M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Philippe Richert, ministre. Même avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 182.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 403.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 404, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 15, deuxième phrase

Remplacer les mots :

est informé qu'il peut recevoir

par le mot :

reçoit

La parole est à Mme Bariza Khiari.

Mme Bariza Khiari. L’article L. 512-2 du CESEDA, tel qu’il résulte de la rédaction de l’article 34, prévoit que le migrant soumis à une obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire est informé qu’il peut recevoir communication des principaux éléments de la décision qui lui a été notifiée.

Selon M. le rapporteur, cette disposition vise à transposer l’article 12, paragraphe 2, de la directive Retour. Ce dernier prévoit, certes, que les principaux éléments des décisions liées au retour sont fournis aux étrangers qui en font la demande. Cependant, il ne faut pas perdre de vue que la directive s’applique « sans préjudice des dispositions plus favorables ». Les autorités françaises peuvent donc parfaitement mettre en place un régime plus protecteur pour les migrants.

Étant donné le délai très court dont bénéficie le migrant pour demander l’annulation de l’obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire – quarante-huit heures –, nous considérons que les principaux éléments de la décision administrative doivent lui être automatiquement communiqués afin qu’il puisse préparer au mieux sa défense. Il y va du respect du droit à un procès équitable.

Telles sont les raisons pour lesquelles je vous invite, mes chers collègues, à adopter le présent amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Cet amendement tend à prévoir que l’étranger reçoit systématiquement communication dans une langue qu’il comprend des principaux éléments de la décision qui lui a été notifiée.

Je rappelle que le texte de la commission prévoit déjà que l’étranger est informé et qu’il peut demander ces éléments – cela ne pose pas de difficulté –, alors que le texte initial ne prévoyait aucune information particulière pour l’étranger.

Les dispositions intégrées dans le texte lui paraissant équilibrées, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Philippe Richert, ministre. Pour les mêmes raisons que la commission, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 404.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 405, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 17, première phrase

Compléter cette phrase par les mots :

ni avant que le juge des libertés et de la détention n'ait statué

La parole est à Mme Bariza Khiari.

Mme Bariza Khiari. L’amendement n° 405 vise à modifier l’article L. 513-3 nouveau, qui précise l’effet suspensif des recours formés contre les obligations de quitter le territoire français.

Ainsi, ces obligations ne peuvent être exécutées d’office avant l’expiration du délai de départ volontaire. Si un recours a été formé dans ce laps de temps, l’administration doit attendre qu’il ait été jugé.

Par ailleurs, si l’obligation de quitter le territoire français n’a pas été assortie d’un délai de départ volontaire, le demandeur d’asile bénéficie de deux jours pour contester la décision.

Nous estimons que la brièveté de ce délai – quarante-huit heures ! – fait peser des menaces importantes sur l’exercice du droit d’asile.

Vous savez, mes chers collègues, que le demandeur d’asile placé en rétention ne peut recevoir l’assistance d’un avocat pour l’aider à introduire un recours juridictionnel. Vous savez également que ce sont souvent les associations présentes dans les centres de rétention qui assurent l’aide à l’exercice du recours. Comment pourraient-elles assumer une telle mission en si peu de temps ?

Il en résulte également que, si le recours n’est pas formé à temps et si une demande n’a pas pu être enregistrée en rétention, la mesure pourra être exécutée à tout moment, avant même que la personne étrangère ait été présentée au juge judiciaire. Cette incongruité est liée au fait que le délai de saisine du juge va être porté à cinq jours, au lieu de quarante-huit heures, par le présent projet de loi.

Un étranger pourra donc être reconduit à la frontière avant même que le juge des libertés et de la détention ait pu examiner la légalité de son interpellation et le respect de ses droits tout au long de la procédure. Ce n’est vraiment pas acceptable !

Cet amendement tend donc à prévoir la suspension de l’exécution de l’obligation de quitter le territoire français jusqu’à ce que le juge des libertés et de la détention ait statué sur la régularité du placement en centre de rétention.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Cet amendement vise à rendre impossible l’exécution d’une obligation de quitter le territoire français avant que le juge des libertés et de la détention n’ait statué. Il présente un inconvénient majeur : cette disposition s’appliquerait même quand l’intervention du juge des libertés et de la détention n’a pas lieu d’être, comme lorsque l’étranger fait l’objet d’une mesure d’éloignement, mais qu’il n’a pas été placé en rétention.

Pour ces raisons, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Philippe Richert, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement, pour les mêmes raisons que la commission.

M. le président. La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, pour explication de vote.

Mme Alima Boumediene-Thiery. Monsieur le ministre, il s’agit là de vérifier les conditions de l’interpellation, non de l’expulsion elle-même ou de la reconduite à la frontière.

Les personnes qui s’occupent de collectifs de sans-papiers constatent souvent des interpellations pour délits de faciès. Ces interpellations n’étant pas justifiées, elles sont cassées, et les personnes concernées retrouvent alors la liberté.

De la même façon, je trouve tout à fait inacceptable que l’on puisse exécuter une mesure d’expulsion avant d’avoir examiné les conditions de légalité de l’interpellation.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 405.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 67 rectifié, présenté par MM. Mézard et Collin, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :

Alinéa 20

Remplacer les mots :

a été

par le mot :

est

La parole est à M. Jacques Mézard.

M. Jacques Mézard. Cet amendement n’est pas simplement de nature rédactionnelle.

Je relis l’alinéa 20 de l’article 34 : « L’étranger qui fait l’objet d’une obligation de quitter le territoire français peut solliciter un dispositif d’aide au retour dans son pays d’origine, sauf s’il a été placé en rétention. » Nous proposons de remplacer : « sauf s’il a été placé en rétention » par : « sauf s’il est placé en rétention ».

En effet, une personne qui a été libérée doit pouvoir bénéficier d’une aide au retour. Or la rédaction actuelle laisse à penser que toute personne qui a fait l’objet d’une rétention, fondée ou non, est exclue du bénéfice de ce dispositif.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Favorable !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Philippe Richert, ministre. Le projet de loi prévoit que l’étranger qui fait l’objet d’une obligation de quitter le territoire français peut solliciter un dispositif d’aide au retour dans son pays, sauf s’il a été placé en rétention. Vous proposez que cette exclusion ne s’applique pas aux étrangers qui ont été en rétention, mais qui ne le sont plus. J’y suis défavorable.

Le fait qu’un étranger ait été placé en rétention signifie soit qu’il ne lui a pas été accordé de délai de départ volontaire, parce que son comportement, par exemple, constituait une menace pour l’ordre public ou qu’il révélait un risque de fuite, soit parce qu’il n’a pas respecté le délai de départ volontaire dont il avait bénéficié et au cours duquel il pouvait demander l’aide au retour. Il n’y a donc pas lieu, dans ces conditions, d’être particulièrement généreux envers de telles personnes.

Là se situe la différence entre votre approche, monsieur le sénateur, et la position du Gouvernement.

M. le président. La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, pour explication de vote.

Mme Alima Boumediene-Thiery. J’avoue que je n’ai pas compris l’explication de M. le ministre.

Si une personne n’est plus en rétention, si elle a recouvré la liberté et qu’elle demande à quitter le territoire, pourquoi ne pourrait-elle pas bénéficier de l’aide au retour ? Si elle n’est plus en rétention, elle n’est plus sous la menace d’une expulsion.

M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard, pour explication de vote.

M. Jacques Mézard. Je dois dire que je n’ai pas, moi non plus, bien compris les explications du Gouvernement.

J’ai noté que la commission est favorable à cet amendement de bon sens, la philosophie de la directive Retour étant d’encourager les retours volontaires. L’aide au retour va exactement dans ce sens, et il est normal de chercher à faciliter le retour de cette manière-là.

Les exemples donnés par le Gouvernement ne reflètent pas la totalité des cas qui peuvent se présenter.

Alors que la commission est favorable à cet amendement, je vous avoue que je comprends mal votre position, monsieur le ministre.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Philippe Richert, ministre. Ma position est très claire : si des personnes ont été placées en rétention, c’est que, pour des raisons diverses, elles n’ont pas joué le jeu du départ volontaire.

M. Jacques Mézard. Non, pas toutes !

M. Philippe Richert, ministre. J’ai donné quelques exemples, on pourrait en trouver d’autres.

De ce fait, nous n’avons pas à faire bénéficier automatiquement d’une aide au retour des personnes qui ont été placées en rétention, même si elles ont depuis recouvré leur liberté.

C'est la raison pour laquelle je confirme, au nom du Gouvernement, l’avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 67 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 34, modifié.

(L'article 34 est adopté.)

Article 34 (début)
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité
Discussion générale

3

Communication relative à des nominations

M. le président. J’informe le Sénat que, saisie en application de l’article 28 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l’électricité, la commission de l’économie a émis un avis favorable sur la nomination de M. Jean-Christophe Le Duigou et de M. Frédéric Gonand au sein du collège de la Commission de régulation de l’énergie.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quarante-cinq.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante-cinq, est reprise à vingt et une heures quarante-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

4

Communication du Conseil constitutionnel

M. le président. M. le président du Conseil constitutionnel a informé le Sénat, le mercredi 9 février, qu’en application de l’article 61-1 de la Constitution, la Cour de Cassation a adressé au Conseil constitutionnel une décision de renvoi d’une question prioritaire de constitutionnalité (2011-120 QPC).

Le texte de cette décision de renvoi est disponible au bureau de la distribution.

Acte est donné de cette communication.

5

Article 34 (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité
Articles additionnels après l’article 34

Immigration, intégration et nationalité

Suite de la discussion d'un projet de loi

(Texte de la commission)

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, relatif à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité.

Nous poursuivons la discussion des articles.

TITRE III (suite)

DISPOSITIONS RELATIVES AUX PROCÉDURES ET AU CONTENTIEUX DE L'ÉLOIGNEMENT

CHAPITRE II (suite)

Dispositions relatives au contentieux de l'éloignement

Section 1(suite)

Dispositions relatives au contentieux administratif

M. le président. Nous en sommes parvenus, au sein de la section 1 du chapitre II du titre III, aux amendements portant article additionnel après l’article 34.

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité
Article 35 (Texte non modifié par la commission)

Articles additionnels après l’article 34

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 406 rectifié ter, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 34, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :

1° Le dernier alinéa de l'article L. 531-1 est ainsi rédigé :

« Cette décision qui n'a pas été contestée devant le tribunal administratif dans les délais prévus à l'article L. 531-5 ou qui n'a pas fait l'objet d'une annulation, peut être exécutée d'office. » ;

2° Le premier alinéa de l'article L. 531-3 est complété par les mots : « sous réserve des dispositions de l'article L. 531-5 » ;

3° Après l'article L. 531-4, il est inséré un article L. 531-5 ainsi rédigé :

« Art. L. 531-5. - I. - L'étranger qui a fait l'objet d'une décision prévue au présent chapitre, peut, dans le délai de trente jours suivant sa notification, demander au tribunal administratif l'annulation de cette décision. Le même recours en annulation peut également être dirigé contre la décision relative au séjour et la décision mentionnant le pays de destination qui l’accompagnent le cas échéant.

« L'étranger peut demander le bénéfice de l'aide juridictionnelle au plus tard lors de l'introduction de sa requête en annulation. Le tribunal administratif statue dans un délai de trois mois à compter de sa saisine.

« Toutefois, si l'étranger est placé en rétention en application de l'article L. 551-1 ou assigné à résidence en application de l'article L. 561-2, il est statué selon la procédure et dans le délai prévus au II.

« II. - En cas de décision de placement en rétention l'étranger peut demander au président du tribunal administratif l'annulation de cette décision dans les quarante-huit heures suivant sa notification.

« Le président, ou le magistrat qu'il désigne à cette fin parmi les membres de sa juridiction ou les magistrats honoraires inscrits sur la liste mentionnée à l'article L. 222-2-1 du code de justice administrative, statue dans un délai de soixante-douze heures à compter de sa saisine.

« L'étranger peut demander au président du tribunal ou au magistrat désigné à cette fin le concours d'un interprète. L'étranger est assisté de son conseil s'il en a un. Il peut demander au président ou au magistrat désigné à cette fin qu'il lui en soit désigné un d'office. L'audience se déroule sans conclusions du rapporteur public.

« L'audience se tient dans les locaux du tribunal administratif compétent. La décision ne peut être exécutée avant l'expiration d'un délai de soixante-douze heures suivant sa notification ou, en cas de saisine du président du tribunal administratif, avant que ce dernier ou le magistrat désigné à cette fin n'ait statué.

« Le jugement du président du tribunal administratif ou du magistrat désigné par lui est susceptible d'appel dans un délai d'un mois devant le président de la cour administrative d'appel territorialement compétente ou un magistrat désigné par ce dernier. Cet appel n'est pas suspensif.

« Si la décision est annulée, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues au titre V du présent livre et l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas. »

La parole est à M. Roland Courteau.

M. Roland Courteau. Cet amendement concerne le sort de ceux que l’on appelle les « Dublinés », en référence au règlement européen dit « Dublin II », qui impose de renvoyer les demandeurs d’asile à la case départ, en quelque sorte, c'est-à-dire vers le premier pays de l’Union européenne où ils sont entrés.

L’objet du règlement est clair : il s’agit d’éviter que la même personne ne dépose de multiples demandes d’asile dans plusieurs États membres.

Dans le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, ce sont les articles L. 531-1 et suivants qui fixent la procédure de renvoi des étrangers vers l’État membre compétent pour traiter de la demande d’asile.

Contrairement aux obligations de quitter le territoire français, les OQTF, et aux arrêtés préfectoraux de reconduite à la frontière, les APRF, de tels arrêtés ne peuvent pas faire l’objet d’un recours suspensif.

Or, dans les cas de décisions de remise à un État européen, l’intéressé peut établir des craintes de mauvais traitements dans le pays concerné. Déjà, le 20 mai 2010, le Conseil d’État a suspendu par une ordonnance de référé-liberté un renvoi vers la Grèce de demandeurs d’asile palestiniens qui avaient été maltraités dans ce pays.

Surtout, le 21 janvier 2011, la Cour européenne des droits de l’homme a rendu un arrêt de grande chambre condamnant conjointement la Grèce et la Belgique pour violation du droit au recours effectif garanti par l’article 13 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

Cet arrêt est historique ! C’est un premier pas vers la refonte d’un système qui, avec sa logique implacable, provoque pour les « Dublinés » de véritables drames humains.

Dans l’attente d’aménagements au niveau européen du règlement Dublin II, nous proposons de prendre en compte la condamnation par la Cour de Strasbourg et d’instaurer un recours de plein droit suspensif contre les décisions de renvoi vers les autres États membres de l’Union européenne. Le recours proposé sera similaire aux recours contre les OQTF.

M. le président. L'amendement n° 187, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche, est ainsi libellé :

Après l'article 34, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :

I. - Le dernier alinéa de l'article L. 531-1 est ainsi rédigé :

« Cette décision qui n’a pas été contestée devant le président du tribunal administratif dans les délais prévus à l'article L. 531-5 ou qui n'a pas fait l'objet d'une annulation, peut être exécutée d'office. »

II. - Après l'article L. 531-4, il est inséré un article L. 531-5 ainsi rédigé :

« Art. L. 531-5. - L'étranger qui a fait l'objet d'une décision prévue à l'article L. 531-1 du présent code peut, dans les quarante-huit heures suivant la notification de cette décision, en demander l'annulation, au président du tribunal administratif.

« Le président, ou le magistrat qu'il désigne à cette fin parmi les membres de sa juridiction ou les magistrats honoraires inscrits sur la liste mentionnée à l'article L. 222-2-1 du code de justice administrative, statue dans un délai de soixante-douze heures à compter de sa saisine.

« L'étranger peut demander au président du tribunal ou au magistrat désigné à cette fin le concours d'un interprète. L'étranger est assisté de son conseil s'il en a un. Il peut demander au président ou au magistrat désigné à cette fin qu'il lui en soit désigné un d'office. L'audience se déroule sans conclusions du commissaire du Gouvernement.

« Par dérogation au précédent alinéa, le président du tribunal administratif ou le magistrat désigné à cette fin peut, par ordonnance motivée, donner acte des désistements, constater qu'il n'y a pas lieu de statuer sur un recours et rejeter les recours ne relevant manifestement pas de la compétence de la juridiction administrative, entachés d'une irrecevabilité manifeste non susceptible d'être couverte en cours d'instance.

« L'audience se tient dans les locaux du tribunal administratif compétent. La décision ne peut être exécutée avant l'expiration d'un délai de quarante-huit heures suivant sa notification ou, en cas de saisine du président du tribunal administratif, avant que ce dernier ou le magistrat désigné à cette fin n'ait statué.

« Le jugement du président du tribunal administratif ou du magistrat désigné par lui est susceptible d'appel dans un délai d'un mois devant le président de la cour administrative d'appel territorialement compétente ou un magistrat désigné par ce dernier. Cet appel n'est pas suspensif.

« Si la décision est annulée, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues au titre V du présent livre et l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas. »

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Cet amendement s’inscrit dans la même perspective que l’amendement n° 406 rectifié ter.

En application de la convention de Schengen ou de la procédure Dublin, lorsqu’un étranger est admissible dans un autre État européen, il fait l’objet d’un arrêté de réadmission fondé sur les articles L. 531-1 et suivants du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.

Contrairement aux OQTF et aux APRF, que ce projet de loi entend au passage fusionner, de tels arrêtés ne peuvent pas faire l’objet d’un recours suspensif.

Or l’intéressé peut établir des craintes de mauvais traitements dans ce pays européen. Les demandeurs d’asile renvoyés en Grèce – cela a déjà été évoqué – ou détenus dans des pays comme Malte en sont les exemples les plus frappants.

Ainsi, le Conseil d’État a suspendu par une ordonnance de référé-liberté du 20 mai 2010 un renvoi vers la Grèce de demandeurs d’asile palestiniens qui avaient été maltraités dans ce pays. Mais une telle procédure n’est pas très accessible.

De même, lors d’une audience de grande chambre le 1er septembre 2010, la Cour européenne des droits de l’homme a examiné la situation des demandeurs d’asile en Grèce.

Il s’agit donc d’anticiper la refonte du règlement Dublin II, en projet, et de nous soustraire à la menace d’une condamnation par la Cour en instaurant un recours suspensif contre les arrêtés de réadmission similaire aux recours contre les refus d’entrée au titre de l’asile, c'est-à-dire avec un délai de quarante-huit heures pour saisir la juridiction, qui a soixante-douze heures pour statuer.

M. le président. L'amendement n° 14 rectifié ter, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :

Après l'article 34, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le dernier alinéa de l'article L. 531-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi rédigé :

« Cette décision peut être exécutée d'office, si elle a pu être contestée devant le tribunal administratif dans un délai de trente jours suivant sa notification, et qu'elle n'a pas fait l'objet d'une annulation. »

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.

Mme Alima Boumediene-Thiery. J’irai dans le même sens que les deux orateurs précédents.

Cet amendement consiste à introduire un recours suspensif de plein droit contre les arrêtés de remise à un autre État européen.

En effet, lorsqu’un étranger est admissible dans un autre État européen, en application de la convention Schengen ou de la procédure Dublin, il fait l’objet d’un arrêté de réadmission fondé sur les articles L. 531-1 et L. 531-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.

L’introduction d’un recours suspensif de plein droit répond à une exigence de conformité à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et à la jurisprudence.

En effet, le 21 janvier 2011, la Cour européenne des droits de l’homme a rendu un arrêt de grande chambre condamnant conjointement la Grèce et la Belgique pour violation du droit au recours effectif en considérant que « l’effectivité d’un recours au sens de l’article 13 demande impérativement un contrôle attentif par une autorité nationale, un examen indépendant et rigoureux de tout grief aux termes duquel il existe des motifs de croire à un risque de traitement contraire à l’article 3, ainsi qu’une célérité particulière ; il requiert également que les intéressés disposent d’un recours de plein droit suspensif ».

Tel est l’objet de cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. La commission émettra le même avis sur les amendements nos 406 rectifié ter, 187 et 14 rectifié ter.

Ces amendements, notamment l’amendement n° 406 rectifié ter, tendent à prévoir que les recours administratifs contre les décisions de réadmission dans un autre État européen prononcées en vertu des articles L. 531-1 et suivants du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ont un caractère suspensif.

En effet, les requêtes en annulation à l’encontre de ces décisions de réadmission dans d’autres pays de l’Union européenne visant des ressortissants de pays tiers, demandeurs d’asile ou non, ne sont pas suspensives de plein droit.

Certes, comme l’a rappelé le Conseil d’État dans un arrêt du 6 mars 2008, ces décisions peuvent faire l’objet d’un référé-suspension, selon les dispositions de l’article L. 521-1 du code de justice administrative. En outre, s’agissant des demandeurs d’asile, le règlement Dublin II n’impose pas de recours suspensif.

Toutefois, alors que la Cour européenne des droits de l’homme semblait auparavant reconnaître le bien-fondé de tels arguments, un arrêt du 21 janvier dernier semble clairement impliquer que ce type de procédures n’est pas suffisant pour assurer un recours effectif au sens de l’article 13 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, notamment parce qu’il ne permet pas réellement d’évaluer, dans le cas d’un demandeur d’asile, si la personne ne risque pas d’être soumise à des traitements inhumains ou dégradants dans le pays où elle est réadmise.

Il est sans doute nécessaire d’avancer sur le sujet. Il faut encore réfléchir pour élaborer un dispositif équilibré.

Quoi qu’il en soit, la commission des lois émet un avis de sagesse sur ces trois amendements, dont l’objet est similaire. Néanmoins, dans l’hypothèse où le Sénat déciderait d’en adopter un, la commission donnerait plutôt la préférence à l’amendement n° 406 rectifié ter, qui est le plus complet.