M. Jean-Jacques Mirassou. Et vous aurez bien raison !

M. le président. La parole est à M. Philippe Adnot, pour explication de vote.

M. Philippe Adnot. Quand Gérard Bailly parle de huit financeurs pour un projet de 80 000 euros, je pense qu’il fait une légère confusion. Ce sujet n’a strictement rien à voir avec la clause générale de compétence.

Mon cher collègue, avec le texte qui nous est soumis, les financements croisés resteront possibles pour les communes d’une certaine importante, ce qui posera d’ailleurs d’autres problèmes, mais nous y reviendrons. Quoi qu’il en soit, ne pas restaurer la clause générale de compétence ne réglera pas la question qui vous occupe.

Cela étant dit, à l’instar de Bruno Retailleau, je pense que l’amendement qui vise à accorder la clause générale de compétence aux intercommunalités n’est pas opportun. Reste que si l’amendement n° 166 rectifié était adopté, tous les autres amendements en discussion commune, dont le mien, deviendraient sans objet.

Monsieur le rapporteur Jean-Patrick Courtois, l’explication que vous avez fournie tout à l’heure n’est pas bonne. Selon l’article 35, le conseil général – ou régional – « peut en outre, par délibération spécialement motivée, se saisir de tout objet d’intérêt départemental [ou régional] pour lequel la loi n’a donné compétence à aucune autre personne publique ». Autrement dit, si la loi accorde une compétence à une collectivité, mais que celle-ci ne l’exerce pas, que faisons-nous ?

La clause générale de compétence permet de prendre des initiatives en cas de blancs, et des blancs il y en aura toujours. Il faut donc se laisser un peu de liberté. Si vous aviez prévu l’hypothèse selon laquelle une collectivité n’exerce pas la compétence qu’elle a reçue, nous pourrions discuter. Las, cela ne figure nulle part à l’article 35. (M. le rapporteur le conteste.) J’ai lu attentivement votre texte, monsieur le rapporteur !

Je le répète, il ne s’agit pas ici de financements croisés, il s’agit de savoir si oui ou non on pourra encore prendre des initiatives. La réponse est fondamentale.

La loi va accorder la compétence économique aux régions, pour reprendre l’exemple que j’ai cité tout à l’heure. Si celles-ci ne l’exercent pas, personne ne fera rien ?

Dans mon département, le conseil général a construit une université. En effet, pour tout ce qui concerne l’enseignement supérieur, c’est lui qui assure la maîtrise d’ouvrage, avec l’accord de la région et de l’État. Et demain, il ne pourra plus le faire ? Je peux vous garantir que, au lieu de réaliser des économies, c’est le contraire qui va se passer. Si on nous confie la maîtrise d’ouvrage, c’est bien que nous sommes les mieux placés pour le faire.

Mes chers collègues, s’il y en a un parmi vous qui a eu un problème avec la clause générale de compétence, qu’il se lève et le dise. Je mets au défi quiconque de le faire, car personne n’en a jamais eu.

Nous pouvons donc voter en toute confiance l’amendement n° 166 rectifié. Qu’il soit présenté par le groupe CRC-SPG n’est en rien gênant, puisque c’est le même que le nôtre. Il faut tenir compte de l’esprit dans lequel il a été rédigé, à savoir la capacité de prendre des initiatives.

Restaurer la clause générale de compétence ne retirerait rien au texte. Cela serait simplement élégant de votre part de nous laisser prendre cette responsabilité.

M. le président. J’informe le Sénat que l’amendement n° 303, qui avait été présenté par Mme Schillinger, a été retiré.

Je confirme en outre ce que vient de dire Philippe Adnot : si l’amendement n° 166 rectifié était adopté, les autres amendements en discussion commune n’auraient plus d’objet.

La parole est à Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

M. Pierre-Yves Collombat. J’ai un problème avec la fine dialectique de Michel Mercier.

Si j’ai bien compris, monsieur le ministre, vous nous avez dit que, en l’état, le texte autorisait la compétence générale ou, tout du moins, permettait aux collectivités d’intervenir.

M. Michel Mercier, ministre. Non !

M. Pierre-Yves Collombat. Je n’avais donc pas compris.

Les collectivités, en particulier la région et le département, ne pourront pas intervenir dans d’autres domaines que ceux qui auront été limitativement énumérés par la loi.

M. Michel Mercier, ministre. C’est faux !

M. Pierre-Yves Collombat. Ah ! Le problème avec vous, c’est qu’on a droit à différentes versions.

Reprenons donc ce qui est écrit : « Le conseil régional règle par ses délibérations les affaires de la région dans les domaines de compétences que la loi lui attribue ». Il ne pourra donc pas intervenir dans des domaines qui ont été attribués à d’autres personnes publiques.

M. Michel Mercier, ministre. Très juste !

M. Pierre-Yves Collombat. Prenons l’exemple de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur.

Si l’on décide que la ressource en eau est du ressort du département, cette région ne pourra pas lancer un grand plan d’économie d’eau ou de résorption des pertes en vue d’améliorer la ressource sur son périmètre au motif que la compétence ne lui a pas été attribuée, bien que ce soit un domaine d’intérêt régional. La notion d’intérêt régional, départemental ou communal, qui définit en creux la notion de compétence générale, n’est donc pas du tout compatible avec l’exercice de compétences exclusives.

Si l’on interprète le projet de loi dans ce sens, on risque de priver le département et la région de toute possibilité d’intervention dans des domaines de leur intérêt. Il serait donc bon d’éclaircir ce point.

M. le président. La parole est à M. Gérard Miquel, pour explication de vote.

M. Gérard Miquel. Nous traitons d’un point fondamental du texte : la clause générale de compétence.

Ce projet de loi fait suite à deux rapports très importants : le rapport Balladur et le rapport Belot. Le premier préconisait l’« évaporation », à terme, de la commune dans la communauté de communes et du département dans la région. Je sais que vous l’aviez bien compris ainsi, mes chers collègues.

C’est donc l’objectif que poursuit le Gouvernement. Mais qu’attendez-vous pour le dire, monsieur le ministre ?

La commune conserve la clause générale de compétence.

Mon département totalise 170 000 habitants, répartis dans 340 communes. Certaines d’entre elles comptent entre 80 et 200 habitants. J’ai présidé aux destinées de l’une de ces communes pendant trente-trois ans. Elles sont dans l’incapacité d’exercer la compétence générale, mais on la leur laisse, alors qu’on la supprime aux seules collectivités qui sont en mesure de l’exercer efficacement !

M. Didier Guillaume. Eh oui ! C’est ça la réalité !

M. Gérard Miquel. Mes chers collègues, nous sommes passés en quelques années de la politique du guichet du début de la décentralisation, voire avant, à la politique du projet. Les collectivités – la région, le département, les communes et les communautés de communes – savent désormais œuvrer à des projets communs et planifier leurs investissements. Elles travaillent dans le cadre de conventions clairement établies, avec un certain nombre d’objectifs précis.

Par ailleurs, notre pays est composé de collectivités de tailles très différentes et les problèmes se posent différemment si le département est composé de petites communes ou de grandes agglomérations.

Cher collègue Gérard Bailly, nous ne devons pas nous inquiéter. Nous devons instaurer des règles, ce qui a déjà été fait dans certaines collectivités. De petits projets ont des financements multiples. Il suffit de régler le problème dans le cadre de conventions entre les divers financeurs et de mettre en place des dispositifs permettant de limiter le montant de départ des subventions. Au-dessous d’un certain montant, nous ne devrions pas verser de subventions. Un tel dispositif permettrait de régler le problème que vous avez évoqué.

La clause générale de compétence mérite un débat tel que celui que nous avons aujourd'hui. Monsieur le ministre, il vous faut entendre le Sénat et faire confiance à sa sagesse, que vous connaissez puisque vous avez siégé parmi nous pendant de nombreuses années et que vous avez exercé votre mandat avec talent.

M. le président. La parole est à M. Michel Teston, pour explication de vote.

M. Michel Teston. La suppression de la clause générale de compétence a souvent été présentée comme la solution à l’enchevêtrement des compétences des collectivités territoriales. À l’évidence, avec ce projet de loi, le Gouvernement fait sienne cette analyse. Or elle me paraît erronée. Je vais essayer d’expliquer pourquoi.

Je commencerai par faire un bref rappel : la clause générale de compétence donne à chaque collectivité territoriale la possibilité d’intervenir dès lors qu’il existe un intérêt local suffisant justifiant son intervention. Le Conseil d’État dans divers arrêts, notamment en 1995 dans l’arrêt Commune de Villeneuve d’Ascq, a effectivement estimé qu’une collectivité peut intervenir dans des domaines qui ne relèvent pas matériellement de sa compétence, à la condition que cela présente un intérêt direct pour la population locale.

Une des limites les plus fortes à l’extension de la compétence générale tient à l’existence de compétences précisément attribuées à d’autres autorités publiques.

En fait, la question de la simplification de l’éventail des interventions des collectivités territoriales est à mon sens résiduelle par rapport à la trop grande imprécision des textes régissant les compétences desdites collectivités.

En effet, nous le constatons souvent, les textes législatifs en vigueur définissent généralement de manière floue les compétences attribuées aux collectivités territoriales. Mieux, il est arrivé que le législateur décide de n’exclure aucun niveau parmi les collectivités territoriales, créant ainsi les conditions d’une intervention conjointe de chacune d’elles.

Pour illustrer mon propos, permettez-moi de citer un exemple que tout le monde connaît : le domaine économique. Depuis la loi Raffarin du 13 août 2004, la région exerce un rôle de coordination dans ce domaine, mais les autres collectivités territoriales se sont également vu reconnaître une certaine compétence, « en creux », comme le disent un certain nombre de juristes.

Selon moi, cet exemple montre que la clause générale de compétence n’a en réalité aucun effet sur l’enchevêtrement des interventions des différents échelons territoriaux. Le vrai débat est à l’évidence ailleurs, comme l’a clairement démontré en son temps le rapport Lambert.

Il convient donc de ne pas supprimer la clause générale de compétence, qui est nécessaire. Aussi, je vous invite, mes chers collègues, à voter tous les amendements qui visent à la maintenir. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume, pour explication de vote.

M. Didier Guillaume. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, pourquoi insistons-nous sur ce sujet ?

Un sénateur de l’UMP. On se le demande !

M. Didier Guillaume. Le présent projet de loi suscitera des discussions, vraisemblablement des négociations. Nous avons évoqué tout à l’heure le problème de la péréquation. Il sera difficile d’avancer sur cette question, mais nous allons essayer d’y parvenir. Peut-être l’avis sera-t-il unanime sur ce sujet. En revanche, concernant le conseiller territorial, qui constitue le cœur de la réforme, ce sera sûrement très dur.

Mes chers collègues – je m’adresse notamment aux sénateurs de la majorité, et ce très sereinement –, je vous rappelle qu’aucune association généraliste d’élus ne demande la suppression de la clause générale de compétence : ni l’Association des maires de France, ni l’Assemblée des départements de France, ni l’Association des régions de France, ni l’Association des petites villes de France, ni l’Association des maires de grandes villes de France, ni l’Association des communautés urbaines de France.

M. Bruno Sido. Et les maires ruraux ! (Sourires sur les travées de lUMP.)

M. Didier Guillaume. Ni l’Association des maires ruraux ! (M. Bruno Sido se gausse.) Mon propos est sérieux, mon cher collègue ! Si elles ne demandent pas la suppression de cette clause, c’est tout simplement parce que l’ensemble des élus et leurs représentants pensent qu’elle permet aux collectivités locales, que ce soit les départements ou les régions, de réaliser des investissements innovants sur tout le territoire et de garantir une véritable cohésion territoriale. De nombreux exemples ont déjà été donnés.

Ne confondons pas les financements croisés et la clause générale de compétence. Lorsqu’un département décide d’assurer la maîtrise d’ouvrage pour une opération dans l’enseignement supérieur ou pour un laboratoire de recherche, c’est grâce à la clause générale de compétence et dans l’intérêt général. Si cette clause était supprimée, mes chers collègues, les financements innovants, ce serait fini !

Si nous faisons du haut débit, du très haut débit et de la fibre optique, c’est parce que la clause générale de compétence nous permet de le faire.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Mais non !

M. Didier Guillaume. Si cette clause était supprimée, nous ne pourrions pas réaliser de tels investissements.

M. Didier Guillaume. Tout le monde est d’accord sur ce point.

Un texte mi-figue mi-raisin ne satisfera personne : ni nous, parce que nous considérons qu’il n’ira pas assez loin, ni même, peut-être, les sénateurs de la majorité, qui voient bien qu’il s’agit d’une sorte de rattrapage, un retour en deuxième semaine.

Nous devons être attentifs à l’intérêt des collectivités locales, en particulier des petites communes. Mon département, comme celui de Gérard Miquel, compte de nombreuses petites communes, en l’occurrence cent communes de moins de cent habitants. Tous les jours, les élus de ces communes nous disent que sans les investissements du département, ils ne peuvent rien faire. Je pense bien sûr à la traverse du village, mais également à la construction de la salle intercommunale d’animation.

J’ai bien écouté tout à l’heure les arguments de M. le ministre, qui s’efforçait de nous expliquer avec conviction la position du Gouvernement. Concrètement, monsieur le ministre, la suppression de la clause générale de compétence, c’est la fin des investissements, notamment dans les territoires ruraux. (Non ! sur les travées de lUMP.) Personne, mes chers collègues, ne peut démontrer objectivement l’inverse. Personne !

Dès lors que les départements ne pourront plus assurer la maîtrise d’ouvrage, les investissements cesseront. Si vous me démontrez que tel ne sera pas le cas, je suis prêt à l’entendre ? Mais, pour l’instant, vous ne le démontrez pas, monsieur le ministre !

C’est pourquoi nous sommes très attachés à la clause générale de compétence, qui est l’un des points durs du projet de loi. La clause générale de compétence est, ne l’oublions pas, un outil d’aménagement du territoire.

Si l’un des amendements est adopté,…

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Cela ne changera rien !

M. Didier Guillaume. … peu importe lequel puisqu’ils ont tous le même objet, peu importe qu’il ait été déposé par le groupe CRC-SPG, le groupe socialiste ou Philippe Adnot, la clause générale de compétence sera maintenu et personne ne se reniera.

Le Gouvernement trouvera toujours un élément sur lequel s’appuyer pour arguer que cela va dans le sens souhaité par les élus. Il dira que, comme nous, il défend les territoires et les élus et qu’il défend donc leurs positions.

Une fois de plus, le Sénat aura fait la démonstration qu’il sait être autonome et qu’il n’a qu’un seul objectif. Nous sommes les élus des collectivités territoriales, que nous représentons.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Vous êtes des féodaux !

M. Didier Guillaume. Parce que les collectivités territoriales – elles sont unanimes sur un sujet tel que celui-ci – nous demandent de maintenir ou de rétablir la clause générale de compétence, nous devons faire œuvre utile et voter l’un de ces amendements. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Yves Daudigny, pour explication de vote.

M. Yves Daudigny. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, ce sujet, c’est vrai, est grave et central. Je suis évidemment d’accord avec les arguments qui ont été présentés sur les travées voisines. En particulier, je tiens à dire à notre collègue Bruno Retailleau combien sa démonstration a été convaincante et que je partage totalement son opinion. Mais il nous faut aller au bout du raisonnement, comme vient de nous y inviter Didier Guillaume.

Pourquoi ce dispositif ? Quelle est sa finalité ? Le but n’est certainement pas de clarifier la répartition des compétences. Il n’est pas non plus de permettre de réaliser des économies. La construction d’une école coûtera toujours aussi cher. Peu importe qui la fait construire, l’essentiel pour le citoyen étant qu’elle existe.

J’ai participé samedi dernier à l’inauguration en pleine ruralité d’une piscine. C’est un défi insensé !

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. C’est sûr ! Qui financera son fonctionnement ?

M. Yves Daudigny. Si cette piscine a été construite, c’est grâce à la volonté commune des collectivités locales, à la solidarité totale entre l’ensemble des élus de toutes les communes, le président de la communauté de communes et les conseillers territoriaux (Exclamations amusées sur les travées de lUMP. – M. Philippe Dallier applaudit.), pardon, les conseillers communautaires !

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. C’est un bon début ! (Sourires.)

M. Yves Daudigny. C’est aussi grâce aux financements croisés du département et de la région.

L’objectif du dispositif qui nous est proposé est bien de réduire l’action publique. Le but est qu’il y ait demain moins de services rendus dans les communes, c'est-à-dire moins d’équipements réalisés, moins de routes, de salles construites, moins d’équipements sportifs, etc.

Les conséquences, nous pouvons facilement les mesurer : ce sera soit l’abandon progressif de certains territoires, qui vont s’appauvrir, soit le remplacement de l’action publique par l’initiative privée exclusivement. Nous avons souvent vu ce que cela donnait ! François Patriat a évoqué tout à l’heure l’exemple du haut débit. Si un jour l’ensemble du territoire français dispose du haut débit, ce sera non pas grâce au marché, mais grâce à l’action publique.

Tous les territoires sont donc aujourd'hui en danger. Certains sont des territoires ruraux, d’autres des territoires urbains ne disposant pas d’une surface économique suffisante, d’une université ou d’un centre de transfert de technologie permettant un développement naturel. Dans ces endroits, l’initiative publique est nécessaire.

Ne faisons pas preuve d’hypocrisie : nous sommes dans un cycle. Dans un premier temps, le Gouvernement a réduit les moyens des collectivités territoriales, par la suppression de la taxe professionnelle, et, demain, par la réduction des dotations. Dans un deuxième temps, il diminue le nombre d’élus, ce qui signifie moins de contacts, moins de projets, moins d’initiatives. Enfin, dans un troisième temps, il réduit les compétences. La boucle est bouclée : moins d’argent, moins d’élus pour les mettre en œuvre, moins de compétences. Les territoires vont s’appauvrir. Tel est bien le but que le Gouvernement cherche à atteindre. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Yann Gaillard, pour explication de vote.

M. Yann Gaillard. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je suis très embarrassé par ce débat. Je n’avais pas du tout l’intention d’intervenir sur ce sujet, mais il se trouve que, après m’être livré à d’autres activités, notamment après avoir assisté à l’audition de François Baroin par la commission des finances, je suis entré dans l’hémicycle au moment du plaidoyer de Philippe Adnot, qui n’est pas précisément mon ami.

M. Jean-Pierre Sueur. Cela peut s’arranger ! (Sourires.)

M. Yann Gaillard. Mais, lorsque nous en avions parlé voilà quelques mois, j’avais pris l’engagement, devant les communes de l’Aube, d’appuyer sa position sur la clause générale de compétence. Je ne peux pas me déjuger, ne serait-ce que par égard pour les communes de mon département. C’est pourquoi je voterai cet amendement, sans prêter attention à l’appartenance politique de ses signataires car, de toute façon, là n’est pas la question. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste.)

M. Philippe Adnot. Merci, monsieur Gaillard !

M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, pour explication de vote.

M. Roland Courteau. Je suis étonné que le Sénat, grand conseil des communes de France, ne se mobilise pas franchement en faveur du maintien de la clause générale de compétence.

Au-delà des propos très justes de mes amis, sur lesquels je ne reviendrai pas, je voudrais rappeler que la solidarité territoriale, telle qu’elle vient d’être défendue, est essentielle dans nos régions. Claude Domeizel l’a d’ailleurs dit tout à l’heure avec beaucoup de pertinence et d’à-propos.

C’est l’existence même de nos petites communes qui est en jeu, car, sans cette solidarité territoriale, elles vont mourir. En effet, comment voulez-vous que des petites communes de 50, 100, 150 ou 200 habitants puissent exister ? Comment voulez-vous qu’elles puissent assurer un minimum de services et de confort à leurs habitants si vous supprimez la clause générale de compétence, si vous taillez à la serpe dans la solidarité territoriale ?

Oui, ce sera, à très court terme, la disparition de ces petites communes. Mais peut-être est-ce finalement le but visé ?

En fait, comme Gérard Miquel le rappelait voilà quelques instants, vous voulez, à l’instar du rapport Balladur, que les communes « s’évaporent ».

Dans ce cas, il faudra assumer vos responsabilités !

En revanche, si vous êtes attachés à l’existence des communes, notamment des plus petites d’entre elles, mes chers collègues, de grâce, préservez cette liberté, et permettez aux autres collectivités de continuer à leur venir en aide.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, écoutez simplement la sagesse qui s’exprime sur ces travées. Il y va de l’existence de nos petites communes et de l’aménagement équilibré du territoire. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Yves Détraigne, pour explication de vote.

M. Yves Détraigne. Je n’avais pas prévu d’intervenir sur ce sujet, pour la simple raison que les amendements dont nous débattons tendent à insérer des articles additionnels avant l’article 1er AA, et que le problème des compétences est, pour sa part, traité à l’article 35 du projet de loi.

M. Bruno Sido. Eh oui !

M. Yves Détraigne. J’ai l’impression que certains de nos collègues jouent la montre. Qui plus est, dans les diverses interventions, on mélange allégrement la clause générale de compétence et les cofinancements, ce qui n’est pas tout à fait la même chose, me semble-t-il. Si je comprends bien, la clause générale de compétence, c’est la liberté pour une collectivité d’intervenir sur son territoire, quel que soit le sujet, ce qui est différent de la liberté donnée à un département ou à une région de subventionner un projet porté par une commune ou une communauté de communes. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.) Cette question sera réglée à l’article 35. (Applaudissements sur plusieurs travées de l’Union centriste et sur les travées de lUMP.)

Je veux bien entrer quelques instants dans votre jeu à l’aide d’un exemple, mes chers collègues : j’ai actuellement dans ma commune un dossier important, qui concerne à la fois notre communauté de communes et une communauté de communes voisine. Or il se trouve précisément que le département et la région se renvoient la balle pour le financement : chacune des deux collectivités attend que l’autre fasse le premier pas, mais chacune évoque d’autres priorités, avançant des contraintes budgétaires liées, notamment, aux frais de remise en état de la voirie à la suite de l’hiver particulièrement rigoureux que nous avons connu cette année. Voilà bien un exemple de cofinancement où le dossier n’avance pas ! (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. Pierre Hérisson. Très bien !

M. Yves Détraigne. Je préférerais donc que les collectivités aient des moyens en rapport avec leurs compétences. Alors clarifions les choses, attribuons les moyens adéquats, évitons tout saupoudrage financier, et tout ira très bien ! (Applaudissements sur plusieurs travées de lUnion centriste et sur les travées de lUMP, ainsi qu’au banc des commissions)

M. le président. La parole est à M. Rémy Pointereau, pour explication de vote.

M. Rémy Pointereau. Je suis assez surpris d’entendre, depuis déjà de longues heures, nos collègues du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, surtout ceux qui président un conseil général, se plaindre de ne pas avoir de moyens financiers et, dans le même temps, demander le maintien de la clause générale de compétence. J’aperçois là une contradiction.

M. Didier Guillaume. Cela n’a rien à voir !

M. Rémy Pointereau. Dans tous les départements tenus par le parti socialiste, on cherche à faire peur aux associations et aux communes, en leur disant que, si la clause générale de compétence est supprimée, la collectivité départementale ne pourra plus les aider.

Mais, si vous votez en faveur de la création des conseillers territoriaux, ils pourront jongler avec les compétences de la région et du département.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Bien sûr !

M. Rémy Pointereau. Ils pourront, à un moment donné, se réunir au niveau régional et, dans un souci de cohérence, soit définir un schéma de compétences partagées entre le département et la région, par exemple dans les domaines de la culture, du sport ou de l’aide aux communes, soit confier certaines compétences exclusivement à la région, notamment en matière de formation, d’économie ou d’infrastructures – on a évoqué les lignes à grande vitesse, les LGV, ou les nouvelles technologies – et d’autres au département, en matière sociale, d’éducation – pourquoi ne pas regrouper la gestion des collèges et des lycées ? –, ou encore d’aménagement rural, ce qui permettra aux départements d’aider les communes rurales.

M. Gérard Miquel. Cela ne figure pas dans le projet de loi !

M. Rémy Pointereau. Je ne vois pas ce qui pose problème, sauf à considérer que la clause générale de compétence permet de faire du clientélisme, notamment lorsqu’on aide des associations parfois loufoques.

M. Roland Courteau. N’importe quoi !

M. Rémy Pointereau. Je vois des cas absolument aberrants dans mon département du Cher.

Pourtant, voilà longtemps que ce département a abandonné la compétence générale, puisqu’il n’aide déjà plus les communes, et qu’il leur demande même une participation financière pour l’installation généralisée du haut débit…

Croyez-vous vraiment qu’il soit opportun de conserver la clause générale de compétence, alors que vos collègues l’ont déjà abandonnée ?

C’est pourquoi je souhaite que les choses soient clarifiées, et que l’on introduise davantage de cohérence et de simplicité dans la loi. (Applaudissements sur les travées de lUMP et au banc des commissions.)