M. Guy Fischer. C’est bas ! On en reparlera !

Mme Éliane Assassi. Attendez-vous au pire, madame le ministre !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ce type d’argument n’est pas digne du Parlement !

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Michel, pour explication de vote.

M. Jean-Pierre Michel. Monsieur le président, madame le ministre d’État, mes chers collègues, nous sommes tous, sur l’ensemble de ces travées, convaincus de la nécessité de lutter contre la récidive, sauf que nous n’avons pas les mêmes idées sur les moyens à mettre en œuvre.

De mon point de vue, la meilleure solution, c’est de prohiber toute sortie de prison sèche. (Marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste.)

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d’État. Bien sûr !

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. C’est dans la loi pénitentiaire !

M. Jean-Pierre Michel. Il faut un accompagnement, soit par un sursis avec mise à l’épreuve, soit par une libération conditionnelle.

Se pose alors immédiatement le problème des moyens. Malgré vos assurances, madame le garde des sceaux, tout le monde sait très bien que, sur le terrain, ceux-ci sont insuffisants, dans le domaine non seulement du contrôle et du suivi judiciaires, mais aussi de la psychiatrie.

Je parle en connaissance de cause, puisque je préside une association qui s’occupe de soigner environ 500 000 personnes souffrant de problèmes psychiatriques. Malgré nos efforts, en dehors des lits d’hôpitaux, tout vient à manquer pour couvrir les besoins de la population. Si les gens ne viennent pas se faire soigner à l’hôpital, nous ne pouvons pas nous en occuper, faute de temps pour les relancer et aller les chercher.

En réalité, la bonne application de ce texte, et donc son vote, est remise en question par trois constats préalables.

Le premier, c’est l’insuffisance des moyens.

M. le rapporteur lui-même en convient, puisqu’il nous proposera tout à l’heure, par le biais d’un amendement adopté ce matin même en commission des lois, le report de certaines mesures au cas où les moyens nécessaires feraient défaut, l'objectif étant notamment de permettre au Centre national d’observation – CNO – de Fresnes de travailler dans de bonnes conditions, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.

Le deuxième, c’est l’absence d’étude d’impact, que nous avons déplorée en commission.

Bien sûr, vous n’allez pas manquer de me dire que le projet de loi a été déposé avant qu’un tel document soit rendu obligatoire. Lors de son examen à l’Assemblée nationale, les députés ont, paraît-il, sensiblement enrichi le texte. Mais je pose la question : les amendements qu’ils ont déposés reflétaient-ils véritablement leur libre arbitre ou étaient-ils suscités, voire téléguidés, par le Gouvernement ? (Mme Michèle Alliot-Marie exprime son désaccord.)

M. Charles Gautier. On peut le penser !

M. Jean-Pierre Michel. Madame le garde des sceaux, vous et moi avons été députés : nous savons bien ce qu’il en est à cet égard !

Une étude d’impact aurait été nécessaire. Aujourd’hui encore, nous avons besoin d’informations supplémentaires, ne serait-ce que sur le traitement destiné à atténuer la libido, au sujet duquel les médecins et M. le rapporteur ont exprimé leur grande interrogation. Un certain nombre d’individus, qu’ils soient ou non délinquants, d’ailleurs, suivent ce traitement : quels résultats donne-t-il ? Peut-on vraiment traiter ces personnes ? Sont-elles toutes consentantes ? Voilà autant de questions sur lesquelles nous n’avons pas obtenu de réponse, alors que nous nous apprêtons à inscrire cette disposition dans la loi !

Le troisième constat préalable concerne l’extension des fichiers judiciaires.

Il est ainsi prévu de créer un nouveau répertoire de données à caractère personnel, lequel, bien entendu, n’a pas fait l’objet d’un avis de la CNIL, alors qu’il soulève nombre d’objections. Ce n’est pas moi qui l’ai dit, c’est le président de la CNIL lui-même, qui ne siège pourtant pas de ce côté-ci de l’hémicycle. M. Türk a ainsi indiqué en commission qu’il existait déjà des systèmes analogues, notamment les fichiers Cassiopée et APPI, qui pourraient être développés, et ajouté que la numérisation des procédures pénales était en cours.

L’insuffisance des moyens, l’absence d’étude d’impact, en particulier sur le traitement antilibido, le problème de la prolifération des fichiers, sans consultation ni avis de la CNIL sur le nouveau répertoire, voilà les trois préalables essentiels qui font défaut à ce texte. C’est la raison pour laquelle nous voterons la motion tendant à opposer la question préalable !

M. Charles Gautier. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Madame la garde des sceaux, je me fais une autre idée du débat parlementaire et du débat politique tout court. Je pourrais moi aussi céder à la facilité et vous dire que le Président de la République, qui a organisé toute sa propagande sur le thème de la sécurité, ne s’en trouve pas pour autant récompensé par sa cote de popularité… Mais ce genre d’argument n’a pas sa place au Parlement !

La motion tendant à opposer la question préalable est parfaitement justifiée. En tant que parlementaires, nous nous devons, avant tout, d’identifier les objectifs que nous voulons atteindre.

Certes, en apparence, nos positions peuvent sembler converger. Notre groupe entend, lui aussi, encourager toute mesure propre à prévenir les crimes et la récidive, et faire en sorte que justice soit rendue.

Pourtant, à force de constater que nous légiférons à tour de bras, que nous en sommes à la quatrième loi sur la récidive et à la dix-septième en matière pénale depuis 2002, avec le succès que l’on sait, il est légitime de se poser des questions. C’est bien ce que nous faisons au travers de cette motion, en vous interrogeant, principalement, sur la réalité des moyens permettant d’évaluer l’action du législateur dans ce domaine.

Cette inflation législative n’est-elle qu’un affichage permanent ? En tout cas, elle aboutit à des résultats que vous-même semblez ignorer. Pour vous justifier, vous vous contentez de dire qu’il y a des crimes. Oui, c’est un fait, il y a des crimes horribles ! Et, pour répondre à vos insinuations, la compassion, l’empathie à l’égard des personnes qui souffrent est largement partagée, y compris, je vous l’assure, par les membres du Parti communiste !

En l’espèce, notre désaccord est total. Non, nous ne faisons pas œuvre législative en refusant de procéder, au préalable, à une évaluation de notre action, et en continuant à adopter, en permanence, des lois d’affichage qui se succèdent les unes aux autres, sans que les professionnels, et encore moins nos concitoyens, comprennent les raisons qui nous poussent à légiférer de nouveau ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)

Mme Éliane Assassi. Très bien !

M. le président. Je mets aux voix la motion n° 1, tendant à opposer la question préalable.

Je rappelle que l'adoption de cette motion entraînerait le rejet du projet de loi.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe UMP. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Quelle perte de temps !

M. le président. Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que l’avis du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 156 :

Nombre de votants 340
Nombre de suffrages exprimés 325
Majorité absolue des suffrages exprimés 163
Pour l’adoption 138
Contre 187

Le Sénat n'a pas adopté.

En conséquence, nous passons à la discussion des articles.

Chapitre Ier

Dispositions relatives à la rétention de sûreté et à la surveillance de sûreté

Question préalable
Dossier législatif : projet de loi tendant à amoindrir le risque de récidive criminelle et portant diverses dispositions de procédure pénale
Article 1er A (Texte non modifié par la commission)

Article additionnel avant l'article 1er A

M. le président. L'amendement n° 14 rectifié, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Avant l'article 1er A, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La loi n° 2008-174 du 25 février 2008 relative à la rétention de sûreté et à la déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental est abrogée.

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il faut que les choses soient très claires. Cet amendement vise à abroger la loi instaurant la rétention de sûreté. Ce n’est pas faute d’avoir, en son temps, longuement débattu du problème, mais il est évident que nous n’avons pas été entendus !

Il était inconcevable que le Conseil constitutionnel valide l’application rétroactive de la rétention de sûreté à des personnes condamnées avant la publication de la loi. Il l’a donc censurée. Mais il a, en revanche, validé le reste du texte et admis le principe d’une peine après la peine. Or, comme vous le savez, nous sommes totalement hostiles à une telle possibilité.

Nous nous soucions évidemment de combattre la récidive et de suivre les criminels dangereux ! Mais le sujet en cause se situe à la limite entre la psychiatrie et la justice. Or la loi relative à la rétention de sûreté le traite sur un mode qui ne nous paraît pas du tout adapté. C’est la raison pour laquelle nous avons déposé cet amendement de suppression.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Je le dis une fois encore, il ne faut pas confondre notre travail de législateur avec la tapisserie de Pénélope ! Nous n’avons pas à défaire en 2010 ce qui a été fait en 2008 ! Si la loi du 25  février 2008   relative à la rétention de sûreté a été votée, c’est parce que nous sommes, en majorité, favorables à l’existence de cette peine. Notre souhait est qu’elle soit appliquée à dose particulièrement homéopathique.

Il va de soi que la commission ne peut être que défavorable à cet amendement.

M. Jean-Louis Carrère. Achille est revenu ! (Sourires.)

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. Nous sommes ici pour élaborer un texte de loi répondant à de vraies problématiques.

Ces problématiques, elles sont de deux natures. Il s’agit, d’abord, de remplir l’obligation qui nous a été faite par le Conseil constitutionnel de nous adapter à un certain nombre d’exigences nouvelles auxquelles ne répondait pas le texte de 2008. Nous allons nous y employer en prenant pour base le rapport Lamanda qui nous aidera à faire une œuvre législative utile, cohérente avec les observations du Conseil constitutionnel et avec la loi précédente.

Il s’agit, ensuite, de tenir compte d’un certain nombre de problèmes, dont aucun d’entre vous ne conteste la réalité, et qui sont d’une actualité moins récente qu’on ne le dit puisqu’ils durent depuis de longs mois. Aujourd’hui encore, un quotidien régional que j’ai cru apercevoir sur certaines travées relate l’agression d’un jeune garçon par une personne récidiviste. Nous voyons bien que les problèmes sont réels.

Cela ne signifie pas pour autant que les lois précédentes ne servaient à rien ! Bien sûr qu’elles ont une utilité ! Mais l’expérience met en évidence un certain nombre de lacunes que nous allons nous efforcer de combler de la façon la plus pragmatique possible.

Je ne prétends pas que le texte qui a été soumis à votre commission était parfait. J’ai moi-même exprimé, à l’Assemblée nationale, mon désaccord sur un certain nombre d’amendements qui ont néanmoins été adoptés.

Il est d’autant plus important et utile d’améliorer encore, par des amendements, la rédaction telle qu’elle ressort du travail remarquable effectué par votre rapporteur, afin d’aboutir à un texte qui réponde aux problématiques que j’ai évoquées.

Ce texte, je le répète, ne s’apparente nullement à une affaire de communication avant des élections ! Soumis à l’Assemblée nationale voilà déjà un certain temps, la faible publicité qui l’entoure nous donne l’occasion de travailler en toute sérénité. Mon souhait est que nous l’abordions de la façon la plus sereine et la plus pragmatique possible, animés par le souci de répondre à une attente de nos concitoyens. Pour satisfaire leur aspiration à vivre plus en sécurité, il nous reste à régler les quelques problèmes en suspens. Ils ne concernent qu’un faible nombre de personnes et nous n’aurons pas à porter atteinte aux libertés. Encore faut-il les résoudre pour éviter ces drames humains qui ressurgissent régulièrement et qui montrent que la situation actuelle n’est pas satisfaisante.

Ce qui est en cause, ce n’est pas une absence de moyens. Pour pallier celle qui existe dans d’autres domaines, la loi de finances pour 2010 a consenti des efforts importants qui devront être poursuivis.

Même si nous disposions de toute une panoplie de moyens, notamment pour la réinsertion, des moyens dont certains dépendent d’ailleurs non du ministère de la justice, mais du ministère de la santé – nous sommes ici dans le domaine de la psychiatrie  – il subsisterait néanmoins des problèmes. Et ce texte va permettre de les régler.

Je pense, en particulier, au cas où une personne condamnée à la suite d’une agression grave ou d’un crime, enfreint l’interdiction de revenir à proximité de sa victime. Le projet de loi apporte une réponse sur laquelle j’ai cru comprendre que l’ensemble de l’hémicycle s’accorde.

Encore faut-il accepter le débat. Le Sénat a rejeté les deux motions de procédure. Cet amendement vise, à nouveau, à empêcher l’examen du projet de loi. Abordons-le, essayons de l’améliorer ! Après quoi, vous voterez les uns et les autres en fonction de votre conviction. Mais il faut commencer par élaborer le texte le mieux adapté pour régler un certain nombre de problèmes.

C’est la raison pour laquelle le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14 rectifié.

J’ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe de l’UMP.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que l’avis du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 157 :

Nombre de votants 340
Nombre de suffrages exprimés 339
Majorité absolue des suffrages exprimés 170
Pour l’adoption 152
Contre 187

Le Sénat n'a pas adopté.

Article additionnel avant l'article 1er A
Dossier législatif : projet de loi tendant à amoindrir le risque de récidive criminelle et portant diverses dispositions de procédure pénale
Article additionnel après l'article 1er A

Article 1er A

(Non modifié)

Le deuxième alinéa de l’article 706-53-13 du code de procédure pénale est complété par les mots : « ou, lorsqu’ils sont commis en récidive, de meurtre, torture ou actes de barbarie, viol, enlèvement ou séquestration ».

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 16 est présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

L'amendement n° 39 est présenté par MM. Anziani et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel et Badinter, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Éliane Assassi, pour présenter l'amendement n° 16.

Mme Éliane Assassi. L’article 1er A introduit par l’Assemblée nationale ajoute à la qualification d’aggravation pour les actes visés, celle de récidive. Or, comme le précise le rapport de la commission des lois, « l’état de récidive peut être considéré comme une circonstance générale d’aggravation- susceptible de porter la peine encourue à la réclusion criminelle à perpétuité ».

Autrement dit, quand la récidive est constituée, elle aggrave la répression de l’infraction poursuivie en augmentant le maximum de la peine encourue. Pourquoi les députés de la majorité ont-ils ajouté cette précision ? Étant donné la philosophie du texte que nous examinons, même corrigé par la commission des lois, il est à craindre que cette nouvelle rédaction ne cache une volonté de faire de la rétention de sûreté une modalité « ordinaire » de la peine, alors qu’elle doit demeurer une décision exceptionnelle, selon l’article 706-53-13 du code de procédure pénale.

Comme nous éprouvons beaucoup de craintes en la matière, nous demandons la suppression de l’article 1er A.

M. le président. La parole est à M. Alain Anziani, pour présenter l'amendement n° 39.

M. Alain Anziani. Nous avons contesté et refusé de voter la loi qui avait institué la rétention de sécurité. Or aucun élément nouveau ne justifie, à notre avis, l’extension proposée par le rapporteur de l’Assemblée nationale.

Au nom de la cohérence, nous demandons évidemment la suppression de cette extension. (M. Jean-Pierre Michel applaudit.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Aux termes de l’article 706-53-13 du code de procédure pénale, la rétention de sûreté est applicable aux crimes d’assassinat ou de meurtre, de torture ou actes de barbarie, de viol, d’enlèvement ou de séquestration commis sur mineurs et, à la condition qu’ils aient fait l’objet de circonstances aggravantes, commis sur majeurs.

Le législateur de 2008 n’avait cependant pas prévu, s’agissant des majeurs, que ces mêmes crimes, commis en état de récidive légale, entrent dans le champ d’application de la rétention de sûreté. Or, comme Mme Assassi en est d’ailleurs convenue, l’état de récidive peut être considéré comme une circonstance générale d’aggravation qu’il importe également de prendre en compte.

Les conditions de la récidive légale sont suffisamment strictes pour que l’on ne puisse vraiment pas parler de « banalisation » de la rétention de sûreté ! Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. À mon sens, le texte issu des travaux de la commission comble une réelle lacune ; M. le rapporteur vient d’ailleurs de le souligner. Il convient évidemment de conserver de telles dispositions.

C'est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces deux amendements.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 16 et 39.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 1er A.

(L'article 1er A est adopté.)

Article 1er A (Texte non modifié par la commission)
Dossier législatif : projet de loi tendant à amoindrir le risque de récidive criminelle et portant diverses dispositions de procédure pénale
Article 1er

Article additionnel après l'article 1er A

M. le président. L'amendement n° 15, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Après l'article 1er A, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le troisième alinéa de l'article 706-53-13 du code de procédure pénale est complété par quatre phrases ainsi rédigées :

« La situation de tous les condamnés susceptibles de faire l'objet d'une rétention de sûreté doit être examinée dès le premier mois qui suit leur condamnation. Les personnes condamnées sont ainsi placées pour une durée de six semaines au centre national d'observation. À l'issue de cette évaluation, un parcours individualisé d'exécution de la peine est déterminé sur la base d'une concertation entre l'administration pénitentiaire, l'autorité judiciaire et l'autorité sanitaire. Ce parcours fait l'objet d'une actualisation au cours de la détention. »

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il s’agit d’un amendement de repli. J’avais d’ailleurs déposé un amendement similaire lors de l’examen du projet de loi relatif à la rétention de sûreté et à la déclaration d’irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental.

Selon M. le rapporteur, la demande que je formule dans cet amendement serait déjà satisfaite par la loi du 25 février 2008. (M. le rapporteur acquiesce.) Or permettez-moi de vous dire que ce n’est pas le cas !

Certes, en apparence, il y a effectivement une similitude entre ce que je prône et le dispositif prévu par la loi. Mais, pour bien connaître les conditions dans lesquelles les évaluations sont menées dans les établissements pénitentiaires, je continue de penser que l’évaluation doit se faire dès l’incarcération !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Notre différend avec Mme Nicole Borvo Cohen-Seat porte sur une période de onze mois.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur. En effet, lors de l’examen du projet de loi relatif à la rétention de sûreté et à la déclaration d’irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental, nous avions prévu que les personnes susceptibles de faire l’objet d’une rétention de sûreté seraient soumises à deux évaluations, la première ayant lieu dans l’année suivant l’incarcération et la seconde se déroulant un an avant la sortie de prison.

Il est, me semble-t-il, important qu’il puisse y avoir une certaine stabilisation de la personne avant de procéder à l’évaluation. Ainsi, selon le Centre national d’observation de Fresnes, une durée d’observation relativement importante est nécessaire, car les deux premières semaines sont quasiment perdues.

De la même manière, le projet de loi n’interdit pas que l’évaluation puisse avoir lieu avant l’expiration du délai de douze mois ; cela peut se faire plus tôt. Simplement, nous offrons la possibilité d’utiliser ce délai. Il s’agit de condamnations qui sont longues. Je ne vois donc pas l’intérêt de modifier le texte sur ce point.

En réalité, nous partageons pleinement les préoccupations qui sous-tendent l’amendement de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Je serais même tenté de dire que nous allons plus loin. En effet, alors qu’elle propose de placer la personne au Centre national d’observation pour une durée de six semaines, le projet de loi prévoit une durée de six semaines « au moins ».

Pour le reste, nous proposons exactement la même chose en matière de mise en place du parcours individualisé d’exécution de la peine.

Pour toutes ces raisons, l’avis de la commission est défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. À l’instar de M. le rapporteur, j’estime que la demande de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat est déjà prise en compte non seulement par la lettre la loi du 25 février 2008 relative à la rétention de sûreté et à la déclaration d’irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental, mais également par l’esprit de la loi du 24 novembre 2009 pénitentiaire.

Vos préoccupations, madame la sénatrice, me paraissent donc totalement satisfaites. C’est la raison pour laquelle j’aurais tendance à solliciter le retrait de cet amendement.

M. Charles Revet. Sait-on jamais ? (Sourires.)

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. À défaut, l’avis du Gouvernement serait défavorable.

M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Madame la garde des sceaux, monsieur le rapporteur, vous m’en voyez désolée, mais je persiste et signe !

Je n’ai pas forcément l’esprit de contradiction, mais procéder à une évaluation dès l’incarcération ou dans un délai d’un an, ce n’est pas exactement la même chose ! Sans doute me rétorquerez-vous qu’il est difficile de faire l’évaluation dans les deux premières semaines. Soit… Mais un délai d’un an, c’est énorme !

Bien entendu, quand j’évoque l’évaluation dès l’incarcération, cela peut être dans le premier ou les deux premiers mois qui suivent. Une évaluation au bout d’un an d’emprisonnement, ce n’est vraiment pas la même chose. La question est capitale. L’essentiel est que la prise en charge commence dès l’incarcération à la suite d’une condamnation ; il s’agit alors de la sanction de l’acte qu’on a commis.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 15.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article additionnel après l'article 1er A
Dossier législatif : projet de loi tendant à amoindrir le risque de récidive criminelle et portant diverses dispositions de procédure pénale
Article 1er bis

Article 1er

I (nouveau). –  Avant le dernier alinéa de l’article 706-53-14 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« La commission vérifie également que la personne condamnée a effectivement été mise en mesure de bénéficier, pendant l’exécution de sa peine, d’une prise en charge médicale, sociale et psychologique adaptée au trouble de la personnalité dont elle souffre ».

II. – (Non modifié) L’article 706-53-15 du même code est ainsi modifié :

1° Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« La juridiction régionale de la rétention de sûreté ne peut prononcer une rétention de sûreté qu’après avoir vérifié que la personne condamnée a effectivement été mise en mesure de bénéficier, pendant l’exécution de sa peine, d’une prise en charge médicale, sociale et psychologique adaptée au trouble de la personnalité dont elle souffre. » ;

2° Le troisième alinéa est complété par les mots : « et de l’alinéa précédent. »

M. le président. L'amendement n° 17, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. L’article 1er constitue incontestablement une amélioration.

En effet, il prévoit que la personne condamnée bénéficie, pendant l’exécution de la peine, d’une prise en charge médicale, sociale et psychologique adaptée au trouble de la personnalité dont elle souffre et que cette vérification est préalable à tout placement en rétention de sûreté.

Cependant, nous y sommes opposés, et ce pour deux raisons.

D’une part, cet article s’inscrit dans le cadre de la rétention de sûreté. C’est donc par cohérence que nous nous y opposons.

D’autre part, madame la garde des sceaux, monsieur le rapporteur, votre refus de notre précédent amendement démontre à l’évidence que nous n’avons pas la même conception de la prise en charge de la personne incarcérée.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?