M. Gérard Longuet. C’est avec confiance que j’invite l’ensemble de mes collègues de l’UMP et de la majorité à rejeter ces amendements de suppression.

Nous avons besoin de faire bouger, sur le terrain, la vie locale de notre pays. Nous sommes tous attachés aux communes. Comment assurer leur existence, préserver leur valeur ajoutée, leur proximité, concrétiser l’attachement que nous leur témoignons sinon en les accompagnant dans le long cheminement vers l’intercommunalité ?

Je me tourne maintenant vers les collègues qui demandent la suppression de cet article, à commencer par Philippe Adnot et par Jean-Pierre Chevènement, que j’ai écouté avec beaucoup d’intérêt parler avec ferveur du conseil général.

La vie de nos compatriotes a changé. On habite dans une commune, on travaille dans une autre commune, on dépense et on passe ses loisirs dans une troisième.

Il y a encore vingt ou trente ans, peu de nos enfants allaient à l’université Nous avons, les uns et les autres, l’ambition de faire en sorte que 60 % ou 80 % d’une classe d’âge obtiennent le baccalauréat, puis accèdent à l’enseignement supérieur. Or ces jeunes ne résident pas nécessairement dans un département abritant des établissements d’enseignement supérieur.

Certes, les conseils généraux ont été utiles pour le développement économique. Mais comment couper celui-ci de la réflexion sur les grandes infrastructures de transport que sont les autoroutes ou les LGV ?

Nous avons besoin de mettre fin à cette séparation qui éloigne du cadre régional le conseiller général, ancré, au pied de son clocher, dans le confort d’une vie locale.

Un sénateur du groupe socialiste. Ce n’est pas vrai partout !

M. Gérard Longuet. Or cette dimension régionale, bien souvent méconnue ou ignorée de lui, est en train de s’imposer pour une part importante de l’activité de nos compatriotes. Car l’université, l’hôpital et les grands services relèvent de l’échelon régional. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.) Et l’on voudrait les séparer du département ! Pourquoi diable priverions-nous nos compatriotes d’élus capables à la fois de gérer la proximité – parce que c’est la vie quotidienne, domaine dans lequel les conseils généraux ont fait leurs preuves – et d’accéder à la réflexion globale ?

La région s’impose de plus en plus aux électeurs, pour leur travail, pour les études de leurs enfants ou pour recevoir des soins quand ils sont malades.

Il faut mettre un terme à cette scission et rapprocher des élus tous capables d’assurer aussi bien la gestion locale que des projets ou des équipements à échelle plus grande.

En votant ces amendements, vous casseriez toute perspective de réforme au moment même où le comportement de nos compatriotes dépasse les limites départementales pour se diriger très largement vers les capitales régionales. Au reste, dans la France du TGV, reconnaissons-le, ils vont souvent à Paris ou dans telle ou telle très grande métropole plutôt que dans la grande ville située à 150 kilomètres, car cela n’aurait pas de sens quand on peut en faire 300 en une heure ! C’est d’ailleurs la raison pour laquelle la constitution de grandes régions n’est sans doute pas pertinente.

Je vous demande, mes chers collègues, d’ouvrir les yeux sur cette évidence : les institutions ne sont pas faites pour les élus, ce sont les élus qui sont à la disposition de nos compatriotes. (Applaudissements sur les travées de lUMP.) Or le mode de vie de ces derniers a changé parce que leur horizon ne s’arrête plus à des limites administratives pour lesquelles j’ai, au demeurant, le plus grand respect.

Je suis, vous le savez, un homme de droite, un conservateur, féru d’histoire ! Je pourrais être intarissable sur la loi Tréveneuc ou les déclarations de Napoléon qui liait le bonheur des Français à l’institution des préfets ! Mais il est temps d’ouvrir les yeux sur le mode de vie moderne et de nous doter d’institutions adaptées à la nouvelle réalité ! (Vifs applaudissements sur les travées de lUMP, ainsi que sur plusieurs travées de lUnion centriste.)

M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin, pour explication de vote.

M. Martial Bourquin. Je crois qu’il faut diffuser auprès de beaucoup d’élus ce que vient de dire notre collègue Gérard Longuet car, dans son propos, je perçois un certain mépris à l’endroit du département et de ses élus. (Protestations sur les travées de lUMP et de lUnion centriste.) Je le prends comme cela !

M. Gérard Longuet. Vous avez l’amour des institutions ! Nous, nous avons l’amour des Français ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)

M. Pierre-Yves Collombat. Alors, donnez-leur donc du travail !

M. le président. Seul M. Bourquin a la parole !

M. Martial Bourquin. Monsieur Longuet, je viens de vous entendre dire, quasiment, que les conseillers généraux ne sont pas capables de traiter du vieillissement, de questions sociales, du développement économique ! C’est à croire que nous ne vivons pas dans les mêmes départements ! Je peux vous dire que, chez nous, cela se passe bien ! (Mêmes mouvements.)

Parlons un peu de l’éthique du débat. Le Sénat est mobilisé pendant des mois sur un rapport concernant la modernisation de nos institutions et de notre organisation territoriale. Des mois de travail, d’auditions ! Et tout est subitement mis de côté,…

M. Martial Bourquin. … car surgit dans le débat quelque chose qui n’y était jamais apparu auparavant : le conseiller territorial. D’où vient-il ? De l’imagination d’une, deux ou trois personnes, tout au plus !

L’intervention de M. Longuet que nous venons d’entendre, elle ne peut pas être vraiment de lui puisque, au cours des mois précédents, il n’a jamais évoqué devant nous cette création des conseillers territoriaux ! Cette idée, en vérité, elle vient du Président de la République. C’est lui qui veut ce conseiller territorial !

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Nous aussi !

M. Martial Bourquin. Il a sifflé la fin de la récréation partie, il a dit au Sénat qu’on avait fini de jouer : le conseiller territorial passera, de gré ou de force !

Et je comprends l’empressement de notre collègue Gérard Longuet qui, sous l’apparence de l’ingénuité, a demandé tout à l'heure combien il allait encore y avoir d’interventions. Allez, on a assez débattu, au vote ! Circulez, il n’y a plus rien à voir ! Le Président nous regarde ! (Mme Jacqueline Panis s’esclaffe.)

Le fait que Le Monde d’aujourd’hui titre en première page sur l’emballement parlementaire, sur la façon dont on fait travailler le Parlement montre bien qu’il y a un vrai problème. Tout vient du dessus, et vous n’avez plus le choix ! Les plus responsables d’entre vous n’ont pas d’autre choix que d’appliquer ce que leur dit le Président !

J’en viens à quelques arguments plus essentiels.

La France est en train de changer, et il faut la moderniser.

Un sénateur du groupe UMP. Il est temps que vous vous en aperceviez !

M. Martial Bourquin. Pour la moderniser, qu’il s’agisse de l’économie de l’intelligence ou de la prise en compte du vieillissement de la population, une méthode a fait ses preuves : la décentralisation, et l’intercommunalité en particulier.

Plus que jamais, nous avons besoin de collectivités territoriales fortes, capables de relever les défis : sans les communautés d’agglomération, sans les régions, le plan Université 2000 ne serait toujours pas en place aujourd’hui ; sans l’investissement massif que les collectivités territoriales leur ont consacré, les lignes à grande vitesse ne contribueraient pas comme elles le font à l’aménagement du territoire…

C’est la raison pour laquelle je pense, comme notre collègue Philippe Adnot et de nombreux élus, qu’ils soient de gauche ou de droite, d’ailleurs, …

M. Jacques Blanc. Ne parlez pas pour nous !

M. Bruno Sido. Mensonges ! Passons au vote !

M. Martial Bourquin. … que le Gouvernement est en train de « gripper » ce qui fonctionne. La France se modernise grâce aux collectivités locales ; alors que l’État, avec la RGPP, s’affaiblit, c’est à elles qu’il revient de relever le gant en matière d’aménagement du territoire.

Des élections vont bientôt avoir lieu. Prenez garde, mes chers collègues ! À croire que l’on peut s’en sortir grâce une entourloupe électorale et que le verdict des urnes peut être modifié par une loi, on risque un effet boomerang ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Panis, pour explication de vote.

Mme Jacqueline Panis. Mes chers collègues, je veux livrer à votre réflexion un témoignage.

Cet après-midi, les élus lorrains ont rencontré le ministre luxembourgeois de l’intérieur et à la Grande Région, avec qui a été signée une convention de partenariat. Or ce ministre, chargé donc de la Grande Région, s’est étonné de la lourdeur excessive de notre organisation : État, régions, départements, intercommunalités, communes… c’est trop ! nous a-t-il dit.

Si j’avais eu besoin d’une raison supplémentaire pour voter contre la suppression de l’article, je l’aurais trouvée là. Il s’agit en effet d’une observation très importante, car, ce que l’on dit de notre pays au Luxembourg, on le dira en Belgique, en Allemagne, en Suisse, en Italie comme au-delà de toutes nos frontières.

En ce qui concerne ensuite la place des femmes, sachez que, bien entendu, je suis très attachée à ce qu’elle progresse, mais, ce soir, nous n’avons pas à discuter du mode de scrutin. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.) Alors, chaque chose en son temps : nous serons tous amenés à nous prononcer, le moment venu, sur le texte relatif à cette question, sur lequel les travaux ont déjà commencé. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)

M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour explication de vote.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Bien que le maintien des conseils généraux et des conseils régionaux comme assemblées délibérantes respectives des départements et des régions soit affirmé, l’objectif est bien, à notre sens, de créer les conditions de la disparition à terme des départements : il s’agit d’organiser non pas leur complémentarité avec les autres collectivités, mais leur dissolution, et M. le ministre peine à trouver des arguments contraires.

Comme vous sans doute, mes chers collègues, j’ai écouté M. le Président de la République hier…

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. C’est bien !

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. … et lu la presse. (Exclamations sur les travées de l’UMP.)

M. Bruno Sido. Tout dépend de laquelle !

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. La vérité vous gêne, mes chers collègues ! (Très bien ! sur les travées du groupe CRC-SPG. – Protestations sur les travées de l’UMP.)

Ce n’est pas moi, c’est M. Sarkozy qui a salué « ce choix, qui place la Guyane et la Martinique en avance sur la métropole, allant un pas plus loin que la réforme des collectivités locales actuellement en examen au Parlement » !

Une sénatrice du groupe CRC-SPG. Et voilà ! Vous pourriez applaudir, c’est votre Président !

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Monsieur Longuet, la complémentarité n’est ni l’écrasement ni la fusion : c’est la coopération des différents niveaux et l’articulation entre leurs compétences propres.

Par ailleurs, mes chers collègues, je veux souligner à quel point le mode de scrutin paraît pour le moins opaque à la population, alors que le Gouvernement prétendait que sa réforme avait pour objectif la simplification !

Nul ici ne nie le besoin de réforme : la question est de savoir dans quel sens et pour qui nous travaillons.

Une sénatrice du groupe CRC-SPG. Voilà !

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Or, permettez-nous d’être très dubitatifs quant aux objectifs de cette réforme qui engage une réduction drastique du nombre des élus de proximité et bouleverse l’équilibre institutionnel et citoyen.

Je crains qu’à terme ce texte ne se révèle être, pour reprendre une fois encore une expression déjà employée, une « bombe à retardement », car nous sommes véritablement en train de créer les conditions d’une nouvelle explosion des inégalités en privant de leurs possibilités d’intervention des collectivités qui aujourd’hui œuvrent pour le bien de nos concitoyens.

Après avoir entendu vos non-arguments, je soutiens donc plus que jamais la suppression de l’article 1er. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Mirassou, pour explication de vote.

M. Jean-Jacques Mirassou. Comme l’ont souligné plusieurs de mes collègues, cette discussion nous donnait l’occasion d’opérer un toilettage de nos institutions de nature à permettre à celles-ci d’être en adéquation avec les enjeux du xxisiècle. Malheureusement, les explications tant du rapporteur que du ministre n’ont pas été, et de loin, à la hauteur d’un débat qui porte sur l’architecture même de notre République.

À ces explications est venue s’ajouter l’intervention de M. Longuet,…

Plusieurs sénateurs du groupe socialiste. Excellente intervention !

M. Jean-Jacques Mirassou. … qui, en invoquant les mêmes principes, nous a donné l’impression que, là où il vivait, le clivage entre départements et région était tellement fort qu’il créait une totale incompatibilité, sur le plan du fonctionnement, entre ces institutions et qu’il était par conséquent, selon lui, parfaitement pertinent de les fusionner…

Je serais tenté de demander à M. Longuet, s’il m’écoutait, dans quel département il vit ! (Rires sur les travées du groupe socialiste.)

M. Jean-Jacques Mirassou. En Haute-Garonne, il y a bien longtemps que le département et la région ont démontré leur capacité à mutualiser leurs moyens, même lorsqu’ils n’étaient pas de la même couleur politique, pour assurer l’essor d’Airbus Industrie – excusez du peu ! –, pour mettre en place un cancéropôle, ou encore pour développer le TGV.

À ce propos, je rappellerai à mon tour que ceux qui stigmatisent les financements croisés sont ceux-là mêmes qui convoquent les présidents des conseils généraux et des conseils régionaux pour leur dire que, si elles ne contribuent pas toutes et toujours plus, leurs collectivités n’auront pas de TGV et ne bénéficieront d’aucun plan, « campus » ou autre… La contradiction est d’autant plus évidente que, c’est bien connu, si régions et départements n’avaient su utiliser leurs moyens en bonne intelligence, le plan Université 2000 n’aurait pas pu être mis en place.

Peut-être le département de M. Longuet souffre-t-il d’un retard structurel ? En tout cas, chaque jour apporte la démonstration que ce que certains appellent de leurs vœux est depuis longtemps déjà une réalité dans plusieurs régions !

En conclusion, je répondrai à la seule interrogation qui vaille et qui, sur ces travées au moins, nous taraude : quelle est la véritable motivation de la fusion-absorption entre le département et la région et de son corollaire, la création des conseillers territoriaux ? Eh bien, il s’agit tout simplement de se plier aux injonctions du pouvoir politique en place, lequel ne supporte toujours pas les contre-pouvoirs locaux ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Rachel Mazuir, pour explication de vote.

M. Alain Vasselle. Ne peut-on pas demander la clôture ?...

M. Rachel Mazuir. M. Longuet a souligné que l’on pouvait habiter dans un département, travailler dans un autre, se consacrer à ses loisirs dans un troisième – et pourquoi pas en effet ? Il a ensuite rappelé que l’enseignement supérieur comme la santé relevaient des régions…

Pourtant, si dans le chef-lieu de mon département, Bourg-en-Bresse, qui compte 40 000 habitants, l’enseignement supérieur est présent, c’est grâce au département autant qu’à la région ! Et, pour ma part, je souhaite que non seulement il se maintienne, mais encore qu’il s’améliore, car il est aussi un outil d’aménagement du territoire qui permet aux étudiants issus de familles de condition modeste d’accéder à la formation : je ne suis pas sûr que cela restera possible avec la réforme que l’on met en place !

De même, dans le domaine de la santé, nous nous battons pour conserver des hôpitaux de proximité, alors que, si j’ai bien compris vos propos, monsieur Longuet, ce secteur serait l’apanage des régions, dont relèveraient tous les hôpitaux.

J’ajouterai que le budget du département a été voté, il y a déjà plus d’un mois, sans que les élus sachent exactement de quels moyens ils pourraient disposer.

M. Rachel Mazuir. C’était plutôt compliqué ! Nous en avons eu connaissance depuis, mais, lorsque nous avons « monté » le budget, nous n’en savions rien ! (Exclamations sur les travées de l’UMP.)

Vous pourrez dire ce que vous voulez, mes chers collègues, pour ce qui me concerne, je vais parler concrètement et donner des chiffres, car tout ce que j’entends me paraît relever de la supputation.

L’an dernier, 170 millions d’euros d’investissements ont été inscrits au budget, somme à laquelle se sont ajoutés, et j’y ai applaudi, 15 millions d’euros provenant du plan de relance. Cette année, mon département dispose de 146 millions d’euros, et il n’y a plus de plan de relance.

Je puis en outre vous indiquer, parce que je me suis livré au calcul – mais, si j’en crois les propos de mon directeur des finances, qui a fait le tour des départements, il en va de même ailleurs –, que, lorsque nous pouvions décider de la fiscalité, notre taux d’autonomie était de 41 % : il est aujourd’hui inférieur à 15 %.

Pendant un moment, on a préconisé l’ouverture de grands chantiers publics pour lutter contre la crise, et on a engagé les départements à participer à leur financement. On a ainsi réduit les capacités d’investissement de ces collectivités comme leurs possibilités d’intervenir dans le domaine économique. Vous en porterez la responsabilité, car c’est par votre faute qu’à la crise on aura ajouté la crise dans le domaine public ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. le président. La parole est à M. Yves Daudigny, pour explication de vote.

M. Yves Daudigny. Trois sentiments me conduisent à voter en faveur des amendements de suppression.

Le premier de ces sentiments est l’incompréhension.

J’ai écouté avec la plus grande attention M. le rapporteur, M. le ministre, notre collègue président du conseil général du Loiret – et je ne doute ni de sa sincérité ni de son attachement à son département – et M. Longuet, mais je n’ai pas saisi dans leurs propos un seul argument en faveur de l’institution du conseiller territorial.

On nous dit que la réforme va rapprocher la région et le département, mais plusieurs de nos collègues ont montré que cela ne pouvait pas être vrai. Aucun des exemples concrets qu’ils ont avancés n’a été réfuté.

On nous dit qu’il est bon pour le département que le nombre de ses élus soit réduit d’un tiers, mais on ne nous précise pas ce que cela lui apportera.

Plusieurs sénateurs du groupe UMP. Ce n’est pas un problème !

M. Alain Vasselle. Quand on ne veut pas comprendre…

M. Yves Daudigny. Expliquez-nous en quoi c’est un progrès pour la modernité que de voir la personne qui traite un jour des questions sociales traiter le lendemain des questions d’aménagement du territoire régional ! La proximité et l’aménagement du territoire, ce n’est pas la même chose : vous nous avez assez répété que chaque niveau devait être spécialisé et avoir des compétences différentes ! La contradiction est flagrante…

Le deuxième sentiment qui m’incite à voter ces amendements, c’est la tristesse. Contrairement à ce que vous affirmez, vous commettez en effet, sans l’avouer, un véritable assassinat de l’échelon départemental, qui est pourtant essentiel à l’action publique française.

M. Guy Fischer. Pour la politique sociale !

M. Yves Daudigny. Enfin, le troisième sentiment que j’éprouve, c’est la crainte.

Nous avons la certitude que vous portez un mauvais coup à la ruralité en affaiblissant ses réseaux et en y amoindrissant la démocratie, la proximité, comme l’attestent la fermeture des services publics, la révision générale des politiques publiques, la RGPP, le désengagement de l’État ou encore la réforme de la santé qui, avec la création des agences régionales de santé, éloigne le centre de décision. L’atteste également, dans le domaine économique, la réforme des chambres consulaires, qui sont réorganisées au niveau régional et s’éloignent du terrain.

Mauvais coup pour la ruralité et pour la démocratie, absence de progrès dans le fonctionnement du département, absence de rapprochement entre le département et la région : toutes ces raisons justifient que la réforme de nos collectivités territoriales soit améliorée, comme cela vous a été demandé. Nous avons donc toutes les raisons de voter pour ces amendements ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 115, 349 rectifié, 486 rectifié et 507 rectifié bis tendant à supprimer l’article 1er du projet de loi.

Je suis saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l’une, du groupe UMP et, l’autre, du groupe socialiste.

Je vous rappelle que l’avis de la commission est défavorable, et l’avis du Gouvernement également défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Ceux qui souhaitent voter « pour » remettront au secrétaire un bulletin blanc.

Ceux qui souhaitent voter « contre » remettront un bulletin bleu.

Ceux qui souhaitent s’abstenir remettront un bulletin rouge.

Le scrutin sera ouvert dans quelques instants.

………………………………………………………

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 136 :

Nombre de votants 339
Nombre de suffrages exprimés 336
Majorité absolue des suffrages exprimés 169
Pour l’adoption 155
Contre 181

Le Sénat n’a pas adopté. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et sur certaines travées de l’Union centriste.)

Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 116, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéas 2 et 3

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Isabelle Pasquet.

Mme Isabelle Pasquet. Vous l’avez compris, mes chers collègues, nous nous opposons au remplacement des conseillers généraux par les conseillers territoriaux. (Des bavardages se font entendre sur diverses travées.)

On nous affirme que la création d’un élu commun au département et à la région permettra une plus grande cohérence entre les missions respectives de ces collectivités et leur meilleure coordination. Deux assemblées, un seul élu : je crains que cela n’entraîne plutôt la confusion des rôles en même temps qu’une hiérarchisation entre les deux assemblées, tutelle pourtant interdite par la Constitution. On est loin de la clarification annoncée ! (Les bavardages se poursuivent.)

On nous affirme aussi que la création des conseillers territoriaux renforcera la légitimité des élus locaux. Les élus départementaux actuels en manqueraient-ils ? Ce n’est pas ce que disent les Français ! Bénéficiant de la confiance de 62 % de nos concitoyens, les conseillers généraux échappent – au même titre que les maires, qui sont les élus les plus proches du terrain – au discrédit qui frappe les politiques, un discrédit auquel contribue pourtant votre discours sur le coût prétendument trop élevé des élus. (Les bavardages deviennent plus fort, jusqu’à obliger l’orateur à s’interrompre.)

Mme Éliane Assassi. Allez donc discuter dehors, si vous ne voulez pas écouter !

M. le président. Veuillez poursuivre, ma chère collègue !

Mme Isabelle Pasquet. L’une des raisons pour lesquelles les conseillers généraux bénéficient de la confiance des Français, c’est précisément leur proximité. Or celle-ci est remise en cause tant par la création des conseillers territoriaux que par la suppression de la compétence générale des départements, compétence qui permet pourtant à ces derniers, au-delà de leurs compétences obligatoires, de répondre quotidiennement, aux côtés des communes, aux besoins des habitants en matière de crèches, d’aide au logement social ou aux transports, de soutien à la vie associative, au sport, à la culture, etc.

Quant à la parité au sein des conseils généraux, non seulement elle n’y gagnera rien, mais il y a fort à parier que la réduction du nombre d’élus entraînera celle du nombre de femmes.

La suppression des conseillers généraux au profit des conseillers territoriaux est tout à fait cohérente, en revanche, avec votre objectif, affiché de longue date, de supprimer les départements, ainsi qu’avec votre réforme de l’État, puisque les départements y perdent de leurs pouvoirs et sont désormais placés sous l’autorité hiérarchique des préfets de région.

Nous considérons, pour notre part, qu’il est primordial de maintenir la spécificité des élus départementaux. Leur mission, qui diffère de celle des conseillers régionaux, est essentielle pour répondre au mieux aux besoins des habitants, pour renforcer la démocratie et pour poursuivre la décentralisation.

M. le président. L’amendement n° 119, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Les conseillers généraux sont élus à la proportionnelle intégrale. »

La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.