compte rendu intégral

Présidence de Mme Bariza Khiari

vice-présidente

Secrétaires :

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx,

Mme Marie-Noëlle Lienemann.

Mme la présidente. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente-cinq.)

1

procès-verbal

Mme la présidente. Le compte rendu intégral de la séance du 28 mai a été publié sur le site internet du Sénat.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté.

2

Décision du Conseil constitutionnel sur une question prioritaire de constitutionnalité

Mme la présidente. M. le président du Conseil constitutionnel a communiqué au Sénat, par courrier en date du lundi 2 juin 2014, une décision du Conseil sur une question prioritaire de constitutionnalité portant sur le second alinéa de l’article 272 du code civil (sommes non prises en considération pour le calcul de la prestation compensatoire) (n° 2014-398 QPC).

Acte est donné de cette communication.

3

Questions orales

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

mise en cause du principe de continuité écologique créé dans la loi sur l'eau

Mme la présidente. La parole est à M. Rémy Pointereau, auteur de la question n° 780, adressée à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.

M. Rémy Pointereau. Monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, ma question porte sur l’application du principe de la continuité écologique pour les cours d’eau. Ce principe, issu de la loi du 30 décembre 2006 sur l’eau et les milieux aquatiques, dite loi « LEMA », implique la libre circulation dans les cours d’eau des espèces et des sédiments.

Comme vous le savez, monsieur le secrétaire d’État, depuis plusieurs mois, des associations et des voix de plus en plus nombreuses remettent fortement en cause ce principe, notamment au travers d’une pétition. C’est un sujet qui intéresse particulièrement mon département, le Cher.

L’Association pour la défense et le développement touristique de la vallée du Cher, le Syndicat de la vallée de l’Arnon et les élus locaux concernés m’ont alerté. J’ai souhaité plaider directement leur cause dans cet hémicycle.

Leurs arguments sont techniques et juridiques, mais leur combat est évidemment économique et s’inscrit dans le contexte actuel de crise que connaît notre pays.

Sur un plan technique, si la continuité écologique présente des avantages lorsque les cours d’eau sont en débit normal, elle est en revanche source de graves désagréments en cas d’étiage important. Le milieu aquatique confronté à un étiage sévère peut, en effet, devenir un piège mortel pour toutes les espèces qui y vivent. C’est la continuité écologique elle-même qui induit cette terrible pression en s’opposant aux retenues de soutien d’étiage. La situation serait d’autant plus alarmante que l’on observe, depuis plusieurs décennies, des étiages de plus en plus longs et sévères.

Par ailleurs, il semblerait que la continuité écologique ne présente aucun impact sur la qualité chimique des eaux de surface, qui constitue la principale menace pour la santé des êtres humains et des poissons.

Sur le plan juridique, le Conseil d’État lui-même affirme que cette exigence de continuité écologique créée par la loi de 2006 ne figure pas dans la directive-cadre européenne sur l’eau : sur ce sujet, comme sur d’autres, spécialement lorsqu’il s’agit de questions environnementales, la France va au-delà des exigences européennes.

J’attire votre attention, monsieur le secrétaire d'État, sur les conséquences socio-économiques particulièrement lourdes d’une application stricte de la loi LEMA, qui entraînerait la suppression de la plupart des usages existants sur les cours d’eau. Le principe de continuité écologique interdit la pratique des réserves d’eau pourtant encouragée auprès des particuliers et dans de nombreux secteurs d’activité comme le tourisme, l’agriculture, l’industrie et l’énergie. En période estivale, la suppression des seuils et des barrages des cours d’eau existants est une catastrophe pour le maintien des berges de nos rivières.

En conséquence, il serait utile et urgent de rendre prioritaire la lutte contre la pollution chimique de l’eau et d’assouplir le principe de continuité écologique en autorisant les barrages existants, même s’il faut les aménager pour les passes à poissons. Il convient également de préserver l’équilibre des usages, de mettre à profit les potentialités socio-économiques résultant de l’aménagement des cours d’eau et, enfin, d’assurer à la loi LEMA ainsi modifiée une application identique sur l’ensemble du territoire.

Le Cher est un département rural que la crise n’épargne pas et où les politiques agricole, touristique et d’aménagement du territoire sont très importantes. À l’heure où l’argent est rare, pourquoi gaspiller autant de millions d’euros pour casser les retenues et les barrages qui ont été réalisés voilà quarante ans afin de réguler le débit des cours d’eau et éviter de grandes inondations ?

Dans ce contexte, monsieur le secrétaire d'État, de quelle manière le Gouvernement envisage-t-il de répondre à ces préoccupations légitimes ?

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Frédéric Cuvillier, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche. Monsieur le sénateur, Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, que vous avez interrogée, vous prie de bien vouloir excuser son absence et m’a chargé de vous apporter des éléments de réponse sur les enjeux environnementaux évoqués.

L’amélioration de la qualité de l’eau et la restauration des milieux aquatiques nécessitent des actions sur de nombreux paramètres : réduire les pollutions diffuses et ponctuelles ; préserver et restaurer les habitats du lit des cours d’eau et des milieux humides… L’ensemble de ces paramètres est pris en compte, vous le savez, dans les schémas directeurs d’aménagement et de gestion des eaux, les SDAGE, et les schémas d’aménagement et de gestion des eaux, les SAGE.

Des programmes de mesures définissent les actions, qu’elles soient de nature réglementaire ou contractuelle, à mettre en œuvre pour atteindre les objectifs des SDAGE et pour permettre à la France de reconquérir le bon état de ses masses d’eau, comme le prévoit la directive-cadre sur l’eau.

La continuité écologique est l’un des paramètres importants pour restaurer la qualité et le bon fonctionnement des milieux aquatiques. Vous l’avez souligné, les espèces aquatiques, les poissons en particulier, ont besoin de circuler entre leurs lieux de reproduction, de croissance, d’alimentation et de repos. Or les ouvrages en cours d’eau ont pour conséquence de réduire, voire de supprimer, les possibilités de migration de ces espèces et d’accomplissement de leur cycle de vie. La qualité des habitats aquatiques est également liée au bon fonctionnement du transport sédimentaire, qui peut être perturbé par l’existence de retenues.

C’est pourquoi un plan d’action pour la restauration de la continuité écologique des cours d’eau a été lancé en 2009, renforcé ensuite par la mise en œuvre des classements des cours d’eau prévus par la loi du 30 décembre 2006.

Ce plan prévoit des mesures d’aménagement ou de suppression des obstacles à la continuité, établies au cas par cas et de manière proportionnée. Les décisions d’intervention sur les ouvrages font toujours l’objet d’une analyse tenant compte des impacts et des enjeux écologiques, de la sécurité, de la dimension patrimoniale éventuelle des ouvrages et des impératifs de gestion de l’eau sur les cours d’eau concernés.

Les effacements sont réservés à des ouvrages abandonnés et sans usage, et ne sont en aucun cas systématiques. Ce plan ne porte donc pas atteinte à l’activité économique, et il ne doit pas lui porter atteinte. En effet, des milieux aquatiques restaurés au potentiel piscicole accru peuvent être considérés comme autant d’atouts de développement économique pour un territoire.

Vous le constatez, il y a à la fois le cadre, notamment européen, les lois, adoptées à l’échelon national, mais aussi un certain nombre d’enjeux déclinés territoire par territoire. Il se peut que des lectures très strictes soient parfois données à ces dispositions, mais il faut revenir à la réalité des textes et au principe de proportionnalité, auquel nous sommes sensibles en cette période où l’usage des finances publiques, qu’elles soient nationales ou locales, doit être optimisé.

Mme la présidente. La parole est à M. Rémy Pointereau.

M. Rémy Pointereau. Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie de la réponse de Mme le ministre de l’environnement, que vous m’avez transmise.

Effectivement, il convient d’être pragmatique afin de pouvoir s’adapter aux situations que nous rencontrons, comme nous l’avons fait sur le plan financier avec la loi sur l’accessibilité.

Toujours est-il qu’il faudrait peut-être amender la loi de 2006 et le Grenelle de l’environnement : certes, les agences de l’eau financent 80 % des projets d’effacement avec les collectivités, mais il reste 20 % à la charge des syndicats et des communes. Or c’est toujours de l’argent public et celui des contribuables.

À l’heure où les collectivités locales peinent à trouver des financements, notamment pour l’assainissement collectif, les agences de l’eau ne devraient-elles pas accorder la priorité aux financements des stations d’épuration pour améliorer la qualité de l’eau plutôt que de financer l’effacement de barrages qui évitent d’inonder un certain nombre de terres agricoles et de surfaces herbagères ?

Vous venez d’annoncer que l’effacement des barrages ne sera pas systématique. C’est une bonne chose, mais il serait bon de faire comprendre aux administrations locales qu’elles doivent avoir une lecture des textes un peu plus souple et appropriée au cas par cas.

desserte ferroviaire de la seine-maritime

Mme la présidente. La parole est à M. Charles Revet, auteur de la question n° 794, adressée à M. le secrétaire d'État chargé des transports, de la mer et de la pêche.

M. Charles Revet. Monsieur le secrétaire d'État, je souhaite attirer votre attention sur la dégradation de la desserte ferroviaire en Seine-Maritime, au niveau tant des installations ferroviaires que des dessertes en elles-mêmes par la SNCF.

Le projet de train à grande vitesse laissait espérer une amélioration à terme. Ce programme semble remis en cause. Qu’en est-il aujourd’hui ?

La Seine-Maritime a été un département pionnier en matière de ligne ferroviaire puisque le réseau a commencé à y « tisser sa toile » dès 1856 pour les premiers tronçons. En 1960, il fallait compter une heure quarante-cinq pour couvrir la distance Paris-Le Havre. Aujourd’hui, les temps de trajet sont souvent supérieurs à deux heures, voire à deux heures quinze, en raison de l’engorgement à l’entrée de la ceinture parisienne. C’est presque autant que pour faire Paris-Strasbourg !

Les usagers – collectif des transports ferroviaires de Haute-Normandie et fédération nationale des associations d’usagers du train – sont exaspérés par les retards chroniques, récurrents. La ligne Paris-Le Havre est en permanence aux limites de ses possibilités.

Un second tronçon ferroviaire enregistre une perte significative de qualité de service : il s’agit de la desserte Rouen-Dieppe. Alors qu’il permet à 1 000 voyageurs en week-end d’effectuer le trajet Paris-Dieppe, il est délaissé. La SNCF a supprimé cinq trains Intercités, proposant des trains express régionaux, ou TER, et des liaisons par autobus. Le comité de développement des transports ferroviaires n’admet pas l’argument de la SNCF, qui met en avant la vétusté du matériel pour justifier la suppression de trains. Il y a là un manque manifeste d’anticipation de la part de la SNCF : elle a investi 510 millions d’euros pour acquérir du matériel thermique et n’a pas pris en compte le cadencement des trains sur la ligne Rouen-Dieppe, réduisant le service et orientant les voyageurs sur des autobus ou des TER bondés.

On observe également la vétusté de la ligne historique Fécamp-Bréauté, longue de 19,6 kilomètres, sur laquelle les trains sont contraints de ralentir en raison de l’état de la voie. Des travaux sont programmés semble-t-il pour 2014-2015, même si l’on m’a parlé de suppression. Les usagers, dont l’association de défense du fer en Caux, s’interrogent sur la pérennité à moyen terme de cette liaison essentielle pour le désenclavement de Fécamp – ville que vous connaissez bien, monsieur le ministre. La région a cofinancé une étude sur le devenir des liaisons ferroviaires en pays de Caux, en évoquant notamment une liaison Le Havre-Gravenchon via la plaine alluviale, un allongement de la ligne Le Havre-Rolleville jusqu’à Criquetot-l’Esneval – canton dont je suis l’élu – et Goderville, avec raccordement à la ligne Fécamp-Bréauté-Gravenchon.

Les usagers s’interrogent sur les conditions d’une amélioration sensible des services de transport par le rail. Des incertitudes pèsent sur les lignes au départ du Tréport – je fais le tour de toute la Seine-Maritime (Sourires.). La réactivation du réseau secondaire à partir des lignes existantes en site propre permettait, outre de développer le transport collectif et donc de réduire la fréquentation automobile, que certaines familles n’aient plus l’obligation d’utiliser un second véhicule, ce qui aurait un impact financier important pour elles.

Cela pourrait également dégager des sillons sur la ligne Le Havre-Paris pour le développement du fret. Monsieur le ministre, c’est là également l’une de vos responsabilités.

Par ailleurs, un raccordement aux transports tram-train pourrait être envisagé par raccordement aux lignes tramway de la ville du Havre.

Je souhaiterais, monsieur le ministre, que vous m’indiquiez, au regard de l’ensemble de ces suggestions, quelles dispositions le Gouvernement entend mettre en place pour accélérer ce processus.

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Frédéric Cuvillier, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche. Monsieur le sénateur, en toile de fond, tout d’abord, comment ne pas oublier que c’est le lancement concomitant de quatre lignes à grande vitesse qui a mis à mal l’ensemble du financement du ferroviaire, notamment l’entretien nécessaire et la mise à niveau des infrastructures de transport ? Depuis deux ans, vous le savez, je n’ai cessé de remettre de l’ordre dans les priorités, au plus proche des territoires.

Vous avez cité un certain nombre d’exemples pris dans votre département. Vous savez combien je suis attentif à l’ensemble de cette ligne. Je vais donc vous donner quelques explications.

S’agissant de la desserte de Dieppe le week-end par les trains d’équilibre du territoire, ou TET, la SNCF a été contrainte d’arrêter les prolongements de parcours de cinq trains Paris-Rouen en raison de l’obsolescence des deux locomotives thermiques.

Pour autant, je note que la SNCF et le conseil régional de Haute-Normandie ont pu aboutir à un accord en fin d’année 2013 permettant la mise en œuvre de deux nouveaux allers et retours entre Rouen et Dieppe par des correspondances efficaces en gare de Rouen entre les TER et les TET. Ce n’était pas le cas jusqu’à présent.

Je rappelle en outre que c’est le Gouvernement – et non la SNCF, contrairement à ce que vous avez dit – qui a fait le choix d’investir 510 millions d’euros pour assurer la modernisation et la circulation quotidienne des TET, qui sont notre priorité dans un cadre budgétaire extrêmement contraint. Depuis plus de trente ans, aucune commande de matériel roulant rénové n’avait été faite. En deux ans, il m’est difficile de rattraper tant de retard accumulé.

Au-delà de ces constats, cet échange renforce ma volonté de clarifier, en concertation avec les régions – actuelles ou à venir –, les missions des TER et des TET, de manière à optimiser les correspondances, au profit des usagers, et l’utilisation du réseau ferroviaire et du matériel roulant. C’est l’objet du plan « Investir pour la France », que j’ai présenté en juillet 2013, sous la responsabilité du Premier ministre d’alors.

S’agissant de la ligne Paris-Rouen-Le Havre, elle est particulièrement dégradée, en raison d’événements conjoncturels, mais pas uniquement. Néanmoins, la ponctualité des trains s’est améliorée dernièrement – mais nous partions de très loin – et atteint désormais 93 % pour les quatre premiers mois de l’année 2014. Il n’en demeure pas moins que les problèmes d’infrastructures doivent être pris en compte. Ainsi, s’agissant de la liaison Paris-Le Havre, je rappelle que la commission « Mobilité 21 » a classé le projet de ligne nouvelle Paris-Normandie dans les opérations à réaliser en priorité par le Gouvernement.

Ainsi, j’ai relancé la gouvernance du projet en nommant le préfet François Philizot délégué interministériel au développement de la vallée de la Seine. De même, j’ai demandé à Réseau ferré de France de lancer la première phase d’études préalables à l’enquête d’utilité publique afin qu’en 2016 puisse être choisie une zone de passage préférentielle sur trois sections : Paris-Mantes, Rouen-Yvetot et Mantes-Évreux.

Outre l’effet de désengorgement des parties franciliennes et rouennaises, ces premières réalisations profiteront directement à la desserte du Havre et de la Haute-Normandie en offrant aux voyageurs des trajets plus confortables et une meilleure régularité pour un temps de parcours optimisé.

S’agissant enfin de la ligne Bréauté-Fécamp – et je vous remercie, monsieur le sénateur, de nous avoir fait voyager dans ce si beau pays ! –, son état a poussé RFF à mettre en place récemment une limitation temporaire de vitesse et à envisager une fermeture à la circulation pour octobre 2014. En effet, nous devons optimiser l’utilisation des ressources. Je suis conscient que cette réponse n’est pas satisfaisante, mais nous devons nous concentrer sur le réseau national et faire en sorte, par le dialogue avec les collectivités, que les réseaux dits « secondaires », sans que leur utilité soit minimisée, puissent trouver les moyens de se restructurer.

Il appartient aux collectivités territoriales, en partenariat avec l’État, d’identifier les réponses à apporter pour donner une suite aux investissements dans ces réseaux secondaires, qui auront vocation à s’inscrire dans le volet ferroviaire des futurs contrats de plan État-région.

Ces travaux sont longs et trouvent souvent leur aboutissement en décalage par rapport aux préoccupations du quotidien.

Mme la présidente. La parole est à M. Charles Revet.

M. Charles Revet. Monsieur le ministre, vous êtes le ministre des ports et je suis moi-même rapporteur pour avis sur les crédits relatifs aux transports maritimes, lesquels recouvrent les ports. La réactivation du réseau ferroviaire secondaire permettrait de libérer nombre de sillons pour le fret. Il me semble qu’il faudrait mettre l’accent sur cette étroite complémentarité en engageant prioritairement des travaux sur ces lignes secondaires.

Par ailleurs – et j’élargis mon propos au-delà de la Seine-Maritime –, la France dispose d’un réseau ferroviaire extraordinaire. Nos aînés ont fait preuve de beaucoup de bon sens et de logique – peut-être en avaient-ils plus qu’on n’en a aujourd’hui – en maillant ainsi notre territoire. À un moment où l’on s’interroge sur la qualité de l’air, où l’on veut développer le transport collectif, ne pourrait-on pas se servir de ces 10 000 kilomètres de lignes secondaires, même si elles ne peuvent pas être réactivées sur-le-champ ? C’est bien de transférer le transport des voyageurs par voie ferroviaire vers la voie routière par car, mais quand il y a un embouteillage, le car est pris dedans ! Tel n’est pas le cas du train.

Il faudrait mener une réflexion en la matière, au sein tant de votre ministère que de la commission à laquelle Rémy Pointereau et moi-même appartenons.

M. Rémy Pointereau. Très bien !

lignes à haute tension survolant des lieux accueillant des publics sensibles

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Kaltenbach, auteur de la question n° 765, adressée à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.

M. Philippe Kaltenbach. Un rapport de 2010 de l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail, l’AFSSET, préconise désormais de ne plus construire de bâtiments accueillant des publics sensibles dans une zone d’exclusion de cent mètres située de part et d’autre d’une ligne à haute ou très haute tension. Les publics sensibles sont les jeunes enfants, les femmes enceintes et les personnes âgées.

Cet avis a ensuite été repris dans un rapport de 2010 de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques portant sur Les effets sur la santé et l’environnement des champs électromagnétiques produits par les lignes à haute et très haute tension.

S’il est aujourd’hui admis qu’il ne faut plus réaliser de nouvelles constructions susceptibles de conduire au survol par une ligne à haute ou très haute tension d’une maternité, d’un hôpital, d’une maison de retraite ou encore d’un établissement scolaire – on ne peut d’ailleurs que s’en féliciter –, il convient de s’interroger sur le traitement des sites existants. En effet, il existe aujourd’hui en France des écoles, des maternités, des maisons de retraite qui sont survolées par des lignes à très haute tension. Il s’agit là d’une préoccupation aussi importante qu’ancienne pour les populations concernées. À mon sens, il semble inenvisageable de demeurer inactif à l’égard des constructions passées.

En tant que maire de Clamart pendant treize ans, j’ai eu à gérer le cas d’une ligne à haute tension qui survolait un collège et une maternité.

Par voie d’amendement, j’ai entrepris, à deux reprises, d’apporter un début de réponse à ce problème. Mes amendements, très raisonnables, avaient pour objet de demander au gestionnaire du réseau de transport d’électricité de remettre au Gouvernement et au Parlement un rapport recensant les lignes à haute tension survolant des sites sensibles et évaluant le coût de leur enfouissement ou de leur déplacement.

Une première fois, en décembre 2011, mon amendement a été adopté dans le cadre du projet de loi renforçant les droits, la protection et l'information des consommateurs, porté par M. Frédéric Lefebvre, mais n’est finalement pas allé au terme de la navette parlementaire. Étant têtu, j’ai une seconde fois déposé cet amendement en janvier 2014, dans le cadre de la discussion de la loi du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové de Mme Duflot. Cet amendement a, une nouvelle fois, été adopté par le Sénat, avant d’être finalement supprimé en commission mixte paritaire, malheureusement.

J’avoue que j’ai été impressionné par la puissance du lobbying de Réseau de transport d’électricité, ou RTE. Monsieur le ministre, je m’en remets désormais au Gouvernement.

Le recensement et l’évaluation de la sécurisation des sites concernés avaient vocation à être une première étape permettant de dresser un état des lieux. C’est indispensable si l’on veut avancer sur ce dossier et régler tous les cas existants.

Monsieur le ministre, pouvez-vous m’indiquer si le Gouvernement envisage de prochaines avancées en la matière ? Allons-nous rester inertes face aux populations concernées ? Allons-nous interdire les constructions sous les lignes à haute tension et tolérer que celles qui existent demeurent et continuent d’accueillir des publics sensibles ?

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Frédéric Cuvillier, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche. Monsieur le sénateur, Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie vous prie de bien vouloir excuser son absence et m’a chargé de répondre à la question importante que vous lui avez posée.

L’instruction du Gouvernement du 15 avril 2013 vise à éviter dans la mesure du possible d’exposer inutilement de nouvelles populations à des niveaux de champs magnétiques que l’on trouve à proximité des ouvrages de transport d’électricité. S’appuyant sur une logique de précaution, elle ne s’applique donc qu’aux nouvelles constructions et non pas, pour l’heure, aux bâtiments existants.

L’état actuel des connaissances scientifiques ne permet pas, en effet, de fonder une éventuelle mesure d’éloignement des bâtiments existants par rapport aux lignes à haute et très haute tension.

Néanmoins, le Gouvernement travaille à lever les incertitudes scientifiques. Ainsi, les résultats de la mise à jour de l’expertise collective de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, l’ANSES, qui interviendra en janvier 2015, à la demande du Gouvernement, permettront d’alimenter la réflexion sur cette question.

Je souhaite rappeler par ailleurs que l’État a mis en place un large dispositif de surveillance et de contrôle des ondes électromagnétiques émises par les ouvrages de transport d’électricité. En effet, le décret du 1er décembre 2011 prévoit que le gestionnaire du réseau public de transport d’électricité établit des plans de contrôle et de surveillance pour les lignes à très haute tension de ce réseau.

Ces plans précisent « les parties de l’ouvrage qui sont susceptibles d’exposer de façon continue des personnes à un champ électromagnétique et au droit desquelles des mesures représentatives de ce champ sont effectuées par un organisme indépendant accrédité ».

Pour les nouvelles lignes électriques, « le contrôle initial est effectué dans les douze mois qui suivent la mise sous tension de la ligne électrique ».

Quant au parc de lignes existantes, l’opérateur a jusqu’au 31 décembre 2017 pour effectuer les mesures initiales.

Ces mesures permettront d’apprécier le contexte des conclusions de l’ANSES l’an prochain et d’orienter la politique du Gouvernement.

Enfin, je veux rappeler, au nom de Mme la ministre, que, en complément des mesures réalisées dans le cadre du plan de contrôle et de surveillance, les collectivités territoriales, certaines associations, et à travers elles les particuliers, peuvent solliciter gratuitement des mesures en tout lieu auprès de RTE.

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Kaltenbach.

M. Philippe Kaltenbach. Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse. Je suis satisfait de constater que le Gouvernement se préoccupe de ce sujet. Je voudrais cependant souligner qu’il est difficile, pour les élus, d’expliquer sur le terrain qu’on ne peut pas construire sous des lignes à haute tension de nouvelles écoles, des maternités ou des établissements recevant des publics sensibles, alors que les structures existantes, parfois depuis dix, vingt, trente ou quarante ans, continuent à recevoir des élèves, des femmes enceintes et des personnes âgées ! Cette incohérence est difficilement compréhensible par nos concitoyens, et il faut se mettre à leur place.

Je note que vous allez engager une campagne de mesures afin d’opérer un état des lieux précis. Je serai particulièrement vigilant à cet égard, notamment concernant le collège des Petits Ponts, à Clamart. D’ailleurs, sur une initiative des parents d’élèves, un organisme agréé a procédé à des évaluations qui ne sont pas du tout réjouissantes. J’espère que ces dernières, associées à la volonté affichée du Gouvernement, conduiront les pouvoirs publics à prendre des décisions fortes en faveur de l’enfouissement ou du déplacement des lignes situées au-dessus des établissements sensibles.

D’aucuns affirment que c’est aux collectivités de prendre en charge le coût lié à ces travaux, mais celui-ci est extrêmement important : à Clamart, pour ne prendre que cet exemple, le chiffrage est de 25 millions d’euros ; or cette ville de banlieue n’a bien sûr pas les moyens financiers de financer de tels projets.

Sur ce sujet, il ne faut pas baisser les bras. Ne laissons par RTE nous endormir avec des promesses et des études à venir dans les prochaines années. Le 31 décembre 2017 me semble très loin. À mon sens, il conviendrait d’accélérer le travail de recensement et de mettre une pression forte sur RTE pour établir un état des lieux précis, afin d’envisager des solutions pour assurer la sécurité de tous nos concitoyens.

Il faut faire de la prévention pour les nouveaux bâtiments, mais également traiter les bâtiments existants.

compétence en matière de gestion des milieux aquatiques dans le nord-pas-de-calais