Mme la présidente. La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, pour présenter l'amendement n° 200.

Mme Josiane Mathon-Poinat. À défaut de supprimer totalement l’article 49, nous souhaitons que le délai de trois ans d’interdiction de retour sur le territoire français ne s’applique pas aux travailleurs clandestins. En effet, une personne vivant régulièrement sur le territoire pourrait être reconduite à la frontière parce qu’elle exerce un emploi sans autorisation.

Face à l’irrégularité commise, qui est ici le seul fait de travailler, les conséquences, à savoir l’expulsion et l’interdiction de retour pendant trois ans, paraissent totalement disproportionnées, et ce d’autant plus que cette disposition vise indistinctement les ressortissants communautaires et extracommunautaires, ce qui constitue, de fait, une violation du droit communautaire.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Tout d’abord, les craintes des auteurs de l’amendement n° 76 rectifié ne sont pas fondées. En effet, l’article L. 533-1 relatif à la reconduite à la frontière pour menace à l’ordre public ne s’appliquera plus aux ressortissants communautaires, car la commission a adopté des amendements du Gouvernement qui les excluent du présent dispositif.

Par conséquent, la commission souhaite le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettrait un avis défavorable.

Les auteurs de l’amendement n° 200 souhaitent supprimer la possibilité de refuser l’accès du territoire aux personnes ayant fait l’objet d’un arrêté de reconduite à la frontière pris moins de trois ans auparavant en application de l’article L. 533-1.

Or il est nécessaire de conserver cette disposition, puisqu’elle recouvre notamment les cas de reconduite pour menace contre l’ordre public. La commission est donc défavorable à cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Brice Hortefeux, ministre. Même avis, madame la présidente.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 76 rectifié et 200.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisi de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L'amendement n° 77 rectifié est présenté par MM. Mézard et Collin, Mme Escoffier, M. Baylet, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.

L'amendement n° 201 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéas 3 à 11

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Jacques Mézard, pour présenter l’amendement n° 77 rectifié.

M. Jacques Mézard. Dans la continuité de notre précédent amendement, nous demandons la suppression des dispositions qui instituent un dispositif autorisant la reconduite à la frontière pour des motifs que nous estimons illégitimes et contraires au droit communautaire.

Nous l’avons déjà rappelé, la menace à l’ordre public revêt, selon le droit communautaire, une définition très précise, respectueuse de la proportionnalité et de l’adéquation à l’objectif visé. Or les alinéas 3 à 11 sont manifestement très imprécis, de façon volontaire selon moi.

Les termes « au regard de la commission des faits passibles de poursuites pénales » justifient qu’une mesure d’éloignement pour menace à l’ordre public puisse être prononcée en l’absence de condamnation pénale, donc d’intervention d’un juge.

Un étranger en situation régulière résidant depuis moins de trois mois pourrait ainsi se voir notifier une obligation de quitter le territoire à l’issue d’une simple garde à vue. Cela nous paraît encore plus dangereux quand on connaît la situation déplorable de notre droit en la matière. Cela donne d’ailleurs lieu à un projet de loi en cours de discussion !

En établissant ainsi un lien entre le soupçon qui pèse sur l’étranger et son éloignement, ces alinéas entretiennent une confusion qui nous paraît tout à fait illégitime.

Mme la présidente. La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, pour présenter l'amendement n° 201.

Mme Josiane Mathon-Poinat. Ces alinéas laissant planer de nombreuses zones d’ombre, leur maintien aboutira à une grande insécurité juridique.

La possibilité d’expulsion « au regard de la commission de faits passibles de poursuites pénales » est particulièrement problématique. Avec la rédaction actuelle, on pourrait comprendre qu’un étranger séjournant régulièrement sur le territoire français qui ne ferait l’objet d’aucune condamnation pénale, mais qui aurait été interpellé pour des faits passibles de poursuites pénales pourrait alors être reconduit à la frontière. Cela signifie que le simple soupçon de la police pourrait remettre en cause la régularité du séjour d’un étranger.

De plus, la notion de trouble à l’ordre public est particulièrement floue. Le droit communautaire précise pourtant, dans l’article 27 de la directive de 2004 : « Les mesures d’ordre public ou de sécurité publique doivent respecter le principe de proportionnalité et être fondées exclusivement sur le comportement personnel de l’individu concerné. L'existence de condamnations pénales antérieures ne peut à elle seule motiver de telles mesures.

Le comportement de la personne concernée doit représenter une menace réelle, actuelle et suffisamment grave pour un intérêt fondamental de la société. »

Les références faites aux articles du code pénal, par exemple l’occupation illégale d’un terrain, ne rentrent manifestement pas dans ces critères.

La procédure de reconduite à la frontière ne peut être automatique ; elle doit être étudiée au cas par cas, selon des critères proportionnés et en considération de la situation personnelle de l’intéressé.

Ce n’est manifestement pas le cas de ces alinéas, qui établissent des critères arbitraires et disproportionnés, sans appréciation personnelle, sans garanties de procédure et, plus grave encore, sans possibilité de recours.

Mme la présidente. L'amendement n° 419, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 8

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme Gisèle Printz.

Mme Gisèle Printz. L’alinéa 8 de l’article 49 tend à expliciter la notion de « menace pour l’ordre public » pouvant justifier le prononcé d’un arrêté de reconduite à la frontière à l’encontre de personnes entrées en France pour un court séjour – moins de trois mois.

D’après le texte soumis à notre examen, cette notion pourrait « notamment » s’apprécier au regard de la commission de certains faits passibles de poursuites pénales.

Cette disposition introduite à l’Assemblée nationale par un amendement du Gouvernement fait partie des mesures autonomes du présent projet de loi. Elle n’est prescrite par aucune des trois directives déjà mentionnées.

Le caractère imprécis et juridiquement peu rigoureux de la rédaction de cette disposition est source d’insécurité juridique. Il est à craindre qu’un étranger n’ayant fait l’objet d’aucune condamnation pénale puisse se voir notifier un arrêté de reconduite à la frontière.

Si cette disposition était adoptée en l’état, des personnes en situation régulière qui seraient simplement soupçonnées par la police de la commission de certains faits risqueraient également de tomber sous le coup d’un arrêté de reconduite à la frontière.

Une telle disposition n’est pas acceptable. Des migrants ne sauraient être expulsés en raison d’infractions pour lesquelles ils n’ont pas été condamnés ! À l’instar de toutes les personnes présentes sur le territoire français, les ressortissants étrangers doivent pouvoir bénéficier de la présomption d’innocence, principe fondamental de notre État de droit !

Par ailleurs, l’énumération de certaines infractions, telles que l’occupation illégale d’un terrain public ou privé et l’exploitation de la mendicité, vise clairement les ressortissants d’États tiers d’origine rom.

Pour toutes ces raisons, mes chers collègues, nous vous proposons de supprimer l’alinéa 8 de l’article 49.

Mme la présidente. L'amendement n° 502, présenté par M. Buffet, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéa 8

Supprimer le mot :

notamment

La parole est à M. le rapporteur.

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Il convient d’user avec beaucoup de prudence de l’adverbe « notamment ».

Utilisé pour des énumérations qui pourraient être incomplètes, il n’a aucune portée normative. Dans le cas présent, il est inutile ; c’est pourquoi nous souhaitons sa suppression.

Mme la présidente. L'amendement n° 99, présenté par Mme Garriaud-Maylam, est ainsi libellé :

Alinéa 8

Remplacer les mots :

ainsi que des 1°, 4° à 6° et 8° de l'article 311-4 et de l'article 322-4-1 du code pénal

par les mots :

ainsi que des 1°, 4° à 6° et 8° de l'article 311-4, de l'article 322-4-1 et des articles 222-14, 224-1, 227-4-2, 227-4-3, 227-5, 227-6, 227-7 du code pénal

La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Le présent amendement vise à permettre l’éloignement de notre territoire d’étrangers ayant commis des faits passibles de condamnation pour violences conjugales, déplacements illicites d’enfants ou violation des ordonnances prises par le juge aux affaires familiales en cas de violences.

Alors que près d’un mariage sur trois se fait avec un étranger, il nous paraissait important de pouvoir protéger les victimes potentielles, le nombre de dossiers étant déjà en augmentation très sensible.

À l’instar des autres mesures prévues par cet article, la présente disposition ne s’appliquera pas à l’étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de trois mois, puisque, dans ce dernier cas, des dispositions sont déjà prévues par le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Les amendements nos 77 rectifié et 201 tendent à supprimer des dispositions de l’article 49 qui ne font que reprendre celles qui figurent actuellement à l’article L. 511-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.

Il s’agit de la possibilité, ajoutée par la loi du 26 novembre 2003, de reconduire à la frontière un étranger en court séjour légal qui cause un trouble à l’ordre public.

Cette disposition paraissant nécessaire à la commission des lois, celle-ci a émis un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.

L’amendement n° 419 vise à supprimer l’énumération des faits passibles de poursuites pénales pouvant justifier une reconduite à la frontière des étrangers en court séjour, au motif d’une menace pour l’ordre public.

Il est vrai que les énumérations présentent toujours le risque d’être incomplètes, ce qui explique d’ailleurs l’utilisation au même alinéa de l’adverbe « notamment », qui n’est pas normatif et dont je vous ai proposé par amendement la suppression.

En l’occurrence, la notion d’atteinte à l’ordre public s’apprécie toujours en fonction d’un ensemble d’éléments, parmi lesquels figure la commission de faits passibles de poursuites pénales. Préciser de quels faits il s’agit n’apporte aucun élément normatif supplémentaire. En revanche, il est à craindre qu’il faille bientôt compléter l’énumération par de nouvelles références au code pénal.

Pour ces raisons, la commission s’en remet à la sagesse du Sénat sur l’amendement n° 419.

Enfin, s’agissant de l’amendement n° 99, le texte applicable aujourd’hui permet déjà, sans aucune difficulté, de poursuivre les faits énumérés dans le cadre de sanctions pénales. Les faits sont aussi couverts par les atteintes à l’ordre public.

La commission a émis un avis défavorable, afin de ne pas allonger encore l’énumération.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Brice Hortefeux, ministre. Monsieur Mézard, tout d’abord, la mesure proposée ne s’applique pas aux ressortissants communautaires ; aucune ambiguïté ne doit subsister sur ce point.

Ensuite, je vous encourage à être vigilant. Vous regrettez en quelque sorte l’absence de condamnation pénale. Si je vous suis, cela signifie que vous rétablissez la double peine. Toutefois, si je proposais un tel rétablissement, vous seriez mécontent, et à juste titre. Par conséquent, quelle que soit notre position, elle ne fait pas votre bonheur. (Sourires sur les travées de lUMP.) Or il faut bien, à un moment donné, faire preuve d’un peu de cohérence !

Le Gouvernement est donc défavorable aux amendements identiques nos 77 rectifié et 201.

Il est également défavorable, comme M. le rapporteur, à l’amendement n° 419.

Il s’en remet à la sagesse du Sénat sur l’amendement n° 502 de la commission.

Enfin, contrairement à la commission, madame Garriaud-Maylam, le Gouvernement est favorable à l’amendement n° 99, par lequel vous souhaitez ajouter les faits passibles de condamnations pour violences conjugales à la liste des infractions pouvant justifier une mesure de reconduite à la frontière pour des motifs d’ordre public.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Je vous remercie !

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 77 rectifié et 201.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 419.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 502.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 99.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 49, modifié.

(L'article 49 est adopté.)

Article 49
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité
Article 51 (Texte non modifié par la commission)

Article 50

(Non modifié)

Le premier alinéa de l’article L. 553-1 du même code est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Le registre mentionne également l’état civil des enfants mineurs accompagnant ces personnes ainsi que les conditions de leur accueil. »

Mme la présidente. L'amendement n° 204, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Nous avions déposé à l’article 10 un amendement visant à interdire la détention des mineurs en centre de rétention, que vous avez bien évidemment repoussé.

Il paraît fort contestable qu’aucune catégorie de personnes n’échappe à l’allongement de la durée d’enfermement prévu par ce projet de loi. Vous savez pourtant que l’enfermement d’enfants a été sévèrement critiqué et considéré par les juges comme un traitement inhumain et dégradant au sens de l’article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

L’article 17 de la directive Retour, reprenant la rédaction de l’article 37, alinéa b, de la Convention internationale des droits de l’enfant, dispose en outre que les familles comportant des mineurs ne doivent être placées en rétention qu’en dernier ressort et pour la période la plus brève possible.

Pour notre part, et au nom de l’intérêt supérieur de l’enfant, nous estimons nécessaire que celui-ci ne puisse faire l’objet d’aucune mesure d’enfermement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Le présent amendement visant à supprimer l’article 50, la commission y est bien évidemment défavorable.

Sur le fond, le fait de mentionner, sur le registre des CRA, les centres de rétention administrative, l’état civil des enfants mineurs accompagnant les personnes à l’encontre desquelles a été prise une mesure de placement en rétention permettra d’assurer au mieux l’exercice par les familles des droits qui leur sont garantis en rétention.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Brice Hortefeux, ministre. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 204.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 418, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Cette mention sera effacée du registre à sa sortie du centre.

La parole est à M. Richard Yung.

M. Richard Yung. Cet amendement vise à réguler la tenue du registre de l’état civil des centres de rétention.

Dans un certain nombre de cas, les enfants suivent les parents en centres de rétention. Peut-être est-ce d’ailleurs une meilleure solution que celle qui consisterait à les séparer. Je signale à ce propos que le commissaire européen aux droits de l’homme, Thomas Hammarberg, vient de publier un rapport sur la question, dans lequel il évoque un certain nombre de solutions, notamment celles qui ont été retenues au Royaume-Uni, pays qui possède des structures spécifiques.

En France, nous sommes confrontés à la présence de mineurs en centre de rétention, puisque les enfants y suivent leurs parents.

L’article 50 prévoit d’ajouter à la liste des éléments devant figurer sur le registre des CRA l’état civil des enfants, ce qui me paraît juste. Il faut en effet savoir qui entre et qui sort de ces centres.

En revanche, nous pensons que cette mention ne doit pas suivre les enfants tout au long de leur existence, afin que ceux-ci ne puissent pas être pointés du doigt du fait de leur séjour en centre de rétention de telle à telle période.

C’est pourquoi, dans l’intérêt de l’enfant et pour assurer la protection de son identité et de sa dignité, nous demandons que cette mention soit effacée, à la fin de son séjour, du registre d’entrée ou de sortie du CRA.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. La commission souhaite connaître l’avis du Gouvernement sur cet amendement.

M. Brice Hortefeux, ministre. En réalité, pour résumer votre intervention, monsieur le sénateur, vous craignez le fichage. Je pense sincèrement que vos inquiétudes ne sont pas fondées et que vous n’avez à nourrir aucune crainte sur ce point. À quoi cela pourrait-il bien servir, puisque, comme vous le savez, les mineurs ne peuvent pas faire l’objet d’une mesure d’éloignement ?

Par ailleurs, la tenue du registre d’un CRA ne constitue pas un fichage « moderne » : il s’agit d’un recensement papier et non pas d’un logiciel de rapprochement !

Enfin, je rappelle que la CIMADE, qui a été évoquée hier par vous-même ou par M. Mermaz, tient précisément un registre des personnes qu’elle suit. Les dispositions de l’article 50 procèdent exactement du même état d’esprit.

Par conséquent, si je comprends parfaitement votre préoccupation, monsieur Yung, je pense cependant sincèrement que vous pouvez être rassuré en la matière : ce registre ne résulte d’aucune volonté de fichage.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 418.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 50.

(L'article 50 est adopté.)

Article 50 (Texte non modifié par la commission)
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité
Article additionnel après l'article 51

Article 51

(Non modifié)

I. – L’article L. 553-3 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Un décret en Conseil d’État détermine les conditions d’exercice du droit d’accès des associations humanitaires aux lieux de rétention. »

II. – Au second alinéa de l’article L. 223-1 du même code, les mots : « à la zone » sont remplacés par les mots : « aux zones ».

Mme la présidente. L'amendement n° 206, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Si vous le permettez, madame la présidente, je défendrai en même temps les amendements nos 206 et 205.

L’article 51 vise à transcrire dans ce projet de loi les termes de la circulaire présentée par Éric Besson et Michèle Alliot-Marie en novembre 2009 et tendant à garantir l’immunité des personnes aidant des étrangers en situation irrégulière à titre « humanitaire ».

Lors de la présentation de ce texte, M. Besson, qui avait tenu à clarifier les choses, déclarait ceci : « l’action humanitaire, c’est une réponse à une situation d’urgence, à un état de nécessité, à un besoin immédiat et ponctuel de protection et de prise en charge ; ce n’est pas un soutien actif et continu à la clandestinité pour des raisons lucratives ou pour faire délibérément obstacle à la législation applicable en matière d’entrée et de séjour en France. Et c’est à la justice, en cas de doute, qu’il revient de trancher. »

Néanmoins, au regard de la neutralisation de l’intervention des magistrats, de la considération dont ils font l’objet et de la remise en cause perpétuelle de l’aide aux étrangers malades, on peut légitimement douter de la portée de cet article !

De nombreuses associations se mobilisent au quotidien, en accueillant et accompagnant des personnes en très grande difficulté. Elles pratiquent un accueil inconditionnel qui s’adresse aux personnes ayant besoin non pas seulement de boire et de manger, mais aussi d’être soutenues psychologiquement eu égard aux difficultés diverses qu’elles rencontrent.

Or, pour nous, comme pour l’ensemble des associations qui interviennent dans les lieux de rétention, la définition de l’action humanitaire que je viens de vous rappeler remet en cause le « principe de l’accueil inconditionnel de toute personne, fût-elle sans papiers » sur lequel elles fondent leur mission.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. La commission, considérant que cet article constitue une avancée supplémentaire, a émis un avis défavorable sur l’amendement n° 206.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Brice Hortefeux, ministre. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 206.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L'amendement n° 205 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

L'amendement n° 420 est présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 2

Supprimer le mot :

humanitaires

L’amendement n° 205 a déjà été défendu.

La parole est à M. Ronan Kerdraon, pour présenter l’amendement n° 420.

M. Ronan Kerdraon. Le paragraphe 4 de l’article 16 de la directive Retour dispose que « les organisations et instances nationales, internationales et non gouvernementales compétentes ont la possibilité de visiter les centres de rétention […]. Ces visites peuvent être soumises à une autorisation préalable. »

Ainsi, la directive Retour permet à un large spectre d’organisations de venir en aide aux étrangers détenus dans les centres de rétention. Nous regrettons donc que l’article 51 du projet de loi relatif à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité ne mentionne, en l’état, que les associations humanitaires.

En effet, autoriser l’accès aux centres de rétention à ces seules associations restreint la portée du paragraphe 4 de l’article 16 de la directive Retour, dénaturant ainsi sa logique.

Par ailleurs, une telle restriction porterait préjudice aux étrangers détenus dans les centres de rétention, dont la situation déjà précaire ne doit pas être aggravée par une limitation de l’aide et des services qui leur sont offerts par les différentes organisations ayant accès à ces lieux.

À titre d’exemple, les associations chargées de l’assistance juridique apportent une aide primordiale aux étrangers détenus dans les centres de rétention. Pour s’en convaincre, il suffit d’étudier avec attention leur bilan d’activité. Malgré des moyens limités et des conditions de travail souvent difficiles, leur expertise juridique s’est souvent révélée capitale. La pertinence et l’utilité de leurs conseils sont manifestes, notamment en matière de protection et de reconnaissance des droits des étrangers.

Par conséquent, nous vous demandons, mes chers collègues, de supprimer, au sein de cet article, le qualificatif « humanitaires ». L’esprit de la directive Retour n’en sera que mieux respecté, et les droits des étrangers détenus dans les centres de rétention, préservés.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. La commission souhaite conserver le qualificatif « humanitaire ». En effet, la formulation retenue à l’article 51 est celle de l’article L. 223-1 relatif aux zones d’attente du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, qui est d’ores et déjà en vigueur.

La commission a donc émis un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Brice Hortefeux, ministre. Défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 205 et 420.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 51.

(L'article 51 est adopté.)