Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Procaccia, rapporteur. La représentation des salariés des TPE doit rester externe à ces entreprises – c’est là l’esprit du présent projet de loi – et les CPRI ne doivent pas s’immiscer dans leur fonctionnement quotidien. Leur accorder des compétences équivalant à celles des délégués du personnel serait donc étrange. Cela n’atténuerait en rien les craintes des employeurs et dévaloriserait, d’une certaine façon, le rôle des desdits délégués.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Rebsamen, ministre. L’avis est défavorable.

Tout à l’heure, madame Cohen, j’ai entendu, émanant de votre groupe, de virulentes critiques sur ce texte, et voilà que vous proposez maintenant d’étendre les attributions des commissions paritaires régionales…

Mme Laurence Cohen. Il s’agit d’améliorer le dispositif !

M. François Rebsamen, ministre. Quoi qu'il en soit, votre proposition revient sur un point d’équilibre du texte. Les membres des CPRI n’ont pas vocation à jouer le rôle de délégués du personnel, je l’ai dit. Si nous avions voulu qu’il y ait des délégués du personnel dans les TPE, nous aurions abaissé le seuil d’effectif à partir duquel ils sont désignés. Or ce projet de loi ne le prévoit pas.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 190.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de six amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L’amendement n° 59 rectifié bis est présenté par MM. Gabouty et Bockel, Mme Billon, MM. Cadic et Canevet, Mmes Doineau et Gatel, M. Guerriau, Mme Jouanno et MM. Kern, Luche et L. Hervé.

L’amendement n° 278 rectifié quater est présenté par MM. Lemoyne et Morisset, Mme Imbert, MM. Cornu, Calvet, Chatillon, Vaspart, P. Dominati et del Picchia, Mme Micouleau, M. Revet, Mme Morhet-Richaud, M. Nougein, Mme Bouchart et MM. Mandelli, Longuet, Pierre, Grand, Chaize, Lefèvre, Pellevat, Darnaud, Genest et Gremillet.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 32

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Jean-Marc Gabouty, pour présenter l’amendement n° 59 rectifié bis.

M. Jean-Marc Gabouty. Les membres des CPRI ne peuvent visiter les entreprises de leur ressort que sous deux conditions : autorisation accordée par l’employeur et signifiée par courrier recommandé avec accusé de réception ; respect d’un délai de prévenance. Ce sont là de louables précautions.

Il reste que, si l’employeur n’accorde pas cette autorisation, cela pourra lui être opposé pour contester sa bonne foi dans le cadre d’une procédure ou d’un conflit.

C’est la raison pour laquelle il me semble nécessaire de supprimer cet alinéa.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, pour présenter l’amendement n° 278 rectifié quater.

M. Jean-Baptiste Lemoyne. La rédaction de cet alinéa telle qu’elle est issue du travail de Mme la rapporteur est indéniablement plus satisfaisante que celle, très impérative, de l’Assemblée nationale, qui disposait : « Les membres de la commission ont, pour l’exercice de leurs fonctions, accès aux entreprises, sur autorisation de l’employeur. » La rédaction de notre commission réaffirme le principe selon lequel ces membres « n’ont, pour l’exercice de leurs fonctions, pas accès aux locaux des entreprises, sauf autorisation expresse et écrite de l’employeur ».

Néanmoins, il nous semble que, du fait du rejet des amendements visant à rétablir la mission de médiation, à laquelle cette faculté de pénétrer dans l’entreprise apparaît liée, cet alinéa n’est plus nécessaire.

En outre, il pourrait donner lieu à des contentieux. Que se passera-t-il, en effet, lorsque sera contesté le refus d’un chef d’entreprise de laisser un membre de la CPRI accéder à ses locaux ? Ne nous plaçons pas dans la main des juges : ceux-ci établiront à ce sujet une jurisprudence sur laquelle le législateur n’aura plus son mot à dire.

Les cosignataires de cet amendement proposent d’en rester à l’esprit et à la lettre du projet de loi tel qu’il avait été présenté par le Gouvernement, en excluant que les membres de la CPRI puissent pénétrer dans l’entreprise.

Mme la présidente. L’amendement n° 84, présenté par Mmes Schillinger, Bricq et Emery-Dumas, MM. Bérit-Débat et Caffet, Mmes Campion, Claireaux et Génisson, MM. Daudigny, Durain, Godefroy, Jeansannetas et Labazée, Mmes Meunier, Riocreux et Yonnet, MM. Tourenne, Vergoz et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 32

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Art. L. 23-113-2. – Les membres de la commission ont, pour l’exercice de leurs fonctions, accès aux entreprises sur autorisation de l’employeur.

La parole est à Mme Patricia Schillinger.

Mme Patricia Schillinger. Cet amendement tend à supprimer les formalités prévues dans le texte adopté par la majorité de notre commission.

Sur le fond, nous sommes d’accord pour que les membres de la CPRI puissent accéder à l’entreprise si l’employeur les y autorise. Nous proposons toutefois de revenir à un texte plus simple, n’exigeant ni autorisation nécessairement écrite ni délai préalable de huit jours.

Je rappelle que le texte tel qu’il est rédigé implique qu’un chef d’entreprise membre de la CPRI passe par ces formalités pour accéder à l’entreprise d’un confrère.

Ne serait-il pas préférable d’adopter une attitude apaisée sur ce point et de maintenir la nécessaire autorisation sans l’assortir de formalités inutiles et désobligeantes ?

Mme la présidente. L’amendement n° 191, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 32

Après le mot :

interprofessionnelles

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

ont, pour l’exercice de leurs fonctions, accès aux locaux de l’entreprise.

La parole est à M. Dominique Watrin.

M. Dominique Watrin. La création des CPRI pour les 4,6 millions de salariés des TPE est un point positif. Cependant, les missions et prérogatives de ces commissions sont très restreintes ; nous l’avons peut-être souligné avec virulence, monsieur le ministre, mais c’est bien une réalité !

Ce constat est aggravé par le fait que les représentants des salariés des TPE qui siégeront au sein de ces commissions n’auront pas le droit d’entrer dans les entreprises, même en cas de médiation, sauf si l’employeur les y autorise.

Cette restriction d’accès, encore durcie par la commission des affaires sociales, ne permettra pas aux représentants des salariés d’exercer pleinement leurs responsabilités.

Je rappelle que ce droit d’entrée dans les entreprises existe déjà pour d’autres représentants du personnel extérieurs à l’entreprise, comme le conseiller du salarié susceptible de l’assister lors d’un entretien préalable au licenciement. Selon nous, il devrait en être de même pour les représentants des salariés des TPE.

Notre amendement vise à ouvrir les portes des entreprises aux représentants des salariés, afin que leur mission profite à l’ensemble des acteurs.

Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 78 rectifié est présenté par MM. Gilles, Calvet, Dufaut, Saugey, Vasselle, Laménie, Revet et Grand, Mme Gruny et M. Lefèvre.

L’amendement n° 146 rectifié est présenté par MM. Kern, Longeot, Médevielle, Guerriau, Gabouty, Luche et Bockel et Mme Morin-Desailly.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 32

Après le mot :

entreprises

supprimer la fin de cet alinéa.

La parole est à Mme Pascale Gruny, pour présenter l’amendement n° 78 rectifié.

Mme Pascale Gruny. Cet amendement est défendu.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marc Gabouty, pour présenter l’amendement n° 146 rectifié.

M. Jean-Marc Gabouty. Cet amendement est défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Procaccia, rapporteur. Concernant les amendements identiques nos 59 rectifié bis et 278 rectifié quater, l’avis de la commission est défavorable. Le texte de la commission a inversé la logique du texte issu de l’Assemblée nationale en réaffirmant le principe général d’interdiction d’accès aux locaux des entreprises. Nous avons toutefois prévu une dérogation, pour les cas où, par exemple à l’invitation de l’employeur, des membres d’une CPRI pourraient se rendre dans une entreprise. Si un chef d’entreprise estime qu’il a besoin d’un de ses confrères, nous ne pouvons pas le lui interdire !

L’accès n’est donc possible que sous réserve de l’accord exprès et écrit du chef d’entreprise et du respect d’un délai de prévenance de huit jours. Par cette disposition, nous avons fait disparaître tout risque de voir des représentants des salariés endosser le rôle d’inspecteurs du travail et réaliser des contrôles par surprise. Cela me semble un point de compromis satisfaisant.

J’ajoute à l’intention de M. Lemoyne que, compte tenu de la rédaction du texte affirmant l’interdiction de l’accès à l’entreprise, le juge ne saurait donner droit à la contestation d’un refus. La rédaction de l’Assemblée nationale prêtait le flanc à ce risque. La jurisprudence peut certes être parfois étrange, mais le texte est très clair.

L’amendement n° 84, auquel la commission est défavorable, revient sur l’accès à l’entreprise et s’oppose donc à l’avancée introduite dans le texte de la commission. Vous considérez, ma chère collègue, qu’un chef d’entreprise concevrait de la frustration à avoir besoin d’une autorisation écrite pour pénétrer dans une entreprise. Je ne vois pourtant pas pourquoi il ne serait pas soumis, dans ce cas, aux mêmes règles qu’un salarié membre d’une CPRI. En tout état de cause, pour autant que je sache, personne ne peut entrer dans une entreprise sans autorisation. Et c’est particulièrement difficile dans une petite entreprise, où il y a par définition peu de monde et où tout le monde se connaît !

La commission est également défavorable à l’amendement n° 191, qui va à l’encontre de la position du Sénat comme de celle de l’Assemblée nationale dans la mesure où il tend à priver les employeurs de toute possibilité de s’opposer à l’entrée dans l’entreprise. Monsieur Watrin, vous ne faciliterez pas la tâche des salariés membres de la CPRI si vous leur conférez un rôle qui s’apparente à celui des inspecteurs du travail, en leur permettant de pénétrer dans l’entreprise sans prévenir !

Je demande, enfin, le retrait des amendements nos 78 rectifié et 146 rectifié ; à défaut, l’avis serait défavorable. La commission me semble avoir garanti la sécurité juridique des possibilités de refus des employeurs.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Rebsamen, ministre. Le Gouvernement est défavorable aux amendements nos 59 rectifié bis et 278 rectifié quater. S’il est normal et légitime que l’accord de l’employeur soit requis, il n’y a aucune raison d’interdire aux membres des CPRI d’entrer dans les entreprises lorsque l’employeur les y autorise. Cela n’aurait pas de sens ! Je ne suis d’ailleurs pas certain que la suppression de cet alinéa équivaudrait à poser une telle interdiction de principe. En outre, ne rien écrire en la matière ne constituerait pas un facteur de sécurité juridique, car la jurisprudence est parfois contradictoire. Il me semble donc préférable de prévoir une telle disposition.

Madame Schillinger, même si je comprends bien l’objet de l’amendement n° 84, je vous demanderai de bien vouloir le retirer. La rédaction proposée par la commission, qui prévoit une autorisation expresse et écrite, est, certes, un peu lourde, et je m’étais contenté à l’Assemblée nationale d’une « autorisation expresse ». Toutefois, si cette précision permet de mettre un terme à l’inquiétude suscitée par la rédaction de la commission de l’Assemblée nationale, j’y suis favorable. Il sera toujours possible d’ajuster la version définitive au cours de la navette.

Monsieur Watrin, vous proposez, par l’amendement n° 191, de supprimer l’autorisation de l’employeur pour accéder aux locaux de l’entreprise. Il me semble que cela pose problème, s’agissant de locaux privés, dans lesquels on n’entre pas librement. L’autorisation de l’employeur me semble pleinement justifiée : les CPRI sont en effet des instances extérieures à l’entreprise. L’avis est donc défavorable.

L’avis est le même sur les amendements nos78 rectifié et 146 rectifié, qui sont inspirés par un point de vue inverse : s’il est légitime que l’accord de l’employeur soit requis et précisé, il n’existe aucun motif pour interdire l’entrée dans l’entreprise dès lors que l’employeur y est favorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marc Gabouty, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 59 rectifié bis et 278 rectifié quater.

M. Jean-Marc Gabouty. La suppression de l’alinéa 32 n’interdirait pas aux membres des CPRI d’entrer dans une entreprise : le régime de droit commun s’agissant de l’accès à des locaux s’appliquerait. Le chef d’entreprise, s’il le souhaite, pourrait donc autoriser les membres des CPRI, employeurs ou salariés, à venir dans l’entreprise. Mon amendement n° 59 rectifié bis tend simplement à supprimer la procédure prévue. L’application du droit commun me paraît plus logique et finalement plutôt conforme à ce que prône M. le ministre.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 59 rectifié bis et 278 rectifié quater.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme Patricia Schillinger. Je retire l'amendement n° 84, madame la présidente !

Mme la présidente. L'amendement n° 84 est retiré.

Je mets aux voix l'amendement n° 191.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 78 rectifié et 146 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 192, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 35, première phrase

Remplacer le mot :

cinq

par le mot :

quinze

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. Nous souhaitons augmenter le nombre d’heures de délégation des membres de ces commissions paritaires. En effet, le nombre d’heures prévu dans ce projet de loi est, à notre avis, trop faible pour assurer de bonnes conditions de défense des salariés.

Je souhaite d’ailleurs m’expliquer auprès de M. le ministre, qui a semblé juger notre position paradoxale.

Oui, monsieur le ministre, comme nous l’avons expliqué dans la discussion générale et en défendant notre question préalable, nous pensons que votre projet de loi est un mauvais projet, qui fait plus écho aux voix du MEDEF qu’à celles des salariés. Cela étant, pour avoir longtemps siégé dans cet hémicycle, vous savez l’importance que revêt à nos yeux le rôle des parlementaires, et c’est ce qui nous conduit à essayer d’améliorer ce projet de loi en présentant des amendements. Nous nous tiendrons à cette attitude constructive jusqu’au bout pour tenter de faire adopter des mesures qui nous paraissent positives.

Mme la présidente. L'amendement n° 123 rectifié, présenté par Mme Laborde et MM. Mézard, Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin et Requier, est ainsi libellé :

Alinéa 35, première phrase

Remplacer le mot :

cinq

par le mot :

dix

La parole est à Mme Françoise Laborde.

Mme Françoise Laborde. Notre amendement relève du même esprit que celui qui vient d’être présenté par Laurence Cohen, même s’il va un peu moins loin.

À travers cet amendement, monsieur le ministre, nous souhaitons vous faire part de notre inquiétude quant au temps laissé au salarié membre de la CPRI pour exercer sa mission. Nous craignons en effet que cinq heures par mois ne soient insuffisantes pour représenter l'ensemble des salariés des entreprises de moins de onze salariés d'une région, d'autant que les nouvelles régions vont couvrir des territoires particulièrement larges.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Procaccia, rapporteur. Les mesures proposées dans ces deux amendements viendraient alourdir très fortement la charge administrative et financière que représentera le fait, pour des TPE, d’avoir un salarié appelé à siéger au sein d’une CPRI. N’oublions pas que ces entreprises peuvent n’employer que trois ou quatre personnes ! À la différence des plus grandes entreprises, une très petite entreprise ne peut pas remplacer un salarié pour cinq, dix ou quinze heures par mois.

Mme Laborde propose dix heures, Mme Cohen quinze : il n’y a donc pas accord sur le bon nombre. En tout cas, aucun de ces deux nombres – non plus que cinq heures, du reste – ne présente de cohérence par rapport au nombre d’heures d’une journée ou d’une demi-journée de travail.

Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Rebsamen, ministre. L’avis du Gouvernement est défavorable. Je comprends la motivation de ces deux amendements, mais je pense qu’il ne faut pas mettre en cause le point d’équilibre auquel on est parvenu sur ce point.

Dans les entreprises de deux ou trois salariés, toutes les heures de travail comptent. Nous avons donc mis en place un dispositif prenant en compte les spécificités de ces entreprises. Je précise que ces cinq heures n’incluent pas le temps passé en réunion. Ces cinq heures octroyées à chaque représentant représentent donc un moyen intéressant pour faire fonctionner les commissions. Les délégués du personnel dans les entreprises de plus de cinquante salariés se voient certes allouer quinze heures, mais comparaison n’est pas raison.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 192.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme Françoise Laborde. Je retire l'amendement n° 123 rectifié, madame la présidente !

Mme la présidente. L'amendement n° 123 rectifié est retiré.

L'amendement n° 193, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 35, seconde phrase

Supprimer cette phrase.

La parole est à M. Dominique Watrin.

M. Dominique Watrin. Par cet amendement, nous demandons la suppression de l’instauration d’un délai de prévenance de huit jours pour l’utilisation des heures de délégation syndicale.

Actuellement, on considère qu’un délai de prévenance pour l’utilisation des bons d’absence des heures de délégation syndicale porte atteinte à la liberté d’action du représentant du personnel.

S’il n’est fait aucune mention dans la loi d’un délai de prévenance à respecter pour les heures de délégation syndicale, c’est non seulement pour cette raison, mais aussi parce que, en pratique, les délégués du personnel préviennent traditionnellement de leurs absences pour ne pas désorganiser le planning d’activité de leur entreprise. Les délégués du personnel sont d’abord, en effet, des salariés responsables, qui pensent à leurs collègues de travail. Nous pouvons tous convenir qu’ils n’ont pas pour objectif de désorganiser leur entreprise ni de gêner leurs collègues.

Voilà pourquoi il ne nous semble pas justifié d’établir un délai de huit jours après information de l’employeur pour que le salarié puisse exercer sa mission de représentant au sein de la CPRI.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Procaccia, rapporteur. L’avis est défavorable. Ce délai est, à nos yeux, indispensable pour permettre à l’employeur de limiter l’impact de l’absence du salarié membre de la CPRI.

Rappelons en outre que nous parlons de toutes petites entreprises, dans lesquelles il n’y a pas de délégué du personnel. Les délégués du personnel ont souvent de longues années de pratique derrière eux et ils se transmettent leur expérience ; les membres des CPRI, en revanche, exerceront une mission toute nouvelle et ils pourraient ne pas avoir le réflexe de prévenir de leur absence suffisamment longtemps à l’avance.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Rebsamen, ministre. Dans ces très petites entreprises, je l’ai dit, chaque heure de travail compte, et il convient donc que l’employeur soit prévenu à l’avance.

M. Jean-Baptiste Lemoyne. C’est aussi une question de politesse !

M. François Rebsamen, ministre. C’est la contrepartie légitime des heures de délégation prévues. Là encore, c’est le point d’équilibre qui a été trouvé.

J’ajoute que, dans l’esprit du Gouvernement, ces heures pourront être cumulées et mutualisées entre représentants.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 193.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 85, présenté par Mmes Schillinger, Bricq et Emery-Dumas, MM. Bérit-Débat et Caffet, Mmes Campion, Claireaux et Génisson, MM. Daudigny, Durain, Godefroy, Jeansannetas et Labazée, Mmes Meunier, Riocreux et Yonnet, MM. Tourenne, Vergoz et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 35

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Le temps peut être utilisé cumulativement, dans la limite de douze mois, sans que cela conduise un membre à disposer, dans le mois, de plus d’une fois et demie le crédit d’heures de délégation dont il bénéficie.

II. – Après l’alinéa 35

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Les membres des commissions paritaires régionales interprofessionnelles peuvent répartir entre eux le crédit d’heures de délégation dont ils disposent. Ils informent leurs employeurs de la répartition. Cette mutualisation ne peut conduire un membre à disposer, dans le mois, de plus d’une fois et demie le crédit d’heures de délégation dont il bénéficie.

La parole est à Mme Patricia Schillinger.

Mme Patricia Schillinger. Cet amendement vise à rétablir la possibilité de mutualisation des heures de délégation dont disposent les membres salariés des commissions paritaires régionales interprofessionnelles. Cette mutualisation serait limitée par un plafond d’une fois et demie par mois le nombre d’heures de délégation dont dispose chaque membre. De plus, l’employeur devrait évidemment avoir été prévenu par avance de l’utilisation de ce crédit supplémentaire d’heures par un salarié.

Les effectifs restreints des TPE peuvent parfois rendre difficile, de façon temporaire, l’exercice de sa mission par un membre salarié de la commission. De plus, l’ordre du jour des réunions des CPRI pourra prévoir d’aborder des sujets différents, requérant des compétences diverses de leurs membres. Dans de tels cas, la mutualisation peut avoir une utilité.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Procaccia, rapporteur. La commission a supprimé ces dispositions pour une simple raison : elles ne peuvent pas être mises en place dans les TPE.

Comment mettre en œuvre la mutualisation, sachant que les membres des CPRI ne relèvent pas du même employeur ? Comment transférer des heures d’un employeur à l’autre ? Comment indemniser l’entreprise « perdante » ? Cela revient, en quelque sorte, à créer une créance du salarié sur une entreprise qui n’est pas la sienne.

Selon le Gouvernement, tout devrait être pris en charge par le fonds de financement du paritarisme, mais cela n’est pas écrit dans le projet de loi ou, en tout cas, pas suffisamment clairement. Je n’ose imaginer la complexité du mécanisme de compensation qu’il faudra mettre en place entre les diverses entreprises impliquées : ce sera une vraie usine à gaz !

L’avis de la commission sur cet amendement est donc défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Rebsamen, ministre. Contrairement à Mme la rapporteur, je suis favorable à votre amendement, madame Schillinger. En effet, il vise à rétablir une possibilité de mutualisation des heures de délégation des membres d’une CPRI. Cette véritable avancée, introduite à l’Assemblée nationale, permettra incontestablement de faciliter l’exercice de leurs fonctions par les membres des commissions.

J’ajoute que cela n’entraînera aucun frais supplémentaire pour les employeurs puisque le maintien du salaire pourra être pris en charge via le fonds de financement du dialogue social.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 85.

J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant de la commission.

Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable et que celui du Gouvernement, favorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 214 :

Nombre de votants 341
Nombre de suffrages exprimés 341
Pour l’adoption 155
Contre 186

Le Sénat n'a pas adopté.

L'amendement n° 300 rectifié quater, présenté par MM. Lemoyne et Morisset, Mme Imbert, MM. Cornu, Calvet, Chatillon, Vaspart, P. Dominati et del Picchia, Mme Micouleau, M. Revet, Mme Morhet-Richaud, M. Chasseing, Mme Bouchart, MM. Mandelli, Longuet, Pierre, Grand, Chaize, Lefèvre et Pellevat, Mme Lopez et MM. Darnaud, Genest et Gremillet, est ainsi libellé :

I. – Après l’alinéa 37

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« L’employeur est dédommagé du coût des heures de délégation utilisées par le salarié pour siéger au sein de la commission paritaire régionale. Ce coût vient en déduction de l’impôt sur les sociétés dû par l’entreprise.

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne.

M. Jean-Baptiste Lemoyne. Il s’agit d’un amendement d’appel. J’aimerais en effet avoir des éclaircissements sur le « dédommagement » financier accordé au chef d’entreprise pour les heures de délégation utilisées par le salarié membre d’une commission paritaire régionale interprofessionnelle.

Aussi bien dans l’alinéa 37 de l’article 1er du projet de loi initial que dans l’alinéa 36 tel qu’il est issu des travaux de la commission des affaires sociales, il est prévu que « le temps passé par le salarié à l’exercice de sa mission, y compris le temps passé aux séances de la commission, est de plein droit considéré comme du temps de travail et payé à l’échéance normale ». Cela sous-entend qu’il revient à l’employeur de payer les heures de délégation.

Or, aux termes de l’étude d’impact, « le projet de loi prévoit que les frais occasionnés par la participation de leurs membres aux réunions et leur formation, ainsi que l’indemnisation des pertes de salaires des représentants salariés seront financés par les crédits du Fonds de financement des organisations syndicales de salariés et d’employeurs ». Et c’est aussi ce que vous sembliez dire à l’instant, monsieur le ministre.

Ainsi que vous l’avez souligné vous-même, dans les toutes petites entreprises en particulier, toutes les heures de travail comptent, et cela peut s’entendre aussi en matière de rémunération du salarié.

Puisque, comme Mme la rapporteur l’a relevé, à ce stade, rien n’est inscrit dans le texte sur ce point, j’ai déposé un amendement prévoyant que le coût des heures de délégation viendrait en déduction de l’impôt sur les sociétés dû par l’entreprise. C’est une proposition. En fait, j’aimerais surtout obtenir des précisions sur le dispositif de dédommagement prévu pour l’employeur. Je tiens à m’assurer que ce ne sera pas une charge supplémentaire pour les TPE.