M. Guy Fischer. On est d’accord !

M. Nicolas About. Pour ce qui concerne l’amendement relatif au délai de choix pour l’attribution de la majoration parentale d’assurance vieillesse, nous ne pouvons que nous réjouir de voir l’amendement reprendre la position du Sénat.

En conclusion, même si, sur des points ponctuels, la CMP apparaît décevante, elle nous semble globalement positive. Et, dans la perspective du rendez-vous du début de l’année sur la dette sociale, l’immense majorité du groupe votera ce texte d’attente. (Applaudissements au banc des commissions. – M. Marc Laménie applaudit également.)

M. Yves Daudigny. Texte décevant !

M. le président. La parole est à M. Bernard Cazeau.

M. Bernard Cazeau. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission, mes chers collègues, la commission mixte paritaire n’a pas manqué d’intérêt : quelques imprécisions ont pu être clarifiées, comme vous l’avez souligné, monsieur le rapporteur, et quelques points ont été améliorés.

Toutefois, madame la ministre, monsieur le ministre, on peut regretter le peu de cas que vous faites de votre majorité en présentant in fine quelques amendements qui me paraissent à la limite de la polémique, et, par là même, le peu de cas que vous faites du Parlement ! Cela devient, il est vrai, une habitude de votre gouvernement...

Nos débats qui, il faut le dire, étaient de bonne tenue, grâce peut-être à nos collaborateurs en général,...

M. Guy Fischer. C’est surtout les collaborateurs !

M. Bernard Cazeau. ... sont devenus, quant aux résultats, désuets au regard des véritables enjeux du PLFSS.

Durant nos discussions, en effet, le tabou financier n’a pas été levé. L’omerta gouvernementale qui interdit de poser les questions qui fâchent a permis de mettre au pas les orateurs le plus intrépides ; n’est-ce pas, monsieur Vasselle ?

M. Nicolas About. Pas de provoc ! (Sourires.)

M. Guy Fischer. Il n’a pas parlé des 170 milliards d’euros !

M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission mixte paritaire. Ne me provoquez pas, monsieur Cazeau !

M. Bernard Cazeau. Même d’éminents sénateurs de la majorité, pourtant ô combien vindicatifs à l’ouverture des débats, ont fini par sombrer, vous l’avez montré tout à l’heure monsieur About, dans un mutisme de bon aloi.

Au fil des jours, dans l’attitude de la majorité, la combativité constructive a cédé sa place à une passivité complice. Nos ministres seraient-ils meilleurs que vous ? Là est peut-être la raison !

Pourtant, la situation est dramatique. Nous vivons un rythme de dégradation des comptes sociaux sans commune mesure avec ce que nous avons connu dans le passé : de 10,2 milliards d’euros en 2008 à 30,6 milliards d’euros en 2010. Nous étions d’ores et déjà déficitaires de 10 milliards d’euros par an avant la crise ; nous voici trois fois plus déficitaires au sortir de celle-ci !

Certes, monsieur le ministre, l’effondrement des recettes a beaucoup pesé dans cette évolution. Dont acte ! Nous avons entendu cet argument de circonstance sur tous les modes. Mais il cache une vérité plus cruelle que nous connaissons tous et toutes : le dérapage conjoncturel s’est transformé en un déficit structurel, vous l’avez d’ailleurs tout à fait admis.

Mes chers collègues, nous mettrons des années à atteindre un niveau de recettes comparable à celui de la période écoulée, même en acceptant les prévisions béates du Gouvernement en matière de croissance.

La stabilisation qu’on nous promet repose, en effet, sur des hypothèses plus qu’aventureuses. Donnez-nous un seul institut de prévision qui valide une croissance annuelle de 5 % de la masse salariale à compter de 2011, monsieur Woerth !

M. Guy Fischer. Ce sont des mensonges !

M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission mixte paritaire. Des hypothèses volontaristes !

M. Bernard Cazeau. Je n’ai pas dit cela, monsieur Fischer ! Il rêve, ce n’est pas pareil !

À la fin des années quatre-vingt-dix, en pleine expansion, la masse salariale augmentait de 4 % par an. Comment voulez-vous qu’elle progresse plus rapidement en pleine stagnation ? À ce degré d’optimisme, vos perspectives relèvent davantage du présage que de la prospective !

Ces prévisions me rappellent les engagements quelque peu imprudents d’un gouvernement qui, à la fin de l’année 2008, nous promettait le « retour à l’équilibre pour 2012 ». On voit ce qu’il en est aujourd’hui.

Mais il y a pis ! Même en reprenant vos hypothèses « hypervolontaristes », comme le disait poliment l’un de nos collègues, nous accumulerons au moins 135 milliards d’euros de déficit entre 2009 et 2013. Cette somme colossale viendra s’ajouter à la dette sociale actuelle !

Bref, nous sommes en passe de doubler la dette sociale et l’on nous répond avec le plus grand calme qu’il faut patienter, car il ne faudrait pas courir le risque « d’hypothéquer la sortie de crise ». Faut-il pour autant hypothéquer la sécurité sociale ? Nous aimerions savoir ce qui est préférable : hypothéquer la sortie de crise ou la sécurité sociale ?

L’idée qui sous-tend votre raisonnement est caricaturale. Vous considérez qu’il est préférable de cacher la vérité budgétaire aux Français pour éviter qu’ils n’anticipent d’éventuelles hausses d’impôts dans l’avenir et se réfugient dans une épargne de précaution. « Dormez tranquilles, braves gens ! ». Voilà une vision bien réductrice de la perspicacité de notre peuple.

Notre conviction est tout autre, madame la ministre, monsieur le ministre. Nous considérons que les Français sont parfaitement lucides sur les déséquilibres qui fragilisent la sécurité sociale. Nous considérons qu’ils savent que nos comptes publics sont déstabilisés comme jamais. C’est précisément cela qui les inquiète et c’est en partie cela qui retarde la reprise. À juste raison, ils craignent pour l’avenir de la protection sociale ; la méfiance, entretenue par un chômage galopant, s’installe dans le pays.

Comment voulez-vous que la consommation des Français reprenne si ces derniers craignent une hausse de leur assurance maladie complémentaire, des soins moins remboursés, une retraite détériorée ou des frais aggravés de dépendance de l’un de leurs parents ? Ils se replient obligatoirement sur eux-mêmes !

Monsieur le ministre du budget, la compétitivité de l’économie, ce n’est pas seulement le taux des prélèvements obligatoires, c’est aussi la confiance de la société dans ses institutions de prévoyance sociale.

Pour redonner confiance, nous vous avons demandé de stopper l’hémorragie, de tenter d’endiguer la propagation des déficits, de prendre des mesures courageuses. Mais votre entêtement est irréductible. Au final, dans ce budget de la sécurité sociale, il n’y aura rien de significatif en faveur du rétablissement des comptes !

Un peu de reprise de dette, je vous l’accorde, mais aucune action efficace sur les recettes (Il n’y a pas de reprise ! au banc des commissions), un relèvement historique du plafond de l’ACOSS à 65 milliards d’euros, aucune décision quant au taux de la CRDS malgré MM. Jégou et Vasselle ! Bref, c’est la fuite en avant !

Je dirai peu de choses des perspectives d’économies...

M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission mixte paritaire. On va travailler dans le cadre d’une commission pour trouver des solutions !

M. Bernard Cazeau. ... qui reposent sur des affirmations que l’on peine à commenter sans sourire : des lendemains qui chantent avec un hôpital coûtant moins cher, parce qu’on changerait son mode de tarification ; des soins de ville qui n’augmenteraient presque pas, alors que des négociations tarifaires sont en cours, et vous le savez, madame la ministre ; des prescriptions de médicaments spontanément économes, etc.

Tout cela sent quelque peu le réchauffé !

J’ai bien lu les propositions de M. Woerth dans le journal Le Monde. Mais, monsieur le ministre, vous oubliez une chose dans vos prescriptions, c’est que l’évolution de la société est tout autre !

On n’est plus dans les années soixante, où les gens ne se soignaient pas ou le faisaient seulement in fine. Aujourd’hui, ils demandent des soins.

On n’est plus non plus dans les années quatre-vingt, où ils avaient peur d’aller à l’hôpital, car c’était pour eux synonyme de début de la fin.

C’est fini tout cela ! Aujourd’hui, ils anticipent et vont même à l’hôpital avant qu’on leur demande, car ils savent qu’ils y trouveront les soins. En effet, la nuit, dans les services, on trouve à l’hôpital une infirmière, mais, dans les cliniques, seulement une aide-soignante et encore, pas toujours !

M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission mixte paritaire. Il n’y a pas que les hôpitaux ! Il y a aussi les maisons de santé, les maisons médicales !

M. Bernard Cazeau. Mme Roselyne Bachelot-Narquin le sait bien, même elle fait semblant de ne pas entendre. Elle préfère écouter les syndicats médicaux souvent tenus par des anciens qui sont, disons-le, rétrogrades et dont le seul objectif est de casser l’encadrement tarifaire pour obtenir une liberté permettant in fine de casser la sécurité sociale !

Ce n’est peut-être pas vers cela qu’il faut aller ! Il conviendrait plutôt de tenir compte de l’évolution de la société et de choisir un nouveau mode de gouvernance avec les professions de santé, notamment de la médecine de ville. Certes, c’est difficile, je vous l’accorde, et cela ne se fera pas en un jour. Mais cela fait des années que vous ne le faites pas !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Oh ! Arrêtez !

M. Bernard Cazeau. Les seules mesures notables – et regrettables – de ce projet de loi consistent une fois encore à taper sur nos concitoyens, à demander des efforts supplémentaires aux assurés sociaux !

Nous sommes en désaccord fondamental avec cette approche visant à instaurer déremboursements, franchises et redevances, au nom d’un principe simple que nous appelons justice sociale : les contributions doivent varier selon les revenus de la personne et non selon son état de santé !

Par les mécanismes d’individualisation de la dépense que vous mettez en œuvre, plus les années passent et plus les malades paient pour eux-mêmes.

Les chiffres sont éloquents : entre 2001 et 2009, les coûts directs de santé dans le budget des ménages, hors cotisations sociales, ont augmenté de 40 % à 50 %. Chaque ménage a ainsi vu sa participation aux frais de santé croître de manière vertigineuse au cours des dernières années. Ces données sont majorées en ce qui concerne les personnes âgées.

Toutes ces évolutions négatives sont en train de dénaturer la philosophie même de l’assurance maladie. Je comprends que, face à un tel constat, vous vous efforciez d’en rire…

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Vous croyez vraiment qu’on rit ?

M. Bernard Cazeau. … et que vous feigniez de considérer que nous disons n’importe quoi.

Vous le savez, le désengagement de la sécurité sociale ne peut plus durer.

M. le président. Veuillez conclure, monsieur Cazeau.

M. Bernard Cazeau. La sécurité sociale ne peut plus continuer à calquer son fonctionnement sur celui des assurances individuelles. C’est avant tout à ceux qui bénéficient de revenus importants qu’il incombe de participer à la solidarité collective.

En 2008, la Cour des comptes a d’ailleurs tracé des pistes sérieuses : elle estime en effet à 2 ou 3 milliards d’euros par an les recettes résultant d’un assujettissement des revenus non salariaux à une fiscalité normale. Qu’attendez-vous pour en finir avec le privilège des niches sociales ? Monsieur Woerth, c’est dans ce domaine que des gains sont possibles !

Cessez de vous cacher derrière votre petit doigt ! Acceptez, comme une très large majorité de sénateurs, toutes travées confondues, de reconnaître cette évidence : la sécurité sociale a besoin de nouvelles recettes, pérennes et dynamiques. Aujourd’hui, pour gagner du temps, vous refusez ce constat. Ce faisant, vous approuvez, par omission, la privatisation rampante de la prise en charge des soins et le développement des inégalités en matière d’accès à la santé.

M. Guy Fischer. Effectivement !

M. Bernard Cazeau. Nous ne pouvons cautionner une telle évolution. C’est la raison pour laquelle nous voterons contre ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. Yves Daudigny. Excellent !

M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission mixte paritaire. La chute n’est pas bonne ! (Sourires.)

M. le président. La parole est à M. Yvon Collin.

M. Yvon Collin. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010 se caractérise par un triste record historique : un déficit de 30 milliards d’euros ! La fuite en avant, qui est sans doute un peu moins rapide, et je vous en donne acte, se poursuit.

Tout le monde en convient, M. le rapporteur général Alain Vasselle l’a rappelé, la situation de notre système de protection sociale est, plus que jamais, inquiétante, voire alarmante. Certes, la crise rend le contexte économique particulièrement difficile, ce qui contribue à l’effondrement des recettes. La reprise de la croissance, même dans les hypothèses les plus favorables, ne suffira pas à rétablir l’équilibre de nos comptes sociaux, l’ampleur des besoins ne faisant que s’accentuer, sous l’effet notamment des évolutions démographiques. Il nous faut donc composer avec ces données structurelles défavorables.

Malheureusement, votre projet de loi, madame la ministre, fait preuve d’une trop grande frilosité. Il est en effet inconcevable de transférer à nos enfants ou à nos petits-enfants le financement de déficits aussi importants.

Si l’on veut enrayer ce cercle vicieux, il est nécessaire d’entreprendre de véritables réformes de fond. Nous aurions pu, ou dû, aller plus loin en ce sens.

La chasse à certaines niches sociales, exemptées ou très peu assujetties aux prélèvements sociaux, constitue l’une des mesures phares de ce texte. Vous avez également souhaité doubler la contribution employeur sur les retraites chapeau versées par une entreprise à ses cadres et hauts dirigeants, ainsi que le taux du forfait social sur un certain nombre d’assiettes exonérées de cotisations sociales.

Bien sûr, on ne peut que se féliciter de telles mesures. Mais celles-ci nous semblent, hélas ! très nettement insuffisantes. Une réforme plus profonde aurait dû être proposée, notamment pour ce qui concerne les niches fiscales dont le bien-fondé est contestable.

Avec plusieurs de mes collègues du RDSE et, au premier chef, M. Gilbert Barbier, nous avions déposé des amendements visant, dans un souci d’équité sociale et d’efficacité, à exclure l’augmentation de la CSG et de la CRDS des impositions directes prises en compte pour l’application du bouclier fiscal. Je regrette très vivement qu’ils n’aient pas reçu le soutien de notre assemblée, alors qu’ils constituaient, à mon sens, une étape importante.

M. Guy Fischer. C’est un vrai scandale ! Vous avez raison !

M. Yvon Collin. Nous n’échapperons pas à une telle évolution. J’en suis convaincu, nous ne pourrons pas sans cesse repousser cette échéance. En effet, on ne peut pas continuer à demander aux seuls Français qui ont des revenus modestes de supporter le règlement de la dette.

M. Guy Fischer. Très bien !

M. Yvon Collin. Je regrette également la suppression par la commission mixte paritaire d’une disposition défendue par Gilbert Barbier et adoptée par le Sénat. Il s’agissait d’imposer aux sages-femmes de communiquer au médecin traitant les informations qu’elles recueillent lors des consultations de contraception et de suivi gynécologique de prévention, et ce dans le souci d’assurer un meilleur suivi de la patiente. À vrai dire, nous ne comprenons pas en quoi cette mesure pose un problème.

Enfin, devant la méthode employée par le Gouvernement, je souhaite vous faire part de ma surprise et de mes regrets.

En effet, à l’issue des travaux de la commission mixte paritaire, ce dernier a déposé des amendements substantiels, en vue de faire adopter une rédaction du texte qui lui convienne davantage. Hier, nous avons eu droit à une deuxième délibération sur la première partie du projet de loi de finances pour 2010 ; aujourd’hui, parce que le texte de la CMP, qui est un texte de compromis entre députés et sénateurs, ne lui convient pas, le Gouvernement use de prérogatives peu respectueuses des droits du Parlement.

Je pense notamment à votre volonté, madame la ministre, d’écarter de la procédure d’alerte les dépenses exceptionnelles liées à la grippe A. En effet, le Sénat avait supprimé la disposition en vertu de laquelle le surcoût induit par les dépenses exceptionnelles liées à la pandémie grippale ne serait pas pris en compte par le comité d’alerte sur l’évolution des dépenses d’assurance maladie, dans la perspective d’un risque de dépassement de l’ONDAM. La décision unanime du Sénat de supprimer cet article a été confirmée par la commission mixte paritaire.

Pourtant, vous rétablissez cette disposition, au motif qu’elle permet de neutraliser l’impact des dépenses liées à la grippe A dans l’évaluation d’un risque de dépassement de l’ONDAM par le comité d’alerte.

En réalité, madame la ministre, vous faites tout pour éviter le déclenchement des mesures prévues par le comité d’alerte. Car, si ce dernier constatait que les dépenses d’assurance maladie dépassent l’ONDAM, il vous demanderait de prendre les mesures nécessaires, c’est-à-dire de prendre vos responsabilités ! (M. Guy Fischer s’exclame.)

C’est par le même procédé que vous réservez la couverture d’assurance aux chirurgiens, anesthésistes et gynécologues-obstétriciens, alors que nous en avions prévu l’extension à tous les médecins libéraux.

M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission mixte paritaire. C’est exact !

M. Yvon Collin. D’ailleurs, la plupart des dispositions raisonnées et responsables que l’Assemblée nationale et le Sénat ont adoptées pour trouver de nouvelles recettes à la sécurité sociale ont été retirées à la dernière minute du texte définitif.

M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission mixte paritaire. C’est vrai !

M. Yvon Collin. Madame la ministre, au cours de la discussion du projet de loi HPST, comme lors de l’examen de ce dernier PLFSS, nous étions unanimes sur ces travées pour vous reconnaître une véritable compétence mais aussi une vraie qualité d’écoute (Mme la ministre s’entretient avec M. le ministre) – dont vous ne faites pas preuve en cet instant ! –, ainsi qu’une volonté de nourrir le débat malgré les désaccords de fond.

En revenant à ce point sur le texte de la commission mixte paritaire par le biais d’amendements présentés hier à l’Assemblée nationale et adoptés, hélas ! par une majorité particulièrement compréhensive, vous ne facilitez pas le dialogue avec la Haute Assemblée.

M. Yvon Collin. D’autant que le Sénat examinant le texte après l’Assemblée nationale, nous ne pouvons nous prononcer sur ces modifications de dernière minute.

Si l’ordre de l’examen par les deux chambres avait été inversé, l’issue aurait pu être – je ne peux m’empêcher de le penser ! – bien différente. Nous allons donc devoir nous prononcer par un seul vote sur les amendements et l’ensemble du texte.

Dans ces conditions, madame la ministre, les motifs de satisfaction n’étant pas suffisants, ce que je regrette, quinze des membres de mon groupe ne pourront se prononcer en faveur du PLFSS pour 2010. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – M. Guy Fischer applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Yves Daudigny.

M. Yves Daudigny. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission, mes chers collègues, à quoi sert la représentation nationale ?

Les conditions d’examen de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale qui nous sont imposées relèvent-elles d’un mépris du Parlement ou du peu de considération que le Gouvernement accorde à une telle loi,…

M. Yves Daudigny. … voire des deux à la fois ?

M. Yves Daudigny. Après cinq jours de séances, nuits comprises, entrecoupés d’un 11 novembre requérant la présence des élus dans leurs départements, le débat s’est achevé dans la nuit du dimanche 15 novembre, à deux heures cinquante-cinq ! C’est dans ces conditions qu’ont été examinés les dispositions et les comptes relatifs à la branche famille ! Ils méritaient mieux !

L’obstination de l’Élysée à faire passer coûte que coûte le projet de loi modifiant le statut de La Poste, afin de pouvoir privatiser plus tard cette entreprise, a entraîné le report de l’examen de ce PLFSS. Du coup, le débat thématique initialement programmé sur la question pourtant fort importante des conséquences de la pénibilité au travail a été purement et simplement supprimé !

M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission mixte paritaire. À qui la faute ?

M. Yves Daudigny. Là encore, la méthode fait question. Nous nous étions félicités l’année dernière, à la même époque, de l’initiative prise par le Sénat en la matière. Nous avions en effet organisé un débat sur l’hôpital au cours de l’examen du PLFSS. Il est regrettable que le Sénat se soit plié si facilement cette année aux ordres du Gouvernement, en renonçant à son ordre du jour pour le satisfaire.

M. Guy Fischer. M. Vasselle devient de plus en plus souple ! (Sourires.)

M. Yves Daudigny. Le vote du Parlement est si formel qu’au-delà d’une application de l’article 40 extrêmement consciencieuse qui anéantit déjà une grande partie de nos propositions, le Gouvernement trouve encore moyen de demander le retrait d’amendements contre la promesse d’arbitrer par voie de décret ou de circulaire.

Il en est ainsi de la question des sanctions prévues en cas de dépassement de la date limite fixée pour l’agrément d’accords relatifs aux salariés âgés, du montant de la contribution financière des régimes d’assurance maladie pour la mise en place des agences régionales de santé ou encore des conditions de sortie du régime d’ALD.

M. Guy Fischer. Et le forfait hospitalier !

M. Yves Daudigny. Comptez sur notre vigilance, madame la ministre, oui, comptez sur notre vigilance pour vérifier que vous tiendrez vos engagements. En effet, il n’a pas échappé à la représentation nationale que vous n’avez pas tenu parole s’agissant de l’ordonnance prévue par l’article 115 de la loi Hôpital, patients, santé et territoires.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Comment cela, je n’ai pas tenu parole ?

M. Yves Daudigny. Je serai moi-même particulièrement attentif à l’engagement que vous avez pris concernant la prestation de compensation du handicap, la PCH, en contrepartie du retrait de l’amendement de notre collègue Paul Blanc, qui proposait, et nous l’avons soutenu, une nécessaire péréquation entre départements.

Le vote du Parlement est si formel que le relèvement du plafond de trésorerie de l’ACOSS ou la création de franchises à la charge des assurés sociaux sont décidés par le Gouvernement hors de cette enceinte. Nous verrons, sur ce dernier point, ce que dira le Conseil d’État de cette nouvelle hausse du forfait hospitalier…

M. Guy Fischer. De 13,5 % ! C’est scandaleux !

M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission mixte paritaire. De 2 euros !

M. Yves Daudigny. … et si, notamment avec un nouveau déremboursement des médicaments, l’addition de toutes ces mesures n’entraîne pas un reste à charge tel pour les assurés qu’il entrave leur accès aux soins et porte atteinte au droit fondamental à la santé.

M. Yves Daudigny. Le vote du Parlement est si formel que, après accord des deux assemblées en commission mixte paritaire, le Gouvernement s’autorise à déposer de nouveaux amendements et nous demande de revenir au texte initial pour finalement ne rien changer ou changer pas grand-chose.

Le Sénat avait supprimé, à juste titre, l’article 28 du projet de loi, qui excluait les dépenses liées à la pandémie grippale de l’évaluation du risque de dépassement de l’ONDAM par le comité d’alerte.

Or, avec l’article 6, qui rectifie le montant de la contribution des régimes obligatoires d’assurance maladie au financement de l’Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires, l’EPRUS, et l’article 10, qui prévoit une contribution des assurances complémentaires, le Gouvernement choisit de se décharger sur l’assurance maladie et les mutuelles des dépenses liées à la grippe A/H1N1.

M. Guy Fischer. Les assurés sociaux paieront !

M. Yves Daudigny. La pandémie est pourtant bien une question de santé publique et relève, à ce titre, de la responsabilité de l’État !

Dès lors, il est contradictoire d’intégrer ces dépenses à celles de l’assurance maladie et, dans le même temps, de faire en sorte qu’elles ne soient pas prises en compte dans l’ONDAM quand celui-ci est soumis à l’appréciation du comité d’alerte.

C’est ce qu’a logiquement décidé la représentation nationale, par deux fois, d’abord au Sénat – nous étions d’accord avec vous sur ce point, monsieur Vasselle –, puis en commission mixte paritaire. Vous revenez à la charge et demandez à la majorité de la Haute Assemblée de manger son chapeau !

Au-delà de ces procédés, nous nous sommes malgré tout attachés, au cours de l’examen de ce texte, à vous soumettre par amendements de nombreuses propositions. Toutes ont été rejetées. Les raisons qui nous ont convaincus de voter contre ce texte subsistent donc entièrement.

Votre projet de financement est en effet illusoire, parce que construit sur des hypothèses de croissance irréalistes, insincères et irresponsables. Il ne prévoit aucune mesure propre à réformer la structure du système, que vous laissez s’enliser, aucune ligne d’action pour la protection de la santé, des retraites, de la famille, des accidents du travail et des maladies professionnelles. Il comporte, tout au contraire, des mesures socialement injustes, économiquement inefficaces et dangereuses pour la santé publique.

Irréalistes, telles sont les hypothèses de croissance sur lesquelles le Gouvernement construit son projet de financement, qui table sur une augmentation de la masse salariale de 5 % et une hausse du PIB de 2,5 % par an en 2011. Je rappelle qu’à une autre époque, entre 1998 et 2000, où, pourquoi ne pas le rappeler, les comptes de la sécurité sociale avaient été ramenés à l’équilibre, la croissance de la masse salariale ne dépassait pas 3,7 % en moyenne…

Comme chaque année, vous serez donc dans l’obligation de réviser vos prévisions à la baisse. Le pari est d’ores et déjà gagné. Vous n’ignorez rien de tout ceci, et c’est pourquoi les comptes que vous nous présentez aujourd’hui sont insincères.

Irresponsable, tel est ce projet de loi qui ne comporte aucune mesure structurelle propre à réformer un système menacé d’asphyxie. Je vous ai demandé, voilà quelques jours, madame la ministre, à cette même tribune, quel était l’objectif d’un gouvernement qui abandonne, sous un déficit accumulé devenu écrasant, l’organisation solidaire de notre protection sociale au point de la mettre en danger, et qui se contente de regarder la barque couler ?

Évidemment, à court terme, il y a les élections régionales et, à long terme – c’est peut-être plus important encore –, la vision « privatisée » de la France, dont tous nos services publics – justice, police, éducation nationale, service postal, hôpital, etc. – font aujourd’hui les frais. (Mme Raymonde Le Texier ainsi que MM. Bernard Cazeau et Guy Fischer applaudissent.)

Créées par la loi HPST, les agences régionales de santé, destinées à rationaliser et maîtriser les coûts, vont surtout, pour l’instant, coûter fort cher aux régimes sociaux ! Et dire que vous demandez au Parlement de vous signer un chèque en blanc…

Cette inertie relève d’un véritable dogmatisme politique. Vous pouviez en effet agir sur les niches fiscales, qui représentent une perte de recettes de plus de 70 milliards d’euros,…