se succèdent vallons, montagnes, plaines, collines et plateaux. Face à cette variété des reliefs, il faut réaliser des investissements pour couvrir tout le territoire.

Dans les zones de montagne, par exemple, l’installation des pylônes est nécessaire, mais difficile et peu rentable. Cela suppose un investissement énorme qui dissuade souvent les opérateurs. (Protestations sur les travées de lUMP.)

Monsieur le président, il faut que je puisse m’exprimer tranquillement !

M. Bruno Sido. Vous êtes hors sujet !

M. David Assouline. Pas du tout ! Je réponds à M. Daniel Dubois, à qui vous n’avez pas reproché d’être hors sujet !

Je suis donc dans le sujet, et j’y reste !

Le combat pour la couverture universelle et la disparition des zones blanches a été notamment mené pendant longtemps par Michel Teston.

M. Bruno Sido. Il n’était pas le seul !

M. David Assouline. On ne peut pas comparer la contractualisation de l’État avec La Poste, qui est un service public, et avec des opérateurs qui appartiennent au secteur privé.

Pour autant, s’agissant de la téléphonie mobile, nous ne considérons pas que les opérateurs peuvent agir à leur guise sous prétexte qu’ils relèvent du secteur privé. Étant donné l’importance qu’a prise la téléphonie mobile dans la vie quotidienne, le fait de ne pas y avoir accès est une vraie atteinte au principe d’égalité.

Aussi Michel Teston a-t-il demandé, et à plusieurs reprises, que la téléphonie mobile soit un service universel reconnu, pour que l’on puisse arriver à une couverture égale du territoire. À chaque fois, ce fut une fin de non-recevoir.

Alors il est inutile de stigmatiser les gouvernements de gauche : ils ont accordé des licences mais, parce qu’il ne s’agit ni d’un service public ni d’un service universel, ils n’ont pas pu imposer aux opérateurs la couverture totale et la résorption des zones blanches.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Pierre Hérisson, rapporteur. Mes chers collègues, cela fait maintenant quarante-deux heures que nous débattons. Le projet de loi ne contient aucune disposition relative au sujet qui vous enflamme. Je m’étonne que la question de savoir si ce qui se pratique en milieu rural depuis cent cinquante ans doit être consacré ou non dans la loi déchaîne les passions. En milieu rural, cela fait belle lurette – cela date même d’avant la Première Guerre mondiale - que les colis sont déposés au bistrot du coin ou chez un commerçant.

M. Pierre Hérisson, rapporteur. Nous n’allons pas passer l’après-midi sur cette question, alors qu’il reste 352 amendements à examiner avant lundi soir, minuit. Je suis prêt à tout entendre, mais, à un moment donné, il faut se rappeler pourquoi nous transposons une directive européenne, pourquoi la majorité a transformé La Poste en société anonyme.

Nous aurons tout à l’heure un débat extrêmement important sur le financement du fonds de péréquation, qui doit être abondé à plus de 150 millions d'euros en moyenne chaque année et qui, pour l’instant, est déjà financé à hauteur de 137 millions d'euros. J’espère que nous trouverons un compromis sur ce sujet.

Donc, mes chers collègues, votons cet amendement, et enchaînons ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Christian Estrosi, ministre. Je remercie M. le rapporteur de son intervention. Alors que nous examinons la réforme postale, il n’y a pas lieu, comme le font certains, d’évoquer la téléphonie mobile…

M. David Assouline. Ce n’est pas nous !

M. Didier Guillaume. C’est eux, à droite !

M. Adrien Gouteyron. Si, c’est vous !

M. Bruno Sido. C’est vous, à gauche !

M. Christian Estrosi, ministre. … qui plus est, avec de faux arguments.

M. Sido est sans doute plus que d’autres au fait de la question, car il a été l’un des premiers à mettre en œuvre une grande politique d’aménagement du territoire.

Non, monsieur Assouline, la couverture des zones blanches n’a rien à voir avec les problèmes que posent les montagnes, c’est une question de volontarisme politique ! La couverture des zones blanches ne relève pas de la compétence de l’État, la téléphonie mobile n’étant pas un service public.

Je rappelle que c’est parce que nous avons hérité de 3 000 zones blanches que nous avons passé un accord – je le sais, c’est moi qui l’ai signé – avec les trois opérateurs de téléphonie mobile. Aux termes de cet accord, l’État s’est engagé à financer les deux tiers de la couverture des 3 000 zones blanches, les opérateurs, le tiers restant. Ainsi le relais de M. Patriat que nous évoquions l’autre soir a-t-il été financé selon les modalités prévues dans cet accord : deux tiers par l’État, un tiers par les opérateurs. (M. Bruno Sido acquiesce.)

Vous connaissez bien cette question, monsieur Sido, vous qui avez pris de nombreuses initiatives dans ce domaine.

M. Bruno Sido. Tout à fait !

M. Christian Estrosi, ministre. J’ai inauguré avec vous des installations de la même génération.

M. Bruno Sido. En effet !

M. Christian Estrosi, ministre. Ce partenariat entre les opérateurs et l’État n’a rien à voir …

M. David Assouline. Vous n’avez rien compris à ce que nous avons dit !

M. Christian Estrosi, ministre. … avec la réforme du grand service public qu’est La Poste.

Je le dis à tous les parlementaires de l’Union centriste et de l’UMP, l’amendement de M. Cornu est légitime, et le Gouvernement a décidé sur ce sujet de s’en remettre à la sagesse de la Haute Assemblée.

Passons maintenant à l’étape suivante, monsieur le président – le vote –, puis reprenons notre débat sur l’avenir de La Poste pour apporter des réponses concrètes aux questions qui se posent à cet égard. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. Alain Gournac. Allez, passons au vote !

M. le président. Le débat ayant été relancé, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, la parole est à M. Didier Guillaume, pour explication de vote. (Exclamations sur les travées de lUMP.)

M. Didier Guillaume. Je partage totalement l’avis de M. le rapporteur.

Pour les villages du département de la Drôme, il n’est pas besoin d’inscrire dans la loi la possibilité pour les communes de créer des points de retrait des objets postaux, de fait, ils existent déjà, mes chers collègues ! Je ne connais pas un village dans lequel le facteur ne laisse pas volontairement les colis à une mamie ou, comme cela se fait chez moi, à la personne qui a la clé de l’église. Et c’est pareil partout !

Je constate simplement pour m’en étonner devant vous, chers collègues, qu’à chaque fois que nous proposons un dispositif novateur pour régler tel ou tel problème, on nous oppose un refus, alors qu’ici on s’apprête à voter un amendement visant à consacrer dans la loi ce qui se pratique déjà sur le terrain sans problème. Non seulement cela ne relève pas de la loi, mais encore nous risquons de mettre le doigt dans un engrenage et d’obliger à terme toutes ces mairies à ouvrir des points de retrait des objets postaux.

Je le répète, je partage la position de M. le rapporteur sur cette question. La distribution des colis se fait sans problème dans tous les villages aujourd'hui. Laissons donc les facteurs, les petits commerçants et les mairies se débrouiller, car tout se passe très bien de cette façon !