M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur. L’amendement n° 54 tend à préciser que la modification du protocole de soins intervient en fonction de l’état de santé du patient. Le rapporteur tient à signaler que cette précision est satisfaite par son amendement portant sur les soins auxquels une personne n’est pas en mesure de consentir en raison de son état mental. La commission, quant à elle, a émis un avis favorable sur cet amendement.

L’amendement n° 109 tend à instaurer une information systématique de la famille, mais le rapporteur estime que celle-ci n’est pas opportune dans certains cas, la famille pouvant être hostile au patient. La commission a cependant émis un avis favorable.

En ce qui concerne l’amendement n° 267, la commission a également émis un avis favorable. Néanmoins, le rapporteur a fait remarquer qu’il est nécessaire de prévoir un simple avis médical pour le cas où le patient n’est plus joignable et ne peut donc plus être examiné.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nora Berra, secrétaire d’État. En ce qui concerne les amendements nos 54 et 267, que se passe-t-il en pratique ? Lorsqu’un patient est en rupture et qu’il présente un danger pour lui-même, le plus souvent, le psychiatre obtient des informations de la famille, de l’entourage. Pour venir en aide au malade, les décisions sont alors parfois prises sur simple avis du psychiatre, à la lumière des informations qui lui ont été communiquées.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur ces deux amendements.

En ce qui concerne l’amendement n° 109, l’avis du Gouvernement est également défavorable, parce qu’il est déjà satisfait par la rédaction actuelle du projet de loi, qui prévoit que le tiers demandeur de soins soit informé lorsque le patient est pris en charge sous une autre forme que l’hospitalisation complète.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 54.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 109.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote sur l’amendement n° 267.

M. Jean Desessard. Je n’ai pas compris les arguments développés par M. le rapporteur et Mme la secrétaire d’État.

J’ai établi une distinction claire entre le certificat médical, qui impose un examen du patient par le médecin et constitue un acte officiel, et le simple avis médical rendu après consultation du dossier médical. J’ai indiqué pourquoi il ne me semblait pas bon que des décisions lourdes et importantes puissent être prises sur la base d’un simple avis.

Vous auriez pu m’expliquer, par exemple, que des décisions ne seraient prises sur le fondement d’un avis médical que dans des circonstances exceptionnelles. La rédaction du projet de loi ne le précise d’ailleurs pas, et on peut donc craindre qu’un manque de personnel ne conduise à recourir à cette solution. Cela étant, il s’agit là d’une pure hypothèse d’école, puisque nous savons bien que les hôpitaux n’ont aucun problème de personnel, dans la mesure où les budgets augmentent de 2 % par an et où le secteur de la santé est très bien loti sur le plan budgétaire… Il y a donc suffisamment de psychiatres pour que l’on puisse toujours en trouver facilement un pour procéder à l’examen du patient et établir un certificat médical !

Mais, en vérité, nous savons bien qu’il n’en est pas ainsi et que l’on recourra largement à l’avis médical. Je suis donc surpris que, après avoir pris énormément de précautions sur d’autres points, par exemple en matière d’adaptation des restrictions des libertés individuelles à l’état de santé du patient, on estime que, en l’espèce, un simple avis médical suffira, sans même qu’il soit fait référence à des circonstances exceptionnelles !

À mes questions, le rapporteur se borne à répondre qu’un avis médical peut suffire lorsqu’un examen médical n’est pas possible. Quant à Mme la secrétaire d’État, elle ne m’a pas répondu du tout ! Chacun sa conception de la démocratie, mais tout cela est un peu léger…

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 267.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de six amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 110, présenté par M. Le Menn, Mme Demontès, MM. Michel, Desessard, Kerdraon et Cazeau, Mmes Le Texier et Schillinger, M. Jeannerot, Mmes Alquier et Campion, M. Daudigny, Mme Ghali, MM. Gillot et Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, M. S. Larcher, Mmes Printz et San Vicente-Baudrin, M. Teulade et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéas 53 à 59

Remplacer ces alinéas par trois alinéas ainsi rédigés :

15° L’article L. 3211-11-1 est ainsi modifié :

a) La dernière phrase du premier alinéa est complétée par les mots : «, par un membre de sa famille ou par la personne de confiance qu’elle a désignée en application de l’article L. 1111-6 » ;

b) Au dernier alinéa, les mots : « d’absence » sont remplacés par les mots : « de sortie accompagnée » ;

La parole est à M. Jacky Le Menn.

M. Jacky Le Menn. Cet amendement tend à rétablir le droit actuel en ce qui concerne le régime des autorisations de sortie accompagnée. Actuellement, le préfet est informé des autorisations de sortie accompagnée et peut s’y opposer. En l’absence de réponse du préfet, la décision est réputée favorable.

Le texte du projet de loi prévoit qu’il faudra désormais une autorisation explicite du préfet pour les autorisations de sortie accompagnée concernant des personnes ayant séjourné en unité pour malades difficiles ou ayant été déclarées pénalement irresponsables.

Une telle disposition est contestable, car le préfet pourrait systématiquement garder le silence, ce qui empêcherait toute sortie. Il convient de rappeler qu’il s’agit de sorties accompagnées et d’une très courte durée, inférieure à douze heures, d’où l’opportunité des modifications proposées au travers de notre amendement.

M. le président. Les quatre amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 55 est présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

L’amendement n° 111 est présenté par M. Le Menn, Mme Demontès, MM. Michel, Desessard, Kerdraon et Cazeau, Mmes Le Texier et Schillinger, M. Jeannerot, Mmes Alquier et Campion, M. Daudigny, Mme Ghali, MM. Gillot et Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, M. S. Larcher, Mmes Printz et San Vicente-Baudrin, M. Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

L’amendement n° 457 rectifié est présenté par M. Mézard, Mme Escoffier, MM. Collin, Alfonsi, Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.

L’amendement n° 489 est présenté par M. Lorrain, au nom de la commission des affaires sociales.

Ces quatre amendements sont ainsi libellés :

Alinéas 58 et 59

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Annie David, pour présenter l’amendement n° 55.

Mme Annie David. En proposant, par cet amendement, de supprimer les alinéas 58 et 59 de l’article 1er, nous entendons dénoncer le fait que le fantasme sécuritaire du législateur prévale sur le bien-être et la guérison des patients atteints de troubles mentaux. En l’occurrence, ces alinéas visent à accorder tous pouvoirs au préfet en matière d’autorisations de sortie accompagnée, le corps médical se trouvant mis à l’écart.

Il s’agit là une nouvelle fois d’une stigmatisation des malades, lesquels se trouveront sous le coup d’une loi de police qui établit un contrôle social généralisé de la normalité des comportements. Le fait que le préfet soit en bout de chaîne pour accorder les autorisations de sortie accompagnée montre la défiance du législateur envers les patients et le corps médical.

De notre point de vue, ces sorties font partie du processus de guérison et permettent aux patients de se réinsérer dans la société parallèlement à leur traitement.

Nous ne comprenons donc pas en quoi l’autorisation du préfet serait nécessaire. Une fois de plus, les médecins se trouveraient subordonnés au représentant de l’État, pourtant bien moins compétent qu’eux en la matière.

Madame la secrétaire d’État, vous nous disiez à l’instant faire entièrement confiance aux psychiatres et à l’ensemble des personnels médicaux pour juger de ce qui était bon pour les patients, ajoutant que l’intérêt de ces derniers était votre premier souci. Or, en l’espèce, vous confiez la décision finale au préfet, au détriment de l’équipe médicale. Ce n’est pas de cette manière que vous témoignerez de votre « confiance totale » à l’égard de cette dernière.

Par cet amendement, nous nous opposons à ce que le préfet puisse refuser de nombreuses autorisations de sortie sans raisons médicales, seulement pour des motifs sécuritaires. Nous nous élevons contre la mise en place d’une procédure qui permettrait au représentant de l’État d’entraver des sorties à vocation thérapeutique, et donc de nuire à la santé du malade.

M. le président. La parole est à M. Jacky Le Menn, pour présenter l’amendement n° 111.

M. Jacky Le Menn. Nous proposons également de supprimer les alinéas 58 et 59 de l’article 1er, qui nous semblent superfétatoires et stigmatisants.

Les sorties qu’il s’agit d’autoriser sont de courte durée, ne pouvant dépasser douze heures. Permises par le directeur de l’établissement de santé, après avis du psychiatre du même établissement, elles doivent être accompagnées. À nos yeux, tout cela suffit.

Pourquoi ajouter l’accord du représentant de l’État pour les personnes déclarées pénalement irresponsables ou ayant séjourné en unité pour malades difficiles ? Un patient qu’une crise a conduit en UMD peut avoir surmonté cet épisode, grâce notamment aux traitements administrés. Quelle est l’utilité de cette disposition, dont le préfet n’a de toute façon pas besoin pour s’opposer à une sortie ?

Évoquer la dangerosité potentielle de telle ou telle personne pour ajouter des précautions aux précautions jette un doute sur la confiance accordée aux soignants. Il n’est nul besoin de cela !

Cette disposition va poser de redoutables problèmes d’organisation : qui peut garantir qu’elle ne conduira pas à laisser enfermées des personnes ayant pourtant de réelles chances de se réintégrer dans la société ?

M. le président. La parole est à M. Yvon Collin, pour présenter l’amendement n° 457 rectifié.

M. Yvon Collin. Comme cela a été excellemment dit, les alinéas 58 et 59 de l’article 1er prévoient l’accord explicite du préfet, en lieu et place d’une absence d’opposition, pour toute sortie accompagnée de personnes séjournant ou ayant séjourné en unité pour malades difficiles, ou faisant ou ayant fait l’objet d’une décision de justice les déclarant pénalement irresponsables.

Les modalités de soins, telles les sorties brèves accompagnées pour motif thérapeutique ou pour accomplir des démarches extérieures, doivent être décidées en fonction de l’évaluation clinique actualisée d’un patient. Les antécédents de ce dernier ne sauraient conduire à une discrimination dans le cadre de la procédure administrative qui lui est appliquée.

Une fois encore, on stigmatise une catégorie de patients, et le droit à l’oubli créé par les députés, intervenant au terme d’une durée qui n’est même pas précisée – s’agit-il de cinq, de dix ou de quinze ans ? –, n’efface pas ce que beaucoup ont déjà qualifié de « dossier psychiatrique ».

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l’amendement n° 489.

M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur. Cet amendement vise à rétablir l’autorisation implicite du préfet pour les sorties accompagnées de courte durée. Si le préfet s’oppose à une sortie, il doit le faire de manière explicite, et non garder le silence.

M. le président. L'amendement n° 8, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Alinéa 59

Compléter cet alinéa par les mots :

, sauf lorsque leur hospitalisation, ordonnée dans les cas prévus aux mêmes 1° et 2°, a pris fin depuis une période fixée par décret en Conseil d’État

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur pour avis. Il s’agit d’un amendement un peu moins ambitieux que ceux qui viennent d’être présentés. La commission des lois propose d’étendre le droit à l’oubli aux autorisations implicites du préfet en cas de sorties de courte durée dont peuvent bénéficier les patients.

En effet, le projet de loi prévoit que, dans le cas de personnes soumises à une mesure d’hospitalisation d’office, l’autorisation de sortie de courte durée est accordée sauf veto exprès du préfet. Le texte renverse cette logique pour les personnes potentiellement dangereuses, ayant fait l’objet d’une hospitalisation en UMD ou ayant été reconnues pénalement irresponsables, l’autorisation explicite du préfet étant alors requise.

Passé un certain délai, il semble à la commission des lois que toutes les personnes, quels que soient leurs antécédents, devraient être soumises au régime de l’autorisation préfectorale implicite, c’est-à-dire au droit commun.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos 110 et 8 ?

M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur. La commission a émis un avis favorable sur l’amendement n° 110. En revanche, elle est défavorable à l’amendement n° 8 de la commission des lois.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur l'ensemble des amendements ?

Mme Nora Berra, secrétaire d’État. Le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 110.

Il émet également un avis défavorable sur les amendements identiques nos 55, 111, 457 rectifié et 489.

En l’état actuel des textes, dans un souci d’allégement de la procédure, l’autorisation du préfet est réputée acquise au bout de quarante-huit heures pour les sorties des patients hospitalisés sur sa décision.

Cependant, la finalité des sorties dont il est ici question diffère de celle des sorties d’essai. Les premières peuvent concerner des patients potentiellement dangereux pour eux-mêmes ou pour autrui. C’est pourquoi il est apparu préférable que l’autorisation du préfet soit explicite dans les cas les plus sensibles.

S’agissant de l’amendement n° 8, le Gouvernement y est favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 110.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 55, 111, 457 rectifié et 489.

(Les amendements sont adoptés.)

M. le président. En conséquence, l’amendement n° 8 n’a plus d’objet.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

M. Jean Desessard. C’est dommage que ça se termine maintenant ! On commençait à avoir de la réussite ! (Sourires.)

Article 1er (début)
Dossier législatif : projet de loi relatif aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge
Discussion générale

13

Ordre du jour

M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, mercredi 11 mai 2011 :

À quatorze heures trente :

1. Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, relatif aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge (n° 361, 2010-2011).

Rapport de Mme Muguette Dini, fait au nom de la commission des affaires sociales (n° 487, 2010-2011).

Texte de la commission (n° 488 rectifié, 2010-2011).

Avis de M. Jean-René Lecerf, fait au nom de la commission des lois (n° 477, 2010-2011).

Le soir :

2. Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité.

Rapport de M. François-Noël Buffet, rapporteur pour le Sénat (n° 491, 2010-2011).

Texte de la commission (n° 492, 2010-2011).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée le mercredi 11 mai 2011, à deux heures dix.)

Le Directeur du Compte rendu intégral

FRANÇOISE WIART