Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Poher, auteur de la question n° 783, adressée à M. le ministre de l’intérieur.

M. Hervé Poher. Madame la secrétaire d’État, j’aimerais appeler l’attention du ministère de l’intérieur, du ministère des finances, voire du ministère de l’environnement sur l’application des articles 56 à 59 de la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles.

En effet, à compter du 1er janvier 2016, les communes ou leurs groupements se voient transférer la compétence de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations, communément appelée la GEMAPI, et auront de façon concomitante la possibilité d’instaurer une taxe pour financer cette nouvelle compétence.

Cette disposition, précisément, pourrait poser quelques problèmes aux habitants de la zone des polders, dite « pays des wateringues », dans la plaine des Flandres, à cheval sur le Nord-Pas-de-Calais.

Cette zone géographique recouvre sept intercommunalités, qui appliqueront, selon toute probabilité, la taxe pour financer la compétence GEMAPI, et cela concerne près de 400 000 habitants.

Le résultat sera le suivant : on pourra trouver sur un même territoire deux types de citoyens.

Les premiers paieront une taxe, prélevée par l’EPCI, alors qu’ils ne sont pas dans une zone de wateringues. À l’extrême, cette position peut être justifiée par la solidarité.

Les seconds devront payer une taxe pour l’EPCI et une redevance pour les sections de wateringues, parce qu’ils habitent en zone de wateringues. Cette double imposition nous pose problème. Les acteurs locaux savent que la cohabitation entre la taxe et la redevance est légalement possible, mais cela créera un sentiment d’injustice et d’incompréhension évident de la part de certains de nos concitoyens, pour ne pas dire plus !

Ma question est donc simple, madame la secrétaire d’État : comment, dans cette zone unique en France, sachant que les effets du réchauffement climatique obligeront à être de plus en plus interventionniste, peut-on mettre en place la disposition GEMAPI sans appliquer une double imposition à certaines catégories de la population ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion. Monsieur le sénateur, je salue votre implication pour votre belle région du Nord-Pas-de-Calais qui est assez particulière. Vous le soulignez d’ailleurs avec ce problème très spécifique concernant le risque d’inondation et de submersion qui, au-delà des départements du Pas-de-Calais et du Nord que vous signalez, concernerait environ 19 000 communes et presque un habitant sur quatre.

Les catastrophes de ces trente dernières années et de ce début de siècle, ou encore très récemment en Bretagne et dans le Sud-Ouest, ont démontré, si besoin en était, la vulnérabilité de nombreux points du territoire français au risque d’inondation.

C’est pour cette raison que vous avez souhaité à une très large majorité, et avec le soutien du Gouvernement, introduire dans la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles une compétence en matière de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations, dite GEMAPI, compétence qui est confiée à titre obligatoire au bloc communal, au 1er janvier 2016.

Cette compétence ne remet évidemment en cause ni l’obligation d’entretien des cours d’eau des propriétaires riverains ni les missions exercées par les associations syndicales de propriétaires, comme le prévoit l’article 59 de la loi.

Les « sections de wateringues », spécificités des départements du Pas-de-Calais et du Nord, sont des associations syndicales de propriétaires. Leurs missions sont donc préservées.

Concernant plus précisément le volet financier, la compétence GEMAPI a été accompagnée de la création d’une ressource fiscale dédiée et facultative dont le plafond est fixé à 40 euros par habitant.

Vous m’interrogez sur l’articulation de cette taxe avec la taxe dite « de wateringues », perçues dans les polders situés dans les départements du Pas-de-Calais et du Nord. Vous mentionnez à juste titre une différence de nature juridique entre la taxe dite « de wateringues », qui doit s’analyser comme une redevance pour services rendus aux propriétaires riverains, et la taxe GEMAPI, qui constitue une contribution fiscale perçue auprès de tous les redevables assujettis aux taxes locales sur le territoire de la collectivité.

La taxe dite « de wateringues » et la taxe GEMAPI, si elles visent le même objectif, ont cependant des objets différents.

La redevance syndicale finance des travaux dont la nature et l’étendue sont définies par les cahiers des charges d’exploitation des associations syndicales de propriétaires. Son montant doit tenir compte de l’intérêt pour chaque propriété de l’exécution des missions de l’association. Le produit de la taxe GEMAPI, de son côté, est affecté au financement global des charges de fonctionnement et d’investissement, lesquelles comprennent les charges constituées par le coût de renouvellement des installations ainsi que par le remboursement des annuités des emprunts, résultant de l’exercice de la compétence de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations.

Par ailleurs, la taxe GEMAPI est facultative et, s’agissant d’une ressource affectée, les collectivités ne seront amenées à la lever qu’à la condition que la taxe dite « de wateringues » soit jugée insuffisante pour financer les infrastructures.

Si les collectivités choisissent d’instituer la taxe, son montant sera déterminé au regard du coût prévisionnel annuel résultant de l’exercice de la compétence GEMAPI, minoré par les interventions réalisées par les sections de wateringues.

Autrement dit, la taxe GEMAPI a vocation non pas à doublonner la taxe dite « de wateringues », mais à la compléter, pour que la compétence puisse être exercée comme sur le reste du territoire.

L’ambition du dispositif GEMAPI n’est pas de remettre en cause l’existant, qui démontre son efficacité localement ; elle est d’offrir les moyens juridiques et financiers aux collectivités qui font face à de réelles difficultés et qui sont dépourvues de moyens d’action.

Ma réponse devrait vous rassurer, monsieur le sénateur.

Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Poher.

M. Hervé Poher. Madame la secrétaire d’État, votre réponse très complète, dont je vous remercie, me laisse quelque peu perplexe, s’agissant d’un certain nombre de points.

Le système des wateringues a été créé sous Louis-Philippe ; avec la montée du niveau de la mer et différentes autres modifications climatiques, il était à bout de souffle.

En 2007, le ministère de l’environnement nous a demandé de revoir notre système. Nous avons donc entamé une réflexion à cette fin. Nous avons notamment imaginé la création d’un syndicat interdépartemental des wateringues chargé de gérer tous les ouvrages d’évacuation à la mer, par exemple les écluses et les pompes, qui représentent 120 mètres cubes à la seconde lorsque le dispositif fonctionne dans sa totalité.

Auparavant, cette institution était gérée par le couple composé, d’une part, des sections de wateringues et, d’autre part, des départements, qui en étaient les financeurs. À la demande de l’État, nous avons procédé à un réexamen de l’ensemble du système et avons décidé, à la suite de l’adoption de la loi GEMAPI, d’instaurer un triptyque : sections de wateringues, EPCI et départements.

Nous venons d’apprendre que les départements allaient disparaître. Les EPCI vont-ils récolter la charge de l’institution ? Les sections pourront-elles assumer tout cela ? Nous n’en savons rien, et l’interrogation est totale.

Par ailleurs, madame la secrétaire d’État, les EPCI ne sont certes pas obligés de créer la taxe, mais vous savez très bien qu’ils le feront automatiquement lorsqu’on leur en donnera la compétence.

Une étude a été réalisée par une mission d’expertise économique et financière. Selon celle-ci, nous pourrions compter sur 5 millions d’euros d’investissements sur plusieurs années en n’appliquant que 6,92 euros par feuille d’impôt. Mais quelle sera la réaction des contribuables lorsqu’ils apprendront qu’ils doivent payer deux fois ? Chez nous comme ailleurs, les gens ont quelquefois la tête près du bonnet ! Je préfère donc vous prévenir des conséquences de tels changements !

Les services de l’État, avec lesquels nous travaillons en toute tranquillité et pleine confiance, et nous-mêmes allons être très ennuyés. Un système fonctionne, il a fait ses preuves. Le niveau de la mer est en train de monter. Or, bien que nous sachions que nous nous dirigeons, à échéance plus ou moins proche, vers une catastrophe, nous sommes impuissants, dans la mesure où nous serons confrontés à un problème social. Même 6 euros – au rythme où les choses avancent, ce ne sera même plus le prix d’un paquet de cigarettes –, par principe, les habitants n’ont pas à les payer en plus !

effectifs de gendarmerie en zone rurale

Mme la présidente. La parole est à Mme Anne Emery-Dumas, auteur de la question n° 786, adressée à M. le ministre de la défense.

Mme Anne Emery-Dumas. Madame la secrétaire d’État, j’introduirai mon propos par quelques chiffres, qui illustrent la situation des effectifs de gendarmerie présents dans mon département, la Nièvre.

La particularité de ce département réside dans le fait que 83 % des Nivernais habitent en zone « gendarmerie ». Cela signifie que les gendarmes assurent la sécurité de 311 des 312 communes que compte la Nièvre et couvrent 99,7 % du territoire.

Nous avons donc toutes les caractéristiques du département rural, avec notamment des zones d’interventions très étendues.

Or, aujourd’hui, je suis très préoccupée par les risques qui pèsent sur les effectifs de gendarmerie dans mon département, inquiétude d’autant plus vive que, depuis quelques années maintenant, nous assistons en zone rurale au développement de nouvelles formes de délinquance très spécifiques : vols de matériels dans les exploitations agricoles et dans les petites entreprises, abattage et dépeçage de bétail à même le pré, recrudescence de cambriolages, vols de cuivre mettant à mal les réseaux France Télécom, SNCF, etc.

Face à cette situation nouvelle, les élus nivernais ont décidé de réagir afin d’apporter un soutien à leurs concitoyens et d’assurer une sécurité indispensable au développement serein des activités économiques et agricoles du département. Une convention a été signée, en novembre 2013, entre l’Union amicale des maires de la Nièvre et le groupement de gendarmerie départementale, avec pour objet de renforcer les liens entre élus et gendarmes.

La réussite des dispositifs mis en place, notamment avec la loi du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance et les textes qui l’ont complétée, est liée au soutien actif que peuvent apporter les forces de sécurité nationales aux élus.

La préservation de l’harmonie et de la tranquillité publique, qui est au cœur du mandat des élus locaux, suppose en effet une action collective et un engagement sans faille.

Vous le savez, madame la secrétaire d’État, la gendarmerie adapte son maillage territorial en permanence, sur la base des critères suivants : le volume de population protégée, l’activité des unités, notamment le volume de faits de délinquance constatés, et l’étendue des espaces à surveiller.

Dans le cadre de la convention signée voilà quelques mois, les acteurs locaux ne peuvent remplir leurs missions que si l’État garantit un niveau suffisant de présence des gendarmes dans les départements.

La faiblesse démographique du département de la Nièvre fait qu’il compte actuellement 1 gendarme pour 795 habitants. Ce chiffre est inférieur à la moyenne nationale, qui s’élève à 1 pour 1 000. Cette situation fait craindre une réorganisation des brigades et une réduction en conséquence de la couverture du territoire.

Il ne faudrait pas que les critères que je viens d’évoquer servent de base à une modification des effectifs des personnels de gendarmerie dans la Nièvre. Les spécificités géographiques de notre département influent sur la difficulté d’exercice des missions assumées par les gendarmes présents.

Madame la secrétaire d’État, pouvez-vous nous préciser aujourd’hui dans quelles conditions l’État envisage d’assurer, au nom de l’intérêt général, la permanence effective des services de gendarmerie dans nos territoires ruraux ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion. Madame la sénatrice, permettez-moi avant tout d’excuser M. le ministre de l’intérieur, Bernard Cazeneuve, qui est retenu ce matin. Je tiens à vous assurer combien il a le souci de la sécurité, en particulier dans les zones rurales du territoire français, au rang desquelles figure votre très beau département de la Nièvre.

Votre question a fait l’objet d’une étude attentive de la part de la direction générale de la gendarmerie nationale.

Vous le savez, la gendarmerie a pour mission d’assurer la sécurité des citoyens et l’ordre public sur 95 % du territoire national, plus particulièrement dans les zones rurales et péri-urbaines ainsi que sur les voies de communication. Que ce soit en milieu urbain ou en milieu rural, en centre-ville, en banlieue ou jusque dans les lieux d’habitation les plus isolés, chacun doit avoir droit au même niveau de sécurité.

À cet égard, il faut rappeler les dégâts de la révision générale des politiques publiques, la RGPP. Au total ce sont 13 700 emplois de policiers et de gendarmes qui ont été supprimés entre décembre 2007 et décembre 2012. C’est là une baisse sans précédent ! (Mme Anne Emery-Dumas acquiesce.)

Aussi, le Président de la République a pris un engagement fort : renforcer les moyens humains de la police et de la gendarmerie. Dorénavant, non seulement les départs à la retraite sont compensés poste pour poste, mais 500 emplois supplémentaires de policiers et de gendarmes sont créés chaque année. Nous ne pourrons pas compenser tous les postes détruits, mais ce gouvernement a fait le choix de revenir dans des territoires que la précédente majorité avait abandonnés.

J’en viens, plus spécifiquement, au département dont vous êtes l’élue. Au 1er juin 2014, le tableau des effectifs théoriques du groupement fait état de 393 personnels pour la Nièvre, ce qui porte le ratio à 1 gendarme pour 798 habitants. En 2012, ce chiffre était de 1 pour 801. Ainsi, le ratio s’est légèrement amélioré ces deux dernières années, alors que la moyenne nationale s’établit à 1 gendarme pour 925 habitants.

Concernant la délinquance, et en particulier les atteintes aux biens, la Nièvre a subi, depuis 2012, une augmentation comparable à la tendance nationale. Elle reste malgré tout l’un des départements les plus sûrs de France, avec un taux annuel de criminalité qui s’élève à 16,28 atteintes aux biens pour 1 000 habitants tandis que la moyenne nationale métropolitaine se situe à 21,55.

La gendarmerie nationale adapte en permanence son dispositif territorial afin de garantir l’efficacité opérationnelle de ses unités départementales. Dans ce cadre, elle tient compte des évolutions des bassins de population, de vie et de délinquance pour procéder aux ajustements locaux nécessaires. Ces opérations sont indispensables pour conserver la cohérence du dispositif et de l’action des forces de sécurité avec l’environnement démographique et délictuel de leurs zones de compétence.

Actuellement, aucun projet de dissolution d’unité n’est en cours et aucune mesure d’organisation ne vise à diminuer les effectifs du groupement de la Nièvre. Cette précision devrait être de nature à vous rassurer !

La lutte contre la délinquance doit concerner tous les territoires, et chacun de nos concitoyens doit pouvoir bénéficier du même niveau de protection, qu’il vive en zone urbaine ou en zone rurale. Aucun effort ne sera épargné pour y parvenir : c’est l’engagement que prend le Gouvernement devant les Français.

Mme la présidente. La parole est à Mme Anne Emery-Dumas.

Mme Anne Emery-Dumas. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de ces éléments. Le seul terme qui m’inquiète un peu, c’est l’adverbe « actuellement » que j’ai entendu à la fin de votre réponse. J’espère sa durée de vie suffisamment longue pour nous permettre d’être rassurés pour plusieurs années !

situation de la papeterie arjowiggins de wizernes

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Leroy, auteur de la question n° 776, adressée à M. le ministre de l'économie, du redressement productif et du numérique.

M. Jean-Claude Leroy. Je remercie par avance Mme la secrétaire d’État de bien vouloir répondre à cette question, qui s’adresse à M. Montebourg.

Je souhaite en effet attirer l’attention du Gouvernement sur la situation de la papeterie Arjowiggins située à Wizernes, dans le Pas-de-Calais, et, de manière plus générale, sur le sort de l’industrie papetière en France.

En effet, la vente de l’usine voire sa fermeture, à défaut de repreneur d’ici à juin 2015, ont été annoncées le 10 avril dernier. Le groupe papetier Sequana, propriétaire d’Arjowiggins, s’est engagé dans une restructuration des divisions « papiers graphiques » et « papiers de création », auxquelles appartient l’usine wizernoise, qui produit essentiellement des papiers couchés, comme les papiers glacés.

Plusieurs critères ont été invoqués pour justifier cette décision. Tout d’abord, a été mise en avant la baisse des ventes de papiers d’impression et d’écriture, en régression de 8 % par an depuis 2008, avec une baisse des volumes de 5 % attendue pour les trois prochaines années. S’ensuit une surproduction, qui tire les prix vers le bas. S’ajoutent à cela des coûts de production élevés pour la pâte à papier, les produits chimiques et l’énergie, qui constitue un poste important.

Si l’on peut comprendre ces tensions externes, l’erreur principale du groupe n’a-t-elle pas été, année après année, d’appauvrir le budget de la recherche et développement, qui lui aurait sans doute permis de rebondir, tant la diversité des productions de papier est large ?

Le 24 mai dernier, plus de 3 000 personnes ont pu, grâce aux travailleurs de cette entreprise, visiter le site et constater la modernité des installations. Dans ces conditions, pouvons-nous accepter qu’une telle entreprise disparaisse purement et simplement du paysage industriel de l’Audomarois ?

J’ajoute qu’à ce jour les carnets de commande sont pleins. L’appareil de fabrication est en bon état et sa flexibilité permet d’assurer diverses productions comme des emballages, des suremballages et des produits porteurs comme les sacs en papier.

La recherche d’un repreneur se pose donc comme une exigence. Pourtant, certains doutent de la volonté de la direction d’agir en ce sens, en raison notamment de l’existence de clauses de non-concurrence qui pourraient décourager des repreneurs potentiels. Certes, on nous a indiqué récemment que la clause de non-concurrence pourrait ne pas être appliquée. Parallèlement, on nous a dit qu’elle s’appliquerait au niveau de la recherche d’un éventuel repreneur mais pas au niveau de la reprise ! De quoi parlons-nous ? Qu’en est-il exactement ?

Par ailleurs, dans la réponse apportée à la question posée par l’un de nos collègues de l’Assemblée nationale, il a été fait état d’un accord signé sous l’égide du ministère entre les actionnaires et les banques. Qu’en est-il également ? Que contient cet accord ?

Les 307 salariés du site de Wizernes sont inquiets pour leur avenir, et l’enjeu va bien au-delà d’eux puisqu’on estime que l’on peut multiplier par 3,5 l’impact sur l’emploi. Il faut en effet ajouter aux 307 postes du site proprement dit tous les emplois induits, c’est-à-dire ceux des sous-traitants, transporteurs, chaudronniers, dont certains travaillent presque exclusivement avec la papeterie. L’impact sur le commerce local doit également être pris en compte.

Madame la secrétaire d’État, nous savons que les pouvoirs publics interviennent dans cette société par le biais de la Banque publique d’investissement, la BPI. Aussi, nous demandons au Gouvernement de tout mettre en œuvre pour sauver le site de Wizernes. Nous vous le demandons au nom de tous les travailleurs de cette industrie papetière, qui sont convaincus que cette dernière a encore un avenir.

Ma question est simple : quelles actions l’État entend-il mener pour sauver le site de Wizernes en évitant, dans un premier temps, que toutes les productions rentables soient transférées vers d’autres sites, ce qui empêcherait tout espoir de reprise ?

La Vallée de l’Aa est encore l’une des premières régions papetières de France. Travaillons ensemble pour qu’elle le reste.

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d’abord d’excuser l’absence d’Arnaud Montebourg. Je tiens, par cette réponse, à vous détailler l’ensemble des actions menées au titre de ce dossier par le Gouvernement, et en particulier par le ministère de l’économie et du redressement productif.

Le 10 avril 2014, la direction du groupe papetier Sequana a annoncé un projet de réorganisation du groupe comportant la cession, ou la fermeture, en l’absence de repreneur, de trois sites industriels dont celui de Wizernes dans le Pas-de-Calais. Cette annonce fait suite à la publication des résultats de l’année 2013 qui – vous l’avez dit – ont été marqués par une perte nette de 301 millions d’euros. Qui plus est, ils succèdent à une perte de 123 millions d’euros l’année précédente.

Le groupe Sequana est l’un des leaders mondiaux du secteur du papier avec ses deux filiales Arjowiggins pour la fabrication et Antalis, numéro un en Europe de la distribution de papier. Le groupe emploie 10 500 collaborateurs, dont plus de 2 900 en France.

L’ampleur des risques sur les plans économique et social a conduit l’État à se mobiliser très tôt.

Anticipant les difficultés du groupe liées à la dégradation du marché que vous avez signalée, le ministre de l’économie, du redressement productif et du numérique avait engagé en amont un processus de négociation entre les actionnaires et les banques pour résoudre les difficultés liées à l’ampleur des pertes. Le groupe Sequana a ainsi pu annoncer, ce même 10 avril, disposer de l’accord de ses banques et de ses actionnaires pour une restructuration de sa dette et une augmentation de capital de 64 millions d’euros, à laquelle Bpifrance souscrira effectivement.

À la suite de demandes exprimées par les salariés, deux organismes ont été mandatés pour mener la prospection en vue d’une reprise de l’usine. Le groupe Sequana a choisi un cabinet de renommée internationale, et les pouvoirs publics ont mobilisé l’Agence française pour les investissements internationaux, l’AFII.

Par ailleurs, la recherche de repreneurs sera menée au niveau mondial auprès de l’ensemble des acteurs, y compris non papetiers, pouvant offrir des perspectives industrielles à ces sites de production, et ce pendant un an. Le ministre a donc obtenu la suppression de la clause de non-concurrence, comme vous le souhaitiez.

Localement, un lien est proposé entre les acteurs de l’agence de développement économique de Saint-Omer, Nord France Invest, correspondant naturel de l’AFII, et le cabinet mandaté par le groupe, afin de garantir une bonne cohérence dans les recherches.

En lien avec les services de l’État en région, c’est-à-dire le commissaire au redressement productif, la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi – la DIRECCTE – du Nord–Pas-de-Calais, l’agence de développement économique de Saint-Omer et Arjowiggins, un travail va être amorcé afin d’anticiper les difficultés des sous-traitants qui vous préoccupent, et qui résultent de la baisse d’activité prévue sur le site de Wizernes à compter de janvier 2015.

prolongation de l'exonération de cotisation foncière des entreprises pour les auto-entrepreneurs

Mme la présidente. La parole est à M. Yvon Collin, auteur de la question n° 709, adressée à M. le secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget.

M. Yvon Collin. Je souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur les conséquences, pour les collectivités territoriales, de l’article 55 de la loi de finances rectificative pour 2013, relatif à la prolongation de l’exonération de cotisation foncière des entreprises, la CFE.

Initialement, il était prévu que les auto-entrepreneurs exerçant l’option pour le prélèvement fiscal forfaitaire libératoire seraient exonérés de la CFE, et ce pour une période de deux ans à compter de l’année suivant celle de la création de leur entreprise.

Madame la secrétaire d’État, vous le savez, le bénéfice de cette exonération a été étendu, par la loi de finances pour 2011, à tous les auto-entrepreneurs à compter des impositions établies au titre de l’année 2010.

La loi de finances rectificative pour 2012 a ensuite prorogé d’un an, au titre de ladite année, l’exonération de CFE pour les auto-entrepreneurs qui avaient déjà bénéficié de cette exonération pour les deux années consécutives précédentes.

Ces dispositions successives, conjuguées à celle de la loi de finances rectificative précitée, pèsent une nouvelle fois sur les finances locales.

En effet, le financement de l’exonération, assumé à 50 % par l’État et à 50 % par les communes et les établissements publics de coopération intercommunale, ou EPCI, crée une charge à ce jour durable, car issue d’une disposition élargie puis reconduite.

Aussi, la prolongation de l’exonération remet en cause le principe constitutionnel d’autonomie financière des collectivités territoriales, dont nous avons beaucoup débattu au Sénat, en 2012, dans le cadre des États généraux de la démocratie territoriale.

C’est pourquoi, au titre du projet de loi de finances rectificative pour 2013, j’avais déposé avec mes collègues du RDSE un amendement tendant à supprimer cet article 55. Sans méconnaître la nécessité de soutenir les micro-initiatives entrepreneuriales, il me semble fondamental de donner aux collectivités territoriales la visibilité à long terme dont elles ont besoin pour gérer leur budget.

En conséquence, malgré les garanties apportées via la loi organique du 29 juillet 2004, le Gouvernement envisage-t-il, dans le cadre de la grande réforme territoriale, de renforcer le principe de stabilisation fiscale, par exemple dans l’esprit du chantier déjà engagé sur la stabilisation des normes ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion. Monsieur le sénateur, je tiens tout d’abord à excuser M. le secrétaire d’État au budget, qui m’a chargée de répondre très précisément à votre question.

Afin de prendre en compte les capacités contributives peu élevées de certains redevables, et dans l’attente de la mise en place du nouveau barème de base minimum de la CFE, prévu à l’article 76 de la loi de finances pour 2014, l’article 55 de la loi de finances rectificative pour 2013, que vous évoquez, prolonge effectivement l’exonération de CFE pour les auto-entrepreneurs. L’objectif est de ne pas laisser à leur charge, au titre de l’année 2013, un montant de CFE susceptible de menacer la pérennité de leur activité.

En droit, le Conseil constitutionnel a déjà jugé que le principe d’une participation financière des collectivités au coût d’un dégrèvement décidé par le législateur n’était pas en soi attentatoire au principe de libre administration. Voilà qui devrait déjà vous libérer d’un doute.

Le dispositif provisoire – car il est provisoire – d’allégement voté prévoit une exonération de prise en charge de façon équitable, à hauteur de 50 millions d’euros par les communes et les établissements publics de coopération intercommunale dotés d’une fiscalité propre concernés et à hauteur de 70 millions d’euros par l’État.

Par ailleurs, cette décision prise par le législateur à la fin de 2013 de maintenir l'exonération, une dernière fois – une dernière année – n'a pas entamé l'autonomie financière des collectivités en les privant d'une recette, puisque les auto-entrepreneurs étaient déjà exonérés de CFE auparavant, comme vous l’avez signalé. Elles ont été privées, pour une nouvelle année, d'une chance de recettes supplémentaires, mais n'ont donc pas réellement, au sens propre, subi de perte.

On peut même conclure que, à la fin de 2013, nous avions remédié à cette situation s’agissant des collectivités locales et mis fin à l'exonération pour l'avenir en faisant rentrer les auto-entrepreneurs dans le nouveau barème de CFE, dans des conditions de lissage et d'égalité avec les très petites entreprises artisanales.

Je ne doute pas que, sur le terrain, vous accordiez une très grande importance au maintien de ces très petites entreprises artisanales qui apportent de l’emploi et de l’activité économique dans les territoires ruraux.