M. le président. La parole est à Mme Bernadette Bourzai, sur l'article.

Mme Bernadette Bourzai. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, j’interviens à la demande de Jean-Luc Fichet, dont je partage les propos, puisque j’ai eu la chance d’être pendant douze ans présidente du conseil d’administration de l’École forestière de Meymac, en Corrèze, et représentante de la région Limousin au conseil d’administration de l’EPLEA de Neuvic.

Voilà deux établissements qui, comme ma collègue Brigitte Gonthier-Maurin vient de le dire, ont fusionné, ce qui ne manque pas de provoquer de nombreuses difficultés.

Si nous ne pouvons que nous réjouir des avancées introduites à l’article 1er quater, nous constatons cependant que cet article ne résout en rien le problème fondamental de l’enseignement agricole, celui de son financement.

Si j’avais déposé un amendement à ce sujet, cela aurait été en pure perte, car il aurait été rejeté sous couvert de l’article 40. Je ne peux donc qu’alerter le Gouvernement pour que, enfin, il agisse et donne à l’enseignement agricole les moyens qui lui sont indispensables.

Les lycées agricoles, sous-dotés en personnels, sont pourtant un formidable outil. Ils permettent, ce qui est rare actuellement, d’offrir un débouché réel aux élèves. Leur performance est reconnue. Il s’ensuit une forte attractivité de ces établissements. Leurs effectifs ont d’ailleurs connu une forte croissance à partir de 1993, avec une accélération de 25 % en quatre ans, pour se stabiliser depuis 2000 à un niveau élevé. Par ailleurs, leur image s’est nettement améliorée.

De plus, les lycées agricoles permettent aux familles modestes de trouver un cadre accueillant et de proximité et à leurs enfants de suivre une formation efficace, d’obtenir un diplôme reconnu et d’accéder à un emploi intéressant.

Pourtant, rien dans la réforme du lycée n’évoque la spécificité de cet enseignement et son originalité pédagogique, qui vient d’être reconnue par nos collègues. On peut également citer en exemple les maisons familiales rurales, qui offrent, selon les régions, des perspectives intéressantes à plus d’un titre.

Les établissements publics et privés accueillent les jeunes comme les adultes pour des formations en alternance et offrent des débouchés aussi variés que les formations sont enrichissantes, allant de l’environnement à la formation aux diverses productions, de l’aménagement de l’espace aux services à la personne.

Cet apprentissage est une réelle chance, notamment pour ceux qui sont en rupture de scolarité, puisqu’il offre un avenir prometteur au sein du monde professionnel, au sein du monde du travail pour tous.

Plus généralement, les lycées agricoles participent au développement des territoires ruraux, en luttant contre la désertification accrue de nos campagnes. À ce titre, un récent rapport du ministère de l’alimentation, de l’agriculture et de la pêche pointe le rôle majeur que joue l’enseignement agricole dans un contexte de renouveau des campagnes françaises.

De mon point de vue, le Gouvernement n’a pas assez pris conscience de l’intérêt que présente cet enseignement.

Depuis des années, des postes d’enseignant et de personnels administratifs sont supprimés : 126 postes l’ont été en 2004, 94 en 2005, 210 en 2006 et 106 en 2008. Au niveau national, il manque actuellement 560 postes d’enseignant ! En somme, le nombre d’élèves progresse, mais les crédits affectés à cet enseignement ne suivent pas, et nous ne pouvons que le regretter.

Par ailleurs, un millier de contractuels travaillent dans ces lycées, mais ils ne sont rémunérés que dix mois sur douze et souffrent de la précarité d’une année scolaire à l’autre.

Mme Nathalie Goulet. C’est vrai !

Mme Bernadette Bourzai. L’enseignement agricole est notoirement sous-doté,…

Mme Nathalie Goulet. Tout à fait !

Mme Bernadette Bourzai. … et, « bénéficiant » de surcroît de la révision générale des politiques publiques, il subit de plein fouet une politique de rigueur budgétaire. L’enseignement agricole est le parent pauvre de l’éducation, alors qu’il présente, comme l’a souligné Mme Férat, un taux d’insertion professionnelle exceptionnel !

Mme Nathalie Goulet. C’est vrai !

M. Paul Raoult. Tout à fait !

Mme Bernadette Bourzai. D’ailleurs, notre collègue défend, chaque année, dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances, un amendement visant à prendre sur les crédits du ministère de l’éducation nationale les ressources nécessaires pour combler le déficit de la filière de l’enseignement agricole.

La logique comptable qui est ici à l’œuvre va donc à l’encontre de l’intérêt des élèves.

Pourtant, l’enseignement agricole ne forme que 20 % des agriculteurs ; son intitulé n’était d’ailleurs pas représentatif de la palette des potentiels qu’il recouvre. En dépit de l’excellent travail de Françoise Férat, avoir modifié la dénomination de l’enseignement et de la formation agricoles pour adopter la formule « enseignement et formation professionnelle aux métiers de la nature, de l’agriculture et des territoires » ne relève que du toilettage et ne changera rien aux problèmes de fond, prégnants depuis de nombreuses années.

Je me réjouis cependant que l’on ait pris le tournant du développement durable et que l’on offre la possibilité de mener des expérimentations sur des innovations agricoles et agroalimentaires, ainsi que des expérimentations pédagogiques. Mais ces belles paroles devront être suivies des moyens adéquats !

En effet, nous débattons actuellement d’un projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche qui préfigure l’agriculture et le monde rural de la future PAC, celle d’après-2013. Les enjeux sont énormes et les besoins de formation immenses. Il faut donc que l’enseignement agricole soit en mesure d’y faire face.

Pour conclure, je reprendrai une formule employée par Edgar Pisani devant les élèves de l’EPLEA de Tulle-Naves, établissement qui porte désormais son nom : « Il faut apprendre à cultiver plus en protégeant la nature et faire en sorte que la nourriture produite soit à la disposition de tous les hommes ».

Parole d’expert que celle de l’un des pères fondateurs de la PAC qui est lucide sur les évolutions nécessaires ! En effet, il s’agit de passer d’une conception principalement quantitative à une conception qualitative. Vaste programme…

M. le président. La parole est à Mme Odette Herviaux, sur l'article.

Mme Odette Herviaux. Comme je souscris pleinement aux propos de mes collègues Brigitte Gonthier-Maurin et Bernadette Bourzai, je me bornerai à formuler quelques remarques.

À l’instar de Françoise Férat, je me félicite qu’un article relatif à l’enseignement agricole ait été inséré dans ce projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche. Il aurait été dommage de faire l’impasse, dans un tel texte, sur ce qui est à l’origine même de la formation de nos agriculteurs !

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. C’est la moindre des choses !

Mme Odette Herviaux. En revanche, je ne partage pas tout à fait le sentiment de Françoise Férat lorsqu’elle affirme que la formation agricole souffre d’un déficit d’image. Peut-être est-ce différent selon les régions, mais, en Bretagne, je puis vous en assurer, la qualité de la formation agricole dispensée au fil des années est telle que nos agriculteurs se sont globalement identifiés à leurs établissements de formation d’origine, éprouvant même le sentiment d’être viscéralement attachés à cet enseignement.

M. Gérard César, rapporteur. Tout à fait !

Mme Odette Herviaux. Après les collègues qui se sont exprimées sur cet article, je m’inquiète de la diminution des crédits affectés à l’enseignement agricole, que l’on constate tous les ans. Cela nous contraint, en effet, à puiser dans le budget du ministère de l’éducation nationale les ressources nécessaires pour combler le déficit.

Néanmoins, subsistent des problèmes importants, que nous devrons attaquer de front. Même si nous modifions sa dénomination, même si cet enseignement doit s’adapter aux évolutions en cours, le cœur de métier reste tout de même l’agriculture. Si seulement 20 % des jeunes qui choisissent cette voie se destinent aux métiers de l’agriculture, alors nous devons vraiment nous interroger sur l’avenir des exploitations à but pédagogique.

Cet aspect du problème doit réellement être pris en compte, car, si nous voulons que ces exploitations évoluent, nous devrons financer de nouvelles mises aux normes. Or, comme nous leur demandons de présenter des comptes équilibrés, ces exploitations doivent être rentables. Mais comment les exploitations à but pédagogique pourraient-elles être rentables, si, outre la gestion quotidienne, elles doivent se préoccuper de pédagogie et de formation ?

Si l’on ouvre trop les métiers à la nature, aux territoires, ce qui n’est pas, en soi, inconcevable, où sera la barrière entre l’enseignement agricole et l’éducation ? Il faudra bien un jour répondre à cette question.

M. le président. L'amendement n° 243, présenté par Mme Gonthier-Maurin, MM. Le Cam et Danglot, Mmes Didier, Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéa 9

Remplacer le mot :

assure

par les mots :

peut assurer

et les mots :

peut dispenser

par le mot :

dispenser

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. L’article 1er quater prévoit de modifier l’article L. 811-8 du code rural pour tirer les conséquences de la loi d’orientation agricole de 1999, avec notamment la création, dans un délai de cinq ans, de « lycées d’enseignement général, technologique et professionnel agricole », en lieu et place des lycées d’enseignement général et technologique agricoles et des lycées professionnels agricoles.

Notons, toutefois, que ladite loi, qui devait entrer en application dans les cinq ans, n’est toujours pas appliquée à la totalité des établissements agricoles.

Ce rappel étant fait, notre amendement porte sur une autre modification prévue dans cet article, qui introduit, de manière assez insidieuse, l’obligation pour tout établissement public local d’enseignement et de formation professionnelle agricole, donc pour tout EPLEFPA, de dispenser une formation générale, technologique et professionnelle initiale.

Aujourd’hui, nombre de lycées agricoles ne dispensent pas la totalité de ces formations initiales. Créer une telle obligation pour tous ces établissements aura pour effet de créer des regroupements factices.

Par cette disposition, vous voulez, monsieur le ministre, favoriser les fusions entre les lycées, les centres de formation d’apprentis, les CFA, et les centres de formation professionnelle, les CFP, avec pour conséquence, dans une logique de réduction des dépenses publiques, la diminution du nombre de postes, notamment d’enseignant, au détriment des contenus pédagogiques et de la spécificité des publics accueillis.

Faciliter les fusions, si nécessaire, dans une logique présupposée d’économie de moyens, tel est, me semble-t-il, le véritable objectif.

C’est pourquoi nous souhaitons, par cet amendement, supprimer l’obligation faite à ces établissements de dispenser ces trois formations, en leur permettant de continuer à remplir leurs missions de proximité, dans un esprit de coopération.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard César, rapporteur. Notre collègue propose de rendre facultatif le fait pour un établissement public local d’enseignement et de formation professionnelle agricole de dispenser les trois types de formation, générale, technologique et professionnelle.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Il ne s’agit pas de le rendre facultatif ; il s’agit de supprimer l’obligation ! Il y a une petite nuance…

M. Gérard César, rapporteur. L’article 1er quater introduit par la commission réaffirme l’obligation pour tout EPLEFPA de dispenser une offre de formation initiale complète. Cette obligation figurait déjà dans la loi d’orientation agricole de 1999, mais elle ne concernait que les lycées.

Cet article maintient donc une exigence de formation élevée, tout en adaptant celle-ci à l’organisation de ces établissements.

En conséquence, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bruno Le Maire, ministre. Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement.

L’objectif est bien évidemment de conserver les trois formations, mais il nous semble trop lourd et trop rigide de l’exiger d’un seul lycée. Nous estimons qu’il est plus souple de le faire au niveau d’un établissement public, mais je sais bien que vous ne serez pas d’accord avec ce choix.

Par exemple, dans mon département, l’Eure, je ne pense pas que le fait de regrouper ces trois formations dans deux lycées agricoles distants de quelques kilomètres, l’un à Chambray et l’autre au Neubourg, pose de réels problèmes. Cette mesure ne peut qu’apporter plus de souplesse, offrant certainement aussi la possibilité à ces établissements d’être plus spécialisés, et donc plus performants encore.

M. Gérard César, rapporteur. Tout à fait !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 243.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 402, présenté par M. Lecerf et Mme Descamps, est ainsi libellé :

Alinéa 9

Compléter cet alinéa par les mots :

et reçoit à cette fin de l'État les postes d'enseignants nécessaires pour faire face aux besoins générés par les programmes officiels

Cet amendement n'est pas soutenu.

L'amendement n° 595, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :

Alinéa 13

Compléter cet alinéa par les mots :

permettant notamment de développer l'autonomie des exploitations agricoles

La parole est à M. Jacques Muller.

M. Jacques Muller. Cet amendement vise à compléter le rôle dévolu aux lycées agricoles concernant la démonstration, l’expérimentation et la diffusion de techniques nouvelles.

Il apporte une précision qui me paraît intéressante dans la mesure où il vise à promouvoir l’autonomie des exploitations agricoles.

Je rappelle ici que toute technique nouvelle n’implique pas une diminution de la consommation d’intrants ou, si l’on préfère, toute technique nouvelle ne permet pas d’accroître l’autonomie des exploitations. On l’a vu, l’utilisation de semences hybrides permet des rendements plus élevés, mais, de fait, elle suppose une consommation accrue d’intrants. J’en veux pour preuve, concernant les élevages laitiers, le passage de l’herbe au modèle intensif fondé sur l’association du maïs et du soja, qui induit, une fois encore, une augmentation des intrants.

Dans le cadre des techniques nouvelles censées être diffusées par les lycées et les exploitations agricoles, il me semble utile d’indiquer un cap - il ne s’agit en aucun cas d’une obligation -, notamment dans le sens de l’autonomie des exploitations agricoles.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard César, rapporteur. Monsieur le président, la précision apportée par cet amendement ne paraît pas utile.

L’article 1er quater indique déjà que les ateliers technologiques ou les exploitations agricoles à vocation pédagogique contribuent – c’est un point très important ! – à la diffusion des techniques nouvelles, ce qui inclut bien entendu le développement de l’autonomie des exploitations agricoles.

Cet amendement étant superflu, la commission y est défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bruno Le Maire, ministre. Le Gouvernement y est également défavorable, et pour les mêmes raisons.

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Je veux simplement souligner que, dans notre bon département de l’Orne, nous travaillons déjà depuis très longtemps sur ces questions.

Voilà environ deux ans, lors de l’examen des crédits affectés aux ministères de l’agriculture et de l’éducation nationale, nous avions déjà proposé de transformer l’appellation « lycée agricole » pour y introduire la notion de « développement durable ». La Basse-Normandie mène d’ailleurs, en la matière, une politique d’envergure, précise et efficace.

Tous les responsables des lycées agricoles – en tout cas, ceux de Basse-Normandie ! – sont parfaitement conscients des objectifs.

Chez nous, cet amendement est largement satisfait !

M. le président. La parole est à M. Jacques Muller, pour explication de vote.

M. Jacques Muller. Monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, vos observations ne m’ont pas convaincu. Une technique nouvelle ne permet pas, en soi, de réduire les intrants ou de développer l’autonomie de l’exploitation.

J’ai travaillé pendant vingt-cinq ans dans un lycée agricole, qui était déjà, eu égard à ce qui se pratiquait alentour, à l’avant-garde en termes d’économies d’intrants et de rotation des cultures, ce qui nous mettait parfois en porte-à-faux.

J’ai moi-même piloté une expérimentation pédagogique sur plusieurs années. Avec les élèves, nous pratiquions une auto-évaluation de la durabilité de l’exploitation agricole et dressions un autodiagnostic ouvert à la profession et, entre autres, à l’INRA, l’Institut national de la recherche agronomique.

M. Gérard César, rapporteur. C’est bien !

M. Jacques Muller. La démarche était intéressante, mais, lorsque nous communiquions nos résultats et mettions en exergue nos ratios, nous avions parfois quelque peine à convaincre la profession, dans une région qui pratique la monoculture de maïs labellisée « raisonnée », avec une consommation d’intrants que vous pouvez imaginer. En effet, lorsque l’on fait de la monoculture, il faut traiter, sinon, avec la chrysomèle – elle est là ! -, c’est la catastrophe.

Lorsque les élèves présentaient les critères de rotation notamment, on les regardait un peu comme des Martiens !

Pour toutes ces raisons, il me semblerait judicieux d’inscrire dans la loi que, au nom du développement durable, les techniques nouvelles doivent permettre une plus grande autonomie des exploitations et, par conséquent, une réduction de la consommation d’intrants.

Nous sommes là de nouveau au cœur des problématiques de souveraineté alimentaire, de réduction de la consommation d’intrants et d’énergies fossiles ; aussi, je n’insiste pas.

L’adjonction de l’adverbe « notamment » permettrait de fixer un cap bien utile pour les lycées qui s’engagent dans cette voie, sans que ce soit une obligation.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 595.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 244, présenté par Mme Gonthier-Maurin, MM. Le Cam et Danglot, Mmes Didier, Schurch, Terrade et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :

Alinéa 14

Supprimer les mots :

et dispose d'un centre relevant de chacune des catégories mentionnées aux 2° et 3°

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Par cet amendement, qui procède de la même logique que celui que nous avons précédemment défendu, nous souhaitons supprimer l’obligation nouvelle pour les EPLEFPA de dispenser tous les types de formation initiale et continue.

À cet égard, monsieur le rapporteur, je précise qu’il s’agit pour nous non pas de transformer en une simple faculté, mais bien de supprimer purement et simplement l’obligation nouvelle pour ces établissements de disposer d’un centre de formation pour adultes ou d’un centre de formation professionnelle, ainsi que d’ateliers technologiques ou exploitations agricoles à vocation pédagogique.

La raison est la même : cette obligation ne correspond pas à la réalité de la composition des établissements, notamment en milieu rural, et aurait pour effet de provoquer des fusions, dont les avantages en termes d’économies budgétaires ont été détaillés, mais qui ne se retrouvent pas en ce qui concerne la qualité et la proximité de l’enseignement public agricole.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard César, rapporteur. Cet amendement procède de la même logique que l’amendement n° 243, que Mme Gonthier-Maurin a défendu il y a quelques instants.

La commission émet donc un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bruno Le Maire, ministre. Pour des raisons identiques à celles qu’il a exposées tout à l’heure, le Gouvernement émet lui aussi un avis défavorable.

Il nous semble préférable de répartir les activités dans le cadre de l’établissement public plutôt que les regrouper sur un seul et même lycée.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 244.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 245, présenté par Mme Gonthier-Maurin, MM. Le Cam et Danglot, Mmes Didier, Schurch, Terrade et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :

Alinéas 17, 18, 26 et 27.

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Cet amendement vise à supprimer les alinéas permettant l’expérimentation pédagogique dans les établissements agricoles, publics et privés.

Nous ne sommes pas fondamentalement opposés à l’idée d’expérimentation pédagogique ; elle peut en effet ouvrir la voie à de nouvelles pratiques innovantes et fructueuses. Néanmoins, cette expérimentation, dans un domaine aussi important que celui de l’éducation, ne doit pas se faire sans initiative et cadre nationaux, sans suivi ni contrôle, et devrait déboucher sur une évaluation sincère avant toute généralisation. C’est pourtant l’inverse qui nous est proposé avec cet article.

Il est introduit pour chaque établissement, sous réserve de validation de l’autorité académique, la possibilité d’effectuer des expérimentations de cinq ans au maximum sur l’enseignement et l’organisation pédagogique.

Cette possibilité est un nouveau pas vers l’autonomisation des établissements, qui auront désormais carte blanche en matière d’expérimentation, sans que l’État les encadre.

Nous sommes opposés à cette autonomisation croissante des établissements Elle a pour effet de créer une grande disparité entre les différents établissements du territoire, allant ainsi à l’encontre du principe même d’égalité face à l’éducation et créant à terme une véritable concurrence entre les établissements et sur la valeur des diplômes.

Ce mode de gestion est fondamentalement opposé à la vision que nous avons de l’enseignement, fondée sur un accès égal de tous et sur tout le territoire.

M. le président. L'amendement n° 246, présenté par Mme Gonthier-Maurin, MM. Le Cam et Danglot, Mmes Didier, Schurch, Terrade et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :

Alinéa 18

I. - Première phrase, après les mots :

Sous réserve de l'autorisation préalable de l'autorité académique

insérer les mots :

et après avis du comité technique paritaire régional

II. - Compléter cet alinéa par les mots et une phrase ainsi rédigée :

effectuée par l'inspection de l'enseignement agricole. Chaque année, le Gouvernement remet au parlement un rapport présentant le bilan des différentes expérimentations entreprises sur tout le territoire.

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Il s’agit d’un amendement de repli.

Nous sommes opposés, comme je viens de l’expliquer, à ce dispositif d’expérimentation. S’il doit néanmoins entrer en application, nous souhaitons au moins qu’il s’effectue dans un cadre précis et déterminé.

Ainsi, nous pensons indispensable que le comité technique paritaire régional donne son avis sur le projet d’expérimentation de l’établissement public, outre le fait que celui-ci doit être validé par l’autorité académique.

En effet, ce comité a pour rôle de se prononcer sur l’organisation générale des services, en particulier sur leur organisation interne, sur la répartition des services, sur les méthodes et techniques utilisées au travail, ainsi que sur les questions touchant aux effectifs et à la situation des personnels contractuels dans la fonction publique.

Il est ainsi logique qu’il soit associé à cette démarche d’expérimentation, afin d’en prendre connaissance et de s’exprimer sur ce sujet, pour lequel il est compétent.

Nous souhaitons ensuite qu’un suivi de ces expérimentations soit effectué sur le plan national, afin qu’elles fassent l’objet d’un véritable contrôle, mais aussi d’une véritable analyse.

On pourrait ainsi éviter la reproduction d’expérimentations infructueuses et systématiser, sur le plan national, les expériences positives.

Nous souhaitons donc que l’évaluation annuelle telle qu’elle est proposée à cet alinéa soit effectuée par l’inspection de l’enseignement agricole.

En plus de cette évaluation, le Gouvernement doit présenter chaque année, devant le Parlement, un rapport listant, présentant et évaluant les différentes expérimentations menées sur l’ensemble du territoire.

Il est en effet important que les représentants de la Nation, dans leur mission de contrôle de l’action du Gouvernement, puissent disposer d’études leur permettant de connaître la réalité de l’enseignement agricole et d’alimenter leur réflexion en la matière.

M. le président. L'amendement n° 249, présenté par Mme Gonthier-Maurin, MM. Le Cam et Danglot, Mmes Didier, Schurch, Terrade et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :

Alinéa 27 :

I. - Première phrase, après les mots :

Sous réserve de l'autorisation préalable de l'autorité académique

insérer les mots :

et après avis du conseil régional d'enseignement agricole privé

II. - Compléter cet alinéa par les mots et une phrase ainsi rédigée :

effectuée par l'inspection de l'enseignement agricole. Chaque année, le Gouvernement remet au parlement un rapport présentant le bilan des différentes expérimentations entreprises sur tout le territoire.

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Ce sont des cadences infernales, monsieur le président ! (Sourires.)

Là encore, il s’agit d’un amendement de repli.

Même si nous demeurons opposés au dispositif d’expérimentation ici prévu, nous proposons néanmoins des conditions minimales d’encadrement si ce dernier voit tout de même le jour.

Cet amendement vise à transposer les mesures de contrôle des expérimentations à l’enseignement privé. Ainsi, en lieu et place du comité technique paritaire régional, l’autorité compétente pour l’enseignement privé est le conseil régional d’enseignement agricole privé.

Notre amendement reprend exactement les mêmes dispositions que pour l’enseignement agricole public : les expérimentations font l’objet d’un suivi sur le plan national, l’inspection de l’enseignement agricole effectuant une évaluation annuelle ; le Gouvernement présente un rapport annuel au Parlement listant, présentant et évaluant les différentes expérimentations menées par l’enseignement agricole privé sur l’ensemble du territoire.