M. Yannick Vaugrenard. Il faut voir !

M. Martial Bourquin. Toutefois, pour cela, un effort majeur de traçabilité des créances doit être réalisé dans les documents comptables, avec l’aide des professions du chiffre, de manière que les partenaires sociaux puissent s’en saisir, mais aussi que nous, les élus, disposions de l’ensemble des informations.

La question posée est celle de la montée en gamme de nos entreprises et de leurs produits. Cette question doit être débattue dans l’ensemble des conseils d’administration ainsi qu’au Parlement.

Cependant, madame la secrétaire d’État, les garde-fous prévus par la loi doivent aussi être effectifs ! Ici et là, on constate que des entreprises tentent de profiter du CICE pour délocaliser, pour supprimer des emplois et investir ailleurs. En la matière, l’effectivité de notre contrôle doit être totale.

Au reste, le CICE n’est pas le seul levier économique. Au-delà de toutes les interrogations et de toutes les remarques qui ont été formulées dans l’hémicycle, je rappelle que le rapport Gallois ne contient pas moins de trente-cinq mesures pour la compétitivité. Parmi ces mesures figure, par exemple, la réduction des délais de paiement : les sous-traitants des grands groupes ont 13 milliards d’euros de retards de délais de paiement par an, et ces délais s’aggravent.

Lorsque nous discutons du CICE, nous devons également aborder les questions de l’innovation, des écosystèmes productifs, de la simplification administrative. Ce sont tous ces éléments qui, mis bout à bout, contribuent à renforcer l’attractivité de notre secteur industriel. Nous ne devons donc pas isoler un dispositif parmi les autres : nous devons en considérer la totalité.

Mes chers collègues, la France compte 5 millions de demandeurs d’emploi.

M. Jean-François Husson. Cela ne s’arrange pas !

M. Martial Bourquin. Cette situation n’est plus tenable. Nous devons nous attaquer à la question de notre système productif. Depuis trente ans, nous regardons notre France se désindustrialiser. Il faut avoir cette volonté de redresser l’économie de la France, notamment notre industrie. On ne peut plus demeurer les bras ballants et répéter toujours les mêmes choses. Posons les vrais problèmes et apportons-y de vraies solutions !

Pour finir, je ferai remarquer au lecteur assidu de Thomas Piketty que deux des questions posées dans son ouvrage n’ont pas été abordées aujourd'hui.

M. Jean-François Husson. Ce sera pour la prochaine fois !

M. Martial Bourquin. Premièrement, faut-il continuer à mener des politiques déflationnistes quand la déflation est proche ? Deuxièmement, pourquoi les revenus des actionnaires augmentent-ils plus vite que la croissance ? Ces deux questions mériteraient un vrai débat dans cette assemblée. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

Plusieurs sénateurs du groupe CRC. C’est sûr !

Mme la présidente. La parole est à M. Yannick Vaugrenard.

M. Yannick Vaugrenard. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi constituait l’une des trente-cinq décisions concrètes du pacte national pour la croissance, la compétitivité et l’emploi, annoncé à la suite de la présentation du rapport de Louis Gallois sur la compétitivité de l’industrie française. Comme cela a été rappelé, son objectif est d’améliorer la compétitivité de nos entreprises, en particulier à travers des efforts en matière de recrutement, d’investissement, de recherche ou encore d’innovation.

Alors que les premiers versements de ce crédit d’impôt parviennent aux entreprises depuis quelques mois, il nous appartient – c’est précisément le but du débat de ce jour – de réaliser un point d’étape sur cette mesure, centrale dans la politique de relance économique du Gouvernement.

Examinons les chiffres dont nous disposons aujourd’hui, notamment ceux que le comité de suivi du CICE a publiés dans son rapport du 30 septembre dernier.

À ce jour, 8,7 milliards d’euros ont été déclarés et 5,2 milliards d’euros ont d’ores et déjà été restitués. Ce sont tout de même 713 000 entreprises, sur le million d’entreprises concernées, qui ont ainsi demandé à bénéficier du dispositif : 11 % sont des micro-entreprises, 31 % des PME et 25 % des entreprises de taille intermédiaire.

Certes, le Gouvernement avait escompté que les entreprises déclarent 10,8 milliards d’euros. Mais, bien évidemment, le temps n’est pas venu de tirer un bilan définitif du CICE ; il est encore trop tôt pour voir ses effets sur le comportement des entreprises, et cela pour plusieurs raisons.

Premièrement, au moment de l’enquête réalisée par le comité de suivi, un quart des entreprises n’avaient pas encore arrêté leurs comptes. Le montant de 8,7 milliards d’euros ne concerne donc que les structures ayant clos leur exercice entre janvier et avril 2014.

Deuxièmement, la créance ultime au titre de 2013 ne sera connue qu’en 2017, à échéance du droit au crédit d’impôt, puisque les entreprises disposent de trois ans pour l’utiliser.

Troisièmement, pour mesurer la réelle efficacité du CICE sur notre économie, il faut attendre les effets de la baisse des cotisations, qui ne seront pas mesurables avant deux ou trois ans au minimum.

La montée en puissance du dispositif est donc, par nature, progressive et nous pouvons aisément mesurer le décalage, normal, entre les annonces et les tout premiers effets. Mais nous savons, depuis quelque temps déjà, mes chers collègues, que le temps économique n’a rien à voir avec le temps politique, et encore moins avec le temps médiatique.

Toutefois, il est dès à présent possible de tirer quelques enseignements du rapport du comité de suivi, ainsi que d’une enquête réalisée par l’INSEE, auprès de 5 000 entreprises, sur la manière dont elles comptent utiliser le CICE.

Tout d’abord, cette enquête nous apprend que la connaissance du dispositif progresse de manière notable chez les dirigeants, par rapport à son lancement en 2013.

Interrogées sur leur future utilisation, 34 % des entreprises du secteur de l’industrie estiment que le CICE leur permettra d’embaucher, et ce chiffre grimpe à 48 % dans le secteur des services.

Par ailleurs, 58 % des entreprises du secteur de l’industrie et 52 % du secteur des services indiquent destiner le CICE à de l’investissement. Son rôle premier semblerait donc rempli, ce qui démontre que, dans les services comme dans l’industrie, la mesure répond à un besoin.

Compte tenu de ces éléments, toute analyse sur le CICE et ses effets nécessite prudence et humilité.

Le retour sur l’année écoulée est extrêmement instructif sur la façon dont sa mécanique a été progressivement assimilée et sur les obstacles que cette assimilation a pu logiquement rencontrer. Mais cette année ne peut être considérée comme véritablement représentative des comportements à venir. Lorsque les acteurs se seront appropriés le dispositif et que sa stabilité sera considérée comme acquise, certaines adaptations devront être envisagées. D’autres méritent sûrement de ne pas attendre…

Je souhaiterais revenir sur quelques points ayant créé la polémique, à savoir l’utilisation du CICE par certains grands groupes en vue d’augmenter les dividendes.

Il est évident que le CICE ne doit pas être détourné de son objet initial : la sauvegarde et la création d’emplois, ainsi que la modernisation de l’appareil productif. C’est pourquoi je soutiens tout ce qui vise à demander aux entreprises de rembourser les aides versées, dès lors que celles-ci servent à augmenter les dividendes ou la rémunération des actionnaires, ou qu’elles accompagnent la fermeture d’entreprises ou de succursales rentables.

M. Roland Courteau. Très bien !

M. Yannick Vaugrenard. Tout comme Martial Bourquin dans son département, j’ai connaissance d’un tel cas de figure sur mon propre territoire. La Seita, qui a bénéficié du CICE, y a fermé un établissement pour délocaliser l’activité en Pologne.

M. Yannick Vaugrenard. Il est bien évidemment choquant que les dividendes versés en France aient progressé de 30,3 % par rapport au deuxième trimestre 2013 pour atteindre près de 41 milliards d’euros. Notre pays est aujourd'hui le leader européen dans ce domaine ! Vu l’état de morosité de notre économie, je ne peux que comprendre ceux qui se sont élevés pour souligner la contradiction !

Mais le principe même du CICE n’est pas à mettre en cause du fait du comportement déplacé de certaines grandes entreprises, même si celui-ci est parfaitement condamnable. Encore faut-il avoir des dispositifs pour contrôler, et sanctionner si nécessaire !

Rappelons que les trois quarts du CICE bénéficient, dans la réalité, à des PME ou des entreprises de taille intermédiaire, qui, a priori, ne sont pas cotées en bourse. Globalement, le dispositif a donc plus servi à reconstituer objectivement la trésorerie des PME, leur permettant de redresser leur marge et de se désendetter, qu’à gonfler les dividendes des grands groupes.

Le pacte national pour la croissance, la compétitivité et l’emploi, dont fait partie le CICE, a donc été conçu pour préparer l’avenir de notre pays. C’est une impérieuse nécessité. Les résultats ne se feront pas sentir en un jour et nous pouvons comprendre que cela prenne du temps. En revanche, et ceci est vrai pour le CICE comme pour toute forme d’aide aux entreprises en général, la conditionnalité est un impératif si nous voulons nous inscrire dans un rapport gagnant-gagnant non seulement sur le plan économique, mais aussi au niveau de l’indispensable pédagogie politique à mettre en œuvre.

Nous aurions collectivement tout à gagner de voir chaque chef d’entreprise indiquer très simplement aux salariés ce qui a été fait avec l’argent du CICE. Cette nécessaire transparence serait une simple initiative de bon sens. Les salariés–citoyens seraient en toute logique informés de l’utilisation par leur entreprise des deniers publics, donc de l’effort collectif.

M. Roland Courteau. Bonne idée !

M. Yannick Vaugrenard. Il est aussi important, madame la secrétaire d’État, d’affiner le dispositif, afin que ce soit véritablement les secteurs économiques en ayant le plus besoin qui en bénéficient – notamment l’industrie –, avec un effort de transparence, profitable à tous et permettant d’éviter les dérives constatées.

Au bout du compte, si le CICE peut incontestablement aider à renforcer la compétitivité de nos entreprises, il ne peut et ne doit pas être mis en œuvre sans transparence, sans nécessaire contrôle et sans information des salariés concernés. Tout cela serait, j’en suis persuadé, mes chers collègues, le gage d’une plus grande efficacité. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC. – M. Pierre-Yves Collombat applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Carole Delga, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénatrices et sénateurs, je souhaite, dans mon propos, évoquer un contexte plus général, celui dans lequel nous avons inscrit la politique du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, et les perspectives qui sont les nôtres en matière de soutien aux entreprises.

Il est clair, comme le rappelait Michel Crozier, qu’« on ne change pas la société par décret ».

M. Jean-François Husson. Il faut le dire à M. Peillon !

Mme Carole Delga, secrétaire d'État. Cela étant, il est nécessaire que, dans le temps législatif et dans le temps réglementaire, nous soyons attentifs aux évolutions à impulser pour améliorer la compétitivité des entreprises.

Rappelons que nous avons hérité, en 2012, d’une situation très complexe : l’industrie était très abîmée et beaucoup de nos entreprises avaient perdu leur compétitivité.

Mme Carole Delga, secrétaire d'État. Nous avons donc souhaité mettre en œuvre une politique qui leur permette de retrouver des marges et de restaurer cette compétitivité. Il s’agissait de soutenir notre tissu industriel, mais aussi de renforcer les capacités à recréer de l’emploi, puisque, comme vous le savez, le niveau très élevé du chômage dans notre pays constitue une forte problématique.

M. Jean-François Husson. Cela ne s’arrange pas !

Mme Carole Delga, secrétaire d'État. C’est malheureusement le cas, mais nous déployons des politiques coordonnées…

MM. Jean-Noël Cardoux et Jean-François Husson. Ah !

Mme Carole Delga, secrétaire d'État. … pour promouvoir l’emploi et reconstituer des services publics, tels que ceux de l’éducation nationale ou de la justice, qui avaient été précédemment laminés.

M. Roland Courteau. Il est bon de le rappeler !

M. Jean-François Husson. Informez donc M. Peillon qu’il ne faut pas réformer par décret !

Mme Carole Delga, secrétaire d'État. Si vous le voulez bien, monsieur le sénateur, je vous propose de l’en informer directement.

M. Jean-François Husson. C’est déjà fait ! Il ne m’a pas répondu !

Mme Carole Delga, secrétaire d'État. Je rappellerai la philosophie du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi : il s’agit de recréer un cercle vertueux à travers l’investissement, l’innovation et la compétitivité pour l’emploi.

Le CICE est un des piliers de la stratégie économique du Gouvernement, laquelle repose sur trois éléments.

Premier élément, la réduction du déficit public et l’assainissement des comptes publics.

Sous le quinquennat précédent – la présidence de Nicolas Sarkozy –, la progression de la dette s’élevait à 5 % par an. Depuis 2012, cette progression a été réduite et n’est plus que de 3 %.

Eu égard à la responsabilité qui nous incombe en tant que membres du Gouvernement, nous avons également souhaité un important ralentissement de la dépense publique, mais compatible avec un soutien à l’économie. C’est ainsi que nous avons prévu de réduire la dépense publique de 50 milliards d’euros sur trois ans, quand d’autres nous proposent de la réduire de 100 milliards d'euros :…

M. Roland Courteau. Ah oui ! Et même de 150 milliards d’euros !

Mme Carole Delga, secrétaire d'État. … je ne vois pas comment il serait possible de réaliser de telles économies…

M. Jean-François Husson. Vous êtes aux affaires !

Mme Carole Delga, secrétaire d'État. … sans casser le modèle républicain !

M. Jean-François Husson. Il est déjà mal en point !

Mme Carole Delga, secrétaire d'État. L’effort de réduction de la dépense publique est sans précédent, mais adapté à notre situation économique. Les ministères et collectivités locales sont, bien sûr, mis à contribution. Toutefois il me semble me rappeler que la suppression de la taxe professionnelle a privé les collectivités locales d’un impôt dynamique et, par la même occasion, les carnets de commande des entreprises du secteur du bâtiment et des travaux publics ont commencé à refléter certaines difficultés…

M. Roland Courteau. Très bien ! Il est bon de le rappeler une fois encore !

Mme Carole Delga, secrétaire d'État. Nous avons également demandé au réseau consulaire de réaliser un effort.

La France doit être redressée ! Ce but appelle la mobilisation de toutes et de tous !

Deuxième élément, la restauration de la compétitivité de l’économie, afin de renouer avec la croissance et l’emploi de manière durable.

M. Jean-François Husson. Cela ne se voit pas !

Mme Carole Delga, secrétaire d'État. Le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi et le pacte de responsabilité et de solidarité redonnent des marges aux entreprises pour investir, consolider leurs hauts de bilan – les budgets de nos entreprises présentent une faiblesse intrinsèque –, embaucher et exporter, grâce à une baisse des prélèvements de 40 milliards d'euros à l’horizon 2017.

Troisième élément, la réforme de notre économie.

C’est ce que nous mettons en œuvre depuis deux ans, notamment à travers la simplification des procédures de paie ou l’allégement des dossiers de candidatures aux marchés publics, nos TPE et nos PME ayant aussi vocation à répondre à ces appels d’offre. Nous avons signé un décret en ce sens, voilà quinze jours, avec Emmanuel Macron.

Comme l’a annoncé M. le Président de la République, nous réalisons également des efforts en matière d’accès des TPE et PME à la trésorerie. Ainsi, la Banque publique d’investissement se portera garante auprès du réseau bancaire pour permettre à nos petites entreprises d’obtenir la trésorerie susceptible de leur offrir un effet de levier.

La question des délais de paiement a aussi été abordée. Dans la loi du 17 mars 2014 relative à la consommation, nous avons voté un dispositif permettant de réduire ces délais de paiement, qui pèsent lourdement sur la trésorerie de nos TPE et de nos PME. M. le Président de la République l’a également précisé, un contrôle accru sera mis en place et les grands donneurs d’ordre seront incités à proposer à nos entreprises des délais de paiement plus corrects.

Il faut aussi rappeler la politique de soutien au pouvoir d’achat, avec la diminution de l’imposition sur le revenu. La suppression de la première tranche du barème vient d’être votée à l’Assemblée nationale. C’est une mesure de soutien des classes modestes et moyennes, qui pourront consommer des biens de première nécessité.

En 2012, le déficit budgétaire était énorme, la dette avait explosé puisqu’elle avait doublé en dix ans, et le déficit du commerce extérieur pénalisait fortement la compétitivité de la France.

Le soutien aux entreprises s’accompagne donc d’un soutien à l’ensemble des salariés dont les ressources sont moyennes ou modestes.

Le Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi est dans un premier temps un « ballon d’oxygène » qui permet à des centaines de milliers d’entreprises de diminuer directement le coût du travail.

Deux rapports ont été remis récemment pour dresser un bilan d’étape du CICE, cela a été rappelé : le premier par le comité de suivi du CICE présidé par Jean Pisani-Ferry et le second par le parlementaire Yves Blein. À travers ces deux rapports, tous les acteurs économiques, politiques et sociaux ont été consultés. Ces deux rapports dressent un bilan positif du CICE.

Il est nécessaire de poursuivre, d’approfondir et d’améliorer le travail d’évaluation qui est mené sur le CICE, mais il est avant tout indispensable de créer des conditions stables pour nos entreprises. La stabilité est l’une des composantes de la confiance, et nous devons savoir redonner confiance à nos entreprises comme nous devons savoir redonner confiance à notre pays.

Ces deux rapports démontrent que l’utilisation du CICE par les entreprises est en ligne avec les objectifs du dispositif, à savoir soutenir l’investissement et l’emploi.

Nous avons donc un premier bilan particulièrement encourageant pour un dispositif dont il faut souligner la nouveauté. Rappelons que les entreprises de moins de 50 salariés constituent 39 % de la créance totale du CICE, c’est-à-dire légèrement plus que celle des entreprises de plus de 500 salariés. Notre cœur de cible, ce sont bien les entreprises de moins de 50 salariés, qui bénéficient du CICE car la structuration de leur masse salariale correspond bien à des salaires inférieurs à 2,5 fois le SMIC.

Nous devons également convenir que le commerce et l’industrie manufacturière sont les deux secteurs les plus concernés par ce crédit d’impôt.

Le dispositif vient de se mettre en place et doit monter en puissance. Dès 2015, au titre de 2014, le taux sera porté à 6 % de la masse salariale. Dès 2014, nous aurons un préfinancement plus fort puisque les entreprises ont commencé à toucher le CICE en mai ou en juin dernier. Elles ont ainsi pu constater qu’il s’agit d’un dispositif réel, opportun. Elles pourront encore amplifier le mouvement de préfinancement au niveau de la Banque publique d’investissement. Nicolas Dufourcq, que j’ai rencontré récemment, m’a indiqué que des préfinancements de plusieurs milliers d’euros – jusqu’à 7 000 euros pour certaines entreprises – pouvaient être réalisés par la BPI en région. C’est cela être adapté et adaptable aux besoins de nos entreprises !

Il a également été question d’aider toutes les entreprises, y compris les entreprises indépendantes. Je tiens à rappeler que, dans le pacte de responsabilité et de solidarité, dans les dispositifs votés dans le projet de loi de finances rectificative au mois de juillet 2014, une disposition concerne les indépendants. Nous avons décidé un allégement de charges pour les cotisations famille de 60 % à partir du 1er janvier 2015. Des mesures sont donc destinées aux artisans et indépendants. De nombreuses chambres de métiers et de l’artisanat se sont félicitées de ce dispositif de baisse des charges qui va toucher le secteur de l’artisanat et des indépendants, important pour la vitalité de nos territoires.

Je suis très étonnée d’entendre dire que le système est très complexe. Vous n’êtes certainement pas allés sur le site internet consulter les modalités…

M. Jean-François Husson. Nous sommes allés sur le terrain !

Mme Carole Delga, secrétaire d'État. Je vais également très souvent sur le terrain, monsieur le sénateur,…

M. Jean-François Husson. Je n’en doute pas, madame la secrétaire d’État !

Mme Carole Delga, secrétaire d'État. … au moins un jour par semaine !

Sur le site, vous pourriez constater que les modalités de déclaration sont très simples pour le CICE. J’ai visité, la semaine dernière, la chambre de commerce et d’industrie de Montpellier. Lors d’une réunion publique, des représentants de la Confédération générale du patronat des petites et moyennes entreprises, la CGPME, sont intervenus pour faire part de leur contentement sur ce dispositif à la fois opérationnel et simple. Lors d’un déplacement à Reims, j’ai également pu discuter avec des chefs d’entreprise qui, s’ils avaient effectivement eu écho d’une certaine complexité, avaient pu constater, en remplissant les documents nécessaires, la réactivité, la lisibilité et l’effectivité du dispositif.

M. Jean-François Husson. C’est le bonheur !

Mme Carole Delga, secrétaire d'État. Outre le CICE, le pacte de responsabilité et de solidarité, les entreprises du secteur du bâtiment et des travaux publics peuvent également bénéficier de dispositifs particuliers, parce que nous savons que les entreprises, dans ces secteurs, souffrent particulièrement.

Pour le secteur du bâtiment, la réhabilitation de l’ancien est une opération primordiale. Le prêt à taux zéro a ainsi été étendu à la réhabilitation du logement ancien et n’est plus limité au logement neuf. Le crédit d’impôt a par ailleurs augmenté significativement, jusqu’à 30 %, pour tous les travaux de rénovation énergétique.

M. Roland Courteau. Très bien !

Mme Carole Delga, secrétaire d'État. L’ensemble des entreprises du secteur du bâtiment sont donc concernées, les très petites entreprises comme les grands groupes du bâtiment pour la production de logement social.

Concernant les travaux publics, les dotations prévues en matière d’infrastructures dans les contrats de projets État-région ont été revalorisées. Là aussi, nous sommes conscients de la nécessité de soutenir l’investissement. Comme vous le savez, à l’échelle européenne, Michel Sapin et Emmanuel Macron sont en train de négocier un investissement fort en particulier sur les nouvelles technologies et les infrastructures.

Nous avons besoin d’un message rassurant pour les entreprises ; nous avons besoin de stabilité pour pouvoir recréer de la confiance, de la volonté d’investir à moyen et à long terme.

Alors, je m’étonne que l’on nous dise que ce dispositif de soutien aux entreprises ne convient pas. Je m’étonne d’entendre dire qu’il existe des difficultés d’application et qu’il aurait fallu mettre en place d’autres solutions. J’aurais voulu que l’on puisse me rappeler quelles ont été les actions de soutien aux entreprises mises en place durant le précédent quinquennat…

M. Roland Courteau. C’est une bonne question !

Mme Carole Delga, secrétaire d'État. Il me semble qu’elles n’ont pas été si nombreuses…

M. Pierre-Yves Collombat. C’était la droite !

M. Jean-François Husson. Cela vous réveille, c’est bien !

M. Pierre-Yves Collombat. Si on conduit la même politique, on se demande ce qu’on fait là !

Mme Carole Delga, secrétaire d'État. La désindustrialisation de la France ne date pas de deux ans. La dégringolade remonte à plus de dix ans.

M. Alain Chatillon. Cela remonte à 1980 !

Mme Carole Delga, secrétaire d'État. Étant précisé, monsieur le sénateur, que le phénomène s’est amplifié depuis le début des années 2000 !

M. Alain Chatillon. Non, c’est 60 000 emplois par an depuis 1980 !

Mme Carole Delga, secrétaire d'État. Nous allons donc continuer à travailler sur le sujet dans les mois à venir. Nous engagerons une communication plus forte sur le CICE, comme cela a été suggéré dans les rapports, ainsi que sur son impact dans tous les territoires. Son montant a parfois permis de soutenir la trésorerie dans les petites entreprises, dans un contexte de crise économique. De nombreux investissements ont également été engagés à ce titre, mais aussi des politiques salariales plus favorables.

Concernant les faux procès sur les contrôles fiscaux et la comparaison avec le crédit d’impôt recherche, ou CIR, je voudrais rappeler que le crédit d’impôt recherche est fondé sur une déclaration fiscale, contrairement au CICE, qui est basé sur la masse salariale. (M. Jean-François Husson s’exclame.)

Lorsque des contrôles sont effectués sur l’utilisation du CIR, il est procédé à un examen de la déclaration fiscale, mais c’est lié à la base du CIR.

M. Jean-François Husson. Sinon, c’est un contrôle URSSAF !

Mme Carole Delga, secrétaire d'État. Il n’y a aucun contrôle fiscal lié au CICE. Il faut être rassurant pour les entreprises.

Limiter le dispositif à certains secteurs comme les entreprises exportatrices ne me paraît pas constituer une bonne idée. Nous devons disposer d’une vision complète des entreprises capables d’exporter, qui ne se limitent pas à l’industrie. Nous devons également être conscients qu’il existe de nombreux sous-traitants d’entreprises exportatrices, qui doivent aussi pouvoir bénéficier du CICE.

Il faut que notre système soit souple, corresponde aux besoins des entreprises et permette de soutenir l’emploi, comme c’est le cas pour le CICE. Le système doit en outre être lisible pour les entreprises mais aussi visible pour nos concitoyens. À cet égard, nous devons développer des outils de communication.

Le CICE est un levier qui met la compétitivité au service de tous. Toutes ces mesures sont engagées pour redresser notre pays. Nous souhaitons que nos entreprises se développent, investissent, innovent et embauchent. Avec ces mesures, nous refusons la fatalité ! Nous sommes volontaristes, pragmatiques (M. Jean-François Husson s’exclame.), en accompagnant l’ensemble des forces vives de la France.

« La fatalité triomphe dès lors que l’on croit en elle ! », écrivait Simone de Beauvoir. Je vous demande, mesdames, messieurs les sénatrices et sénateurs, de croire en la France et de ne surtout pas croire en la fatalité ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – Mme Françoise Laborde et M. Jean-Claude Requier applaudissent également.)