M. Jean-Pierre Sueur. Et Mme Tasca !

Mme Catherine Tasca. … vous présenteront un amendement rétablissant l’affectation sur la base d’un classement. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. – M. Josselin de Rohan applaudit également.)

M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?…

La discussion générale est close.

M. Jean-Pierre Sueur. Pas de réponse de M. le garde des sceaux ? Nous sommes déçus ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. Nous passons à la discussion des articles.

Chapitre Ier

Dispositions tendant à améliorer la qualité des normes et des relations des citoyens avec les administrations

Section 1

Dispositions applicables aux particuliers et aux entreprises

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : proposition de loi de simplification et d'amélioration de la qualité du droit
Article 1er

Articles additionnels avant l'article 1er

M. le président. L'amendement n° 106 rectifié, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet, MM. Desessard, Muller, Sueur, Collombat, Peyronnet, Anziani et Yung, Mmes Klès et Bonnefoy, MM. Ries, Lagauche, Daunis, Michel, Botrel et Percheron, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au premier alinéa de l'article L. 3141-3 du code du travail, les mots : « qui justifie avoir travaillé chez le même employeur pendant un temps équivalent à un minimum de dix jours de travail effectif » sont supprimés.

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.

Mme Alima Boumediene-Thiery. Cet amendement vise à supprimer l’exigence d’un temps minimum de travail effectif pour le bénéfice des congés payés, dans un souci d’amélioration du droit.

Il s’agit ici de tirer les conséquences d’un arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne, la CJUE, dans le champ du droit du travail. En effet, le 20 janvier 2009, cette juridiction a affirmé de manière claire qu’un État membre de l’Union européenne ne saurait conditionner le bénéfice des congés payés d’un salarié à l’exigence d’un temps de travail effectif minimum.

Selon la Cour, « le droit au congé annuel payé conféré par la directive 2003/88 elle-même à tous les travailleurs […] ne peut pas être subordonné par un État membre à l’obligation d’avoir effectivement travaillé pendant la période de référence établie par ledit État ».

Il convient de tirer les conséquences de cette décision dans notre droit interne, en modifiant l’article L. 3141-3 du code du travail, qui est aujourd’hui contraire à la directive 2003/88/CE du 4 novembre 2003.

Au travers de cet amendement, nous vous proposons donc de supprimer l’exigence d’une durée minimale de travail effectif, afin de rendre notre législation conforme au droit communautaire.

M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires sociales ?

Mme Françoise Henneron, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. Cet amendement vise à supprimer la disposition qui subordonne le bénéfice des congés payés au fait d’avoir travaillé au moins dix jours chez un même employeur.

Les auteurs de cet amendement affirment que cette disposition serait contraire à un arrêt rendu par la Cour de justice de l’Union européenne le 20 janvier 2009.

En réalité, la CJUE a seulement pris position sur un point : un salarié en arrêt maladie peut-il prendre ses congés payés ou doit-il les reporter à la fin de son arrêt maladie ?

La Cour ne s’est pas prononcée sur la compatibilité de notre code du travail avec le droit communautaire. Il n’est au demeurant pas choquant d’exiger une durée minimale de la relation de travail avant d’ouvrir le droit à congés.

Pour toutes ces raisons, la commission des affaires sociales émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Michel Mercier, garde des sceaux. L’exigence d’un délai minimum de travail effectif pour l’accès à des congés payés constitue en effet un enjeu de compatibilité entre notre droit national et la jurisprudence communautaire, comme l’a rappelé la Cour de cassation.

Le Gouvernement est pleinement conscient de cette situation. Une réflexion est d’ailleurs en cours sur ce sujet, avec l’exigence de ne pas déstabiliser brusquement l’organisation concrète des entreprises, notamment en ce qui concerne le paramétrage des logiciels de paie, qui est complexe et coûteux.

Avant de modifier la norme nationale, une évaluation précise des conséquences de la mesure doit être réalisée avec l’ensemble des professionnels. En tout état de cause, une période de transition devra être aménagée.

Madame Boumediene-Thiery, telles sont les raisons pour lesquelles je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement. (Mme Alima Boumediene-Thiery se penche vers M. Jean-Pierre Sueur.) Il me semble préférable d’écouter mon conseil plutôt que celui qui peut vous être soufflé, madame la sénatrice ! En effet, nous sommes tout disposés à étudier avec vous les moyens de remédier à cette situation.

M. le président. Mme Boumediene-Thiery, l’amendement no 106 rectifié est-il maintenu ?

Mme Alima Boumediene-Thiery. Monsieur le garde des sceaux, j’aimerais savoir si nous pourrons effectivement évaluer la situation dans l’année à venir, afin d’être en mesure de proposer des mesures concrètes ? Si vous me répondez par la négative, je maintiendrai l’amendement. En revanche, si vous vous engagez à procéder à une telle évaluation afin de mettre notre droit en conformité avec la réglementation européenne, je retirerai l’amendement.

M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.

M. Michel Mercier, garde des sceaux. Madame la sénatrice, je puis simplement vous promettre que, dans l’année à venir, nous vous associerons à ce travail d’évaluation. Toutefois, je ne peux vous garantir que celui-ci sera achevé au 31 décembre 2011. D’ailleurs, peut-être vous-même aurez-vous alors d’autres préoccupations. Cela peut arriver à tout le monde ! (Sourires.)

En tout cas, un travail sera mené, dont vous aurez pleinement connaissance.

M. le président. Mme Boumediene-Thiery, maintenez-vous l’amendement no 106 rectifié ?

Mme Alima Boumediene-Thiery. Dans la mesure où M. le garde des sceaux s’engage à évaluer la situation dans l’année à venir, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement no 106 rectifié est retiré.

L'amendement n° 107 rectifié, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet, MM. Desessard, Muller, Sueur, Collombat, Peyronnet, Anziani et Yung, Mmes Klès et Bonnefoy, MM. Ries, Lagauche, Daunis, Michel, Botrel et Percheron, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le deuxième alinéa de l'article L. 3142-1 du code du travail est complété par les mots : « ou pour l'enregistrement de son pacte civil de solidarité ».

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.

Mme Alima Boumediene-Thiery. Cet amendement vise à étendre aux salariés qui contractent un pacte civil de solidarité, un PACS, le bénéfice du congé pour événement familial. Cette proposition s’inscrit dans un souci de rapprochement des régimes applicables au mariage et au PACS au regard des droits sociaux.

Cet amendement tend à introduire le droit au congé de quatre jours pour la conclusion d’un PACS pour les salariés, dans les mêmes conditions que pour le mariage.

Ce droit à un congé existe déjà dans le secteur public, puisque les fonctionnaires bénéficient de cinq jours au maximum d’autorisation exceptionnelle d’absence lorsqu’ils se marient ou concluent un PACS.

Pourquoi cette disposition n’est-elle pas prévue pour les salariés du secteur privé ? Nous considérons que cette différence de traitement n’est pas justifiée et que les salariés, au même titre que les fonctionnaires, doivent bénéficier d’un congé pour pouvoir conclure leur PACS.

Cet amendement tend à corriger cette situation. Il s’inscrit dans la logique des propositions formulées par le Médiateur de la République dans les réflexions qu’il a présentées sur l’évolution du PACS à l’occasion du dixième anniversaire de la création de ce dernier.

M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires sociales ?

Mme Françoise Henneron, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à étendre au salarié qui conclut un pacte civil de solidarité le droit de prendre un congé de quatre jours pour événement familial, comme c’est le cas pour un mariage.

Je suis réservée sur cette mesure. Tout d’abord, parce qu’elle ferait peser une charge nouvelle sur les entreprises, y compris les plus petites d’entre elles, alors que nous sommes encore dans une période de sortie de crise. Ensuite, parce qu’elle aboutirait à aligner le statut du mariage sur celui du pacte civil de solidarité. Or, si le PACS a son utilité, c’est justement parce qu’il offre un statut différent de celui du mariage.

Pour ces deux raisons, la commission des affaires sociales émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Michel Mercier, garde des sceaux. Cet amendement vise à étendre aux personnes ayant souscrit un PACS le bénéfice du congé pour mariage. Or cela me semble difficile dans la mesure où le PACS n’est pas le mariage.

Je rappelle que l’article L. 3142-1 du code du travail ouvre aux salariés le droit de bénéficier de jours de congés rémunérés en cas d’événements familiaux exceptionnels. Des dispositions négociées par les partenaires sociaux s’appliquent aux personnes pacsées. Il me paraît préférable de nous en tenir à ce cadre, sans solliciter l’intervention du législateur.

Pour toutes ces raisons, je vous demande, madame Boumediene-Thiery, de bien vouloir retirer votre amendement. Toutefois, dans la mesure où je sais que j’aurai moins de chance qu’avec le précédent amendement, j’indique d’emblée que je suis défavorable à cette disposition.

M. le président. Madame Boumediene-Thiery, l'amendement n° 107 rectifié est-il maintenu ?

Mme Alima Boumediene-Thiery. Oui, je le maintiens, monsieur le président, car mon objectif est, d’une part, de faire en sorte que les personnes pacsées aient des droits identiques à ceux dont bénéficient les personnes mariées, et, d’autre part, d’aligner le droit applicable dans le secteur privé sur celui qui est en vigueur dans le secteur public.

M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Voilà maintenant plusieurs mois, à l’occasion du dixième anniversaire de la création du PACS, j’avais déposé une proposition de loi visant à aligner certains droits des personnes pacsées sur ceux des personnes mariées.

Le PACS, auquel la majorité, y compris au Sénat, était peu favorable lors de sa création,…

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Nous l’avons voté !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. … est devenu un mode d’union assez répandu. Le droit a d’ailleurs évolué puisque, désormais, les pacsés se doivent solidarité et soutien et bénéficient de droits patrimoniaux.

Force est de reconnaître cette évolution. Je suis d’ailleurs persuadée que certains enfants de parlementaires, y compris ceux de la majorité, choisissent de se pacser plutôt que de se marier.

M. Michel Mercier, garde des sceaux. C’est leur droit !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Nombre de situations que vous refusiez, chers collègues, sont aujourd’hui entrées dans les mœurs et vous êtes bien obligés de les admettre.

La proposition de loi que j’avais déposée visait, notamment, à étendre aux pacsés certains droits importants consentis aux personnes mariées, en particulier en matière de pension ou de congés accordés à l’occasion de l’enregistrement d’un PACS, mais dont ils ne peuvent bénéficier parce qu’ils sont du même sexe.

Lors de la discussion de cette proposition de loi, on m’avait répondu que la question des pensions serait examinée lors de l’examen du projet de loi portant réforme des retraites, ce qui n’a pas été le cas.

Quant au congé pour événement familial, on m’avait opposé que, les partenaires sociaux allant parfois plus loin que le législateur, il valait mieux laisser ceux-ci décider. J’avais alors répondu que, pour les personnes mariées, la loi fixe des droits et que nous voulions qu’il en soit de même pour les personnes pacsées.

Dans la fonction publique, la situation a été résolue grâce à la bonne volonté de l’État, qui a accepté d’aligner le PACS sur le mariage. Les partenaires sociaux, quant à eux, ne se préoccupent pas de la différence qui existait entre les secteurs public et privé. Et le législateur est là pour veiller au respect de l’égalité entre les citoyens.

Il est vrai que le régime de certains salariés est différent selon qu’ils appartiennent au secteur public ou au secteur privé, mais une personne qui conclut un PACS doit avoir les mêmes droits, qu’elle soit fonctionnaire ou non.

Devant l’absence de dispositions générales des partenaires sociaux – même si, je n’en doute pas, la situation des personnes pacsées est prise en compte dans certaines entreprises –, il m’avait été répondu que cette question devait être examinée. Selon nous, elle doit l’être par le législateur.

Pour ma part, je ne souhaite pas que l’on surcharge les projets de loi de simplification du droit de nombreuses dispositions nouvelles ; vous comprendrez donc que je n’en présente pas. Toutefois, j’observe qu’Alima Boumediene-Thiery propose un amendement visant à corriger l’inégalité de traitement entre les personnes pacsées et les personnes mariées et que Mme le rapporteur pour avis lui répond qu’il n’en est pas question, car le mariage n’est pas le PACS !

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. C’est vrai.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. M. le garde des sceaux emploie le même argument en apportant toutefois un léger bémol, puisqu’il fait référence aux partenaires sociaux.

Pour moi, le constat est simple : lorsque l’on fait un petit pas en avant, parce qu’on y est contraint, on s’empresse ensuite de faire marche arrière. Pour quelle raison ? Parce que PACS n’est pas le mariage ? Nous le savons parfaitement ! Il n’empêche qu’avoir imposé aux personnes pacsées des devoirs d’assistance mutuelle implique d’améliorer leur situation en rapprochant leurs droits de ceux qui sont accordés aux personnes mariées.

M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.

M. Michel Mercier, garde des sceaux. Je ne souhaite pas allonger inutilement la discussion, mais un petit rappel s’impose.

Pendant longtemps, dans le code civil, le couple était formé par le mariage. Il n’était d’ailleurs pas défini en tant que tel. On en précisait simplement les effets en matière de filiation et de succession.

Depuis lors, les choses ont changé, et le Sénat a largement contribué à cette évolution. Désormais, le code civil prévoit trois façons de constituer un couple : le mariage, le concubinage et le PACS.

Mme Françoise Henneron, rapporteur pour avis. Voilà !

M. Michel Mercier, garde des sceaux. J’en ajouterai une quatrième, qui consiste à ne rien faire. Libre aux Français de choisir entre ces quatre façons de s’unir.

Madame Borvo Cohen-Seat, vous avez parfaitement raison de souligner que le PACS s’est banalisé. Aujourd’hui, le choix de conclure un pacte civil de solidarité n’est plus motivé uniquement par des raisons liées à l’homosexualité des contractants. Le PACS est devenu une manière de s’unir. Les gens connaissent les avantages et les inconvénients des quatre formes de couple qui existent dans notre pays. Ils ont la liberté de choisir, mais une fois qu’ils ont choisi, qu’ils ne prétendent pas aux droits accordés à un autre mode d’union : ils doivent assumer les avantages et les inconvénients de leur décision.

Il me semble que le système est relativement clair. Les quatre modes de formation du couple sont différents et présentent chacun des avantages et des inconvénients. Les gens, je le répète, ont la liberté de choisir. Cependant, le PACS ne doit pas devenir le mariage, et inversement. C’est ainsi que nous pouvons vivre ensemble dans notre pays.

Le Gouvernement est donc tout à fait défavorable à l’amendement n° 107 rectifié.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 107 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 109 rectifié, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet, MM. Desessard, Muller, Sueur, Collombat, Peyronnet, Anziani et Yung, Mmes Klès et Bonnefoy, MM. Ries, Lagauche, Daunis, Michel, Botrel et Percheron, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le cinquième alinéa de l'article 79 du code civil, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

...° Les prénoms et nom de l'autre partenaire, si la personne décédée était liée par un pacte civil de solidarité ;

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.

Mme Alima Boumediene-Thiery. Cet amendement vise à prévoir l’inscription de l’identité du partenaire survivant d’un PACS sur l’acte de décès du partenaire défunt.

Cette exigence répond à une véritable demande de la part des associations, dans la mesure où l’absence de mention du partenaire survivant dans l’acte de décès provoque un certain nombre de difficultés pratiques que seule une modification de la loi permettrait d’éviter.

La conclusion d’un PACS est portée dans l’acte de l’état civil des partenaires, assurant ainsi une publicité du PACS. En revanche, lors du décès de l’un des deux partenaires, aucune mention du partenaire survivant n’existe dans l’acte du décédé. Si l’on publie le PACS, il nous paraît donc légitime d’en faire de même pour le décès de l’un des deux partenaires.

Pour des raisons de symétrie évidentes, il convient également de sécuriser, lors du décès, la situation du partenaire survivant. Cela passe par la mention de l’identité de celui-ci, afin que la rupture du PACS consécutive au décès n’efface ni l’existence du partenaire ni le bénéfice de certains droits auxquels ce dernier peut prétendre, par exemple la jouissance gratuite du logement du défunt durant une année ou l’attribution préférentielle de la propriété du logement qu’ils ont tous deux occupé.

Il est absolument nécessaire de sécuriser la jouissance de ces droits en mentionnant, de manière explicite, l’identité du partenaire survivant dans l’acte de décès.

Si le décès emporte dissolution du PACS, l’acte de décès doit, en tout état de cause, permettre d’identifier le bénéficiaire des droits mentionnés à l’article 515-6 du code civil.

C’est la raison pour laquelle nous vous proposons, mes chers collègues, de permettre l’inscription de l’identité du partenaire survivant dans l’acte de décès.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Bernard Saugey, rapporteur. La mention du conjoint survivant sur l’acte de décès du défunt a pour objet de faciliter l’identification et de prouver sa situation de famille. La mention du partenaire du PACS peut y contribuer pour les mêmes raisons. C’est pourquoi la commission émet un avis favorable sur cet amendement.

M. Jean-Pierre Sueur. Très bien, monsieur le rapporteur. C’est une évolution positive ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Michel Mercier, garde des sceaux. Je répondrai à la fois à Mme Alima Boumediene-Thiery et à M. le rapporteur.

M. Michel Mercier, garde des sceaux. Cet amendement vise à étendre au partenaire lié par un pacte civil de solidarité les dispositions de l'article 79 du code civil, qui imposent l’énonciation, dans l’acte de décès, « des prénoms et nom de l’autre époux, si la personne décédée était mariée, veuve ou divorcée ».

Toute mention portée sur un acte d’état civil doit être justifiée par des raisons juridiques précises – il ne s’agit pas seulement de se faire plaisir. Ainsi, les dispositions prévues par l'article 79 du code civil ont pour objet de faciliter le règlement de la succession du défunt, le conjoint survivant ayant la qualité d’héritier légal. Tel n’est pas le cas des couples unis par un PACS, au sein desquels le partenaire survivant n’a pas de vocation successorale légale, comme le précise le code civil dans diverses dispositions.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. C’est vrai.

M. Michel Mercier, garde des sceaux. La mention que vise à prévoir cet amendement serait donc sans objet.

Mme Alima Boumediene-Thiery. Ce n’est pas un bon argument.

M. Michel Mercier, garde des sceaux. C’est au contraire un excellent argument, madame la sénatrice. L'article 79 du code civil permet de donner à l’époux survivant une sorte d’acte de notoriété légal, afin que, muni de ce document, il puisse effectuer les formalités pour l’héritage.

Dans le cas d’un PACS, le partenaire n’est pas l’héritier légal : il n’est donc pas utile de compléter cet article.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C’est inscrit à l’état civil !

M. Michel Mercier, garde des sceaux. Non, madame Borvo Cohen-Seat, c’est la convention de PACS qui rend ces dispositions possibles, et non l’acte de décès.

Le bénéfice des dispositions successorales de l’article 831-3 du code civil sur l’attribution préférentielle du droit de jouissance pendant un an suppose que celui qui entend en bénéficier en fasse la demande, auquel cas l’attribution est de droit. Par conséquent, il n’est pas nécessaire de porter cette mention sur l’acte de décès.

M. Jean-Pierre Sueur. Ce n’est pas parce que ce n’est pas nécessaire que ce n’est pas judicieux !

M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Encore une fois, je fais observer que, depuis dix ans, un certain nombre de dispositions ont modifié la situation des personnes pacsées. Désormais, l’inscription du PACS figure sur l’état civil.

Une fois que l’un des deux partenaires d’un PACS est décédé, pourquoi n’en serait-il pas fait mention sur l’acte de décès, comme c’est le cas pour les couples mariés ? En outre, entre couples mariés et couples pacsés, certaines situations sont identiques : ainsi, les personnes unies par un PACS peuvent établir une convention devant notaire.

Par conséquent, je ne comprends pas pourquoi le Gouvernement refuse cette proposition.

M. le président. La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, pour explication de vote.

Mme Alima Boumediene-Thiery. Je remercie M. le rapporteur d’avoir émis un avis favorable sur cet amendement, dont la commission a tout à fait compris la portée. Il s’agit ici d’établir un parallélisme : à partir du moment où le PACS est inscrit sur l’acte d’état civil, il me semble tout à fait opportun de le mentionner également sur l’acte de décès.

Et cela n’a rien à voir avec l’héritage ! Nous entendons juste simplifier les procédures pour que le partenaire survivant puisse, par exemple, continuer à bénéficier du logement qu’il occupait à titre gratuit, notamment par la continuité du contrat de location. Notre motivation est pratique : nous sommes animés par le souci de rendre plus facile la vie quotidienne du partenaire survivant.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Tasca, pour explication de vote.

Mme Catherine Tasca. Monsieur le garde des sceaux, je rappelle ce qui avait animé nos débats lors de la création du PACS : si nous avons demandé à l’époque l’inscription de ce contrat à l’état civil, c’était aussi dans l’intérêt des tiers.

Ici, il s’agit non pas de chercher à capter un héritage, mais bien d’établir à l’état civil la situation réelle des personnes. L’inscription du nom du partenaire du PACS dans l’acte de décès est un élément d’information des tiers, en même temps qu’elle permet de consolider les droits de celui-ci.

À mes yeux, la commission et son rapporteur ont fort bien analysé l’objet de cet amendement.

M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.

M. Michel Mercier, garde des sceaux. Madame Tasca, comme toujours, je suis sensible aux arguments que vous développez. La question de l’intérêt des tiers que vous soulevez est importante. Il s’agit également de sauvegarder celui des partenaires, car certaines personnes ont pu contracter plusieurs PACS successifs au cours de leur vie, dont les différents signataires sont parfois encore en vie. C’est vrai. Toutefois, la réponse est apportée par la mention sur l’acte de naissance et non par l'article 79 du code civil, qui est visé ici et qui a une vocation successorale.

C'est la raison pour laquelle le Gouvernement maintient son avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 109 rectifié.

(L'amendement est adopté. – Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 1er.

L'amendement n° 110 rectifié, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet, MM. Desessard, Muller, Sueur, Collombat, Peyronnet, Anziani et Yung, Mmes Klès et Bonnefoy, MM. Ries, Lagauche, Daunis, Michel, Botrel et Percheron, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 515-6 du code civil est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque le pacte civil de solidarité prend fin par le décès d'un des partenaires, le partenaire survivant est présumé avoir qualité pour pourvoir aux funérailles au sens des dispositions du code général des collectivités territoriales. »

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.

Mme Alima Boumediene-Thiery. Cet amendement vise à apporter une réponse adéquate aux difficultés grandissantes que connaissent certains de nos concitoyens s’agissant du sort de l’urne cinéraire ainsi que des cendres du partenaire décédé.

La loi du 19 décembre 2008 – je parle sous le contrôle de Jean-Pierre Sueur, qui connaît mieux que personne cette question – est muette sur le point de savoir si le partenaire survivant a, selon les termes de la loi, « qualité pour pourvoir aux funérailles ».

En l’absence de déclaration écrite du choix de la personne chargée des obsèques, l’organisation de celles-ci échoit le plus souvent à un proche, membre de la famille, avec laquelle le défunt entretenait un lien stable, régulier et permanent.

En pratique, cette loi n’empêche pas que le partenaire de PACS survivant soit chargé d’organiser les funérailles, bénéficiant ainsi de l’urne cinéraire si telle était la volonté du défunt. Toutefois, dans le silence de la loi, plusieurs partenaires de PACS se sont vu refuser la possibilité non seulement de pourvoir aux funérailles, mais également d’assister aux obsèques, en raison de tensions liées, par exemple, au rejet de l’homosexualité du défunt par ses proches.

Les tribunaux sont régulièrement interrogés pour déterminer si le partenaire de PACS a qualité pour pourvoir aux funérailles, alors même que le défunt vivait avec lui depuis plusieurs années et entretenait avec lui « des liens stables et réguliers » – exigences centrales de la convention de PACS.

Il nous a donc semblé nécessaire et utile de rappeler que le partenaire survivant est considéré comme ayant qualité pour pourvoir aux obsèques et ne saurait, ainsi, être écarté des choix funéraires qui seront opérés.

Tel est l’objet de cet amendement. Il s’agit d’inscrire dans le code civil la place qui est celle du partenaire survivant dans cet instant tragique de la perte de son compagnon.

En tant qu’élus, nous avons reçu des témoignages poignants de partenaires ayant dû traverser ces instants de deuils douloureux dans la clandestinité la plus totale, parfois même en devant se cacher, faute d’avoir pu être associés aux funérailles du défunt. C’est une situation intolérable que le silence de la loi rend possible.

Nous vous proposons donc, mes chers collègues, d’expliciter la qualité pour pourvoir aux funérailles du partenaire survivant, en complétant l’article 515-6 du code civil. Cette mention sera très utile pour pacifier l’organisation des funérailles dans un contexte de rupture du défunt avec sa famille en raison de son orientation sexuelle ; elle rendra au partenaire survivant la place qui est la sienne : auprès du défunt, jusqu’aux derniers instants.