M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre des solidarités et de la cohésion sociale. Monsieur le sénateur, je ne vais pas régler ce problème, c’est M. Xavier Bertrand qui le réglera et je vous prie de bien vouloir excuser son absence puisqu’il est actuellement en réunion avec l’ensemble des syndicats au ministère du travail, de l’emploi et de la santé. Mais je ne suis pas complètement ignorante de ce dossier.

Comme vous le savez, depuis le 1er janvier 2011 et en application du nouveau règlement arbitral, le médecin peut bénéficier non seulement du versement de 7 centimes d’euros par feuille de soin télétransmise, mais également d’une nouvelle aide de 250 euros si son taux de télétransmission est effectivement supérieur à 75 %.

La télétransmission est un dispositif particulièrement important, puisqu’il permet – vous avez beaucoup parlé des médecins, permettez-moi d’évoquer également les patients – en premier lieu aux patients ou aux professionnels en tiers payant de bénéficier de délais de remboursement très rapides. Cette procédure simplifie les démarches des assurés et diminue les coûts de gestion de l’assurance maladie. C’est donc une démarche extrêmement intéressante pour tout le monde : les médecins, les patients et l’organisme gestionnaire.

Après plusieurs années qui ont permis de conforter l’utilisation de la carte vitale dans le système de remboursement des soins, et qui se sont accompagnées, notamment pour les professionnels concernés, de mesures pour faciliter la transmission électronique, l’instauration d’une contribution sur les feuilles de soins papier avait une portée incitative visant à l’achèvement de la montée en charge de la télétransmission, puisqu’elle laissait une marge très importante d’une feuille sur quatre non télétransmise pour bénéficier de ces aides, ce qui était considérable.

Nous avions donc initialement retenu un pourcentage en deçà duquel pouvait être appliquée une pénalité. Or, comme vous me le rapportez, les médecins se demandent s’ils vont être pénalisés parce qu’ils n’ont pas atteint ce pourcentage alors qu’ils n’en sont pas loin. (M. Yves Détraigne opine.) D’autres font beaucoup de visites à domicile ou sont face à des patients qui n’apportent pas leur carte vitale.

Le Gouvernement, dans le cadre de la proposition de loi de votre collègue Jean-Pierre Fourcade – je n’y suis pas pour rien puisque je lui ai moi-même demandé de l’élaborer…

M. le président. Ah ! La vérité éclate !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. La vérité n’éclate pas ; vous la connaissez très bien. D’ailleurs, M. Fourcade lui-même le dit. Aussi, ne me faites pas croire à des révélations. Le président Fischer aime toujours jouer certains personnages…

Le Gouvernement, disais-je, dans le cadre des débats sur cette proposition de loi, a déposé, le 13 avril dernier, un amendement que l’Assemblée nationale a adopté afin que les médecins qui ne télétransmettent pas ou télétransmettent peu le fassent davantage.

Dans ce contexte, il est apparu que les modalités précises ne pouvaient être fixées par la loi, et le ministre Xavier Bertrand a décidé après consultation des partenaires conventionnels et du directeur général de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie, l’UNCAM, de renvoyer à la négociation conventionnelle les modalités de mise en œuvre d’une télétransmission renforcée, en se donnant un délai pour cette négociation. La définition du taux de télétransmission à partir duquel serait applicable la contribution sera discutée dans ce cadre fixé par la loi. La question du taux pris en compte pour le versement de l’aide forfaitaire relève, elle aussi, de la discussion conventionnelle.

Par conséquent, aussi bien le pourcentage que la sanction financière éventuelle font partie du champ de la négociation conventionnelle.

Vous voilà donc pleinement renseigné, monsieur le sénateur.

M. le président. La parole est à M. Yves Détraigne.

M. Yves Détraigne. Je vous remercie, madame la ministre, de ces précisions. Renvoyer aux négociations conventionnelles les clauses qui permettront d’améliorer le taux de télétransmission me semble constituer une avancée.

Cependant, s’agissant de la télétransmission, un acteur a, selon moi, été oublié : c’est tout simplement le patient. Les exemples que j’ai cités et qui démontrent l’insuffisance de la télétransmission sont dus en grande partie au défaut d’information du patient. Il serait donc utile de réfléchir à la sensibilisation du patient, qui ignore souvent tous les avantages qu’il peut lui-même tirer de l’utilisation de la carte électronique.

financement des missions locales de bretagne

M. le président. La parole est à M. Ronan Kerdraon, auteur de la question n° 1267, adressée à M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé.

M. Ronan Kerdraon. Ma question s’adressait à Xavier Bertrand, mais je ne doute pas, madame la ministre, que vous lui transmettrez nos interrogations en la matière.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre des solidarités et de la cohésion sociale. Faute de grives, on mange des merles ! (Sourires.)

M. Ronan Kerdraon. Il y a de très bons merles ! (Nouveaux sourires.)

Ma question porte sur le financement des missions locales de Bretagne.

Madame la ministre, je veux vous alerter sur l’indignation et la colère des dix-sept présidentes et présidents des missions locales de Bretagne face à l’annonce des réductions de financement décidées par le préfet de région.

En effet, lors d’une réunion récente, ce dernier a annoncé au réseau des missions locales : une réduction des financements de 3,45 % par rapport à l’année 2010, soit une amputation de crédit de plus de 276 000 euros ; une baisse du financement de fonctionnement de l’association régionale à hauteur de 8 % et une diminution de 5 % de l’enveloppe dédiée à l’animation et au développement de réseaux de parrainage.

Parallèlement, les moyens mobilisables pour les jeunes sont également en recul : 30 % de moins pour le programme CIVIS, et 30 % de moins également en ce qui concerne le Fonds pour l’insertion professionnelle des jeunes...

À titre d’exemple, la mission locale de Saint-Brieuc, que je préside, se voit infliger une baisse de 5 % – 28 471 euros –, bien supérieure à la moyenne régionale.

Ces annonces, madame la ministre, sont en complète contradiction avec les engagements pris et sans cesse renouvelés par le Gouvernement en 2010 et en ce début d’année 2011.

Pour mémoire, je citerai simplement un extrait du courrier adressé par M. Laurent Wauquiez, alors secrétaire d’État en charge de l’emploi, au président de l’Association des régions de France, lequel précisait : « Je peux aujourd’hui vous garantir que le projet de loi de finances 2011 tel qu’il sera présenté en conseil des ministres maintient la complète reconduction des moyens obtenus en loi de finances 2010 ».

Pourtant, le nombre des premiers accueils n’a cessé de progresser depuis le début de la crise en 2008. En 2010, ce sont 47 000 jeunes de seize à vingt-cinq ans que les missions locales de Bretagne ont reçus et accompagnés.

Les missions locales se trouvent ainsi touchées au cœur même de leur métier, au moment où deux rapports, celui de l’IGAS, l’Inspection générale des affaires sociales, et celui de l’IGF, l’Inspection générale des finances, soulignent la pertinence et l’efficience de l’action de ces structures en faveur des jeunes de seize à vingt-cinq ans, en particulier dans le contexte de crise que nous connaissons.

Remettre en cause le financement des missions locales est une lourde erreur sociale, politique et économique.

Cette baisse de financement, si elle était confirmée, aurait un impact important sur l’emploi dans les missions locales. Cela équivaudrait à la suppression d’une dizaine de postes dans les structures.

Au-delà, c’est la question du portefeuille de jeunes suivis par les conseillers qui se poserait et, par extension, celle de la qualité de l’accompagnement des jeunes.

En outre, ce désengagement de l’État se cumule avec la fin du plan de relance.

Madame la ministre, le Président de la République a déclaré à plusieurs reprises vouloir que tous les jeunes sortant du système éducatif sans qualification soient pris en charge et se voient proposer « soit une formation soit un emploi ».

Comment ne pas partager cette ambition et ainsi faire de l’emploi des jeunes une priorité nationale ? Dans ce cadre-là, les missions locales jouent pleinement leur rôle !

Malheureusement, on le constate quotidiennement, il y a loin des discours aux actes ! De manière incompréhensible, vous demandez de faire toujours plus avec toujours moins de moyens. Un tel raisonnement est intenable !

Aussi, ma question sera simple : allez-vous enfin tenir vos engagements et reconduire intégralement les financements alloués aux missions locales de Bretagne ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre des solidarités et de la cohésion sociale. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur Kerdraon, je vous prie maintenant de bien vouloir excuser l’absence de Xavier Bertrand en sa qualité non pas de ministre de la santé, mais de ministre du travail et de l’emploi, qui est actuellement en réunion avec l’ensemble des syndicats de son ministère.

Vous vous faites l’écho de préoccupations et interrogations exprimées par le réseau des missions locales de votre région à la suite de la publication de la circulaire du 19 janvier 2011 relative à la convention pluriannuelle d’objectifs, la CPO. Vous évoquez notamment une baisse des financements des missions locales.

Tous les engagements pris par M. Wauquiez dans le courrier que vous avez mentionné, monsieur Kerdraon, ont été respectés : les crédits initiaux notifiés au niveau national cette année s’élèvent à 198 millions d’euros, soit exactement le même niveau de financement qu’en 2010. Ne feignez pas de l’ignorer, puisque vous connaissez très bien ce dossier.

Les fonds supplémentaires obtenus en cours d’année 2010 par les missions locales provenaient soit de crédits issus du plan de relance, soit de crédits émanant des marges de gestion dont disposent les directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi, les DIRECCTE. Ils n’avaient donc pas vocation à être renouvelés ; tout le monde le savait.

Cette stabilité au plan national ne signifie pas qu’il n’y a pas de rééquilibrage entre les régions et entre les missions locales pour tenir compte au plus juste des publics et des besoins des territoires, ce dont les présidents des missions locales étaient aussi les premiers demandeurs. Il convient donc de faire preuve de plus de pédagogie pour que ces notions soient mieux comprises par l’ensemble des acteurs.

S’agissant des crédits destinés aux mesures « jeunes » notifiés à la région Bretagne, ils s’élèvent, au titre de la loi de finances initiale pour 2011, à 8,3 millions d’euros, c’est-à-dire exactement la même somme qu’en 2010.

Enfin, la circulaire relative à la CPO de 2011 permet d’accompagner une professionnalisation du réseau et d’améliorer l’efficacité de ces structures au service des jeunes. Elle s’inscrit par conséquent pleinement dans le cadre proposé par le rapport de l’Inspection générale des finances de juillet 2010, qui a reconnu la capacité du réseau à accompagner les jeunes en recherche d’emploi.

L’accompagnement global des jeunes effectué par les missions locales est utile. L’objectif final ne doit toutefois pas être perdu de vue : il s’agit d’insérer les jeunes dans le monde du travail, l’emploi étant ce qui permet aux jeunes de faire des projets et de s’insérer durablement dans la société. Cela a d’ailleurs été rappelé lors de la dernière séance plénière du Conseil national des missions locales qui s’est tenue la semaine dernière.

Oui, monsieur Kerdraon, des crédits supplémentaires ont en effet été alloués, mais ils n’avaient pas vocation à être reconduits, car il ne s’agissait, selon la formule consacrée, que de « fusils à un coup ». Les engagements pris le Gouvernement ont donc parfaitement été tenus.

M. le président. La parole est à M. Ronan Kerdraon.

M. Ronan Kerdraon. Si votre réponse ne me surprend pas, madame la ministre, elle ne me satisfait pas, et ne contentera pas davantage, me semble-t-il, les autres présidentes et présidents des missions locales de Bretagne.

En effet, si le plan de relance était mort-né, à un moment donné des crédits sont tout de même arrivés – vous l’avez dit vous-même – intégralement en région Bretagne, mais ils ont été amputés, lors de la distribution, de 3,45 %. Aussi, nous souhaiterions connaître les fondements d’une telle réduction.

On nous a parlé de critères. Le préfet de région avait engagé une négociation avec le réseau des missions locales de Bretagne pour définir des critères de répartition, et nous nous étions donnés un an pour aboutir à un accord. Or, le représentant de l’État a unilatéralement décidé, au mois de février dernier, d’appliquer des critères qui n’ont toujours pas été portés à notre connaissance.

Dans ces conditions, je vous demande, madame la ministre, de bien vouloir transmettre à M. Xavier Bertrand notre souhait de pouvoir disposer, dans leur intégralité, des sommes promises.

contribution économique territoriale

M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, en remplacement de Mme Anne-Marie Payet, auteur de la question n° 1237, adressée à Mme la ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Mme Catherine Morin-Desailly, en remplacement de Mme Anne-Marie Payet. Monsieur le secrétaire d’État, Mme Payet ne pouvant être présente aujourd’hui, je vous adresserai la question en son nom.

Mme Payet souhaite en effet appeler l’attention de Mme la ministre de l’économie, des finances et de l’industrie, sur la nécessité de réformer l’article 2 de la loi n° 2009–1673 de finances pour 2010. La reforme de la taxe professionnelle, en retenant la valeur ajoutée, réintègre les salaires dans la base imposable. Celle-ci, qui visait à alléger la charge des entreprises, se traduit au contraire par un choc fiscal pour une large majorité de PME à forte intensité de main-d’œuvre.

Selon une étude réalisée auprès de sept cents PME, sur la base des données transmises par la société de caution mutuelle des entreprises de travail temporaire, la SOCAMETT, l’instauration de la contribution économique territoriale, ou CTE, se traduirait à terme par une hausse d’impôt pour 90 % de ces PME.

La contribution économique territoriale, en réintégrant les salaires dans la base imposable, se traduirait par un surcoût annuel moyen de 17 000 euros pour les PME, soit une croissance moyenne de l’impôt de 582 %.

Le lissage de la hausse sur cinq ans, mis en place par la loi de finances pour 2010, apparaît insuffisant compte tenu de son impact sur les PME du travail temporaire. Certaines entreprises sont donc menacées par de graves difficultés.

L’objectif de la réforme de la taxe professionnelle consiste à maintenir l’emploi industriel en France. Pourtant, pénaliser l’intérim revient au final à sanctionner les secteurs utilisateurs, dont l’industrie, qui compte 200 000 intérimaires en équivalents temps plein. Renchérir le coût de l’intérim reviendrait donc finalement à inciter les entreprises des secteurs utilisateurs soit à délocaliser leur activité, soit à accentuer leur recours à la sous-traitance internationale plutôt qu’à l’emploi en France.

Si le lissage de l’augmentation de la contribution économique territoriale a permis en 2010 aux agences d’emploi de contenir la hausse du coût du travail, la montée en puissance de l’impôt en 2011 pourrait mettre en péril cette fragile reprise de l’emploi. La hausse du coût du travail intérimaire ou la fermeture d’agences non seulement se traduirait par des destructions d’emplois et par la disparition de contributions sociales et fiscales, mais limiterait aussi la capacité d’actions collectives en faveur de l’emploi.

C’est pourquoi toute initiative qui permettrait de limiter certains effets négatifs de la réforme de la taxe professionnelle sur l’emploi doit être soutenue. À cet égard, le mécanisme de lissage sur dix ans, s’il ne modifie pas à terme l’impact pour les agences d’emploi, permet au moins de rallonger la période de transition. Les contributions fiscales des PME dont l’activité serait sauvegardée et les contributions sociales liées aux emplois maintenus ou créés localement feraient plus que compenser le coût de ce dispositif.

Je vous demanderai donc, monsieur le secrétaire d’État, de bien vouloir me faire savoir si des aménagements ne seraient pas envisageables.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services, des professions libérales et de la consommation. Madame la sénatrice, permettez-moi tout d’abord d’excuser Christine Lagarde, qui n’a pu venir répondre elle-même aujourd’hui.

L’article 2 de la loi de finances pour 2010 a supprimé, à compter du 1er janvier 2010, la taxe professionnelle, et l’a remplacée par une contribution économique territoriale, composée de la cotisation foncière des entreprises, la CFE, assise sur les bases foncières, et de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, la CVAE, dont le taux est fixé au niveau national selon un barème progressif.

Considérée dans sa globalité, la réforme allège considérablement la charge fiscale des entreprises : la cotisation des 2,9 millions d’entreprises imposées à la taxe professionnelle est allégée de 4,7 milliards d’euros en régime de croisière, en tenant compte de l’effet sur l’impôt sur les sociétés. En 2010, année de mise en œuvre de la réforme, le gain pour les entreprises s’élève même à 7,7 milliards d’euros.

Je ne voudrais donc pas que s’installe l’idée que cette réforme n’aurait pas bénéficié aux entreprises. C’est tout le contraire.

J’ajoute que le Gouvernement s’est attaché à ce que les petites et moyennes entreprises, qui sont à l’origine de l’essentiel des créations d’emplois dans notre pays, soient les principales bénéficiaires de la réforme.

C’est pourquoi la CVAE a précisément été configurée pour protéger les petites entreprises d’une imposition trop forte. En effet, elle n’est pas due par les entreprises dont le chiffre d’affaires est inférieur à 152 500 euros. Entre 152 500 et 500 000 euros de chiffre d’affaires, les entreprises bénéficieront d’un dégrèvement total automatique pris en charge par l’État. Au-delà de 500 000 euros de chiffre d’affaires et jusqu’à 50 millions d’euros, le dégrèvement est partiel. Seules les entreprises réalisant un chiffre d’affaires supérieur à 50 millions d’euros acquitteront une CVAE au taux de 1,5 %.

Les entreprises dont le chiffre d’affaires est inférieur à 2 millions d’euros bénéficient dans tous les cas d’une réduction de CVAE de 1 000 euros.

Par ailleurs, la situation des entreprises à forte intensité de main-d’œuvre – c’est le cas du secteur de l’intérim, que vous avez évoqué, madame la sénatrice – fait l’objet d’une disposition particulière. Ainsi, pour la détermination de la CVAE, la valeur ajoutée est plafonnée à un pourcentage du chiffre d’affaires égal à 80 % pour les contribuables dont le chiffre d’affaires est inférieur ou égal à 7,6 millions d’euros, et à 85 % pour les contribuables dont le chiffre d’affaires est supérieur à 7,6 millions d’euros.

De surcroît, et afin de garantir la baisse de la charge pesant sur les entreprises les plus imposées, la CET est plafonnée à 3 % de la valeur ajoutée produite par l’entreprise.

Toutes ces dispositions vont donc bien dans le sens de la protection de ces entreprises, dont celles du secteur de l’intérim.

Les entreprises qui, malgré ces mesures, subiraient un ressaut d’imposition supérieur à 10 % et à 500 euros peuvent obtenir un dégrèvement pris en charge par l’État. Les pertes supérieures à 10 % seront dégrevées en totalité au titre de 2010, à hauteur de 75 % au titre de 2011, de 50 % au titre de 2012 et de 25 % au titre de 2013.

Ce mécanisme de dégrèvement va concerner des entreprises qui, pour la plupart, étaient faiblement imposées à la taxe professionnelle.

Cette réforme, voulue par le Président de la République, va donc bénéficier à l’ensemble des entreprises de ce pays, tout en protégeant plus spécialement les plus petites d’entre elles, notamment celles à forte intensité de main-d’œuvre. Aussi, il me semble que la majorité a véritablement fait œuvre utile en la votant.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.

Mme Catherine Morin-Desailly. Je vous remercie d’avoir apporté ces précisions, monsieur le secrétaire d’État, et je transmettrai l’ensemble de ces données à ma collègue Anne-Marie Payet.

Comme vous le savez, les sénateurs sont très attentifs à l’application de cette loi. Ils avaient d’ailleurs instauré une clause de revoyure à l’époque, et continueront dans les mois à venir à être particulièrement vigilants, notamment pour son application aux PME.

statut juridique de pôle emploi

M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, auteur de la question n° 1243, adressée à M. le ministre du travail, de l’emploi et de la santé.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Ma question porte sur le statut juridique de Pôle emploi, statut qui pose problème depuis le vote de la loi du 13 février 2008 relative à la réforme de l’organisation du service public de l’emploi.

Ma question interroge directement le statut des personnels, puisque Pôle emploi est né de la fusion des ASSEDIC, organismes privés employant des salariés soumis au code du travail, et de l’ANPE, établissement public à caractère administratif composé d’agents de droit public.

Depuis le début, le Gouvernement entretient un « flou juridique » quant à la nature de Pôle emploi.

Tout d’abord, si la terminologie choisie d’« institution nationale », dont le caractère « public » n’était même pas mentionné dans le projet de loi initial, renvoie à bien des égards à la définition juridique d’un établissement public administratif, rien dans la loi de 2008 ne l’indique expressément.

Pourtant, par un décret n° 2009–661 du 9 juin 2009, modifiant le décret n° 84–38 du 18 janvier 1984 fixant la liste des établissements publics de l’État à caractère administratif, le Gouvernement y fait figurer Pôle emploi comme EPA.

Le Gouvernement a tenu la même position en décembre 2009, lors du débat sur le projet de loi de finances rectificative pour 2009.

Alors que Pôle emploi fait l’objet de recours en justice de la part d’organisations syndicales pour obtenir le remboursement de cotisations chômage indûment prélevées sur les salariés issus des ASSEDIC – ou Associations pour l’emploi dans l’industrie et le commerce –, le Gouvernement défend et fait voter un amendement devant permettre à Pôle emploi d’adhérer au régime d’assurance chômage à titre dérogatoire en 2009 pour ces personnels, amendement censuré fort à propos par le Conseil constitutionnel, mais dans lequel le Gouvernement allait dans le même sens.

Je cite ici l’exposé des motifs de cet amendement : « [...] Bien que la loi ne précise pas la nature juridique de Pôle emploi, il est désormais établi qu’il s’agit d’un établissement public administratif [...] ».

Le Gouvernement a donc tranché, à deux reprises, en faveur du statut d’établissement public administratif ou EPA.

Un EPA relève, en principe, du droit public. Or le législateur a décidé que les salariés de Pôle emploi relevaient du droit privé.

Cette insécurité juridique touche directement les personnels – près de 45 000 personnes tout de même – et leurs instances représentatives, elle doit être tranchée en urgence car nous sommes loin d’un traitement juridique identique pour tous les agents, tel que le laissait supposer l’entrée en vigueur de la nouvelle convention collective.

Ma question est donc simple, monsieur le secrétaire d’État : quel est le statut juridique de Pôle emploi ?

Les agents de Pôle emploi étant régis par le code du travail en matière de relations collectives du travail, la compétence de l’inspection du travail est-elle pleine et entière quant au fonctionnement des institutions représentatives des personnels et pour les salariés de statut privé de Pôle emploi, ce qui semble être contesté par la Direction générale du travail ?

Enfin, quelle est la juridiction compétente pour les conflits individuels et collectifs ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services, des professions libérales et de la consommation. Madame la sénatrice, je vous prie tout d’abord d’excuser l’absence de Xavier Bertrand qui, vous le savez, est actuellement en réunion avec l’ensemble des syndicats de son ministère.

Vous avez mentionné la loi du 13 février 2008 qui crée Pôle emploi. Vous avez simplement omis de rappeler que, dans le débat, les choses étaient claires depuis le début, puisque, contrairement au sentiment que pouvait donner votre question, il n’y a pas eu d’hésitation sur le statut de Pôle emploi, qui est bien un établissement public à caractère administratif.

L’intention du législateur est manifeste puisque le Gouvernement a clairement indiqué devant votre Haute Assemblée, comme il l’avait fait d’ailleurs devant l’Assemblée nationale, que sa volonté était de créer un établissement public administratif et le législateur s’est prononcé à ce moment-là.

De la même façon, l’activité de Pôle emploi est une activité de service public, ses ressources sont d’origine publique, puisqu’elles relèvent principalement de la subvention versée par l’État, et ses modalités de fonctionnement correspondent bien à celles qui prévalent dans les établissements publics administratifs.

Pôle emploi est donc indiscutablement un établissement public et le Conseil d’État a d’ailleurs retenu cette qualification lors de l’examen du décret relatif à l’organisation du service public de l’emploi. Vous avez d’ailleurs fait référence au décret de 1984, qui déterminait ce statut.

Pour autant, le législateur, parfaitement conscient de créer un établissement public administratif, a décidé que les personnels de l’établissement puissent être soumis à des conditions de travail et d’emploi relevant d’un régime de droit privé. Ce débat est donc bien connu, il a eu lieu devant la Haute Assemblée et devant l’Assemblée nationale, et c’est donc en toute clarté que ce régime existe aujourd'hui.

Précisément, l’article L. 5312-9 du code du travail dispose que les agents de Pôle emploi, qui sont chargés d’une mission de service public, sont régis par le code du travail dans les conditions particulières prévues par une convention collective.

Seuls demeurent régis par le régime de droit public les anciens agents de l’Agence nationale pour l’emploi, l’ANPE, qui, conformément à la possibilité ouverte par la loi, n’auraient pas opté pour l’application du droit du travail et l’application de la convention collective.

Je rappelle que ce droit d’option est ouvert aux salariés de droit public jusqu’au 31 décembre 2011 et que, à la fin du premier trimestre 2011, 60 % du personnel de droit public aura opté.

Par conséquent, 80 % du personnel de Pôle emploi est désormais régi par les règles de droit privé et les inspecteurs du travail ont bien compétence pour contrôler l’application du droit du travail, de la convention collective nationale et des accords collectifs de Pôle emploi. Il n’y a aucun doute sur cette question.

Vous m’avez interrogé sur les juridictions compétentes.

Dans le cadre des litiges individuels, si l’agent est soumis au statut de droit privé, le conseil des prud’hommes est compétent ; en revanche, si l’agent est soumis au statut de droit public, c’est le tribunal administratif. Dans les conflits collectifs, c’est le code du travail qui s’applique.

Vous avez posé des questions précises, les réponses sont précises. Mais les éléments du débat étaient bien connus au moment où ce texte a été discuté et adopté au Parlement.