M. le président. Vous avez tout à fait raison !

M. Gérard Bailly. Merci, monsieur le président. La flambée des prix des céréales, cet été, a conduit à l’explosion de coûts de production, rendant la situation des éleveurs intenable.

Monsieur le ministre, vous avez vous-même déclaré en commission qu’il était incroyable que l’on ne puisse pas expliquer la formation du prix d’un steak, acheté 3 euros le kilo à l’éleveur et revendu 17 euros au consommateur ! Ne faudrait-il pas davantage aller voir ce qui se passe dans la distribution, en particulier dans les grandes et moyennes surfaces ? Nous attendons cela avec impatience.

Dans ce contexte, la mise en place de l’Observatoire des prix et des marges, dont la commission a été heureuse d’auditionner le nouveau président récemment, est cruciale. Nous attendons avec une grande impatience la fin de l’année pour disposer des premières conclusions sur les mécanismes de formation des prix et des marges de la filière de la viande bovine. Il faut absolument que la transparence soit faite. Il est en effet inadmissible que dure une telle disparité entre les prix d’achat des produits et des matières premières aux agriculteurs et aux éleveurs et les prix de revente aux consommateurs.

Dans le cadre de l’aide aux éleveurs – c’est un dossier qui me tient à cœur –, la modernisation et la mise aux normes des bâtiments d’élevage sont bien entendu indispensables. Vous nous avez déjà dit, monsieur le ministre, que le niveau des dotations était maintenu à 29 millions d’euros, mais l’enveloppe est tout de même faible par rapport aux 52 millions d’euros inscrits au budget de 2009, surtout si on songe au soutien bien plus important que l’Allemagne apporte à ses éleveurs dans ce domaine.

Le plan de modernisation des bâtiments d’élevage, le PBME, est essentiel pour garantir l’avenir de l’élevage, principalement celui de la filière laitière. Or le niveau des enveloppes est insuffisant pour répondre à la demande. Les files d’attente établies selon des critères de priorité, l’impossibilité de démarrer les travaux avant l’accord de subvention, la fixation de sous-plafonds nationaux nettement inférieurs à ce qu’autorise le cadre européen, sont autant de freins qui découragent les éleveurs.

À mon sens, il faudrait un plan plus ambitieux, afin de permettre à la France de regagner la compétitivité qu’elle a perdue face aux principaux pays producteurs laitiers de l’Union européenne, notamment l’Allemagne.

Monsieur le ministre, il serait judicieux de dresser un bilan des débuts de l’application du plan actuel et, surtout, d’évaluer les besoins à moyen terme. Cela irait dans le sens du bien-être des animaux, dont on parle beaucoup, mais aussi et surtout, du bien-être des éleveurs qui, en Bretagne comme dans votre région, subissent déjà les affres du froid, du gel et de la neige. Ce matin, lorsque j’ai quitté mon exploitation, il faisait moins 18 degrés ; tout était gelé ! Mais les températures sont sans doute descendues jusqu’à moins 24 degrés ou moins 25 degrés à Mouthe, dans le Haut-Doubs. Des bâtiments adaptés sont donc indispensables à la qualité du travail des éleveurs.

Le transfert des crédits de la génétique sur le compte d’affectation spéciale « Développement agricole et rural », le CASDAR, suscite des inquiétudes chez les professionnels. Ils craignent que cela ne remette en cause l’engagement de l’État et le modèle de la génétique française, notamment le service public de l’insémination artificielle et, surtout, l’amélioration génétique des ruminants. Comme vous le savez, la recherche génétique française est l’une des meilleures du monde. Il serait dommage de l’affaiblir. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous rassurer sur ce sujet, ainsi que sur le transfert d’un certain nombre d’actions aux organismes à vocation sanitaire, les OVS ?

Je souhaite aussi obtenir des précisions sur le financement des mesures relatives aux races en voie de disparition. Cette question relève-t-elle de votre budget, monsieur le ministre ? Ne serait-il pas plus pertinent d’utiliser les crédits du ministère de l’environnement consacrés à la biodiversité ? Je pense notamment aux crédits inutiles qui sont dépensés pour promouvoir des prédateurs.

M. le président. C’est une bonne idée !

M. Gérard Bailly. Je le pense aussi, monsieur le président. (Sourires.) Nous connaissons tous le coût de la réintroduction du loup.

Monsieur le ministre, quelles sont vos intentions au sujet des services de remplacement, question qui a été soulevée par de précédents intervenants.

Que pouvez-nous nous dire sur les chambres d’agriculture, qui viennent d’obtenir des compétences nouvelles, mais qui s’inquiètent de la diminution de certains crédits.

Par ailleurs, et même si cela ne relève pas de votre budget, je souhaite rappeler une nouvelle fois la nécessité d’une hausse de la retraite des exploitants et exploitantes agricoles, qui reste toujours bien faible. Ces professionnels ont pourtant bien travaillé pour la qualité de nos produits agricoles. Si ce n’était pas le cas, croyez-vous que la table française aurait été classée au patrimoine mondial de l’humanité, ce dont je me réjouis ?

Monsieur le ministre, à mon tour de souligner le caractère stratégique de l’agriculture, en France comme dans le reste de l’Europe. Nous ne pouvons pas laisser l’organisation du marché agricole mondial voguer au gré des spéculations diverses, des crises géographiques ou sanitaires. L’Union européenne a déjà compris, en grande partie grâce à vous, la nécessité de maintenir des instruments de régulation. Mais beaucoup de chemin reste à parcourir.

Le prochain G20 sera important puisque la France a réussi à y faire inscrire la résolution du problème de la volatilité des prix des matières premières agricoles. Je sais que vous y êtes très attentif, et nous le serons avec vous.

Monsieur le ministre, je voterai naturellement les crédits de la mission « Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales ». (Applaudissements sur les travées de lUMP et de lUnion centriste.)

M. le président. La parole est à M. Yannick Botrel.

M. Yannick Botrel. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur spécial, messieurs les rapporteurs pour avis, mes chers collègues, la discussion de cette partie du projet de loi de finances consacrée à l’agriculture intervient quelques mois après l’adoption de la loi du 27 juillet 2010 de modernisation de l’agriculture et de la pêche, la LMAP. Elle s’inscrit à l’évidence dans son sillage et devrait en être le prolongement.

Or le projet de budget qui nous est présenté ne répond pas aux enjeux actuels de l’agriculture, tels que nous les connaissons. La crise que nous traversons depuis plusieurs années est loin d’être achevée. Les producteurs de lait peinent à résorber leurs pertes.

Monsieur le ministre, vous avez dû, dans l’urgence, intervenir dans le conflit de la viande bovine qui opposait les éleveurs aux abattoirs. Et combien de producteurs de porcs survivront-ils à la faiblesse récurrente des cours, peut-être entretenue artificiellement, et qui dure depuis de trop nombreux mois ?

Les palliatifs budgétaires des années précédentes n’ont fait que répondre à la marge à un problème plus profond. Car ce sont les orientations mises en place pour l’agriculture qu’il faut revoir, au lieu d’apporter des corrections ponctuelles.

Les dispositions maîtresses de la LMAP, ou du moins celles qui sont présentées comme telles, tardent à se mettre en place et suscitent plus de questions et de doutes qu’elles n’apportent de confiance et de sérénité. Ainsi, le projet de décret portant sur la contractualisation laitière recueille pour l’heure le scepticisme des syndicats de tous bords et des représentants professionnels agricoles.

Dans ce contexte, la hausse du projet de budget consacré à l’agriculture pour 2011 est peu significative puisque, enseignement agricole y compris, les crédits passent de 5,2 à 5,3 milliards d’euros, soit une augmentation de 1,8 %. Cette progression est conforme aux chiffres de l’inflation. Ce projet de budget est donc, au mieux, constant.

Cette hausse, somme toute très relative, s’explique principalement par une augmentation de 492 millions d’euros due à l’exonération des charges patronales de sécurité sociale pour les emplois saisonniers dans certains secteurs de production. Dont acte ! Cette décision était souhaitable. Il n’en subsiste pas moins, entre les pays européens, des disparités de situation peu compatibles avec une approche communautaire de l’agriculture.

Par ailleurs, on assiste à la suppression des exonérations de charges salariales dont bénéficiaient jusqu’à présent les travailleurs occasionnels de moins de vingt-six ans. Il s’agissait d’une mesure de soutien en faveur de travailleurs jeunes à la recherche d’un revenu d’appoint, qui rendait le travail saisonnier plus attractif.

Cette pseudo-hausse budgétaire est également aléatoire, dans la mesure où elle laisse entrevoir une réduction programmée des crédits de paiement à l’échéance de 2013. À cet horizon, les objectifs sont en effet très clairs et cohérents, avec l’affichage d’une volonté de diminution des dispositifs d’intervention.

La conviction est largement partagée que l’installation des jeunes agriculteurs est une priorité. Bien que perfectibles, des mesures avaient été mises en place pour favoriser l’installation des jeunes. La traduction budgétaire de cette volonté est désormais moins affirmée, en dépit des engagements pris par le Président de la République. La meilleure illustration en est la baisse très nette des prêts à l’installation, qui sont en recul de 25 millions d’euros.

En outre, rien n’indique clairement que l’intégralité du produit de la taxe sur la plus-value foncière sera réellement consacrée à l’installation des jeunes agriculteurs, comme vous l’aviez indiqué à la suite des interventions unanimes des sénateurs. À moins que vous n’apportiez des précisions claires sur ce point, monsieur le ministre.

Rien ne change vraiment sur le terrain, et les jeunes éprouvent toujours autant de difficultés à s’installer. Le moindre des paradoxes n’est pas que, aujourd’hui, dans certaines régions, les installations non aidées ou hors normes sont aussi et même parfois plus nombreuses que les autres. Cela démontre que les vocations existent. Il faudrait les accompagner mieux que cela n’est fait aujourd'hui.

Lors de l’examen du projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche, nous avions exprimé notre choix, sur la question des assurances contre les aléas climatiques, en faveur d’un dispositif de réassurance publique, solution que vous n’aviez pas écartée. Nous devons observer, avec les rapporteurs, que rien n’est cependant envisagé dans le projet de loi de finances pour 2011. Il s’agissait pourtant d’un des dispositifs phares de la LMAP, qui devait être mis en œuvre très rapidement après son adoption. Faut-il en déduire que cette ambition est différée, monsieur le ministre ?

L’action la moins bien dotée du programme est celle qui concerne un très grand nombre d’agriculteurs. Les crises et les aléas de production sont en effet récurrents et auraient mérité un meilleur arbitrage que ce que l’on constate, avec cette baisse de 39 %, soit 28 millions d’euros de crédits de paiement de l’action 12, Gestion des crises et des aléas de la production, du programme 154, Économie et développement durable de l’agriculture, de la pêche et des territoires. L’assurance-récolte elle-même, pourtant présentée comme une disposition essentielle, se trouve amputée de près de 5 millions d’euros. Qu’adviendra-t-il si la crise agricole s’accentue encore ?

Les moyens dédiés aux actions internationales et à la stratégie économique diminuent dans ce projet de budget de 800 000 euros, alors que la France perd des parts de marché à l’export. Ainsi, en 2009, pour la première fois depuis vingt ans, les exportations agroalimentaires ont reculé de 12 %.

Si l’avenir de l’agriculture est soumis aux marchés globalisés, le tournant en faveur d’une libéralisation accrue a de quoi inquiéter.

Certes, pour la période 2007-2013, les crédits européens sont de 330 milliards d’euros, soit 10 milliards d’euros par an pour la France. Mais c’est l’après-2014 qui devient problématique. Car les agriculteurs devront en toute hypothèse s’aligner davantage encore sur le marché mondial. Il serait intéressant de savoir quelles options seront prises à l’échelon national sur la répartition des crédits européens.

Ajoutez à cela la volatilité chronique des cours mondiaux des produits agricoles à laquelle nous sommes soumis, et chacun mesurera le risque encouru pour la sécurité alimentaire de notre pays, comme pour la survie à terme de nombreux agriculteurs et la vitalité de nos territoires. Il n’existe pas de perspectives durables sans régulation. L’absence d’engagements clairs cache en réalité la dérégulation qui se poursuit.

Perdre les outils de la régulation des marchés, c’est livrer l’agriculture aux fluctuations parfois spéculatives des cours. Pour le secteur laitier, l’objectif poursuivi est ainsi de préparer la filière à la disparition du régime des quotas pour 2015. Mais avec quelles conséquences ? Le président de la Fédération nationale des producteurs de lait, la FNPL, en a fait récemment le constat quand il a déclaré que « la régulation des relations commerciales qui sera issue des futurs contrats ne remplacera jamais la régulation des marchés organisés par l’Europe ».

L’agriculture n’est pas une activité économique banale. Elle permet l’alimentation des populations, l’indépendance alimentaire. C’est le premier maillon de la chaîne de l’alimentation. À ce titre, une régulation est nécessaire, sauf à réduire l’agriculture à la variable d’ajustement de la filière agroalimentaire et de la grande distribution.

L’oublier, c’est livrer les exploitations à taille humaine, les paysans en difficulté et le développement des filières à un marché d’autant plus âpre que tous n’y jouent pas avec les mêmes règles et n’y exercent pas le même pouvoir. Dans l’esprit de quelques-uns, la sélection naturelle doit, elle aussi, s’appliquer à l’agriculture, via les règles pures et dures du marché. Les exploitations les plus faibles sont-elles vouées inexorablement à disparaître ? C’est l’avenir de nos territoires ruraux qui serait alors menacé par une remise en cause de leur équilibre économique souvent fragile, car l’agriculture y représente fréquemment une des seules activités.

Monsieur le ministre, le présent projet de budget de l’agriculture s’inscrit clairement dans les options libérales que promeut le Gouvernement et dont nous mesurons les conséquences particulièrement négatives pour l’économie agricole et les agriculteurs eux-mêmes.

Aussi, avec mes collègues du groupe socialiste, je ne voterai pas les crédits de la mission « Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales ». (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Virapoullé.

M. Jean-Paul Virapoullé. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je vous convie à prendre un peu l’air du grand large. (Sourires.)

La France a la deuxième zone économique exclusive du monde, qui s’étend sur quelque 11 millions de kilomètres carrés. Les États-Unis ont seulement 300 000 kilomètres carrés de plus que nous.

Dans les années à venir, les potentialités de la mer en termes de biodiversité, de satisfaction des besoins de la consommation humaine et de développement économique constitueront une part croissante des richesses du monde. Pourtant, mes chers collègues, sur tous les océans bordant les côtes françaises, nous constatons une incohérence dans l’approche de la connaissance et de l’exploitation de l’ensemble de ces potentialités.

Je serai bref, car une cause comme celle-là n’a pas besoin d’être plaidée tant elle est juste.

Monsieur le ministre, je souhaite que soit mis en place un groupe de travail réunissant, autour de vous-même et de Mme la ministre chargée de l'outre-mer, les grands experts français qui connaissent bien nos océans, puisqu’ils ont réussi à maîtriser et à protéger les ressources dans les Terres australes et antarctiques françaises, les TAAF, tout en permettant de les exploiter.

J’aurais voulu que l’on fasse de même dans l’océan Indien, autour du canal de Mozambique et de la Réunion, en Polynésie, en Nouvelle-Calédonie, avec un triple objectif.

Premièrement, alors que nous pourrions construire des bateaux pour exploiter nos richesses, car nos eaux sont poissonneuses, on nous applique le règlement européen de l’Atlantique nord, où les ressources se raréfient.

Le poisson est là, mais nous n’avons pas la capacité de le pêcher. Pourtant, au moment où je vous parle, des navires coréens, chinois, espagnols pillent les ressources françaises,…

M. Gérard César. Des navires japonais aussi !

M. Jean-Paul Virapoullé. Tout à fait !

Or, nous restons les bras croisés. J’insiste, monsieur le ministre, sur l’importance de cette question.

Deuxièmement, usant de l’article 349 du traité de Lisbonne, il faudrait que nous expertisions les possibilités d’adaptation des règlements de pêche dans les régions ultrapériphériques, les RUP. Cet article, qui ouvre de grandes possibilités, n’a jamais été utilisé en matière de pêche.

Par ailleurs, monsieur le ministre, je souhaite que s’installe un partenariat entre les armements français et ceux des îles de l’océan Indien ou des Caraïbes, à l’instar de ce qui s’est fait pour la légine. Cela permettra aux armements français de connaître un nouvel essor et nous pourrons profiter de leur expérience pour étendre nos activités.

Troisièmement, les pays de la zone devraient mettre en place des traités de coopération internationale avec les puissances voisines, notamment pour le thon, comme cela a été le cas entre les terres australes et antarctiques françaises et l’Australie.

Le Gouvernement a toute autorité sur nos mers et sur nos océans. Conjuguons nos réflexions et nos efforts pour que la pêche dans les régions ultrapériphériques et dans les collectivités d’outre-mer devienne un atout pour le développement de la pêche nationale. (Applaudissements sur les travées de lUMP et de lUnion centriste, ainsi que sur certaines travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Bruno Le Maire, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire. Monsieur le président, monsieur le rapporteur spécial, messieurs les rapporteurs pour avis, mesdames, messieurs les sénateurs, avant de répondre précisément aux questions qui m’ont été posées, je ferai quelques observations générales sur le contexte économique actuel, qui marque l’agriculture française comme l’agriculture européenne.

Nous sommes au croisement de trois défis, que nous devons relever ensemble.

Le premier défi est l’effondrement des revenus des agriculteurs français en 2009, qui ont baissé de 34 % en moyenne et de 50 % pour certains producteurs, en particulier dans le secteur laitier.

Le deuxième défi est la crise budgétaire que connaissent l’ensemble des pays européens, et qui oblige la France et ses voisins à engager une politique rigoureuse en matière de gestion des déficits publics pour éviter d’avoir à prendre des dispositions plus draconiennes.

Le troisième défi réside dans une concurrence accrue sur la question agricole, aussi bien en Europe, en particulier avec l’Allemagne, que dans le reste du monde, je pense notamment aux pays d’Amérique du Sud.

Il serait irresponsable de vouloir aborder ce projet de budget sans garder présents à l’esprit ces trois défis qu’il est nécessaire de relever ensemble. C’est bien le choix politique qui a été le nôtre dans ce projet de budget.

Tout d’abord, nous avons pris la décision, que j’assume, de réduire les crédits de fonctionnement afin d’éviter de nous retrouver dans une situation budgétaire encore plus difficile qui nous contraindrait à prendre des décisions douloureuses, comme ont dû le faire d’autres pays européens.

Ensuite, nous avons décidé d’assurer le maintien ou l’augmentation des soutiens directs aux agriculteurs, qui sont la priorité absolue de ce budget.

Enfin, nous avons voulu moderniser notre agriculture en mettant en place la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche. Je profite de l’évocation de cette loi pour rassurer Yannick Botrel : 90 % des 70 décrets d’application prévus dans cette loi seront pris avant la fin du mois de janvier 2011. (M. Yannick Botrel sourit.) C’est l’un des meilleurs taux de mise en place des décrets sur l’ensemble des lois adoptées en 2010.

Les priorités pour 2011 sont très claires.

La première des priorités est l’augmentation du revenu de tous les agriculteurs français.

Pour répondre aux critiques qui se sont élevées et aux inquiétudes exprimées par certains d’entre vous, je pense à Renée Nicoux, je précise que les chiffres dont vous aurez connaissance dans quelques jours attestent d’un relèvement significatif du revenu des agriculteurs en 2010, toutes filières confondues. Ce relèvement n’est pas dû uniquement à la conjoncture. Il résulte également de décisions que nous avons prises à l’échelle nationale ou sur le plan européen.

La deuxième priorité, au-delà de l’augmentation et de la sécurisation du revenu des agriculteurs, réside dans les batailles que nous aurons à mener pour le budget de la politique agricole commune et pour la régulation des marchés agricoles européens. Madame Herviaux, depuis ma prise de fonction, je suis resté fidèle aux choix de soutenir la régulation contre la libéralisation des marchés, de privilégier l’encadrement des marchés à l’ouverture à outrance, à l’absence de règles et d’un minimum de réciprocité qui pourraient, je pèse mes mots, tuer l’agriculture française.

La troisième priorité consistera à nous montrer très vigilants sur les questions internationales, notamment en ce qui concerne les négociations commerciales. Il n’est en effet pas question de livrer nos agriculteurs à des accords commerciaux internationaux, aussi bien avec l’Organisation mondiale du commerce, l’OMC qu’avec le MERCOSUR, car cela signifierait la disparition d’un certain nombre d’exploitations en France. J’ajoute, à l’attention de Gérard Le Cam, que nous engagerons la bataille contre la volatilité des matières premières agricoles dans le cadre du G20, à la demande du Président de la République. En effet, chacun le sait, la volatilité du prix des matières agricoles est le premier des problèmes qui se posent à l’ensemble des agriculteurs, en France comme dans les autres pays européens.

J’en viens au projet du budget de mon ministère proprement dit. Les crédits de la mission «Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales », enseignement agricole y compris, s’élèvent à 5,7 milliards d’euros en 2011 en crédits de paiement, soit une augmentation de 1,8 % par rapport à 2010, avec une très légère baisse de 0,1 % à la fin du triennal.

Le programme 154, Économie et développement durable de l’agriculture, de la pêche et des territoires, qui pour nous tous ici est le plus important, est doté de 2 milliards d’euros de crédits de paiement en 2011. Nous avons engagé sur ce programme un certain nombre d’économies de crédits que je tiens à rappeler.

Certaines économies résultent de l’arrivée à échéance de dispositifs antérieurs. Je pense, en particulier, au plan de soutien exceptionnel à l’agriculture, qui nous permet d’économiser 150 millions d’euros en crédits de paiement, ou encore à la non-reconduction de la mesure rotationnelle, prévue pour un an seulement, qui nous permet d’économiser 135 millions d’euros en autorisations d’engagement.

Par ailleurs, nous économisons 31 millions d’euros de crédits de paiement au titre de la compensation de la taxe carbone, qui avait été budgétée, mais qui n’a pas été mise en place, et 24 millions d’euros de crédits de paiement au titre de la fin du plan pour une pêche durable et responsable.

Au-delà des crédits budgétés et non employés, d’autres économies, dont M. le rapporteur spécial a dressé la liste, résultent des réformes engagées par mon ministère au titre de la RGPP. Je pense à la rationalisation des crédits de FranceAgriMer, qui permet de dégager 15 millions d’euros en crédits de paiement en 2011, à la réaffectation des 9,6 millions d’euros de crédits dédiés à la génétique animale sur le compte d’affectation spéciale « Développement agricole et rural », à la réforme des associations départementales pour l’aménagement des structures des exploitations agricoles, les ADASEA, qui dégagera 6 millions d’euros en 2011, ainsi qu’aux dépenses de fonctionnement de l’administration et des établissements publics, qui seront réduites de 10 % en trois ans, et de 5 % dès 2011.

C’est un effort important qui est demandé en termes de crédits de fonctionnement à mon ministère. Une fois encore, je l’assume, car je considère que, eu égard aux contraintes budgétaires que nous connaissons, nous devons en priorité soutenir les agriculteurs. Je tiens d’ailleurs à saluer le sens des responsabilités de l’ensemble des agents de mon ministère qui, conscient de cette nécessité, nous ont permis de préserver les mesures de soutien au revenu des agriculteurs.

Monsieur le rapporteur spécial, je suis favorable à la mise en place d’une mission pluriannuelle, aussi bien sur l’Agence de services et de paiement, l’ASP, que sur l’Institut français du cheval et de l’équitation. Une telle initiative pourrait se révéler très utile.

Les mesures de soutien aux revenus des agriculteurs sont, je le répète, la priorité absolue de mon ministère. Les économies que nous avons réalisées nous permettent de maintenir intégralement un certain nombre de dispositifs vitaux pour les exploitants. Il en est ainsi de la prime nationale à la vache allaitante, que M. Bailly a mentionnée, pour laquelle nous avons préservé 165 millions d’euros. J’ajoute, monsieur le sénateur, que, depuis 2007, nous avons consacré 400 millions d’euros à la modernisation des bâtiments d’élevage. L’effort est donc soutenu.

Les économies réalisées nous également permis de maintenir 248 millions d’euros pour les indemnités compensatoires de handicaps naturels. Lors d’un récent déplacement dans le Rhône, j’ai pu une nouvelle fois mesurer combien les ICHN sont un élément clé du maintien de notre modèle agricole. Si nous voulons des exploitations partout, y compris dans les zones difficiles, il est indispensable de préserver les ICHN. Le maintien de ces indemnités constitue une priorité absolue, je l’ai encore répété aujourd'hui au commissaire européen Dacian Ciolos qui déjeunait avec le Premier ministre.

J’attache une attention particulière à la filière bovine, à chère au cœur de Daniel Soulage et d’Ambroise Dupont, sur laquelle j’aurais l’occasion de revenir lors des questions-réponses-répliques. C’est, avec la filière porcine, une des productions qui connaît les plus grandes difficultés. Je suis particulièrement mobilisé sur ce sujet depuis le début du mois de septembre. J’espère que nous verrons, notamment en termes de prix, les premiers résultats de cette action dans les semaines à venir.

Tous les crédits nécessaires ont également été prévus pour couvrir les engagements pris en 2010 en matière de renouvellement des contrats au titre de la prime herbagère agro-environnementale. C’était une question très sensible pour vous tous, et Jean-Paul Emorine m’a alerté à plusieurs reprises sur ce point. Tous les engagements pris sur la PHAE seront tenus. En 2011, 47 millions d’euros ont été ouverts en décrets d’avances pour couvrir les contrats arrivant à échéance en 2010 et en 2011. En 2012, 19 millions d’euros sont prévus pour prolonger de deux ans les contrats qui arrivent à échéance, afin que tous les PHAE arrivent à terme en 2014, lorsque sera mise en œuvre la future politique agricole commune. Ainsi, aucun éleveur ne verra ses contrats de PHAE annulés ou reportés.

En ce qui concerne l’installation des jeunes agriculteurs, qui inquiètent, et c’est bien légitime, Odette Herviaux et Renée Nicoux, j’apporterai deux précisions.

En premier lieu, les 350 millions d’euros prévus seront bien intégralement maintenus. Ils se décomposent en 169 millions d’euros de crédits du ministère de l’agriculture, en 94 millions d’euros de cofinancement du Fonds européen agricole pour le développement rural, le FEADER, et en 86,9 millions d’euros d’aides fiscales et d’exonérations sociales. Faisons bien attention lorsqu’on regarde cette ligne à ne pas comptabiliser uniquement les crédits du ministère, mais à prendre également en compte les exonérations fiscales et sociales, ainsi que les financements européens du FEADER.

En second lieu, l’intégralité de la taxe pour les jeunes agriculteurs sera bien consacrée, je vous rassure, à des projets pour les jeunes agriculteurs. Ce n’est pas parce que l’aide s’inscrit dans les plans de développement qu’elle n’ira pas aux jeunes agriculteurs.

La filière cheval a fait l’objet de nombreuses questions. Comme toujours, la mobilisation du Sénat a été payante. Quelques ajustements sont certes nécessaires, mais les amendements qui ont été déposés sur ce sujet nous permettront probablement de remédier à certaines difficultés.

Monsieur Le Cam, il n’est pas question d’abandonner le cheval de trait breton. Nous continuerons à consacrer 10 millions d’euros par an à l’identification et à l’étalonnage gratuit du cheval de trait et nous maintiendrons, dans le cadre de la politique agricole commune, les soutiens financiers à ces chevaux. Il n’y a pas, en France, uniquement des chevaux légers ou de course. Il est tout à fait légitime que les races de chevaux de trait continuent à être préservées.

Au-delà de ces mesures de soutien, les crédits du programme 154 doivent permettre de renforcer la compétitivité de nos filières, car la réponse à la concurrence allemande et internationale reposera sur leurs gains de compétitivité. Sur ce point, comme nous en avons ensemble pris la décision, je ne bougerai pas d’un millimètre. Ces gains de compétitivité sont indispensables, car il n’est pas question que nous continuions à perdre des parts de marché au profit de nos voisins allemands, espagnols ou italiens, aussi sympathiques soient-ils !

Nous continuerons donc d’accompagner la modernisation de l’agriculture avec les plans de développement, qui mobiliseront 300 millions d’euros pendant trois ans, à raison de 180 millions d’euros prélevés sur le budget de l’État, soit 60 millions d’euros par an, et de 120 millions d’euros produits par la taxe sur le foncier agricole qui seront, je le répète, réservés au financement de l’installation des jeunes agriculteurs.

Toujours en matière de compétitivité, nous allons poursuivre l’allégement des charges sur le travail occasionnel, un certain nombre d’entre vous, notamment Claude Biwer, en ont parlé. Il est indispensable que nous progressions dans ce domaine, car le coût du travail, dans le secteur de l’agriculture, peut représenter jusqu’à 60 % du coût du produit.

La Parlement a adopté, au début de l’année dernière, une mesure exonérant de toute charge sociale le travail occasionnel. Cette mesure représente un coût supplémentaire de 170 millions d’euros par an, ce qui porte le total de l’ensemble des exonérations de charges sociales sur le travail occasionnel dans l’agriculture à 492 millions d’euros, soit un demi-milliard d’euros par an. La décision que nous avons prise tous ensemble sur ce sujet a largement aidé le secteur des fruits et légumes et un certain nombre d’autres secteurs agricoles, qui ont connu une année 2010 bien meilleure que l’année 2009.

Cet exemple prouve que nous devons, à mon sens, continuer dans cette direction. J’ai donc confié à un député le soin de me remettre un rapport sur ce sujet dans les six mois à venir, de façon que nous puissions aussi présenter des propositions concrètes sur le travail permanent. Je vous propose de travailler ensemble sur ce sujet et d’expérimenter un certain nombre de dispositifs qui permettront à notre agriculture d’être plus compétitive.

Au-delà de ces décisions, je plaide de longue date pour une harmonisation des règles en Europe, qui permettront à la France d’affronter ses concurrents européens à armes égales.

Ces mesures de compétitivité doivent aussi s’accompagner de modifications des règles du droit européen de la concurrence, j’ai en d’ailleurs parlé ce midi avec Dacian Cioloş qui était invité à déjeuner chez le Premier ministre. Il s’agit de permettre aux producteurs de se regrouper pour mieux défendre leurs intérêts. J’avais eu l’occasion de le souligner lors de la discussion du projet de loi sur la modernisation de l’agriculture et de la pêche : si nous voulons des contrats justes et efficaces entre producteurs et industriels transformateurs ou distributeurs, il faut autoriser les producteurs à se regrouper. M. Jean-Paul Emorine a, à juste titre, soulevé cette question.

Je ne vous cache pas que la discussion est difficile. La Commission européenne n’est pas uniquement composée du commissaire à l’agriculture, malheureusement, en l’occurrence ! Nous devons tenir compte de la position d’autres commissaires. Nous devons notamment convaincre le commissaire à la concurrence, Joaquín Almunia, que, à partir du moment où l’on a autorisé la constitution de cartels dans l’industrie laitière, regroupant de très grandes entreprises telles que Danone, Lactalis ou Sodial, dont nous pouvons à bon droit être fiers, il n’est pas illégitime de permettre aux producteurs de s’organiser aussi pour négocier en position de force, ou du moins sur un pied d’égalité avec les industriels. C’est une question de justice, mais aussi d’efficacité économique. Pour établir un bon contrat, il faut des parties de force comparable, mille ou deux mille producteurs, d’un côté, et la grande industrie laitière, de l’autre, et non pas des parties déséquilibrées, un petit producteur normand face à un industriel comme Danone.

S’agissant de la pêche et de l’aquaculture, questions abordées par Charles Revet et Odette Herviaux, les 31 millions d’euros de baisse des crédits de paiement correspondent à la fin de la mise en œuvre du plan pour une pêche durable et responsable. En revanche, plusieurs actions innovantes essentielles seront poursuivies : ainsi, les contrats bleus, qui constituent une action prioritaire à nos yeux, continueront à s’inscrire dans la durée, pour un montant de 10 millions d’euros par an.

Le vieillissement de la flotte, évoquée par Odette Herviaux et Charles Revet, est une question absolument majeure : nos bateaux ont en moyenne 25 ans, ils consomment trop de carburant et le coût final du poisson est grevé par le prix du carburant, qui peut représenter jusqu’à la moitié du coût de revient du poisson ! Il est donc indispensable de moderniser ces bateaux. Dans les jours prochains, je confierai au député Daniel Fasquelle, la mission d’élaborer un rapport sur le renouvellement de la flotte, et je lui demanderai de présenter des propositions concrètes assorties des financements adéquats.

Nous consacrerons 5 millions d’euros en 2011 au renforcement de la connaissance des ressources halieutiques et au développement d’un partenariat encore plus étroit entre scientifiques et pêcheurs.

J’ai été heureux d’entendre les remarques de Charles Revet et Odette Herviaux sur ces sujets. Je saisis cette occasion pour répéter, devant la représentation nationale, ce que j’ai déjà dit publiquement : je souhaite que l’on témoigne une plus grande considération aux pêcheurs. (M. Charles Revet approuve.) Je suis toujours surpris, dans le débat public, de constater la considération que l’on a pour les poissons, qui certes le méritent, et le peu d’égards que l’on accorde aux pêcheurs et aux emplois de pêche, comme si l’on pouvait les rayer d’un trait de plume sans que personne ne s’en émeuve. (Signes d’assentiment sur de nombreuses travées.) Je vous avoue être plus ému par la disparition d’un emploi de pêche ou d’un pêcheur, sur le littoral atlantique ou méditerranéen, que par la disparition d’un poisson au fond de la mer ! (Mme Nathalie Goulet et M. Jean-Paul Virapoullé applaudissent.)

En ce qui concerne l’ostréiculture, je ne vous cache pas ma préoccupation pour cette filière, pour laquelle je me suis beaucoup engagé depuis le début de mon action à la tête de ce ministère. Nous avons déjà pris de nombreuses dispositions, notamment le remplacement du test de la souris par le test physicochimique, au prix d’une bataille difficile qui a beaucoup aidé les ostréiculteurs. Le Premier ministre a également accepté de classer l’année 2010 en calamité agricole et nous avons adopté un certain nombre de dispositions fiscales pour soutenir les ostréiculteurs. Reste à relever le défi du remplacement des huîtres aujourd’hui affectées par une surmortalité des juvéniles due à des souches infectieuses plus résistantes. Le défi est compliqué à relever et nous aurons besoin d’une entière mobilisation pour aboutir dans les meilleurs délais possibles.

Monsieur Revet, les schémas régionaux d’aquaculture seront mis en place dans les douze mois à venir, car ces dispositifs sont longs à installer.

L’allongement des périodes de pêche à la coquille Saint-Jacques, notamment pour Dieppe et Fécamp qui sont directement concernés, fait toujours l’objet de discussion, car il n’est pas certain que les avantages l’emportent sur les coûts. Il faut que les pêcheurs s’entendent sur ce sujet, ce qui n’est pas encore le cas.

Enfin, monsieur Virapoullé, en ce qui concerne la zone économique exclusive française outre-mer, je suis tout à fait ouvert à la mise en place d’un groupe de travail conjoint entre le Parlement, mon ministère et celui de Mme Penchard. Je suis prêt à ce que nous travaillions de concert sur ce sujet et je partage votre appréciation sur les problèmes que vous avez soulevés.

Les crédits du programme 206, Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation, vont évoluer avec la mise en place de la première politique publique de l’alimentation. Les raisons de la forte baisse des crédits de ce programme ont été expliquées par Joël Bourdin. Cette diminution résulte à la fois du transfert du financement de la gestion de l’équarrissage aux filières professionnelles, de la fin de l’élimination des farines animales, qui entraînent une réduction de 27,2 millions d’euros des crédits de paiement en 2011, ainsi que du transfert aux services du Premier ministre des crédits mutualisés des directions départementales interministérielles.

Malgré ces baisses conjoncturelles, qui s’expliquent facilement, nous accordons une priorité absolue à la sécurité sanitaire, à laquelle nous consacrons des crédits en forte augmentation. La sécurité sanitaire de l’alimentation est un de nos atouts, nous avons tout intérêt à le valoriser.

À propos des récentes controverses soulevées par les traces de pesticide retrouvées dans un certain nombre d’aliments produits en France, notamment les fruits et légumes, je rappellerai que nous respectons les règles et les normes les plus strictes en Europe. Nous avons réalisé des progrès considérables en la matière : toutes les quantités relevées sont très inférieures aux seuils de tolérance fixés par l’Union européenne. Nous continuerons d’avancer dans cette direction, mais n’alarmons pas inutilement nos concitoyens alors que les risques ne sont pas avérés !

En ce qui concerne la forêt : nos deux priorités budgétaires sont la lutte contre les conséquences de la tempête Klaus et le redressement de la situation budgétaire de l’Office national des forêts, l’ONF.

Dans le prolongement des décisions annoncées par le Président de la République à Urmatt, 371 millions d’euros seront consacrés au développement des forêts, ce qui représente une hausse de près de 10 % en crédits de paiement.

Le budget de l’ONF souffre, vous le savez, de déséquilibres structurels. Nous étudierons dans les mois à venir, avec Pascal Viné et Hervé Gaymard, les moyens de renouer avec l’équilibre financier. Plusieurs pistes sont avancées, mais aucune décision n’a encore été prise. Il faudra vraisemblablement choisir entre la possibilité d’aménager le taux de contribution au compte d’affectation spéciale « Pensions », solution défendue par l’ONF, ou l’augmentation de la subvention de l’État, qui n’est pas prévue dans le triennal. Seules certitudes : le budget de l’ONF devra être équilibré en 2011 et la subvention versée par le ministère de l’agriculture augmentera de 5 millions d’euros par rapport à 2010.

Enfin, nous suivons de très près la propagation des scolytes, dans la forêt des Landes. Monsieur César, nous avons eu l’occasion de nous en entretenir à Bordeaux, hier : nous réserverons 7 millions d’euros, prélevés sur l’enveloppe du plan de reconstitution de la forêt, au plan de lutte contre les scolytes. Et si le froid nous aide, peut-être verrons-nous les scolytes disparaître plus rapidement et pour un coût bien moindre qu’un traitement.

Les crédits du programme relatif à l’enseignement agricole ayant déjà été examiné, je rappellerai simplement que cet enseignement reste une priorité pour mon ministère.

J’en viens enfin aux questions diverses soulevées par différents orateurs.

En ce qui concerne les chambres d’agriculture, je laisse à François Baroin le soin de vous répondre lors d’une prochaine discussion. Pour l’heure, je rappellerai simplement trois points.

Tout d’abord, nous faisons tous des efforts, y compris le ministère de l’agriculture, notamment sur ses crédits de fonctionnement. Il n’est donc pas illégitime que cet effort soit partagé, même si, je le sais, de nouvelles missions sont confiées aux chambres d’agriculture.

Ensuite, n’oublions jamais que l’augmentation de la taxe pèse non pas sur le budget de l’État, mais directement sur les agriculteurs. Or ma préoccupation est d’améliorer le revenu des agriculteurs, donc d’éviter de leur imposer de nouvelles charges.

Enfin, le Gouvernement a proposé la création d’un taux pivot de 1,5 %, avec la possibilité de monter jusqu’à 3%. Le Sénat reviendra sur ce sujet demain soir, et je ne doute pas que Joël Bourdin et Jean-Paul Emorine sauront mobiliser leurs collègues sur ce sujet.

Monsieur César, sachez que je refuse catégoriquement la suppression des droits de plantation. Voilà quelques années, l’agriculture européenne s’est engagée dans la voie d’une libéralisation totale, qui a été un échec total. Ne reproduisons pas les erreurs du passé !

Au moment où, sur d’autres continents, certains pays, les États-Unis notamment, optaient pour une régulation accrue, accordaient une aide plus importante à leur agriculture, notamment en prenant des mesures de soutien du marché lorsque les prix s’effondraient, nous, Européens, avons voulu être plus libéraux que les ultralibéraux ! (M. Jean-Marc Pastor approuve.) Nous avons ouvert en grand nos frontières, abandonnant tout instrument d’intervention sur les marchés. Puis, nous avons constaté que cela ne marchait pas. En bien tirons-en les leçons et revenons à une régulation des marchés, y compris dans le domaine viticole.

Si nous supprimons les droits de plantation en Europe, vous verrez surgir de nombreuses exploitations viticoles et l’on produira du champagne en Espagne, en Italie ou dans le sud de la France, du bordeaux en Allemagne et du beaujolais en Grande-Bretagne. (Sourires.)