M. Thierry Repentin, ministre délégué. Nous sommes donc optimistes sur la non-adoption de cette proposition par la Commission.

S’agissant de la régionalisation, nous sommes favorables, avec le Parlement européen, à une approche régionalisée de la politique commune de la pêche, afin de prendre dûment en compte les propositions des pêcheurs et des autres parties prenantes, qui connaissent les réalités du terrain.

Dans le respect du droit d’initiative de la Commission européenne, les États pourront coopérer entre eux, en étroite concertation avec les conseils consultatifs régionaux, afin de proposer des mesures de gestion adaptées aux réalités des pêcheries.

Une approche par grandes aires géographiques est néanmoins indispensable : les mesures adaptées à la Manche ne le sont pas nécessairement à la mer Celtique, au golfe de Gascogne ou à la mer Méditerranée.

Des divergences demeurent toutefois sur les modalités de la mise en œuvre pratique de cette mesure pour éviter une renationalisation de la politique européenne de la pêche. Nous sommes confiants quant à l’adoption d’un compromis acceptable sur ce point.

Par ailleurs, nous sommes favorables à un renforcement des conseils consultatifs régionaux, qui sont essentiels.

MM. Antiste et Serge Larcher, je me félicite de vos interventions sur un sujet prioritaire pour le Gouvernement.

Frédéric Cuvillier et Victorin Lurel ont défendu une meilleure prise en compte des outre-mer français dans cette réforme. Nous sommes peu nombreux, au sein du Conseil, à être directement concernés par cet enjeu et la Commission, comme les autres États membres, ne manifeste qu’un intérêt relatif.

Nous avons toutefois obtenu la mise en place d’un conseil consultatif spécifique pour les régions ultrapériphériques, ce qui renforcera la représentation de ces régions et leur voix dans les discussions sur les sujets relatifs à la politique commune de la pêche.

Le Parlement européen soutient cette mesure, ce qui constitue une avancée très positive en matière de gouvernance.

Par ailleurs, à la demande de la France, le Conseil souhaite que le régime spécifique de protection des 100 milles nautiques, réservé jusqu’à présent aux régions ultrapériphériques de l’Espagne et du Portugal, soit étendu aux RUP françaises. Cette dernière avancée, soutenue par nos pêcheurs d’outre-mer, ne l’est pas, pour le moment, par le Parlement européen, mais nous avons bon espoir que, grâce au soutien de la Commission, la raison l’emportera.

Enfin, dans le cadre du FEAMP, nous nous battons pour que la Martinique, la Guadeloupe et Mayotte bénéficient d’un « POSEI pêche ». Frédéric Cuvillier a abordé de nouveau cette question lundi – je veux le dire à MM. Antiste et Serge Larcher – avec la commissaire Maria Damanaki. L’un d’entre vous me demandait tout à l’heure d’apporter de l’espoir ; j’apporte au moins une lueur d’espoir ! Je puis vous affirmer que mon collègue fait preuve d’une grande combativité dans les discussions qu’il mène actuellement sur cette question.

Pour votre part, si vous disposez d’interlocuteurs au sein du Parlement européen, n’hésitez pas à leur faire connaître votre position et celle du gouvernement français pour faire avancer ce dossier.

Enfin, et M. Merceron l’a signalé, le sujet le plus sensible est l’interdiction des rejets de poissons en mer, qui sera sans doute l’élément majeur de la réforme. À tout le moins, c’est cette décision qui aura le plus grand impact sur nos pêcheurs.

La France a fait part de ses inquiétudes quant à une approche qui serait trop radicale. Les causes de ces rejets sont multiples. Le plus souvent, elles tiennent à la réglementation européenne elle-même – quotas insuffisants, respect des tailles minimales, respect des mesures techniques, etc.

Le « zéro rejet » soulève des préoccupations majeures pour l’aménagement et la sécurité des navires, mais aussi pour la gestion des poissons ramenés à quai. Seule une approche progressive, praticable et réaliste permettra aux pêcheurs et à la filière de s’adapter.

La position du Conseil permet de prendre en compte cette progressivité et cette souplesse dans l’interdiction des rejets, même si le principe est acquis. Pour être tout à fait clair, en l’état actuel des alliances au sein de l’Union européenne, une majorité d’États membres est favorable au principe d’interdiction des rejets.

Nous avons obtenu que cette interdiction des rejets, qui ne s’applique qu’aux espèces soumises à quotas, soit mise en œuvre de manière progressive et étalée dans le temps d’ici à 2018 ou 2019 suivant les zones.

Nous avons également obtenu des assouplissements qui n’étaient pas dans le texte à l’origine et pour lesquels il a fallu se battre. Je pense notamment aux flexibilités permettant certains rejets sous certaines conditions – raisons sanitaires, pourcentages incompressibles de rejets, poissons pouvant survivre – ou au principe d’un réajustement des quotas.

La position du Parlement européen est beaucoup plus radicale, puisque celui-ci entend interdire tous les rejets en mer, selon un calendrier très serré, avec très peu de souplesse, comme vous l’avez fort justement indiqué, madame Herviaux.

Un compromis est nécessaire sur ce point. Une approche praticable et comprise par les pêcheurs est en effet indispensable pour que la réforme soit un succès.

D’autres sujets ont été évoqués, comme la gestion de la capacité ou les plans de gestion. Sans entrer dans les détails, je puis vous indiquer que la France soutient la position du Conseil sur ces sujets.

Toutes ces thématiques sont d’actualité et au cœur des négociations entre les deux institutions menées dans le cadre du trilogue. La présidence irlandaise a annoncé son intention de conclure d’ici au 30 juin prochain, date à laquelle elle prendra fin. C’est un calendrier ambitieux, tant les compromis sont difficiles, mais la France est prête à l’accepter, sous réserve que les lignes rouges ne soient pas franchies, position que partagent nos alliés traditionnels.

Sur le troisième texte, relatif au FEAMP, nous sommes inquiets, car le calendrier d’adoption est également très serré. Le Parlement européen n’a pas encore défini sa position, le vote en commission Pêche devant intervenir en juillet prochain pour un vote en séance plénière à l’automne prochain.

La position du Conseil est adoptée depuis octobre dernier et un nombre important de points ont été introduits sur l’initiative de la France.

Le futur fonds doit soutenir la modernisation des navires, à capacité de pêche constante, car notre flotte est vieillissante et inadaptée aux défis environnementaux et économiques. Il devra aider à réduire l’impact environnemental des activités de pêche par le biais d’une plus grande sélectivité des engins et par l’amélioration de l’efficacité énergétique des navires. Nous ne pouvons pas condamner le secteur de la pêche à l’immobilisme en lui interdisant toute forme d’innovation !

Le fonds doit ainsi permettre de soutenir la remotorisation des navires, afin de diminuer la dépendance du secteur de la pêche aux évolutions du coût du carburant et de réduire les émissions de CO2. Nous devons également maintenir des mesures d’aide à l’ajustement des capacités de la flotte de pêche, sorties de flotte et arrêts temporaires.

L’accompagnement du secteur pour lui permettre de relever les défis de la réforme de la politique commune de la pêche doit être une priorité. Outre le maintien de l’aide à la modernisation et à l’ajustement des flottes, points que je viens d’évoquer, cet instrument financier doit soutenir les organisations de producteurs dans la poursuite de leurs nouvelles missions, mais également les entreprises de commercialisation, qui doivent bénéficier d’un soutien à l’innovation.

Le traitement des rejets à terre justifie également un accompagnement adéquat.

Le fonds doit enfin contribuer à renforcer la collecte des données et à améliorer la qualité des avis scientifiques.

Les montants attribués à chaque État membre ne sont pas encore connus. L’enveloppe globale devrait connaître une très légère diminution – environ 6 milliards d’euros –, à la suite des négociations toujours en cours sur les perspectives financières de l’Union.

Pour être impliqué dans ce dossier, je puis vous dire que le maintien d’une ligne face à certains États qui souhaitaient une baisse drastique du budget européen est déjà une victoire. Alors ne manquons pas de goûter notre plaisir !

Sur tous ces sujets, comme je vous l’ai précédemment indiqué, les négociations, qui durent maintenant depuis onze mois, sont ardues. Frédéric Cuvillier, homme du littoral et du grand large, est pleinement mobilisé pour faire prévaloir les intérêts de la pêche française, dans la perspective d’une réforme de la PCP équilibrée et réaliste. Les bonnes relations de travail qu’il entretient avec la commissaire Maria Damanaki sont indéniablement un facteur facilitant, même s’il reste des divergences. Ces bonnes relations avec la Commission n’ont pas toujours été une réalité dans le passé.

Compte tenu du rôle fondamental du Parlement européen, nous comptons donc sur tous les députés européens français dans cette volonté partagée.

Nous comptons enfin sur vous, mesdames, messieurs les sénateurs, pour faire passer ces messages afin de préserver une pêche durable et responsable, créatrice de richesses et garante d’un développement équilibré de nos territoires, de vos territoires, de la France et de l’Europe. (Applaudissements.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, nous en avons terminé avec le débat sur la politique européenne de la pêche.

6

Ordre du jour

Mme la présidente. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mardi 14 mai 2013, de quatorze heures trente à dix-huit heures trente :

1. Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif à la sécurisation de l’emploi ;

Rapport de M. Claude Jeannerot, rapporteur pour le Sénat (n° 530, 2012-2013) ;

Texte de la commission (n° 531, 2012-2013).

2. Projet de loi relatif à l’élection des sénateurs (n° 377, 2012-2013) ;

Rapport de M. Philippe Kaltenbach, fait au nom de la commission des lois (n° 538, 2012 2013) ;

Résultat des travaux de la commission (n° 539, 2012-2013).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-huit heures trente.)

Le Directeur du Compte rendu intégral

FRANÇOISE WIART