Mme la présidente. La parole est à M. le ministre du travail.

M. Éric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique. Madame la présidente, madame la présidente de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur général de la commission des affaires sociales, mesdames, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, je ne vais évidemment pas, en cet instant, refaire le débat sur les retraites… (Exclamations amusées sur les travées du groupe CRC-SPG.)

Mme Annie David. On peut, si vous le voulez !

M. Éric Woerth, ministre. Je n’ai aucun doute sur ce sujet ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

Je ne reviendrai pas davantage sur les propos de Nora Berra, de Nadine Morano ou de François Baroin. Je vais m’efforcer de répondre au mieux aux questions qui m’ont été posées.

Alain Vasselle et Jean-Jacques Jégou ont mis en exergue le contexte du déficit de nos comptes sociaux, comme nous le faisons déjà depuis maintenant plusieurs années.

M. François Autain. Il est antérieur à la crise.

M. Éric Woerth, ministre. Il est évidemment impératif de prendre des mesures financières de nature à résorber les déficits sociaux, et c’est ce que nous faisons avec le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011.

Monsieur Dassault, il est vrai que les charges sur les salaires sont déjà suffisamment élevées en France. Les charges salariales sont effet un facteur de fuite des industries de main-d’œuvre. Les propositions que vous avez présentées sur ce sujet ont déjà été examinées, et elles pourraient bien évidemment l’être de nouveau.

La résorption des déficits est certes liée aux recettes, mais elle dépend aussi d’une meilleure maîtrise de la dépense. C’est vrai pour le budget de l’État – François Baroin l’a rappelé à juste titre –, mais c’est également vrai dans le domaine des comptes sociaux.

Les dispositions du présent PLFSS visent précisément à contenir la dépense. On peut certes les contester, tant il est difficile de remettre des dépenses en question. Mais ces économies sont nécessaires et nous poursuivrons dans ce sens.

Je peux comprendre l’opposition de Mme Schillinger et de M. Cazeau à la mesure d’économie proposée par le Gouvernement en matière d’aide au logement, car il est toujours difficile, je le répète, d’accepter la remise en question d’une dépense. Pour autant, je suis défavorable aux amendements tendant à supprimer cette mesure, et ce pour trois raisons.

D’abord, en permettant une économie de 120 millions d’euros, cette mesure contribuera à la réduction du déficit de la branche famille.

Ensuite, réduire le déficit de la branche famille, c’est aussi réduire le déficit de l’État. Cette mesure aidera donc l’État à respecter sa norme de dépense.

Enfin, la rétroactivité de trois mois applicable au versement des aides au logement, dont le Gouvernement propose la suppression, n’existe pas pour les autres minima sociaux, le RSA par exemple. Il s’agit donc d’une harmonisation des procédures.

Il n’est pas question pour nous de revenir sur les prestations sociales d’une manière générale. En revanche, il est légitime de revoir leur nature ou la manière dont elles sont versées. Il est ainsi normal de tenir compte de la date du dépôt du dossier…

M. Guy Fischer. Pour réduire la dépense !

M. Éric Woerth, ministre. … sans systématiquement revenir trois mois en arrière. Il appartient aux personnes qui demandent cette aide de déposer leur dossier au bon moment.

M. Guy Fischer. Ces personnes sont les moins informés et les plus faibles !

M. Éric Woerth, ministre. La rétroactivité, je le répète, n’existe pas pour les autres prestations sociales. Le Gouvernement souhaite donc s’en tenir au droit commun et retenir la date de dépôt du dossier.

Madame Schillinger, je l’ai dit et je le répète : aucune prestation familiale n’est remise en cause. Comme l’a indiqué M. Alain Milon, aucune allocation ne verra son montant diminuer l’an prochain.

M. Lardeux considère que la branche famille est fragilisée par des transferts de charges en provenance d’autres branches. La reprise de dette par la CADES aidera cette branche à faire face aux déficits constatés en 2009 et en 2010.

Mme Desmarescaux souhaite obtenir des précisions sur l’ONDAM médico-social et sur le financement de l’investissement dans les établissements médico-sociaux.

M. Guy Fischer. Voilà !

M. Éric Woerth, ministre. Une enveloppe est bien prévue pour l’an prochain, mais nous ne pourrons en fixer le montant qu’après avoir eu connaissance des excédents de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, qui permettent de financer les établissements médico-sociaux, c’est-à-dire avant le début de l’année 2011.

En matière de programmation de créations de places dans les établissements médico-sociaux, nous sommes dans une année de transition. Nous instituons un nouveau mode de budgétisation, au plus près des besoins, en nous fondant sur les places réellement créées et non sur des engagements de création. En effet, certaines places sont ouvertes bien après que la décision de les créer a été prise, le plus souvent pour des motifs qui n’ont rien de financier, les retards dans l’obtention du permis de construire par exemple.

Comme je l’ai indiqué devant la commission des affaires sociales, le Gouvernement s’engage à transmettre dès cette année au Parlement des objectifs annuels en matière de créations de places. Cela va dans le sens d’une plus grande transparence et d’une meilleure information du Parlement.

M. Vasselle et M. Milon insistent sur la restitution, d’un montant de 100 millions d’euros, à l’assurance maladie au titre de l’année 2010. Cette somme venant de l’assurance maladie, il est légitime qu’elle lui soit retournée lorsqu’elle n’est pas dépensée. Cette restitution ne limite en rien la création de places dans les établissements médico-sociaux. Ces 100 millions d’euros sont en fait des excédents constatés en fin d’année. L’État ne prive pas donc le secteur médico-social de ses crédits.

Enfin et surtout, l’État tient son engagement concernant le rythme d’autorisations de créations de places dans les établissements pour personnes âgées, comme l’a indiqué tout à l’heure Nora Berra à cette tribune.

Mme Desmarescaux propose de revenir sur la disposition adoptée par l’Assemblée nationale concernant les pharmacies à usage interne. Il s’agit de déterminer à partir de quelle date les groupements de coopération sociale et médico-sociale peuvent avoir recours à une pharmacie commune à plusieurs établissements. Je considère, comme vous, madame, qu’une pharmacie à usage interne est un élément de rationalisation de la gestion des médicaments et d’amélioration de la prise en charge médicale des résidents des établissements.

Mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 permet une meilleure maîtrise de la dépense en vue d’un rétablissement durable et structurel des comptes sociaux. Par ailleurs, il confirme la solidarité envers les plus défavorisés.

Dominique Leclerc et Nicolas About ont souligné la contribution importante consentie au titre de la réforme des retraites, et cet avis est me semble-t-il largement partagé sur toutes les travées de cet hémicycle.

Monsieur Fischer, monsieur Cazeau, je ne reviendrai pas, je l’ai dit, sur la réforme des retraites, qui a déjà donné lieu à de longs débats.

M. Guy Fischer. C’est dommage !

M. Éric Woerth, ministre. Le présent PLFSS complète cette réforme puisqu’il contient plusieurs mesures visant à assurer son financement.

J’indique à MM. Godefroy et Dériot que le projet de loi de financement marque une avancée importante dans le traitement du dossier, lourd et difficile, de l’amiante. Nous proposons en effet une mesure qui précise les règles de prescription du Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante, le FIVA, dans un sens qui me paraît répondre aux attentes des associations de victimes.

M. Guy Fischer. Nous sommes d’accord.

M. Éric Woerth, ministre. M. Dériot présentera un amendement visant à remédier à une difficulté d’harmonisation et de coordination des différents dispositifs de versement de l’allocation de cessation anticipée d’activité entre les différents régimes. Cette difficulté avait d’ailleurs été relevée par le Médiateur de la République, M. Delevoye.

Cet amendement prévoit deux mesures distinctes : d’une part, l’harmonisation du versement de l’allocation au sein des différents régimes et, d’autre part, des règles de coordination entre les régimes.

La coordination pourrait être mise en œuvre rapidement, c’est-à-dire dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012, dès lors que sa soutenabilité financière aura été examinée. En revanche, l’harmonisation complète des différents régimes est difficile pour des raisons d’ordre technique. En outre, elle ne se ferait pas toujours à l’avantage des bénéficiaires.

M. Godefroy a évoqué les conséquences que le Gouvernement pourrait tirer de la décision du Conseil constitutionnel du 18 juin relative au régime d’indemnisation des accidents du travail et des maladies professionnelles.

Je rappelle tout d’abord que le Conseil a jugé que le régime actuel, basé sur la réparation forfaitaire des dommages subis par les victimes, était conforme à la Constitution.

Le Conseil constitutionnel précise que la victime a le droit de demander une réparation intégrale de ses dommages en cas de faute inexcusable de l’employeur, même lorsque les réparations ne sont pas listées par la loi. Cette disposition peut être mise en œuvre sans qu’il soit nécessaire de modifier la loi. Monsieur Godefroy, votre objectif, que je partage, est donc satisfait.

Monsieur Alain Milon, la généralisation des maisons pour l’autonomie et l’intégration des malades d’Alzheimer est en cours. On compte aujourd’hui dix-sept expérimentations et trente-cinq maisons sont en phase de création.

L’amendement déposé à l’Assemblée nationale, et complété par le Gouvernement, a pour objet de garantir le mode de financement de ces établissements. Le Gouvernement déposera au Sénat un amendement visant à préciser le montant exact que la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie versera aux MAIA.

Madame Desmarescaux, vous avez manifesté votre inquiétude en ce qui concerne la prise en charge de l’allocation personnalisée d’autonomie, l’APA, et de la prestation de compensation du handicap, la PCH. Sachez que le Président de la République et le Gouvernement partagent votre souci et qu’ils s’efforcent d’y répondre, notamment par l’ouverture du chantier sur le cinquième risque. Il s’agit, comme l’a indiqué M. About, d’une réforme importante qui aboutira en 2011.

MM. Lardeux et de Legge ont souligné les efforts faits par le Gouvernement en matière de garde d’enfants, sujet évoqué tout à l’heure par Mme Nadine Morano. Au total, à la fin de l’année 2009, nous comptions déjà 41 300 places nouvelles, qui ont permis la garde de 67 300 enfants supplémentaires. Jamais un Gouvernement n’aura fait autant en faveur d’une meilleure conciliation entre vie familiale et vie professionnelle.

Par ailleurs, les maisons d’assistantes maternelles, qui doivent beaucoup à M. Arthuis, sont une forme innovante et intéressante pour développer la garde d’enfants. Un amendement a été adopté sur ce sujet en commission des affaires sociales. Sachez, monsieur Lardeux, que le Gouvernement entend répondre à votre souci et encourager le développement de ces structures par des moyens adaptés.

Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, M. François Baroin, Mmes Roselyne Bachelot-Narquin, Nora Berra et Nadine Morano ainsi que moi-même avons veillé à élaborer un PLFSS équilibré, responsable, courageux, qui fait la part entre l’attention que nous devons porter aux générations futures et le soutien renforcé qu’il nous faut apporter à nos concitoyens les plus fragiles. (Applaudissements sur les travées de lUnion centriste et de lUMP. – M. Gilbert Barbier applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports. Madame la présidente, madame la présidente de la commission, madame, messieurs les rapporteurs, mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, permettez-moi tout d’abord de rétablir quelques faits afin que nos discussions s’établissent sur des bases solides.

Monsieur Fischer, monsieur Cazeau, on ne peut pas soutenir que la construction de l’Objectif national de dépenses d’assurance maladie pour 2011 repose essentiellement sur une participation accrue des usagers. La quasi-totalité des efforts d’économies prévus dans la construction de l’ONDAM pour 2011 ne portent pas sur les assurés.

L’effort le plus important pèse sur les programmes de maîtrise médicalisée…

M. Guy Fischer. C’est pareil !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. … avec un objectif réaliste de 550 millions d’euros.

Pour atteindre cet objectif, il faudra mobiliser tous les outils déjà disponibles, par exemple, la promotion des référentiels de la Haute Autorité de santé, la HAS, comme le souhaite M. Alain Vasselle, ou encore le développement de la procédure de la mise sous entente préalable, que nous proposons dans ce projet de loi de financement.

L’autre grand poste d’économie repose sur d’importantes baisses de tarifs et de prix : 200 millions d’euros dans les domaines de la biologie et la radiologie et 500 millions d’euros sur les produits de santé – médicaments et dispositifs médicaux –, dans le cadre de la politique conventionnelle.

Les mesures pesant sur les assurés, et qui seront prises en charge, dans leur grande majorité, par les organismes complémentaires, sont, en réalité, la reprise de propositions des caisses d’assurance maladie. Il en est ainsi de la mise en place d’un forfait médicalisé de prise en charge des bandelettes pour les patients diabétiques non insulinodépendants.

À ce sujet, M. René Teulade a commis, à mon grand regret, une grossière erreur d’appréciation. Il est bien évident que la préconisation de la Haute Autorité de santé concerne les diabétiques insulinodépendants ; les diabétiques de type 2 ne sont pas invités, cher René Teulade, à faire quatre examens par jour ! Je tenais à rectifier cette erreur, qui m’étonne beaucoup de la part d’un ancien ministre aux affaires sociales ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)

Une autre mesure reprise des propositions de la Caisse d’assurance maladie est l’évolution des critères d’entrée en affection de longue durée, ou ALD, pour les patients vivant avec de l’hypertension artérielle isolée. Monsieur Barbier, l’évolution du dispositif des ALD est en fait permanente, mais elle est liée aux progrès des techniques médicales. Certaines pathologies, autrefois considérées comme lourdes et coûteuses, sont devenues, au fil du temps, des affections relativement bénignes et bien prises en charge.

J’en viens à la budgétisation du dispositif licence, master, doctorat, ou LMD. Monsieur Fischer, je ne peux pas vous laisser dire que les établissements de santé devront assumer seuls les conséquences budgétaires de la réforme LMD. Les surcoûts feront bien évidemment l’objet d’une prise en charge par l’assurance maladie, comme c’est le cas de toutes les mesures salariales.

Le coût de la réforme LMD a été intégré dans le calcul du tendanciel pluriannuel de l’ONDAM, pour un montant de 140 millions d’euros en 2011, pour les seuls établissements de santé. Les surcoûts liés à la montée en puissance progressive de la réforme dans les années à venir feront, eux aussi, l’objet d’un accompagnement par l’assurance maladie.

D’une manière générale, je souhaite souligner que l’évaluation des charges prévisionnelles de fonctionnement des établissements de santé qui est faite par les fédérations hospitalières et celle qui est réalisée par le Gouvernement auront rarement été aussi proches. C’est le signe d’une évaluation sincère et fiable de l’ONDAM tendanciel hospitalier pour 2011.

Monsieur Fischer, monsieur Cazeau, contrairement à une idée reçue, la situation financière des hôpitaux s’améliore, alors que nous sommes passés à un financement à 100 % à la T2A depuis le début de 2009. Le nombre d’établissements en déficit a chuté de 23,1 %, passant de 294 à 226, le nombre d’établissements en équilibre ou en excédent augmentant de 484 à 552.

Certains intervenants m’ont interrogée sur la différence qui existe entre les données du ministère de la santé et celles de la Cour des comptes. Cette différence s’explique par le fait que la Cour intègre dans les comptes des établissements de santé des charges qu’elle estime sous-évaluées, comme les reports de charges ou les provisions pour risques. Cette insuffisance de rigueur, avérée dans certains cas, n’affecte qu’un nombre restreint d’hôpitaux.

L’analyse de la Cour des comptes ne remet pas en cause l’amélioration nette et sans équivoque des pratiques de gestion des établissements de santé et de leur situation financière, qui se traduit par une baisse continue des déficits depuis trois ans.

M. Guy Fischer. À quel prix !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Le ministère de la santé a vocation à accompagner tous les hôpitaux dans leur recherche de performance. La mise en œuvre de pratiques comptables irréprochables s’inscrit dans cette dynamique. Elle a fait l’objet, ces dernières années, de mesures fortes, notamment la mise en place des états des prévisions des recettes et des dépenses, les EPRD.

De même, la loi portant réforme de l’Hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires prévoit, dans son article 17, la certification obligatoire des comptes des établissements publics de santé par la Cour des comptes ou par un commissaire aux comptes. Ce dispositif permettra le rappel de principes comptables clairs et l’évaluation stricte de leur application. Il a vocation à mettre en place de façon durable des pratiques comptables vertueuses.

En tout état de cause, la prise en compte de la diversité des situations et des difficultés de certains hôpitaux est au cœur du travail quotidien des agences régionales de santé, des services de la direction générale de l’offre de soins, la DGOS, et de l’Agence nationale d’appui à la performance des établissements de santé et médico-sociaux, l’ANAP.

Monsieur Jégou, comme vous l’avez souligné, la dette des établissements de santé a progressé de manière continue ces dernières années. Cette augmentation s’explique, pour l’essentiel, par la croissance concomitante et parallèle des dépenses d’investissements, surtout pendant la période d’application du plan Hôpital 2007 mais aussi pendant celle du plan Hôpital 2012.

Le Gouvernement accompagne la remise à niveau indispensable du parc hospitalier. Une bonne partie de la dette est gagée par des dotations spécifiques destinées à couvrir les dotations d’amortissement et les frais financiers.

Une très grande vigilance s’impose. L’article 11 du projet de loi de programmation des finances publiques pour la période 2011-2014 prévoit un dispositif d’encadrement du recours à l’emprunt pour les établissements publics de santé. Les modalités de cet encadrement seront déterminées par un décret, sur lequel mes services travaillent depuis plusieurs mois.

Toutefois, la meilleure façon de limiter le recours à l’emprunt est de se montrer encore plus drastique dans la sélection des projets d’investissement et dans leur calibrage, comme nous nous efforçons de le faire dans la mise en œuvre de la deuxième tranche du plan Hôpital 2012. Le niveau de la dette des établissements porteurs d’un projet fera partie, au premier chef, des critères d’éligibilité au plan.

M. Dominique Leclerc m’a interrogée sur la politique du médicament et sur la réforme des laboratoires de biologie médicale.

La procédure des avis de la commission de la transparence de la HAS prévoit une phase contradictoire. La commission élabore un projet d’avis qui est envoyé aux firmes, lesquelles peuvent réagir par écrit ou demander une audition devant la commission de la transparence.

Monsieur Leclerc, la réforme de la biologie n’a pas modifié les règles de la détention du capital : ce dernier doit toujours être détenu à 75 % par des biologistes ou par des laboratoires de biologie. Il est vrai que des groupes investissent dans la biologie via des laboratoires implantés dans d’autres pays européens et des cascades de sociétés d’exercice libéral, mais tel était déjà le cas avant la réforme !

L’ordonnance portant réforme de la biologie interdit à des sociétés à responsabilité limitée et à des sociétés anonymes de détenir un laboratoire. Elle ouvre la possibilité de créer des coopératives, ce qui n’existait pas avant, et permet de réserver la propriété du capital aux biologistes. Elle améliore donc la situation, en allant dans le sens souhaité par les uns et les autres.

La réforme ne devrait pas non plus entraîner une désertification, puisqu’elle permet la création de laboratoires multisites. Ainsi, les laboratoires de biologie auront la possibilité de créer des sites répartis sur le territoire.

Les baisses tarifaires ne sont pas décidées arbitrairement, elles sont négociées entre les représentants des biologistes et l’Union nationale des caisses d’assurance maladie, l’UNCAM. Elles sont limitées à 100 millions d’euros et compensées par la progression des volumes d’examens prescrits.

La réforme de la biologie permet aux structures de regrouper leurs activités sur des plateaux techniques, ce qui va augmenter leur productivité et leur rentabilité. Pour mémoire, le revenu moyen des directeurs de laboratoires privés était de 132 000 euros en 2009.

Quant à la recommandation de la Haute Autorité de santé sur le dosage de la troponine, il s’agit d’un consensus scientifique qui ne se fonde aucunement sur des arguments économiques.

J’en viens à la question majeure du renoncement aux soins et des dépassements d’honoraires, qui a notamment été soulevée par Guy Fischer, Bernard Cazeau et Patricia Schillinger.

Notre système de santé offre à nos concitoyens un niveau de prise en charge parmi les plus élevés du monde. L’origine principale des restes à charge provient de la multiplication des dépassements d’honoraires qui, comme l’ont souligné à juste titre Bernard Cazeau et Guy Fischer, représentent aujourd’hui 2 milliards d’euros.

Il existe de très grandes disparités entre les régions dans la pratique des dépassements d’honoraires. Le taux moyen des dépassements varie du simple au double : de 25 % en Poitou-Charentes, dans le Limousin et en Bretagne, il s’élève à 43 % dans le Pas-de-Calais et en région Provence-Alpes–Côte d’Azur pour atteindre 63 % en Île-de-France ! Des disparités géographiques existent aussi selon les spécialités et en fonction des établissements.

Les dépassements d’honoraires peuvent donner lieu à plusieurs réponses.

Il faut permettre à nos concitoyens de souscrire à une assurance complémentaire, ce que 94 % d’entre eux ont déjà fait. À cette fin, nous allons relever une nouvelle fois le plafond permettant d’accéder à l’aide à l’acquisition d’une complémentaire santé.

Il faut également progresser dans la transparence des tarifs et des honoraires. Dans cette perspective, nous avons imposé un devis préalable obligatoire chaque fois que le cumul des actes, dépassement compris, se situe au-delà d’un seuil fixé à 70 euros. Ce seuil, je le rappelle, ne s’applique plus lors de la deuxième consultation : le devis devient alors de droit, quel que soit le tarif pratiqué.

L’assurance maladie accomplit un effort d’information important dans ses caisses primaires, c'est-à-dire dans son réseau de proximité, afin que les assurés puissent connaître soit l’adresse d’un praticien exerçant en secteur 1 au plus près de leur domicile, soit, s’ils veulent s’adresser à un médecin qui applique un dépassement, la nature exacte de ce dernier.

Je souhaite par ailleurs que les partenaires conventionnels se mettent d’accord sur la mise en place d’un secteur optionnel, dont l’objectif sera non pas de vider le secteur 1, mais plutôt d’y « rapatrier » des praticiens du secteur 2.

M. François Autain. Alors là !

M. Gilbert Barbier. C’est un vœu pieux.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Ce sera l’un des éléments qui permettront de valider le pré-accord sur le secteur optionnel, qui a été signé par la Confédération des syndicats médicaux français, le Syndicat des médecins libéraux, l’Union nationale des organismes d’assurance maladie complémentaire et l’Union nationale des caisses d’assurance maladie, le 15 octobre 2009.

Monsieur Gilbert Barbier, monsieur Bernard Cazeau, ce document n’a pas été rejeté par le Gouvernement ! Il constitue une plateforme de départ, dont certains points restent à traiter ou dont les termes sont ambigus, comme l’ont d’ailleurs admis les signataires de l’accord. Le protocole ne prévoit en effet aucune modalité de prise en charge par les organismes complémentaires, alors que tel est évidemment le concept même du secteur optionnel. En outre, sa rédaction est ambigüe, puisqu’elle ne permet pas de savoir si l’objectif de l’accord est défini en volume d’honoraires ou en volume d’actes, ce qui, vous l’avouerez, mesdames, messieurs les sénateurs, laisse une très grande marge d’interprétation.

De nombreuses questions – je pense en particulier à celles d’Alain Vasselle, de Guy Fischer et de Bernard Cazeau – portaient sur l’apport de recettes nouvelles pour financer notre système d’assurance maladie et sur des réformes structurelles de ce dernier.

Que dire, sinon, de nouveau, qu’il n’y a pas d’assiette miracle ou de trésor caché ? Le constat est connu : le niveau de nos prélèvements obligatoires, bien qu’il soit en diminution par rapport à 2008, reste très élevé, à près de 42 % du PIB en 2009. Nos marges de manœuvre sont très restreintes !

Nous l’avons vu lors de notre débat sur les retraites : quels que soient les scénarios proposés, d’un côté ou de l’autre de cet hémicycle d'ailleurs, les hypothétiques revenus du capital sont déjà tous fléchés vers le système de retraite.

Mme Annie David. Les flèches sont plus grosses de notre côté !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Je voudrais dire à ceux qui réclament plus de moyens pour la santé que cette orientation ne pourra se traduire, à terme, que par une augmentation de la participation financière des assurés. Il faut avoir le courage de le reconnaître.

M. Guy Fischer. C’est un aveu !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. J’en viens aux moyens de restructurer les financements.

M. Nicolas About propose de plafonner les franchises en fonction du revenu des ménages. Cette disposition constitue à l’évidence l’amorce d’un débat, qui ne manquera pas d’être intéressant, sur le bouclier sanitaire.

M. Serge Dassault, pour sa part, suggère d’asseoir l’assiette des cotisations non plus sur les salaires, mais sur la différence entre le chiffre d’affaires et la masse salariale. Cette réflexion est très intéressante, mais elle trouverait me semble-t-il mieux sa place dans une campagne présidentielle,…

M. Jacky Le Menn. Elle arrive !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. … après avoir obtenu l’accord de celles et ceux qui porteront la candidature de Nicolas Sarkozy afin qu’il reste à la tête de l’État. (Protestations amusées sur les travées du groupe socialiste.)

Mme Annie Jarraud-Vergnolle et M. Jacky Le Menn. Non, pas ça !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. La politique du Gouvernement vise tous nos concitoyens, en particulier les plus fragiles d’entre eux. Comme l’ont rappelé François Baroin et Éric Woerth, cette politique repose sur un impératif essentiel : une offre de soins de qualité, accessibles à tous, et une modernisation constante du système de santé.

Cette politique d’ajustement, qui accompagne une plus grande responsabilité dans les comportements, a été renforcée par la promotion des médicaments génériques et l’adaptation du taux de remboursement des médicaments au service médical rendu.

Nous cherchons également à développer de nouveaux instruments de maîtrise des dépenses : instauration de procédures de contractualisation avec les ARS et les organismes locaux d’assurance maladie pour les dépenses des médicaments inscrits sur la liste en sus et pour les transports sanitaires ; référentiels médico-économiques de la Haute Autorité de santé ; efforts pour responsabiliser les acteurs en modifiant la gouvernance de l’hôpital dans un sens plus propice à l’efficience et à la performance.

Nicolas About et Alain Vasselle se sont interrogés sur les contrats d’amélioration des pratiques individuelles ou professionnelles de santé, les CAPI. Pour ma part, je note que, avec 16 000 signatures, cette expérience est un succès.

La mise en œuvre de ces contrats confirme l’intérêt de la rémunération à la performance en termes de qualité des soins. Je ne suis pas hostile par principe à la généralisation d’un dispositif qui fonctionne et qui rencontre l’adhésion des praticiens. Je considère d'ailleurs que la rémunération à la performance permettrait de poursuivre la responsabilisation médico-économique des médecins libéraux.

En ce qui concerne les effets des mesures d’économie sur les organismes complémentaires, Guy Fischer a rappelé qu’un point de hausse de cotisations décidé par les organismes complémentaires « absorbait » 320 millions d’euros de charges nouvelles. Et encore n’a-t-il pas abordé la question du déport de charges lié à l’entrée dans le dispositif de prise en charge à 100 %. Celle-ci, en effet, déplace chaque année 600 millions d’euros des assurances complémentaires vers l’assurance maladie.

Les économies décidées dans le cadre du présent PLFSS auront des conséquences directes très marginales sur l’évolution des primes, donc sur le pouvoir d’achat des ménages. En effet, lorsque l’on calcule le solde net des dépenses qui sont imputées aux mutuelles dans le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale et des économies qui seront réalisées par les mutuelles sur les baisses de charges et de tarifs réalisées sur un certain nombre de rémunérations de professionnels de santé et de médicaments ou de dispositifs médicaux, on obtient une charge nette de 129 millions d'euros.