M. Jean-Jacques Hyest. Je suis d’accord avec les propos tenus par M. Roche, mais pourquoi légiférer de nouveau à tout prix ? Est-ce parce que l’on n’a pas été en mesure de développer une offre de soins palliatifs suffisante ? S’agit-il de protéger les médecins ? Il faut le dire, alors !

M. Michel Amiel, corapporteur. Je l’ai dit trois fois !

M. Jean-Jacques Hyest. Personnellement, j’ai voté la loi Leonetti, en croyant que l’on était enfin parvenu à un équilibre. La fin de vie, comme la vie même, n’est pas un processus continu : un jour, on peut beaucoup souffrir, au point de souhaiter mourir, et aller mieux le lendemain. Certains invoquent le droit absolu de chacun à mourir, mais alors c’est du suicide dont on parle.

Certaines dispositions de l’article 3 me conviennent, mais à quel moment le nouveau droit ouvert au patient va-t-il s’exercer ? Ce qu’a dit Philippe Bas est juste : on imagine mal un médecin informer son patient qu’il est en phase terminale, pour qu’il puisse donner son consentement éclairé à la mise en en œuvre d’une sédation profonde. Ce n’est pas ainsi que les choses se passent dans la réalité !

Je crois beaucoup à l’esprit de responsabilité des équipes médicales, à l’éthique et à la déontologie des médecins. Ce que je craindrais le plus, c’est que l’on substitue, dans certaines circonstances, la sédation profonde aux soins palliatifs. C’est pour cette raison que la présente proposition de loi me laisse très circonspect. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – MM. Gérard Barbier et Yves Pozzo di Borgo applaudissent également)

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Amiel, corapporteur.

M. Michel Amiel, corapporteur. Effectivement, alors que la société et la médecine sont de plus en plus judiciarisées, le législateur se doit de penser aux médecins. Comme je l’ai dit cette nuit, il faut certes protéger le patient, mais aussi le médecin, son entourage, ainsi que la société. Un acte aussi important que la mise en place d’une sédation profonde, qui, je le rappelle, fait partie de l’arsenal thérapeutique en matière de soins palliatifs, doit être encadré.

À la suite de M. Roche, je voudrais revenir sur la façon dont les choses se passent véritablement, sur le plan clinique.

Nous discutons d’un amendement qui vise à supprimer le caractère continu de la sédation. Peut-on raisonnablement imaginer, sur un plan médical ou tout simplement humain, que l’on pourrait à un moment donné réveiller un patient qui souffre, qui va bientôt mourir, pour lui demander s’il est bien certain de vouloir que la sédation soit poursuivie ?

M. Philippe Bas. Ce n’est pas de cela qu’il s’agit !

M. Gérard Dériot, corapporteur. Si !

M. Michel Amiel, corapporteur. Mais si ! Je suis désolé, mais c’est ce à quoi aboutirait l’adoption de l’amendement !

M. Philippe Bas. Pas du tout !

M. Michel Amiel, corapporteur. On ne le rappellera jamais assez : il est question ici de la fin de vie, qui n’est pas une notion aussi floue que certains veulent bien le dire ; la mort survient dans les quelques heures ou jours qui suivent. On a parlé de faire confiance au corps médical : les médecins savent très bien, à peu de chose près, à quel moment le décès interviendra.

Gérard Dériot s’exprimera peut-être plus longuement sur les directives anticipées, mais en tout état de cause la sédation profonde sera mise en place, bien évidemment, à la demande clairement exprimée du patient.

Il faut bien entendu dire la vérité au patient. Les directives anticipées peuvent être le moyen de signifier ses volontés lorsque l’on est encore bien portant. Cette nuit, je disais que la perception des choses change à l’approche de la mort. Pour autant, est-il concevable de réveiller le patient au tout dernier moment pour l’informer de l’imminence de son décès et lui demander s’il est bien certain de vouloir maintenir son choix précédemment exprimé ? Je suis désolé, mais dans la vie, les choses ne se passent pas ainsi ! Comme je le rappelais tout à l’heure en lisant le texte de la Société française d’accompagnement et de soins palliatifs, la sédation profonde et continue fait bien partie de l’arsenal qu’il est possible de mettre en œuvre. Depuis longtemps, nous médecins y recourons régulièrement dans des conditions bien précises, mais nous avons besoin que celles-ci soient encadrées par la loi. Voilà pourquoi j’en suis venu à considérer que la loi Leonetti n’était pas suffisante, comme le reconnaît d’ailleurs lui-même son auteur.

En conclusion, supprimer le caractère continu de la sédation ne serait ni raisonnable ni humain.

Sur la forme, enfin, je pense avoir été très courtois au cours de ce débat, même si je défends avec force mes convictions. Certains arguments ont été qualifiés aujourd’hui de byzantins, mais hier les miens étaient traités d’arguties… (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe CRC et du groupe écologiste.)

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Tout ce qui a été dit est vrai. On peut s’interroger sur l’utilité de cette proposition de loi, mais alors il aurait fallu déposer une motion tendant à opposer la question préalable. Gérard Roche a parlé d’expérience, les médecins côtoyant chaque jour la mort.

C’est la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé qui, la première, a autorisé les patients à refuser la poursuite de soins. Rapidement, on s’est aperçu que l’arrêt des soins à la demande du patient devait s’accompagner de la mise en place de traitements visant à lui épargner la souffrance. Je vous renvoie aux positions d’Axel Kahn sur ce sujet.

La loi Leonetti a reconnu, chose extrêmement importante que nous n’avons guère évoquée, le double effet : la mise en place de certains types de traitements peut constituer un accompagnement vers la mort.

La présente proposition de loi vise non pas à ouvrir la voie à l’euthanasie, mais à permettre l’accompagnement de malades en fin de vie. Notre collègue de Legge propose de supprimer le caractère continu de la sédation profonde. Dans ce cas, le médecin devra réveiller périodiquement son patient. (M. Dominique de Legge le conteste.) Mais si, telle est la réalité ! Si la sédation n’est pas continue, cela signifie qu’elle doit être interrompue de temps en temps.

M. Gilbert Barbier. C’est de la caricature !

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Non, ce n’est pas de la caricature ! Une sédation profonde non continue implique de réveiller le patient, ce qui n’est pas du tout conforme à la déontologie médicale, surtout quand il s’agit des dernières heures de la vie d’une personne qui souffre, physiquement et moralement. Si l’on adopte la proposition de notre collègue, je ne sais pas comment les spécialistes appliqueront ensuite la sédation profonde non continue.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote sur l’amendement n° 59 rectifié bis.

M. Daniel Chasseing. Comme l’ont dit Gérard Roche et le président de la commission, il faut faire confiance aux praticiens. Un médecin qui aura mis en place une sédation profonde ne l’interrompra pas. C’est absolument impossible !

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Donc, elle est continue !

M. Daniel Chasseing. Même si l’on supprime l’adjectif « continue » dans le texte, le médecin ne sera pas obligé d’interrompre le traitement sédatif : une telle affirmation relève de la caricature.

La loi Leonetti est un très bon texte, qui permet déjà d’augmenter les doses de morphine et de valium administrées à un patient en fin de vie tout en informant la famille des effets secondaires probables. Aucun médecin ne réduira les doses alors que le malade souffre et que son état s’aggrave, même si l’on supprime le caractère continu de la sédation. (Applaudissements sur certaines travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Evelyne Yonnet, pour explication de vote.

Mme Evelyne Yonnet. Pour des raisons tout à fait personnelles, je suis ce débat avec beaucoup d’attention et d’intérêt.

J’ai le sentiment que l’on en vient à oublier le malade. Nous parlons pourtant des droits du malade en fin de vie. C’est lui qui décide, ce n’est pas le corps médical ; le corps médical est là pour l’accompagner. Cette proposition de loi vise à attribuer de nouveaux droits aux personnes en fin de vie, afin de leur éviter de souffrir. Or si la sédation n’est pas continue, le patient se réveillera et souffrira. (Marques de dénégation sur les travées du groupe Les Républicains.) Mais si ! En fait, vous n’acceptez pas que l’on accorde au patient en fin de vie le droit nouveau qui fait l’objet de cette proposition de loi. Le meilleur médecin dans ces circonstances, c’est le patient lui-même ; il sait qu’il est en fin de vie. Le rôle du médecin consiste avant tout à l’accompagner. Je ne comprends pas cette discussion. Il faut maintenir le caractère continu de la sédation.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 59 rectifié bis.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Bruno Gilles, pour explication de vote sur l'amendement n° 4 rectifié.

M. Bruno Gilles. Je voudrais revenir sur la seconde partie de cet amendement, ayant obtenu tout à l’heure des réponses sur la question des traitements de maintien en vie et des traitements thérapeutiques.

Nous sommes plusieurs à proposer une rédaction différente de l’alinéa 4. Dans le cas de patients en état d’exprimer leur volonté, la poursuite de traitements de maintien en vie fondés sur une obstination déraisonnable relève davantage de l’empathie que de l’objectivité, même si on peut la comprendre. En revanche, dans les services de pointe où sont disponibles des technologies très performantes, comme au sein de l’Assistance publique-Hôpitaux de Marseille, par exemple, il est facile d’évaluer la souffrance des patients. Néanmoins, ces technologies très performantes n’existent pas partout et nous avons souligné hier le manque de places et de moyens.

Deux cas doivent donc être distingués, selon que des technologies très performantes sont disponibles ou pas. Tout à l’heure, il a été dit qu’il fallait penser au patient, certes, mais aussi au médecin. Celui-ci peut se trouver dans une situation où il doit fonder sa décision sur les seules dispositions anticipées du patient, mais qui peut vraiment s’autoriser à décider de mettre un terme à la vie d’autrui sans que l’intéressé en ait fait explicitement la demande ? Agir autrement correspondrait à une euthanasie ou à un « suicide assisté », que la plupart d’entre nous ont entendu exclure. C’est sur ce point que porte notre débat de cet après-midi. Nous proposons que, en l’absence de dispositions anticipées du patient, le médecin devra seul s’assurer que le pronostic vital est engagé à court terme.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 4 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 5 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote sur l'amendement n° 49 rectifié.

M. Daniel Chasseing. Je maintiens cet amendement, car il me semble nécessaire de préciser, dans la rédaction de l’article 3, que l’hydratation peut être poursuivie durant la sédation profonde et continue.

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Je rappelle que, hier soir, nous avons inscrit cette précision au sein de l’article 1er. Il n’est peut-être pas nécessaire de rappeler à chaque article que l’hydratation artificielle peut être poursuivie…

Mme la présidente. Monsieur Chasseing, l'amendement n° 49 rectifié est-il maintenu ?

M. Daniel Chasseing. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L'amendement n° 49 rectifié est retiré.

La parole est à Mme Dominique Gillot, pour explication de vote sur l'amendement n° 102 rectifié.

Mme Dominique Gillot. Je maintiens cet amendement, qui vise à affirmer un droit nouveau pour les patients. Certains malades peuvent juger, sans être forcément en fin de vie, que celle-ci ne vaut plus d’être vécue et souhaiter partir dignement. L’exercice de ce droit serait bien sûr entouré de toutes les garanties nécessaires.

Comme je l’ai déjà souligné, nos concitoyens ont une grande confiance dans les médecins, et cette confiance oblige ces derniers. Il ne s’agit pas, pour autant, de les contraindre à accomplir des gestes auxquels leur conscience se refuserait, mais, dans des cas rares, il arrive, on le sait, qu’un médecin accède à la demande fondamentale d’un patient de lui administrer un traitement qui accélère la survenue de la mort.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 102 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Monsieur de Legge, l'amendement n° 60 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Dominique de Legge. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L'amendement n° 60 rectifié bis est retiré.

Monsieur Chasseing, l'amendement n° 50 rectifié est-il maintenu ?

M. Daniel Chasseing. Dès lors que la sédation sera continue jusqu’au décès…

Mme la présidente. Mon cher collègue, je vous rappelle que, à la suite de l’adoption de l’amendement n° 59 rectifié bis, le texte ne prévoit plus que la sédation sera continue.

M. Daniel Chasseing. Dans ces conditions, je retire l’amendement.

Mme la présidente. L'amendement n° 50 rectifié est retiré.

Monsieur de Legge, l'amendement n° 61 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Dominique de Legge. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L'amendement n° 61 rectifié bis est retiré.

Monsieur Barbier, l'amendement n° 74 rectifié est-il maintenu ?

M. Gilbert Barbier. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L'amendement n° 74 rectifié est retiré.

Madame Duranton, l'amendement n° 25 rectifié est-il maintenu ?

Mme Nicole Duranton. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L'amendement n° 25 rectifié est retiré.

Je mets aux voix l'amendement n° 51 rectifié bis.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique de Legge, pour explication de vote sur l'amendement n° 62 rectifié bis.

M. Dominique de Legge. Je rectifie cet amendement, pour supprimer le mot « très ».

Mme la présidente. Je suis donc saisie d’un amendement n° 62 rectifié ter, présenté par MM. de Legge, Sido, Reichardt, Morisset, Mandelli, Revet, de Nicolaÿ, D. Laurent, G. Bailly, B. Fournier, Pierre, Leleux et Chaize, Mme Gruny, M. de Raincourt, Mmes Canayer et Duchêne, MM. Bizet et Buffet, Mme Cayeux, MM. Trillard et Portelli, Mmes di Folco et Duranton, MM. Huré, Kennel et Pozzo di Borgo, Mme Des Esgaulx, M. J.P. Fournier, Mme Deromedi, MM. Vasselle, Bignon, Pointereau, Vaspart, Hyest et Mouiller, Mme Mélot, MM. Retailleau, Mayet et Charon, Mme Deroche, MM. Husson, Houel et Gournac, Mmes Debré et Lamure et MM. Kern, Cardoux et Guerriau, et ainsi libellé :

Alinéa 4

Après les mots :

le patient

insérer les mots :

, dont le pronostic vital est engagé à court terme,

Quel est l’avis de la commission sur cet amendement ainsi rectifié ?

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. La commission maintient l’avis défavorable qu’elle avait émis sur l’amendement n° 62 rectifié bis.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Le Gouvernement maintient également son avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Bas, pour explication de vote.

M. Philippe Bas. L’alinéa 4 vise le cas de figure où le patient est non pas en situation d’agonie, mais dans un état végétatif. Il n’est pas en mesure d’exprimer sa volonté, et c’est au titre du refus de l’obstination déraisonnable que serait appliquée une sédation profonde.

Si l’on ajoute que le pronostic vital doit être engagé à court terme, l’alinéa 4 ne se justifie plus. En effet, le dispositif de la sédation profonde ne concernera plus que les patients à l’agonie. De ce fait, il me semble que l’adoption de cet amendement créerait de la confusion.

Mme la présidente. Monsieur de Legge, l'amendement n° 62 rectifié ter est-il maintenu ?

M. Dominique de Legge. Non, je le retire, madame la présidente. Les excellents arguments de M. Bas m’ont convaincu.

Mme la présidente. L'amendement n° 62 rectifié ter est retiré.

La parole est à Mme Dominique Gillot, pour explication de vote sur l'amendement n° 37 rectifié.

Mme Dominique Gillot. Je maintiens également cet amendement. Il s’agit de réaffirmer que la volonté du patient prime sur celle des médecins.

Je préconise que la procédure collégiale ne s’impose que si le malade est hors d’état d’exprimer sa volonté et s’il n’a pas rédigé de directives anticipées. Sinon, la responsabilité de la décision reviendra forcément au médecin.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 37 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique de Legge, pour explication de vote sur l'amendement n° 83 rectifié.

M. Dominique de Legge. Pour ma part, je voterai cet amendement, qui me semble aller tout à fait dans le sens évoqué par Mme David.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 83 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Monsieur de Legge, les amendements nos 63 rectifié bis et 68 rectifié bis sont-ils maintenus ?

M. Dominique de Legge. Je suis disposé à les retirer, sous réserve que le Gouvernement nous apporte des garanties sur le suivi médical de la sédation, notamment lorsqu’elle sera mise en œuvre à domicile. Je souhaiterais que Mme la ministre prenne des engagements très clairs sur ce point.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marisol Touraine, ministre. Monsieur le sénateur, l’un des objectifs du plan triennal de développement des soins palliatifs est précisément de permettre à des personnes en fin de vie qui souhaitent rester chez elles de bénéficier des services de structures de soins palliatifs.

De telles structures existent déjà. Leurs équipes se rendent au domicile des malades pour leur apporter un encadrement, un accompagnement à la fois médicalisé et psychologique. Il ne s’agit nullement de laisser la personne seule ! La solution peut être l’hospitalisation à domicile ou le recours à des structures spécifiques de soins palliatifs intervenant au domicile ou au sein des EHPAD. Aujourd’hui, l’accompagnement à domicile ou en EHPAD des personnes en fin de vie n’est clairement pas satisfaisant. Il est, de plus, très insuffisamment proposé.

Je le répète, il ne s’agit en aucun cas de nier la nécessité d’un accompagnement, bien au contraire : l’objectif est de permettre aux malades de rester chez eux, dans un environnement serein et familier, lorsque l’hospitalisation ne leur apporte plus rien, aucune issue thérapeutique n’étant possible.

Mme la présidente. Monsieur de Legge, qu’en est-il finalement des amendements nos 63 rectifié bis et 68 rectifié bis ?

M. Dominique de Legge. Au bénéfice de ces explications, je retire ces deux amendements, madame la présidente.

Mme la présidente. Les amendements nos 63 rectifié bis et 68 rectifié bis sont retirés.

Madame Duranton, l’amendement n° 23 rectifié est-il maintenu ?

Mme Nicole Duranton. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 23 rectifié est retiré.

Je mets aux voix l'amendement n° 52 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Monsieur Revet, l’amendement n° 7 est-il maintenu ?

M. Charles Revet. On le voit bien, des interrogations subsistent. Le Conseil national de l’Ordre des médecins a certes été consulté, mais sur la proposition de loi initiale, c’est-à-dire sur le texte qui avait été déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale.

M. Alain Gournac. Tout à fait !

M. Charles Revet. En conséquence, je maintiens mon amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Amiel, corapporteur.

M. Michel Amiel, corapporteur. L’article 47 du code de déontologie est tout à fait clair sur ce point : « Hors le cas d’urgence et celui où il manquerait à ses devoirs d’humanité, un médecin a le droit de refuser ses soins pour des raisons professionnelles ou personnelles. »

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Monsieur Revet, le caractère continu de la sédation ayant été supprimé, ce qui fragilisera d’ailleurs considérablement la position des médecins, au point qu’il n’est pas certain qu’ils persistent à la pratiquer, la clause de conscience prévue par votre amendement n’est plus nécessaire.

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Bas, pour explication de vote sur l’amendement n° 7.

M. Philippe Bas. Je voudrais rassurer M. le président de la commission des affaires sociales : la rédaction que nous avons adoptée n’empêchera pas que la sédation soit continue jusqu’au décès ; simplement, cela ne devra pas nécessairement être le cas.

M. Philippe Bas. Il me semble qu’un profond malentendu existe dans ce débat.

M. Charles Revet. Tout à fait !

M. Philippe Bas. La sédation profonde, mise en œuvre en ultime recours, quand tous les autres soins palliatifs ont échoué, se poursuivra très généralement jusqu’au décès. Bien souvent, en pratique, la question ne se posera même pas.

M. Charles Revet. Je retire l’amendement, madame la présidente !

Mme la présidente. L’amendement n° 7 est retiré.

Monsieur de Legge, l’amendement n° 64 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Dominique de Legge. Pour les raisons que M. Bas vient d’exposer, je retire cet amendement, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 64 rectifié bis est retiré.

La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote sur l'article.

M. René-Paul Savary. Ce débat exige de notre part beaucoup d’humilité.

J’ai consulté le compte rendu de l’audition du 15 avril dernier d’Alain Claeys et de Jean Leonetti, pour essayer de déterminer si nous avions progressé sur ce sujet de la sédation profonde et continue.

En accord avec la Société française d’accompagnement et de soins palliatifs, M. Leonetti avait rappelé que l’on a « le droit de dormir pour ne pas souffrir avant de mourir », le principe étant que le malade n’est pas obligé d’assister au « drame tragique » de sa mort. La sédation continue jusqu’au décès pouvait être mise en place à condition que la mort soit imminente et que la souffrance du malade soit réfractaire à tout autre traitement. Je ne suis pas convaincu que le présent texte marque une progression.

Jean Leonetti disait que la sédation profonde et continue est déjà pratiquée dans certains services hospitaliers, mais pas à domicile ou dans les EHPAD. Or cette proposition de loi ne changera rien de ce point de vue, puisque des moyens supplémentaires ne seront pas alloués pour que chacun soit à égalité face à ce droit, devenu opposable, des malades à ne pas souffrir.

On peut se donner bonne conscience en soulignant des avancées que certains jugent significatives, mais rien ne changera en termes de résorption des inégalités entre les patients selon leur lieu de résidence, selon les territoires.

C’est pourquoi je ne suis toujours pas persuadé de la nécessité de toucher à la loi Leonetti. (Mmes Dominique Gillot et Michelle Meunier s’exclament.) Dans le droit fil de mes votes précédents, je m’abstiendrai donc sur cet article 3.

Mme la présidente. La parole est à M. Georges Labazée, pour explication de vote.

M. Georges Labazée. En raison de l’adoption de l’amendement n° 59 rectifié bis, les membres du groupe socialiste et républicain ne voteront pas l’article 3, le caractère continu de la sédation étant à leurs yeux un élément central.

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.

Mme Annie David. J’abonde dans le sens de Georges Labazée : la suppression du caractère continu de la sédation dénature complètement le dispositif. C’est pourquoi les membres du groupe CRC voteront contre l’article 3.

Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Bouchoux, pour explication de vote.

Mme Corinne Bouchoux. Peut-être ai-je mal lu, mais je ne retrouve pas dans le texte la notion de droit opposable. De ce fait, la polémique à laquelle nous avons assisté ne me semble pas justifiée. Je me permettrai de le signaler à M. Hyest, pour qui j’ai beaucoup d’amitié : au travers de cet article, il ne s’agit pas de créer un droit opposable. Une confusion me paraît s’être produite sur ce point. J’aimerais que Mme la ministre nous apporte des précisions. Cela pourrait lever pour partie les réserves de la commission des lois.

Par ailleurs, l’adoption de l’adoption n° 59 rectifié bis constitue un recul par rapport à une rédaction qui nous semblait déjà représenter un minimum. Dans ces conditions, avec la meilleure volonté du monde, le groupe écologiste ne pourra voter cet article.

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Monsieur Savary, j’en conviens, les dispositions législatives n’auront, en définitive, pas beaucoup évolué. Hier soir, nous avons déjà évoqué la nécessité de généraliser la mise en œuvre des soins palliatifs dans tous les services hospitaliers, dans les EHPAD et à domicile, par l’intermédiaire de l’hospitalisation à domicile ou par d’autres biais.

Des amendements sur ce sujet présentés par des membres du groupe auquel vous appartenez ont été adoptés. Pour que leurs dispositions puissent être appliquées, il faudra voter les budgets nécessaires. (M. Bruno Retailleau acquiesce.) Nous en reparlerons donc lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Des lits de soins palliatifs doivent enfin être installés dans l’ensemble de nos territoires !

Madame la présidente, je sollicite une suspension de séance d’une dizaine de minutes avant que n’intervienne le vote sur l’article 3.

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Amiel, corapporteur.

M. Michel Amiel, corapporteur. À mon sens, il est exagéré d’affirmer que la suppression du caractère continu de la sédation a dénaturé cet article.

Le médecin aura la possibilité de mettre en œuvre une sédation profonde, mais celle-ci ne sera pas automatiquement continue. Sa position s’en trouvera certes fragilisée, mais l’esprit du texte demeure, ainsi que la volonté de soulager le patient en fin de vie, selon des modalités bien connues du corps médical. Par conséquent, je regrette que les tenants de l’euthanasie se prononcent contre le présent article.

Pour le reste, je le redis encore une fois, il s’agit de fin de vie à court terme et de souffrances réfractaires à tout autre traitement. À cet égard, cette proposition de loi consolide bel et bien la loi Leonetti, conformément au souhait de son auteur lui-même.

Il faut ouvrir la possibilité de finir ses jours ailleurs qu’à l’hôpital, par exemple en EHPAD ou à domicile. (MM. Louis-Jean de Nicolaÿ et Dominique de Legge opinent.) C’est, de très loin, le meilleur moyen d’inciter le Gouvernement à déployer les moyens nécessaires, dans le cadre du plan triennal annoncé.