M. Jean-Pierre Sueur. Je suis très choqué, mon cher collègue !

M. Louis Nègre. Vous dites, monsieur Sueur, qu’il existe déjà un certain nombre de dispositifs en la matière.

M. Louis Nègre. Je le sais bien, mais ces dispositifs sont malheureusement insuffisamment appliqués.

Par ailleurs, l’actualité le montre, la situation a évolué par rapport aux décennies antérieures. Aujourd'hui, on voit des gosses de treize ans s’assassiner entre eux !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C’est un autre sujet !

M. Louis Nègre. C’est simplement un constat. Mais face à un tel constat, ma démarche est simple : plutôt que d’avancer de grands principes, je me demande de quelle manière de telles dérives peuvent être évitées.

L’arrêté « couvre-feu » a été pris chez moi, avec, j’y insiste, l’aval de tous les groupes politiques composant mon conseil municipal,…

M. Louis Nègre. … et pas un seul Cagnois n’a protesté ! Aucun ! Tous ont estimé qu’il s’agissait d’une mesure de bon sens, tout simplement parce que c’est, d’abord et avant tout, une mesure protectrice de l’enfance.

Au demeurant, en prenant un tel arrêté, vous faites passer un message aux parents, qui sont quelquefois – vous l’avez souligné vous-même – en difficulté par rapport à leurs enfants : ils doivent être plus responsables encore parce que la société, la puissance publique, leur demandent de respecter cet arrêté. Cela ne fait que renforcer leur position.

Enfin, les mineurs que je rencontre le soir dans la rue sont tout à fait conscients de l’arrêté « couvre-feu » – en tout cas dans ma ville – et ils le respectent. En l’espace de dix ans, un seul mineur a franchi la ligne blanche !

Pour ma part, je considère qu’il s’agit d’une mesure responsable, digne d’une société qui s’occupe de ses mineurs. Il n’y a là aucune stigmatisation. Aucun des quartiers où le couvre-feu est en vigueur – vous savez très bien, mon cher collègue, qu’il est contraire à la jurisprudence du Conseil d’État d’instaurer le couvre-feu dans l’ensemble d’une commune ! – ne s’estime stigmatisé ! Bien au contraire, voilà une mesure qui les rassure !

J’en viens maintenant à la responsabilité des parents.

Aux termes de l’article 24 bis, le représentant de l’État intervient lorsque le fait, pour ces mineurs, de circuler les expose à un risque manifeste pour leur santé, leur sécurité, leur éducation ou leur moralité. Qui peut être contre ? Vous ? Nous, non ! Dès lors qu’il y a un risque manifeste – et c’est écrit noir sur blanc ! –, il est normal que la puissance publique intervienne. Sur ce point, nous nous rejoignons, mon cher collègue : nous ne pouvons laisser ces mineurs seuls, nous devons intervenir.

Les parents ont des droits, sans aucun doute, mais aussi quelques devoirs, on l’oublie trop souvent dans notre société. Si on le leur rappelle, il ne me semble pas que cela soit un mal, bien au contraire ! En leur rappelant leurs responsabilités, on leur apporte une aide.

Le conseil pour les droits et devoirs des familles que j’ai été amené à mettre en place permet d’aider les parents à assumer leurs responsabilités.

Telles sont les raisons pour lesquelles je considère que cet article est le bienvenu.

Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C’est de la rhétorique en boucle !

M. Louis Nègre. C’est de la pratique et du concret !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Non ! Qui, je voudrais bien le savoir, dit qu’un mineur peut se promener tout seul la nuit dans la rue ?

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Comment cela ? Personne n’a dit cela ! (M. Louis Nègre lève les bras au ciel.) Vous pouvez protester, c’est la vérité !

Tout citoyen et plus encore les forces de police ont le devoir de ramener dans sa famille un mineur qui se promène seul la nuit dans la rue. À défaut, cet enfant doit être pris en charge.

Quel est donc le sens de cet article ? Vous considérez, là encore, qu’il est nécessaire de renforcer un dispositif existant. Vous avez dit vous-même, monsieur Nègre, que le couvre-feu avait été instauré voilà dix ans dans votre ville. Les arrêtés municipaux existent et peuvent donc être utilisés ! Tout cela, c’est uniquement de la rhétorique.

En outre, avec cet article, vous stigmatisez les maires qui ne prendraient pas des arrêtés de couvre-feu et vous les chargez de la tâche de mettre en place des dispositifs permettant de faire respecter ces couvre-feux, car, à l’évidence, les forces de police existantes ne peuvent pas assumer ce devoir, qui est celui de tout un chacun, de ramener dans sa famille un mineur qui se promène la nuit ou de le confier aux services de protection de l’enfance.

Par ailleurs, par le biais d’un glissement rhétorique, vous établissez un lien entre les mineurs qui se promènent la nuit et les enfants de treize ans qui s’assassinent entre eux. Quel rapprochement !

Je ne peux vous laisser tenir ce langage. Même si votre parole, comme la nôtre, est libre, il n’en demeure pas moins qu’un tel discours est insupportable. Vous passez insidieusement de la protection des enfants, qui est un devoir pour tout citoyen et bien entendu pour l’État, aux enfants qui s’assassinent entre eux. Vous en rendez-vous compte ?

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Thérèse Hermange, pour explication de vote.

Mme Marie-Thérèse Hermange. S’il existe un glissement rhétorique, c’est celui qui consiste à opposer systématiquement la sanction à la correction et à l’éducation. Or, dans notre système de protection de l’enfance, il est question de « sanctions éducatives ». En effet, une mesure de sanction est aussi une mesure de correction et d’éducation, c'est-à-dire une mesure qui peut faire grandir.

Tout d’abord, elle peut permettre aux jeunes d’éviter de récidiver et de s’inscrire dans un parcours délinquant. Ensuite, comme l’a dit notre collègue Louis Nègre, elle peut constituer une aide pour la famille. Enfin, elle permet aussi, dans certains cas, d’épauler les services de protection de l’enfance. En effet, toutes celles et ceux qui ont œuvré dans ce domaine ont pu se rendre compte des oppositions qui se font souvent jour entre la justice, les conseils généraux et les parents. Parfois, certaines décisions de justice paraissent incongrues et personne ne réussit alors à trouver une réponse adéquate. À tel point que, dans un certain nombre de cas, nous ne savons pas ce que deviennent les enfants une fois qu’ils ne bénéficient plus des services de protection de l’enfance.

Lorsque je m’occupais de la protection de l’enfance à Paris, je me suis toujours demandé ce qu’allaient devenir les 10 000 enfants dont nous avions la charge et qui, un jour ou l’autre, seraient sans protection. Je ne suis pas sûre que les services de protection de l’enfance, tels qu’ils existent actuellement, réussissent toujours à mener à bien leur mission.

À mon avis, il ne faut pas opposer systématiquement sanction et éducation, sanction et correction. La mesure proposée par cet article permettra sans doute d’aider l’ensemble des partenaires. C’est la raison pour laquelle je la voterai. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.

M. Marc Laménie. J’ai écouté avec beaucoup d’attention et d’intérêt Jean-Pierre Sueur et Louis Nègre, qui se sont exprimés avec beaucoup de passion, évoquant tous deux leur expérience en tant que maires d’une ville.

Pour ma part, maire d’un petit village de moins de 200 habitants, je n’ai pas forcément la même analyse ni la même interprétation qu’eux. À propos de l’article 24 bis et de ces amendements identiques, on a plutôt évoqué les grandes villes de la région parisienne et de province. Il convient toutefois de ne pas oublier le monde rural.

Les petites communes rencontrent également des difficultés, dont on parle beaucoup moins. Leurs maires, qui ne disposent pas de personnel, se retrouvent seuls pour gérer ces problèmes humains, car, ne l’oublions pas, tout repose sur l’humain.

Selon moi, il serait dommage de ne pas adopter cet article. En effet, aucun texte n’est parfait à 100 %. Même si, en fonction de notre appartenance politique, nos analyses peuvent différer, nous avons tous le souci de la prévention, de la sécurité, de la protection de l’enfance, afin de ne pas oublier la dimension humaine de ces questions.

En tant que maire et, par conséquent, officier d’état civil, je donne lecture, lors de la célébration d’un mariage, des articles du code civil évoquant les droits et devoirs respectifs des époux, notamment en ce qui concerne l’éducation des enfants. Naturellement, la responsabilité des parents est toujours évoquée dans ce cadre.

Cet article permettra d’offrir de réelles garanties pour la sécurité des mineurs de treize ans, seuil qui sera naturellement susceptible d’évoluer. Considérant que les dispositions proposées vont dans le bon sens, je voterai l’article 24 bis.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 50, 157 et 246.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. L'amendement n° 7 rectifié, présenté par MM. J. Gautier, Buffet et Dassault, est ainsi libellé :

Alinéas 3 et 4

Rédiger ainsi ces alinéas :

II. - Lorsqu'un contrat de responsabilité parentale est conclu en application de l'article L. 222-4-1 du code de l'action sociale et des familles avec les parents d'un mineur de treize ans qui a fait l'objet d'une des mesures éducatives ou sanctions éducatives prévues par les articles 15 et 15-1 de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante et signalées par le procureur de la République au président du conseil général en application du deuxième alinéa de l'article L. 3221-9 du code général des collectivités territoriales, ou si le contrat n'a pu être signé du fait des parents ou du représentant légal du mineur, le préfet peut prononcer une mesure tendant à restreindre la liberté d'aller et venir du mineur, lorsque le fait pour celui-ci de circuler sur la voie publique entre 23 heures et 6 heures sans être accompagné d'un de ses parents ou du titulaire de l'autorité parentale l'expose à un risque objectif pour sa santé, sa sécurité, son éducation ou sa moralité.

La décision, écrite et motivée, est prise en présence du mineur et de ses parents ou du titulaire de l'autorité parentale. Elle énonce également la durée de la mesure ainsi que le territoire sur lequel elle s'applique. Elle n'entre en application qu'une fois notifiée au procureur de la République.

Cet amendement n'est pas soutenu.

L'amendement n° 158, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéa 6

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Cet amendement a été défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement tend à supprimer la faculté pour le préfet de remettre provisoirement le mineur aux services de l’aide sociale à l’enfance lorsque les représentants légaux de ce mineur ne veulent pas ou ne peuvent pas le recueillir. Cette solution paraît malheureusement la seule acceptable.

La commission a émis un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marie-Luce Penchard, ministre. Défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 158.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L'amendement n° 159 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

L'amendement n° 247 est présenté par MM. Sueur, Anziani, Peyronnet, Bel et C. Gautier, Mmes Klès et Boumediene-Thiery, MM. Yung, Michel, Frimat et Repentin, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Mahéas, Collombat, Sutour, Tuheiava, Collomb, Courteau, Guillaume, Berthou et Daunis, Mmes Ghali, M. André et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 7

Supprimer cet alinéa.

L’amendement n° 159 a été défendu.

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour présenter l’amendement n° 247.

M. Jean-Pierre Sueur. Il s’agit d’un amendement de repli.

En ce qui concerne le couvre-feu individuel, vous avez dû, monsieur le rapporteur, réécrire le texte du Gouvernement, car, pour des raisons d’inconstitutionnalité que vous exposez très précisément dans votre rapport aux pages 107, 108, 109, 110 et 111, il aurait été impossible de maintenir la rédaction initiale, sachant que la décision du couvre-feu individuel doit être prise par un juge des enfants. Je tenais à apporter cette précision pour bien montrer qu’il existe des limites au « tout-couvre-feu ».

Par ailleurs, permettez-moi, madame la ministre, de revenir sur votre argumentation. Vous avez affirmé qu’il fallait protéger les enfants. À l’évidence, je partage totalement cet objectif ! Simplement, vous n’avez pas expliqué en quoi la nécessité de défendre les enfants impliquait celle de créer un couvre-feu. Vous n’avez pas expliqué non plus pourquoi il était fondé de l’instaurer dans certains endroits et pas d’autres.

Or une telle décision va non seulement pointer du doigt les quartiers où le couvre-feu est en vigueur, mais surtout induire l’idée que, dans les lieux où tel n’est pas le cas, la question de la protection des enfants en danger ne se pose pas, ce qui est absurde !

Pour être conforme aux décisions du Conseil d’État, la mesure ne doit en aucun cas être générale, ce qui introduit, vous le savez bien, mon cher collègue, un véritable paradoxe : il est impossible qu’elle ne soit pas générale, puisqu’une mesure de protection de l’enfance s’applique partout à tous les enfants.

Par ailleurs, quelle efficacité pourrait avoir une telle décision ? S’il s’agit de disposer des forces de police spéciales dans l’ensemble des endroits où le couvre-feu existe pour vérifier qu’il n’y a pas d’enfants dans les rues, cela n’a pas de sens, vous le savez bien ! Les policiers, malheureusement en nombre moins important la nuit que par le passé, font face, dans les commissariats, à une activité souvent intense, les patrouilles étant sollicitées de toutes parts.

Si un enfant, qu’il se trouve ou non dans une zone concernée par le couvre-feu, est laissé à l’abandon, comme cela se produit quelques rares fois, il faut impérativement s’en occuper et le protéger.

Mes chers collègues, j’espère avoir réussi à démontrer que cette mesure n’est absolument pas nécessaire. En revanche, il existe une ardente obligation, pour tous et toutes, de venir en aide à l’enfance en danger. C’est une obligation morale et juridique à laquelle nul ne peut se soustraire.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Ces amendements visent à supprimer la contravention prévue pour le non-respect du couvre-feu.

Cette contravention est nécessaire pour donner une portée effective à cette mesure. Chacun comprend bien qu’une interdiction qui ne serait assortie d’aucune sanction en cas de non-respect ne servirait à rien.

Aussi, la commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marie-Luce Penchard, ministre. Avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 159 et 247.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 24 bis.

(L'article 24 bis est adopté.)

Article 24 bis
Dossier législatif : projet de loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure
Article 24 ter B

Article 24 ter A

Le premier alinéa de l’article L. 2211-4 du code général des collectivités territoriales est complété par une phrase ainsi rédigée :

« À cette fin, il peut convenir avec l’État ou les autres personnes morales intéressées des modalités nécessaires à la mise en œuvre des actions de prévention de la délinquance. »

Mme la présidente. L'amendement n° 376, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. La disposition prévue à cet article s’inscrit dans le fatras de mesures contenues dans le présent projet de loi. Bien entendu, l’idée, pour l’État, est de se décharger sur les collectivités locales de ses responsabilités en matière de sécurité et des charges financières qu’elles entraînent.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Le présent amendement tend à supprimer l’article 24 ter A, qui prévoit simplement la possibilité de passer des conventions entre les communes et l’État ou d’autres acteurs de la prévention de la délinquance. Cette disposition permettra d’améliorer la loi du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance.

Aussi, la commission émet un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marie-Luce Penchard, ministre. Avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 376.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 24 ter A.

(L'article 24 ter A est adopté.)

Article 24 ter A
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Article 24 ter C

Article 24 ter B

(Non modifié)

L’article L. 2211-5 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« L’échange d’informations est réalisé selon les modalités prévues par un règlement intérieur établi par le conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance sur la proposition des membres du groupe de travail. »

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L'amendement n° 160 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche.

L'amendement n° 251 est présenté par Mme Boumediene-Thiery, MM. Anziani, Peyronnet, Bel et C. Gautier, Mme Klès, MM. Sueur, Yung, Michel, Frimat et Repentin, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Mahéas, Collombat, Sutour, Tuheiava, Collomb, Courteau, Guillaume, Berthou et Daunis, Mmes Ghali, M. André et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour défendre l’amendement n° 160.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Après l’élargissement des données collectées par le biais des logiciels de fichage ultraperformants, qu’on peut étendre à l’ensemble de la population sans limite d’âge, extension sans véritable fondement au regard de la fiabilité douteuse de ces données, vous entendez autoriser un échange d’informations sur les mineurs, selon les modalités prévues par les règlements des conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance. La confidentialité des données échangées n’est en rien garantie. De plus, le dispositif concerne une population particulièrement fragile.

C’est la raison pour laquelle nous demandons la suppression de cet article.

Mme la présidente. La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, pour présenter l'amendement n° 251.

Mme Alima Boumediene-Thiery. L’article 24 ter B du projet de loi envisage un « échange d’informations » sur les mineurs dans le cadre des conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance, sans définir les modalités de mise en œuvre de cet échange.

En effet, celles-ci seront déterminées par le règlement intérieur de l’institution, sans aucune précision concernant notamment la confidentialité des informations échangées et le contenu des échanges.

L’article 24 ter B nous permet d’ailleurs de mieux prendre conscience de l’utilité de cet échange d’informations, puisqu’on y apprend que, en réalité, cet échange consiste en un fichage des mineurs ayant commis des infractions ; il s’agit ni plus ni moins d’un casier judiciaire bis, électronique, pour mineurs !

Se posent plusieurs questions : comment sera géré ce fichier ? Quel droit d’accès aux informations sensibles comportera-t-il ?

L’article ne renvoie pas à un décret, encore moins à la loi « Informatique et libertés ». Il prévoit que cet échange d’informations sera déterminé par le règlement intérieur du conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance.

Nous considérons que cette question, qui implique des informations sensibles, ne doit pas être laissée au règlement intérieur d’un simple groupe de travail.

En effet, un régime complet de cet échange, homogène sur tout le territoire, devrait être mis en place, ce que ne prévoit pas le projet de loi.

C’est la raison pour laquelle nous demandons la suppression de ce dispositif.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Ces deux amendements identiques visent à supprimer l’article 24 ter B, qui crée un règlement intérieur, comparable à une charte de déontologie, destiné à encadrer les échanges d’informations au sein des groupes de travail des CLSPD.

Aussi, la commission émet un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marie-Luce Penchard, ministre. Avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 160 et 251.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 24 ter B.

(L'article 24 ter B est adopté.)

Article 24 ter B
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Article 24 ter

Article 24 ter C

(Supprimé)

Mme la présidente. L'amendement n° 8 rectifié, présenté par MM. J. Gautier, de Legge et Dassault, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Après l'article L. 4111-2 du même code, il est inséré un article L. 4111-2-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 4111-2-1. - Dans le cadre de l'exercice des compétences de la région, le représentant de l'État dans la région peut conclure avec celle-ci une convention définissant les modalités de réalisation d'actions de prévention de la délinquance. »

Cet amendement n'est pas soutenu.

Article 24 ter C
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Article 24 quater

Article 24 ter 

L'article L. 222-4-1 du code de l'action sociale et des familles est ainsi modifié :

1° À la première phrase du premier alinéa, après les mots : « établissement scolaire », sont insérés les mots : « , de prise en charge d'un mineur au titre de l'article 24 bis de la loi n°… du … d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure » ;

2° Après la première phrase du premier alinéa, sont insérées deux phrases ainsi rédigées :

« Un contrat de responsabilité parentale peut également être signé à l'initiative des parents ou du représentant légal d'un mineur. Un contrat de responsabilité parentale est également proposé aux parents d'un mineur de 13 ans condamné pour une infraction lorsque cette condamnation a été signalée au président du conseil général dans le cadre d’un des groupes de travail et d’échange d’informations définis à l’article L. 2211-5 du code général des collectivités territoriales et lorsque cette infraction révèle une carence de l'autorité parentale. » ;

3° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque le contrat n'a pu être signé du fait des parents ou du représentant légal du mineur, le président du conseil général peut également leur adresser un rappel de leurs obligations en tant que titulaires de l'autorité parentale et prendre toute mesure d'aide et d'action sociales de nature à remédier à la situation. »

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L'amendement n° 161 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche.

L'amendement n° 249 est présenté par Mme Boumediene-Thiery, MM. Anziani, Peyronnet, Bel et C. Gautier, Mme Klès, MM. Sueur, Yung, Michel, Frimat et Repentin, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Mahéas, Collombat, Sutour, Tuheiava, Collomb, Courteau, Guillaume, Berthou et Daunis, Mmes Ghali, M. André et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour défendre l’amendement n° 161.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Nous nous opposons à possibilité ouverte par cet article au président du conseil général de proposer un contrat de responsabilité parentale aux parents de mineurs condamnés.

Je rappelle d’ailleurs que les dispositions créant le contrat de responsabilité parentale avaient été adoptées sans débat en recourant à l’article 49-3 de la Constitution. Et pour cause, puisque ce dispositif est un véritable outil de répression, incompatible avec l’accompagnement et l’aide des familles en difficulté.

Non seulement il confie cette décision à une autorité administrative, mais, en outre, il change la nature de l’intervention des professionnels des services éducatifs et sociaux des départements, car la contrainte et la sanction deviennent des parties intrinsèques de l’action des travailleurs sociaux. On peut s’interroger sur l’intérêt de cette mesure, sans compter les dégâts qui en résulteront dans les rapports entre les travailleurs sociaux et les populations.

Dans ce projet, seuls les parents et l’enfant sont considérés comme responsables de la situation. Contraire aux savoirs actuels, ce postulat est idéologique.

Le dispositif est surtout porteur de risques majeurs de crises au sein des familles. L’enfant « incriminé » deviendrait le responsable de la perte des prestations, suscitant ou renforçant des difficultés ou des tensions relationnelles entre lui et ses parents.

Cette mesure entraîne un effet de double stigmatisation : celle de l’enfant dans le regard de ses parents, celle des parents dans le regard de l’enfant. Des parents à ce point disqualifiés ne seraient plus vraiment des acteurs de leur vie. Le contrat de responsabilité parentale risque de créer ainsi plus de problèmes qu’il n’apporte de solutions.

De plus, ce contrat élimine de fait le service social scolaire. À aucun moment ce dernier n’est mentionné et aucun rôle ne lui est attribué. C’est totalement méconnaître la fonction de ce service essentiel et ses missions. Celle qui concerne la prévention de l’échec scolaire pourrait être renforcée. Le manque chronique de moyens attribués à ce service, comme à l’ensemble du service public de l’éducation, et ce depuis des années, est totalement éludé par le recours au contrat de responsabilité parentale.

Le constat est clair : le contrat de responsabilité parentale ne constitue en rien une solution aux problèmes auxquels il est censé répondre. Le choix de cette « nouveauté » apparaît davantage justifié par une volonté de répondre à une pensée sécuritaire où chaque acte est isolé de nombre des éléments qui le provoquent, où chaque situation n’est considérée qu’au travers de la transgression qui en est l’aboutissement, où la responsabilité entière est portée par la personne, et ce quel que soit son âge.

C’est la raison pour laquelle nous demandons la suppression de cet article.

Mme la présidente. La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, pour présenter l'amendement n° 249.

Mme Alima Boumediene-Thiery. L’article 24 ter donne compétence au président du conseil général pour proposer aux parents de mineurs la signature d’un contrat de responsabilité parentale, dont le non-respect sera assorti de sanctions.

Les garanties entourant la création de ce contrat de responsabilité parentale sont très insuffisantes.

En premier lieu, à défaut de signature du contrat par les parents ou le représentant légal du mineur, le pouvoir conféré au président du conseil général de leur adresser un rappel à leurs obligations en tant que titulaires de l’autorité parentale est flou. En effet, la possibilité de prendre des mesures « d’aide et d’actions sociales de nature à remédier à la situation » recouvre une variété de moyens de pression.

Il aurait fallu définir avec précision les sanctions, afin d’éviter l’arbitraire de décisions prononcées en dehors de tout contrôle judiciaire, sans assistance d’un avocat ni droit de recours.

Je vous rappelle que, d’une part, une sanction n’est éducative que si elle est comprise par l’enfant, d’autre part, elle doit être prévue par la loi, accessible et intelligible.

Cet objectif à valeur constitutionnelle n’est pas respecté par la procédure prévue à cet article.

En second lieu, cet article ouvre la voie à la création de nouvelles mesures éducatives, non codifiées, échappant au contrôle du juge. Ainsi, on va créer, sous la responsabilité de l’administration, un dispositif de prise en charge administrative, s’ajoutant à celui qui existe déjà sous la responsabilité du juge.

Il en résultera fatalement des contradictions, puisque les deux procédures sont distinctes et qu’aucune passerelle n’est mise en œuvre par le texte entre cette autorité administrative et l’autorité judiciaire.

C’est la raison pour laquelle nous demandons la suppression du contrat de responsabilité parentale, qui n’est rien d’autre qu’un gadget sécuritaire masquant le renoncement de l’État à la prise en charge éducative des mineurs en détresse.