M. Robert del Picchia. Ce n’est pas sûr ! (Nouveaux sourires.)

M. Richard Yung, rapporteur spécial. Mais ce cas de figure, à supposer qu’il se présente, serait exceptionnel ; il n’est pas nécessaire de l’intégrer dans le projet de loi de finances.

D’autres facteurs sont d’ordre structurel.

Les crédits de personnel connaîtront une légère diminution du fait de la rationalisation du réseau consulaire. Toutefois, le projet de loi de finances prévoit pour la troisième année consécutive la création de vingt-cinq emplois affectés à l’instruction des demandes de visas ; au total, soixante-quinze équivalents temps plein supplémentaires auront été alloués aux services compétents. Nous nous en réjouissons, car la rapidité de délivrance des visas est une dimension importante de notre politique d’attractivité.

Monsieur le secrétaire d’État, nous comprenons bien les raisons pour lesquelles le réseau consulaire connaît des évolutions, et nous y sommes attentifs. Mais nous aimerions être informés des décisions, voire associés à la réflexion en amont. Aujourd’hui, en effet, les fermetures tombent tout d’un coup, comme du haut de l’Olympe, sans que nous, sénateurs représentant les Français de l’étranger, soyons de quelque manière prévenus. La surprise est toujours un peu désagréable, d’autant que nous devons ensuite expliquer les décisions. Nous ne demandons pas à cogérer le ministère, mais nous aimerions être avertis. Une réunion d’information sur les projets du Gouvernement pour les deux ou trois prochaines années, sachant qu’ils peuvent évidemment évoluer, pourrait, me semble-t-il, être organisée.

Parmi les facteurs d’économies figure également la réforme, intervenue au mois de juillet 2013, de la représentation des Français établis hors de France, qui s’est traduite par une économie de plus de 20 %, les crédits passant de 3,4 millions d’euros à 2,7 millions d’euros, soit une économie de 700 000 euros. Pour mémoire, cette réforme a consisté à réduire fortement le nombre des membres de l’Assemblée des Français de l’étranger, ramené de 190 à 90, à créer 160 conseils consulaires, au sein desquels siègent 443 conseillers consulaires élus, et à réviser le mode d’indemnisation des élus.

En revanche, les crédits consacrés aux bourses scolaires augmentent de 5,6 %, passant de 118 millions d’euros à 125 millions d’euros. Il s’agit d’assurer le respect d’un engagement pris par le Président de la République en 2012 : le rattrapage en trois ans, sur le budget des bourses attribuées selon des critères sociaux, de la suppression de la prise en charge automatique des droits d’inscription de tous les lycéens sans considération des revenus des familles, dont le coût s’envolait de manière inconsidérée et incontrôlable.

Je me félicite que l’engagement soit tenu, à un détail près. Du fait de l’augmentation du taux de mise en réserve des crédits, 1,2 million d’euros manqueront à l’appel. Il conviendrait sans doute de dégeler cette somme en gestion, afin de respecter l’engagement présidentiel.

Je présenterai tout à l’heure au nom de la commission des finances un amendement sur un sujet qui revient chaque année et qui nous occupe beaucoup : les ambassadeurs thématiques.

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication. Ah !

Mme Michèle André, présidente de la commission des finances. En effet, c’est un sujet !

M. Richard Yung, rapporteur spécial. Voilà deux ans, j’avais procédé à un contrôle en la matière, mais sans pouvoir présenter mon rapport en séance publique – quel dommage pour la République ! (Sourires.) – en raison du rejet de la première partie du projet de loi de finances.

J’ai également signé l’amendement qu’Éric Doligé présentera au nom de la commission des finances sur la mesure au sujet de laquelle le Gouvernement avait demandé une seconde délibération à l’Assemblée nationale.

En définitive, mes chers collègues, je suivrai avec plaisir et conviction les recommandations de la commission des finances, et je voterai les crédits de la mission ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur les travées du RDSE. – M. Aymeri de Montesquiou applaudit également.)

Mme Michèle André, présidente de la commission des finances. Bravo !

Mme la présidente. La parole est à M. Christian Cambon, rapporteur pour avis.(Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. Christian Cambon, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je présenterai les observations de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, saisie pour avis, sur le programme 105, « Action de la France en Europe et dans le monde », pour en reconnaître les vertus, mais également pour en souligner les défauts et pointer quelques incertitudes.

Ce programme, qui représente près du tiers des crédits dont dispose le Quai d’Orsay, voit sa dotation de 1,8 milliard d’euros réduite de 2,5 % par rapport à 2014, dans un contexte budgétaire particulièrement contraint.

Cette baisse tient principalement à la diminution attendue des contributions obligatoires dues par notre pays aux organisations internationales et aux opérations de maintien de la paix. De prime abord, on pourrait s’en réjouir : moins de dépenses contraintes, c’est une marge d’action nouvelle pour nos services. Néanmoins, les hypothèses sur lesquelles reposent les prévisions nous laissent sceptiques.

En particulier, l’hypothèse retenue par le Gouvernement en ce qui concerne la parité de l’euro par rapport au dollar, 1,36 dollar pour 1 euro, devra selon toute vraisemblance être révisée. L’évolution récente des taux de change montre que le taux de change devrait être moins favorable au budget des affaires étrangères.

En tenant compte du fait que les trois quarts des contributions internationales sont payés en dollars ou en devises liées au dollar, une parité égale à son niveau du mois dernier, soit 1,25 dollar pour 1 euro, porterait les besoins de financement aux environs de 875 millions d’euros, quand 795 millions d’euros seulement sont inscrits dans le projet de loi de finances. Monsieur le secrétaire d’État, nous aimerions obtenir quelques explications sur ce sujet important. (M. Robert Hue acquiesce.)

Au demeurant, à l’Assemblée nationale, en seconde délibération, le Gouvernement a abaissé de 10 millions d’euros le coût prévisionnel de ces contributions obligatoires, officiellement « grâce à une meilleure priorisation des dépenses ». Cette réduction, qui visait à assurer le financement des mesures votées par nos collègues députés, nous laisse aussi dubitatifs que nos collègues de la commission des finances.

Par ailleurs, le nouveau barème onusien des contributions obligatoires dépendra en partie de négociations qui restent à faire aboutir. Anticiper ce résultat, c’est tenir pour acquis quelque chose qui, par nature, comporte un aléa.

Enfin, en matière d’opérations de maintien de la paix, le Gouvernement prévoit des reports de charges sur l’exercice 2016. Certes, cette opération allège le fardeau pour 2015, mais ce n’est, par définition, qu’un différé de paiement. Du reste, il est bien difficile de savoir quelles nouvelles opérations devront être financées en urgence l’année prochaine.

Après avoir exposé les incertitudes, je tiens à mettre en valeur les quelques vertus de ce budget.

Le projet de loi de finances préserve les moyens de notre réseau diplomatique. Somme toute, c’est l’essentiel.

Ainsi, la sécurisation des postes est maintenue comme priorité. Nous savons gré au Gouvernement d’avoir tenu compte, en faisant ce choix primordial, du contexte sécuritaire qui se dégrade en différents points du monde, aggravant les menaces qui pèsent sur le personnel de nombreux postes diplomatiques.

Par ailleurs, les moyens de fonctionnement de nos ambassades sont en légère augmentation, de 1,5 %. Cela devrait favoriser la mue en cours de notre outil diplomatique.

Cette mue comporte le redéploiement géographique de notre outil, qui nous paraît indispensable, notamment vers les pays émergents. La marche dans cette direction se poursuit, mais elle est lente. Au 1er janvier dernier, seulement 16 % des effectifs étaient affectés en Asie, contre près de 40 % en Afrique, alors que l’Asie est le continent où les enjeux stratégiques et économiques sont désormais majeurs.

Elle vise à mobiliser nos moyens sur le terrain de la diplomatie économique, au service du soutien aux exportations françaises et de la promotion de la destination « France » auprès des investisseurs comme des voyageurs étrangers.

Cette mobilisation n’est, pour l’essentiel, pas quantifiée au plan budgétaire, ce qui peut faire obstacle à la capacité du Parlement d’apprécier, aujourd’hui, l’adéquation des moyens prévus aux objectifs fixés et, demain, l’efficience de l’action. Nous invitons donc le Gouvernement à exploiter les ressources multiples de la comptabilité analytique pour accomplir un plus grand effort d’information envers le Parlement. Du reste, le meilleur indicateur du succès dans ce domaine sera l’évolution du solde de notre balance commerciale !

Nous soutenons bien entendu cette politique, mais elle reste à consolider. Or il existe un moyen d’y contribuer à peu de frais. Monsieur le secrétaire d’État, ma corapporteur pour avis, Mme Aïchi, et moi-même nous en sommes entretenus avec vous lorsque vous nous avez fait la gentillesse de nous accueillir. Ce moyen, c’est le renforcement de l’implication de nos régions.

En effet, les régions françaises sont des acteurs de premier plan pour le soutien aux PME exportatrices, qui sont les entreprises ayant le plus besoin de soutien, dans la mesure où les grands groupes savent prendre par eux-mêmes les contacts nécessaires à l’étranger. Les régions doivent être plus systématiquement associées aux initiatives de l’État, notamment pour la préparation et la réalisation des déplacements officiels. C’est l’une des clés du redressement de notre commerce extérieur !

Je terminerai en formulant deux critiques, je le crains, aussi récurrentes que les défauts sur lesquelles elles portent.

La première vise la gestion de notre patrimoine immobilier diplomatique. Cette gestion est dynamique, mais elle repose sur un modèle qui fait dépendre l’entretien des bâtiments des recettes de cessions d’immeubles, ce qui n’est ni vertueux en termes économiques ni tenable à plus ou moins long terme. Pour ainsi dire, la France vend les « bijoux de famille », non sans alarmer les esprits. Je pense en particulier au sort réservé au palais Clam Gallas,…

M. Christian Cambon, rapporteur pour avis. … siège de l’Institut français de Vienne, que notre collègue Robert del Picchia connaît bien.

M. Jean-Yves Leconte. Tout à fait !

M. Christian Cambon, rapporteur pour avis. Cependant, les crédits n’en sont pas moins insuffisants. Nous appelons donc à leur « rebudgétisation », assortie de dotations annuelles à la hauteur des besoins. Il faut savoir entretenir le patrimoine de nos ambassades. Cela contribue au rayonnement de notre pays !

Ma seconde critique porte sur la diminution des crédits alloués à la coopération de sécurité et de défense, qui baisseront de 3,6 % l’année prochaine, après avoir déjà été réduits de 4,3 % cette année. Cette orientation ne nous paraît pas cohérente avec les ambitions affichées. Elle n’est en phase ni avec les conclusions du sommet de l’Élysée du mois de décembre 2013 ni avec l’implication de nos forces armées en opérations extérieures dans la bande sahélo-saharienne. Il y a là une forme de contradiction de notre politique étrangère, que M. le secrétaire d’État pourra peut-être nous expliquer.

Au total, malgré les réserves que j’ai exposées, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a émis un avis favorable sur l’adoption des crédits du programme 105, et de ceux de l’ensemble de la mission ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP, de l'UDI-UC et du RDSE, ainsi que sur quelques travées du groupe socialiste.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Leila Aïchi, rapporteur pour avis.

Mme Leila Aïchi, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, comme vient de le souligner Christian Cambon, la dotation pour 2015 du programme 105, « Action de la France en Europe et dans le monde », repose sur des hypothèses relatives aux contributions internationales obligatoires, qui sont autant d’incertitudes.

Des révisions seront sans doute nécessaires, notamment pour le taux de change entre l’euro et le dollar.

D’ailleurs, un tel problème affecte les dépenses du ministère des affaires étrangères au-delà des seules contributions aux organisations internationales et aux opérations de maintien de la paix, puisque sont payées en devise, en particulier en dollars, non seulement les trois quarts de ces contributions, mais également une large part des dépenses de fonctionnement du réseau et des loyers à l’étranger.

On risque donc d’assister en cours d’exercice à de nouveaux arbitrages entre postes budgétaires. C’est un point d’inquiétude, alors que ce projet de budget conserve a priori au réseau diplomatique, que ce soit pour le fonctionnement courant ou pour les importantes opérations de sécurisation, un caractère prioritaire ayant recueilli l’assentiment de la commission des affaires étrangères.

Cependant, l’orientation à la baisse des crédits prévue l’année prochaine pour le programme 105, « Action de la France en Europe et dans le monde », comme pour la mission « Action extérieure de l’État » dans son ensemble, n’est pas uniquement liée à la réduction supposée des dépenses de contributions internationales. Elle traduit aussi l’effort du ministère des affaires étrangères pour participer au redressement de nos comptes publics en poursuivant la baisse de ses effectifs.

Le plafond d’emplois retenu pour 2015 pour le programme 105, c’est-à-dire pour l’administration centrale du Quai d’Orsay et le réseau diplomatique, représente en effet une diminution de 109 équivalents temps plein travaillé. Les dépenses de personnel associées à ces effectifs enregistreront une baisse de 0,3 % par rapport à 2014. Ainsi, se poursuit une tendance engagée depuis près de dix ans. Je crois qu’il faut saluer cet effort. Mais il faut aussi faire attention ; nous sommes arrivés « à l’os », ou peu s’en faut.

Pour le reste, je partage l’ensemble des remarques, y compris critiques, que mon corapporteur a développées.

D’abord, les moyens d’entretien immobilier du ministère des affaires étrangères doivent être « rapatriés » dans le budget général, où ils pourront ainsi faire l’objet d’une programmation plus fiable que celle qu’autorise aujourd’hui le système du compte d’affectation spécial. Ces crédits doivent être abondés au niveau des besoins d’un patrimoine parfois très dégradé.

Ensuite, notre coopération de sécurité et de défense doit cesser de servir de variable d’ajustement budgétaire pour être à la hauteur des ambitions que la France place, avec raison, dans cette action. Il faut être conséquent, monsieur le secrétaire d'État !

Enfin, le redéploiement géographique du réseau diplomatique, pour adapter cet outil aux évolutions stratégiques et économiques internationales, doit être accéléré, en particulier en direction des pays émergents. En effet, cette évolution reste lente – trop lente ! –, notamment pour renforcer la présence française en Asie. Du reste, évitons une vision trop étroite de l’émergence : l’avenir, c’est aussi l’Afrique ! Je plaide pour que l’on institue une représentation permanente de plein exercice auprès de l’Union africaine.

Ce redéploiement est essentiel pour mener à bien la diplomatie économique, devenue une priorité du Quai d’Orsay, désormais dénommé « ministère des affaires étrangères et du développement international ». La maquette budgétaire pour 2015 n’a pas entièrement suivi la nouvelle organisation gouvernementale. Mais, en tout état de cause, c’est au plus près des réalités de terrain que peut se mener utilement la bataille pour le développement des entreprises françaises à l’international et la promotion de l’attractivité de notre pays auprès des investisseurs et des touristes étrangers.

Sont allées dans ce sens la création des conseils économiques des ambassades et l’insertion systématique d’un volet économique dans le plan d’action des postes. Je rejoins mon collègue pour estimer que nos régions doivent être mieux associées à cette action. Je sais que vous êtes très sensible à ce sujet, monsieur le secrétaire d'État. La nomination d’ambassadeurs pour les régions a constitué un premier pas, mais il est encore modeste.

Par ailleurs, une réflexion sur le recrutement, la carrière et la formation des diplomates semblerait fort opportune, dans la mesure où la plupart d’entre eux ne sont pas naturellement familiers du monde économique. Il conviendrait également de réviser l’organisation des services économiques à l’étranger en suivant les récentes préconisations de la Cour des comptes. En outre, la promotion du tourisme en France doit être accentuée, compte tenu des enjeux considérables qui s’attachent pour l’avenir à ce secteur.

Enfin, à mon sens, il faudrait améliorer en quantité et en qualité la présence politique de l’État que garantissent les visites officielles, en particulier ministérielles, dans les pays où les entreprises françaises sont susceptibles de se développer. Ces visites sont souvent essentielles, car elles constituent l’occasion de mettre en valeur les atouts de nos PME. Les multiplier, c’est donc ajouter à leurs chances. Encore doivent-elles être calibrées, notamment en termes de durée sur place, pour ne pas aboutir à un effet d’« attente déçue », qui serait contre-productif.

J’espère que vous saurez vous faire l’écho de cette recommandation auprès de vos collègues, monsieur le secrétaire d'État. Nous voterons ce projet de budget. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste, du groupe socialiste et du RDSE.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Legendre, rapporteur pour avis.

M. Jacques Legendre, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, mon propos portera sur le programme 185, « Diplomatie culturelle et d'influence ». Mon collègue Gaëtan Gorce traitera de la politique d’attractivité et du réseau français d’enseignement à l’étranger. Pour ma part, je commenterai les crédits destinés à l’action culturelle extérieure, à la promotion de la langue française et au tourisme.

Environ 88,5 millions d’euros sont consacrés en 2015 à l’action culturelle extérieure – hormis les crédits de promotion de la langue française, que je mets à part –, soit une enveloppe en diminution. Sur cette enveloppe, 74 millions d’euros sont des crédits de soutien, qui comprennent notamment la dotation de fonctionnement aux instituts français, en hausse de 2 millions d’euros, et la dotation de fonctionnement à l’Institut français, opérateur de l’action culturelle extérieure, en baisse de 9,5 millions d’euros par rapport au montant inscrit l’année dernière.

Cependant, en 2014, cette dotation a été diminuée en gestion du fait de l’abandon du projet de rattachement du réseau culturel. En pratique, la subvention ne baisse que de 0,6 million d’euros, soit 2,1 %, ce qui est conforme la norme de diminution fixée par Bercy pour tous les opérateurs de l’État. Le reste, soit environ 14,5 millions d’euros, correspond à des crédits d’intervention destinés au financement d’une grande variété d’actions et de projets – expositions, salons, festivals, soutien à des associations locales, études… – principalement mis en œuvre par les instituts français.

On le voit, il s’agit de moyens limités, et les instituts français, tout comme l’Institut français, doivent s’efforcer de trouver des partenariats et des cofinancements pour compléter les crédits d’intervention, qui jouent avant tout un rôle de levier.

En ce qui concerne l’Institut français et le réseau culturel public, je voudrais revenir sur un projet qui me tenait à cœur beaucoup et qui n’a malheureusement pas abouti : le rattachement du réseau des instituts français à l’opérateur Institut français.

Le projet avait été suggéré par la commission de la culture et la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat. Tel que nous avions conçu le projet, l’Institut français avait vocation à prendre la tête du réseau des instituts français, et se rapprocher ainsi du modèle de British Council ou du Goethe Institut.

Malheureusement, une expérimentation menée entre 2012 et 2013 avec une douzaine de postes a été suspendue l’année dernière. Il a été finalement décidé d’abandonner ce projet, plusieurs rapports ayant mis en avant son coût et des difficultés pratiques tenant notamment au fait que les instituts français n’interviennent pas seulement en matière de coopération culturelle, mais travaillent également pour le compte d’autres opérateurs.

Je peux l’entendre, mais je regrette que cette expérimentation ait été réalisée sur une période aussi courte, de dix-huit mois, alors qu’elle était initialement prévue pour trois ans. Au surplus, pendant cette période, il y a eu une autre réforme : la fusion des services de coopération et d’action culturelle, les SCAC. Cela n’a pas simplifié les choses. J’ai le sentiment que cela n’a pas été bien compris par une partie de nos diplomates.

Résultat, l’Institut français, qui était en quelque sorte « programmé » pour absorber le réseau et qui s’était doté des outils administratifs et comptables pour y faire face, se retrouve à la fois avec une structure inutilement lourde à gérer et en manque de missions, même si le ministère lui a promis un nouveau positionnement.

L’élaboration d’un nouveau contrat d’objectifs et de moyens, que nous attendons, doit être l’occasion de redéfinir ces missions, ce qui devrait conduire, nous le souhaitons, à conforter son rôle de stratège.

D’un montant d’environ 22 millions d’euros, les crédits destinés à la promotion de la langue française sont, je tiens à le souligner, en augmentation de 5 %. Sur cette enveloppe, 7 millions d’euros sont destinés au réseau des Alliances françaises, dont 1,35 million d’euros pour la fondation Alliance française et 5,67 millions d’euros pour les alliances françaises locales.

Le reste des crédits consacrés à cette politique finance divers programmes et activités portés par les autres acteurs du réseau culturel et divers partenaires du ministère. Je le rappelle, avec 220 millions de locuteurs francophones – nous sommes au lendemain d’un sommet de la francophonie –, le français est aujourd’hui la neuvième langue parlée dans le monde. Mais il reste souvent la deuxième langue de travail dans les grandes organisations internationales, comme l’ONU. La question de sa place dans le monde et de son éventuel déclin est un sujet sensible, très débattu, qui fait l’objet d’appréciations divergentes. Ce qui est certain, c’est qu’il s’agit d’un vecteur d’influence à ne pas négliger.

Pour finir, je dirai un mot du tourisme, dont la promotion fait désormais partie du programme. Les crédits prévus en la matière sont exclusivement destinés au versement de la subvention de fonctionnement d’Atout France. Comme un certain nombre d’opérateurs, Atout France voit sa subvention baisser depuis plusieurs années, ce qui pose problème. Compte tenu des restructurations intervenues depuis dix ans, l’organisme ne dispose plus vraiment de marges d’optimisation. Il est contraint de trouver toujours plus de financements extérieurs alors même que les défis à relever sont nombreux – l’attractivité des territoires est très inégale, notre parc hôtelier se dégrade… – et qu’il nous faut supporter la concurrence de plus en plus vive d’autres destinations touristiques.

Le développement touristique fait désormais partie des priorités de la diplomatie d’influence, dont le champ d’action ne cesse de s’étendre. Donnons à notre volonté politique la capacité financière de se réaliser.

Sous ces réserves, je recommande l’adoption des crédits. (Applaudissements sur les travées de l'UMP, de l'UDI-UC et du RDSE, ainsi que sur quelques travées du groupe socialiste.)

Mme la présidente. La parole est à M. Gaëtan Gorce, rapporteur pour avis.

M. Gaëtan Gorce, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la France est-elle encore fière de sa langue ? C'est la question que posait Jacques Legendre. Est-elle prête à se donner les moyens de défendre cette belle langue et de s'en servir pour soutenir le projet politique qu’elle est censée incarner ?

Je ne suis pas sûr que ce budget permette de répondre à une aussi importante question. Mais il va tout de même nous y aider un peu, sachant qu’il était difficile d’aller plus loin dans le contexte actuel.

Compte tenu du partage des responsabilités que Jacques Legendre et moi-même avons décidé, il me revient d’évoquer deux composantes de ce programme 185, « Diplomatie culturelle et d'influence » : les crédits consacrés à l'enseignement supérieur et à la recherche, d’une part, et ceux qui sont consacrés à l’enseignement du français à l’étranger, d’autre part.

Sur le premier volet, les crédits progressent de 5 % pour s'établir à 106 millions d’euros. Ils concernent de nombreuses activités, en particulier l’accueil d’étudiants étrangers en France. De ce point de vue, on notera que la France accueille presque 300 000 étudiants étrangers. Ce nombre, en progression régulière, a augmenté de près de 30 % en 10 ans, les principaux pays d’origine restant le Maroc et la Chine. En tant que pays d’accueil, la France repasse désormais au troisième rang mondial, devant l’Australie, qui, elle, retrouve donc son quatrième rang.

Les étudiants étrangers représenteraient 12 % de nos effectifs globaux, ce qui n’est pas négligeable. Mais ils représentent surtout 40 % de nos doctorants, ce qui montre l’importance de leur implication dans les études de fin de cycle universitaire.

Pour soutenir l’accueil de ces étudiants, nous disposons notamment de deux types d’outils : Campus France, la plate-forme chargée d’organiser leur accueil, dont les crédits accusent malheureusement une baisse de 2 %, et nos bourses universitaires, qui bénéficient à environ 15 000 étudiants et progressent d’environ 5 %, même si nous sommes loin des montants qui existaient voilà une dizaine d’années.

Les crédits destinés à la recherche sont globalement stables. Avec un million d’euros supplémentaires, ils connaissent même une légère progression, de 3 %. On soulignera que les dotations versées aux vingt-sept instituts de recherche à l’étranger n’évoluent pas. Nous pouvons nous féliciter qu’ils ne soient pas touchés par les mesures de réduction des crédits.

L’enseignement du français à l’étranger mobilise plus de 327 000 élèves – là encore, le chiffre est en progression régulière – et 494 établissements dans plus de 135 pays. La France intervient pour l’essentiel par le financement de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, l’AEFE, qui, avec des crédits en baisse de 2 %, se voit malheureusement appliquer le rabot destiné aux crédits concernant l’ensemble des activités administratives. Nous le regrettons naturellement.

En revanche, les crédits dédiés aux bourses affichent, eux, une progression significative. Mais ils relèvent d’un autre programme : le programme n°151, « Français à l'étranger et affaires consulaires ».

On peut évidemment regretter que les moyens conférés à l’AEFE soient en léger retrait – on sait les difficultés que rencontrent tous les établissements concernés –, même si, en jouant sur les conventionnements et les partenariats, un équilibre peut être recherché en renforçant la présence sans pour autant augmenter les moyens.

La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a émis un avis favorable sur les crédits du programme 185 et vous invite à les adopter. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe écologiste et du RDSE.)