compte rendu intégral

Présidence de M. Jean-Claude Gaudin

vice-président

Secrétaires :

M. Jean Desessard,

M. Christian Cambon.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

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Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire

M. le président. Mes chers collègues (Mmes et MM. les sénateurs se lèvent.), je suis particulièrement heureux de saluer, en votre nom, la présence dans notre tribune d’honneur d’une délégation du Sénat gabonais, conduite par son premier vice-président, M. Léonard Andjembé.

La délégation est accueillie par notre éminent collègue M. Jean Pierre Cantegrit, président du groupe d’amitié France-Afrique centrale, et par les membres de ce groupe.

Cette visite s’inscrit dans le cadre des échanges riches et réguliers entre notre assemblée et le Sénat du Gabon, où une délégation de sénateurs français a été reçue très chaleureusement en 2013.

Le thème principal de cette session de travail interparlementaire est le renforcement de la coopération décentralisée entre les collectivités territoriales de nos deux pays.

Outre un programme dense d’auditions et d’entretiens à Paris, la délégation effectuera un déplacement en région, dans le Loir-et-Cher, sur l’initiative de notre éminent collègue Jeanny Lorgeoux.

Nous souhaitons à nos amis gabonais de fructueux échanges, en formant le vœu que cette session de travail interparlementaire contribue à renforcer encore davantage les relations entre nos deux pays.

3

Questions orales

M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

Nous inaugurons aujourd'hui une nouvelle formule, puisque l’auteur de chaque question dispose désormais de deux minutes trente pour présenter cette dernière et peut reprendre la parole, après la réponse du ministre, pour deux minutes au maximum.

brevets industriels carbone savoie

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Vial, auteur de la question n° 1181, adressée à M. le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique.

M. Jean-Pierre Vial. Madame la secrétaire d'État, Carbone Savoie, dont l’activité est répartie entre le site de Notre-Dame-de-Briançon, en Savoie, et celui de Vénissieux, dans le Rhône, est une société spécialisée dans la fabrication des cathodes en carbone et en graphite et des matières nécessaires à la construction et à l’exploitation des cuves d’électrolyse de production d’aluminium.

Aujourd’hui propriété de Rio Tinto Alcan, cette entreprise emploie environ 450 salariés.

Le groupe Rio Tinto Alcan, qui a cédé, en 2013, l’usine d’aluminium de Saint-Jean-de-Maurienne à l’entreprise allemande Trimet, a récemment engagé une revue stratégique dont l’objet est d’aboutir le plus rapidement possible à la cession des sites de Carbone Savoie, sans écarter le risque qui pourrait résulter d’un défaut d’accord si les conditions de reprise n’étaient pas trouvées.

La spécificité de Carbone Savoie est de fabriquer des produits de très haute qualité. La société a bénéficié ces dernières années de programmes importants en matière de recherche et développement, pour aboutir à des produits qui ont largement bénéficié des aides de l’État au titre du crédit d’impôt recherche.

Depuis le lancement de la revue stratégique, la situation a évolué, puisque le site industriel de Carbone Savoie vient d’être visité par quatre repreneurs possibles, Rio Tinto s’étant engagé à prendre rapidement – vraisemblablement dans les toutes prochaines semaines – sa décision sur l’avenir du site.

Or la qualité des brevets et le haut niveau de savoir-faire de Carbone Savoie intéressent tout particulièrement les industriels chinois et russes, qui ne bénéficient pas de ce savoir-faire et de cette expertise industrielle.

Il est évident que, si de tels repreneurs étaient privilégiés, ce serait la remise en cause à très court terme des sites de Carbone Savoie.

Au-delà de cette disparition, cela représenterait un risque majeur : celui de fragiliser les deux sites français de fabrication d’aluminium de Dunkerque et de Saint-Jean-de-Maurienne, dont la technologie, la maintenance et l’exploitation des fours dépendent directement des produits de Carbone Savoie.

C’est pourquoi, compte tenu de l’enjeu industriel, des aides d’État mobilisées au profit de Rio Tinto grâce au crédit d’impôt recherche, mais également du soutien historique et important en matière de coût de l’énergie dont bénéficie ce groupe électro-intensif, je souhaite savoir quelles mesures le Gouvernement entend prendre pour rassurer les salariés sur le maintien et la pérennisation de l’activité de Carbone Savoie en France.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du numérique. Monsieur le sénateur, Rio Tinto Alcan, ou RTA, actuel propriétaire de Carbone Savoie, souhaite se recentrer sur ses activités de production d’aluminium primaire, en se séparant notamment de ses filiales spécialisées dans la fourniture de matériel et de technologie. C’est dans ce contexte que RTA vient de céder sa filiale ECL au groupe Fives.

Voilà quelques mois, le principal motif d’inquiétude des salariés de Carbone Savoie était le risque de fermeture des deux sites rhônalpins. Le dialogue que nous avons établi avec la direction de RTA a permis d’obtenir des éclaircissements à ce sujet. Ainsi, RTA a rappelé, en comité d’entreprise, qu’une fermeture des sites n’était pas étudiée dans le cadre de la réflexion stratégique menée et a même formalisé ce point dans un courrier, à la demande du ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique.

Comme vous le constatez, nos équipes travaillent tant avec la direction de RTA qu’avec les représentants des salariés de Carbone Savoie pour favoriser l’émergence d’un projet sécurisant l’avenir du site. Nous sommes attentifs à ce que les projets du groupe assurent la pérennité de Carbone Savoie et offrent une vision industrielle de long terme à la société et à ses salariés.

Vous avez raison de le souligner, en cas de cession, la question de la propriété industrielle nécessaire à l’exploitation et à la poursuite de la recherche et développement – la R&D – du site serait examinée avec attention, pour permettre au cédant comme au repreneur de poursuivre leur exploitation en toute sécurité juridique. Si RTA était conduit à proposer un avenir à Carbone Savoie en dehors du groupe, nous veillerions à ce que le périmètre cédé permette de garantir l’avenir du site sans dissocier les usines, le centre de R&D et la propriété intellectuelle, conformément à l’engagement pris par Rio Tinto Alcan vis-à-vis de l’État, d’une part, et de ses salariés, d’autre part.

Enfin, la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte que vient de voter le Parlement met en place des mesures de nature à améliorer la compétitivité de Carbone Savoie. Dès l’année prochaine, cette entreprise, qui se caractérise notamment par son électro-intensivité, pourra bénéficier des dispositifs de soutien à une énergie plus compétitive. L’allégement de ses coûts d’énergie contribuera ainsi à soutenir son effort de diversification dans des produits graphites s’adressant à d’autres marchés que le seul marché de l’aluminium.

Comme vous le voyez, monsieur le sénateur, nos équipes, au sein tant du cabinet ministériel, des services du ministère que de la préfecture de Savoie, suivent de très près les évolutions de ce dossier. Soyez assuré de notre détermination à assurer le maintien et le développement de l’activité industrielle, en Savoie comme sur l’ensemble du territoire, de l’entreprise Carbone Savoie.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Vial.

M. Jean-Pierre Vial. Madame la secrétaire d'État, les propos que vous tenez au nom du Gouvernement vont dans le sens d’une position de Rio Tinto qui n’est pas pour nous étonner.

Permettez-moi de rappeler que cette aventure aura commencé voilà maintenant quinze ans, au moment où Pechiney allait entamer son déclin, à la suite du refus par Bruxelles de la fusion prévue à l’époque sur l’initiative d’Alcan. Trois ans plus tard, Alcan lançait une OPA sur Pechiney.

Douze ans se sont écoulés avant que nous n’assistions, aujourd'hui, à la fermeture des derniers sites de Pechiney. Quand Carbone Savoie aura été fermé, il ne restera plus en France que Dunkerque ! Autrement dit, les quarante sites de Pechiney auront, les uns après les autres, été soit fermés, soit cédés à d’autres groupes.

On peut se féliciter de la reprise de quelques-uns de ces sites, comme Pechiney Électrométallurgie par l’espagnol Vilar Mir ou, plus récemment – voilà deux ans –, Saint-Jean-de-Maurienne par l’allemand Trimet, ou encore du regroupement des produits usinés à travers Constellium. Malgré tout, nous demeurerons très vigilants sur les intentions de Rio Tinto, dont nous avons dû suivre la volonté de très près, car, si le groupe affirme aujourd'hui ne pas vouloir fermer le site de Carbone Savoie, il en allait autrement voilà encore quelques mois.

J’entends bien aujourd'hui le Gouvernement nous donner l’assurance qu’il n’y aura pas de remise en cause de ce site. Cependant, je me permets d’insister sur un point, madame la secrétaire d'État : l’avenir des deux derniers sites de production d’aluminium qu’il restera en France – Dunkerque et Saint-Jean-de-Maurienne – dépendra très étroitement du maintien ou non de Carbone Savoie, qui les approvisionne en cathodes, mais est aussi spécialisé dans la fabrication et la réfection des fours et des cuves de fabrication d’aluminium. Or, sur ce point, notre inquiétude a une raison toute simple : le refus, par Rio Tinto, de l’accompagnement que Bercy lui a proposé dans le cadre de la reprise, comme cela avait été fait pour le site de Saint-Jean-de-Maurienne.

C'est la raison pour laquelle nous comptons sur le Gouvernement pour que Rio Tinto fasse le meilleur choix, permettant que le site de Carbone Savoie soit pérennisé.

conséquences pour le personnel retraité de la restructuration de l'entreprise areva

M. le président. La parole est à M. Jean Bizet, auteur de la question n° 1191, transmise à M. le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique.

M. Jean Bizet. J’avais souhaité attirer l’attention de Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l'énergie sur les conséquences, pour le personnel retraité, de la restructuration du groupe AREVA, entreprise majeure sur le plan national mais aussi pour le Cotentin.

Le 7 juin dernier, AREVA annonçait un vaste plan d’économies d’un milliard d’euros sur trois ans. Ce plan de performance est jugé indispensable par le groupe pour restaurer sa compétitivité, après avoir essuyé 4,8 milliards d’euros de pertes en 2014 et près de 8 milliards d’euros de déficit sur quatre ans.

AREVA, qui emploie 28 520 personnes en France et 44 000 au total dans le monde, compte ainsi « réduire ses frais de personnels de l’ordre de 15 % en France et de 18 % au total au niveau mondial », ce qui se traduira par la suppression de plus de 3 000 postes en France.

La ministre de l’écologie avait immédiatement réagi à cette annonce en affirmant qu’il n’y aurait aucun licenciement sec en France. La direction de l’entreprise a elle-même fait savoir qu’elle privilégierait les départs volontaires ou anticipés.

Les inquiétudes légitimes des salariés portent non pas seulement sur ces baisses d’effectifs, mais aussi sur les autres conséquences du plan de performance, notamment en matière de rémunérations, de conditions et de temps de travail, de statuts collectifs et de garanties collectives.

S’agissant justement de ce dernier point, les retraités de l’établissement de La Hague s’interrogent sur l’avenir de leurs mutuelles. Dans un courrier en date du 18 mai 2015, le directeur des ressources humaines d’AREVA les informe que le groupe a décidé « l’arrêt du financement des frais de santé des retraités AREVA NC, AREVA mines, EURODIF production, MELOX, AREVA NP Pierrelatte, AREVA TA », soit les différentes branches d’AREVA.

Cette décision, qui risque de mettre à mal le portefeuille des anciens salariés d’AREVA, semble méconnaître l’esprit de notre système de répartition fondé, depuis 1945, sur la solidarité inter-générations.

Pouvez-vous, madame la secrétaire d’État, nous communiquer des éléments plus précis sur les conséquences, pour les retraités du groupe, des modalités de mise en œuvre du volet social du plan de performance d’AREVA ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du numérique. Monsieur le sénateur, vous vous interrogez sur les conséquences, pour les retraités du groupe AREVA, du plan de performance annoncé par l’entreprise.

La direction du groupe a rencontré, le 12 juin 2015, une délégation de représentants des associations de retraités des sociétés concernées du groupe. Elle a alors indiqué qu’il serait difficilement concevable, compte tenu de l’importance des efforts demandés aux salariés actifs, de maintenir une participation financière de l’entreprise à la couverture complémentaire des frais de santé des retraités.

Il est à noter que la participation financière patronale d’AREVA représente une dépense annuelle de plus de 5 millions d’euros et une provision dans les comptes d’AREVA de l’ordre de 240 millions d’euros, ce qui est conséquent au regard du contexte économique actuel.

Malgré cette suppression, il me semble important que les retraités concernés continuent de bénéficier d’un contrat collectif offrant des prestations d’un bon niveau et couvrant leur famille, en contrepartie d’un tarif qui n’évolue pas avec l’âge de l’assuré. La direction d’AREVA a rassuré le Gouvernement en indiquant que tel serait bien le cas.

Cette évolution s’effectuera dans le cadre d’une négociation avec les organisations syndicales de l’entreprise visant à déterminer des modalités transitoires permettant une approche progressive.

Lors de cette première rencontre, les associations de retraités ont suggéré que la direction propose, au cours des négociations à venir, la possibilité d’adhérer à un régime moins coûteux afin de minimiser l’augmentation de leur cotisation liée à la suppression de cette participation.

Le plan de performance préparé par la direction d’AREVA est indispensable au redressement global de l’entreprise. Néanmoins, monsieur le sénateur, tout comme vous, nous restons attentifs à ce que les mesures de réduction des coûts soient équilibrées et s’accompagnent de garanties adéquates pour les salariés et anciens salariés d’AREVA.

M. le président. La parole est à M. Jean Bizet.

M. Jean Bizet. Madame la secrétaire d’État, je prends acte des informations que vous venez de nous donner ; elles ne sont pas totalement rassurantes pour les salariés du groupe.

On peut comprendre que chacun doive faire des efforts, mais ce plan résulte des décisions hasardeuses prises au plus haut niveau de la direction. Quand vous parlez de « négociation », d’« approche progressive » et d’« adhésion à un régime moins couteux », tout cela sous-entend que la situation sera moins favorable demain qu’elle n’était prévue initialement. Les retraités concernés ne pourront se satisfaire d’une telle réponse.

Je souhaite bien évidemment que les négociations se déroulent dans une bonne ambiance et que l’évolution soit la moins désagréable possible pour les salariés du groupe. Encore une fois, ces derniers ne sont pas responsables de décisions qui ont été prises à une autre époque et qui n’étaient assurément pas les bonnes.

fermetures de perceptions en ariège

M. le président. La parole est à M. Alain Duran, auteur de la question n° 1226, adressée à M. le ministre des finances et des comptes publics.

M. Alain Duran. Je voudrais attirer l’attention de M. le ministre des finances et des comptes publics sur les annonces de fermetures de perceptions en Ariège.

Au printemps 2015, la direction départementale des finances publiques a annoncé son intention de procéder à la fermeture, au 1er janvier 2016, des trésoreries de Castillon, de Vicdessos et de Luzenac. Le projet prévoit de réaffecter leurs ressources aux trésoreries des communes voisines plus importantes. À ces fermetures imminentes viendraient s’ajouter celles de trois perceptions, susceptibles d’intervenir en 2017.

Alors que toutes ces communes, classées en zone de montagne, connaissent des difficultés tenant à leur géographie et leur climat particuliers, ces annonces constituent un très mauvais signal envoyé à la ruralité. Les habitants des territoires ruraux et de montagne se retrouvent à nouveau les premiers fragilisés par la disparition des services publics de proximité qui détériore l’attractivité et la vitalité de nos communes.

Ce service public du Trésor constitue en effet un relais important pour les élus et les citoyens. Nombreuses sont les régies municipales ou les personnes âgées à se rendre directement dans les perceptions pour effectuer leurs paiements ou bénéficier d’un accompagnement.

Il ne s’agit pas ici, madame la secrétaire d’État, de remettre en question la poursuite de l’objectif essentiel de réduction des dépenses publiques et de réorganisation inhérente des services administratifs en vue d’une meilleure efficacité. Il convient néanmoins de rechercher des solutions équilibrées, de sortir de l’alternative entre les deux écueils du maintien d’un niveau de service qui ne correspond plus aux besoins des territoires – nous sommes prêts à l’entendre – et de la décision drastique de suppression pure et simple des services, ce que nous ne pouvons accepter.

La considération de la réalité des territoires très ruraux doit nous conduire à rechercher des mesures d’adaptation innovantes afin de maintenir des permanences régulières sur les sites aujourd’hui voués à la fermeture.

Plusieurs solutions existent : il serait possible, par exemple, de rattacher l’ensemble des agents à une perception « tête de réseau » tout en leur permettant d’officier dans les perceptions de proximité au gré des besoins des administrés ; la permanence de ces services pourrait également être assurée par le biais de maisons des services au public qui restent à construire – le ministre sait que nous y travaillons en Ariège – ; enfin, la solution est peut-être à trouver dans la création de communes nouvelles.

Pour toutes ces raisons, il conviendrait que M. le ministre des finances suspende toute décision de fermeture sèche afin de nous donner le temps de co-construire cette nouvelle organisation des services au public dans nos territoires de montagne.

Après l’engagement pris par le Gouvernement en faveur de l’égalité des territoires lors du comité interministériel aux ruralités, pouvez-vous me préciser, madame la secrétaire d’État, quelles mesures le ministre des finances entend prendre le 1er janvier 2016 au sujet de ces trois perceptions ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du numérique. Monsieur le sénateur, mes collègues Michel Sapin et Christian Eckert, qui ont suivi de près ce dossier, vous demandent de bien vouloir excuser leur absence : ils sont en effet retenus par les travaux sur le projet de loi de finances pour 2016.

Monsieur le sénateur, vous appelez notre attention sur la réorganisation du réseau territorial de la Direction générale des finances publiques, ou DGFIP, de votre département. Vous soulignez l’importance de la prise en compte du contexte territorial, en particulier en milieu rural, ainsi que du processus de concertation avec les acteurs locaux.

Je tiens tout d’abord à vous indiquer que le Gouvernement partage avec vous ces deux préoccupations et en ajoute une troisième, celle de la nécessaire évolution du réseau de cette direction générale dans un contexte de moyens contraints.

Cette administration régalienne se doit à la fois d’être présente localement et d’assurer des prestations de qualité. Comme vous l’avez souligné, l’amélioration du service à l’usager et de l’efficacité de l’action publique sur l’ensemble du territoire national constitue pour elle des priorités.

En effet, notre situation budgétaire et la contribution nécessaire de l’administration fiscale au rétablissement de nos comptes amènent la DGFIP à réfléchir à la meilleure organisation possible de chacune de ses missions et à l’adaptation de son réseau aux évolutions démographiques comme aux attentes des usagers.

La méthode appliquée est fondée sur le dialogue et sur l’appréciation des besoins au plus proche du terrain. La concertation occupe une place essentielle : c’est à son terme seulement que les ministres rendent l’arbitrage définitif sur la solution la mieux à même de répondre aux objectifs de qualité de service de la DGFIP et de maillage territorial des acteurs locaux.

S’il apparaît que l’implantation d’une trésorerie ne répond plus aux attentes des différents publics, que sa taille ne lui permet pas d’offrir une qualité de service suffisante, son regroupement avec une unité voisine peut être mis à l’étude.

Dans cette démarche, la DGFIP s’attache autant à maintenir l’accessibilité du service public que sa qualité, au bénéfice des contribuables, des administrés, des élus et des partenaires du secteur local.

Vous l’avez dit, monsieur le sénateur, la mise en place de maisons de services publics – dont la montée en puissance est à venir – est à prendre en compte pour assurer la continuité d’une présence des services des finances publiques dans les territoires portant de tels projets.

S’agissant de l’Ariège, vous avez déjà pu aborder la question très en détail avec M. Christian Eckert, secrétaire d’État chargé du budget, qui a été sensible à vos préoccupations. Trois projets étaient initialement soumis à la concertation. Au regard des arguments échangés, le directeur départemental a formulé des propositions de compromis que le ministre des finances et des comptes publics, ainsi que le secrétaire d’État chargé du budget sont en train d’étudier en vue d’un arbitrage définitif. Il est donc encore un peu tôt pour apporter une réponse finale à vos interrogations.

Sachez toutefois, monsieur le sénateur, que le ministre et le secrétaire d’État ont tous deux à cœur de réaffirmer la nécessité, pour le département de l’Ariège, d’entamer l’adaptation de son réseau dès 2016 en fermant l’un des trois postes concernés et en tenant compte des possibilités offertes en matière de gestion conjointe et d’échelonnement de calendrier pour les deux autres.

M. le président. La parole est à M. Alain Duran.

M. Alain Duran. Je vous remercie de votre réponse, madame la secrétaire d’État.

Je prends acte des engagements que prendraient M le ministre et M. le secrétaire d’État à notre égard. Je veux juste rappeler combien il est important, pour la ruralité, de maintenir ces services au public.

Vous avez parlé de « dialogue » et de « concertation » ; nous poursuivrons dans cette voie, comme je l’ai fait en rencontrant le secrétaire d’État. Je crois qu’il faut nous donner le temps nécessaire afin de trouver la meilleure solution possible vis-à-vis de nos administrés. Nous sommes en effet tous très attachés, aussi bien dans le milieu urbain que dans le milieu rural, au maintien du service au public.

lignes ferroviaires dans l'aisne

M. le président. La parole est à M. Antoine Lefèvre, auteur de la question n° 1160, adressée à M. le secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche.

M. Antoine Lefèvre. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, les mauvaises performances en termes de ponctualité des trains régionaux sont actuellement légion dans ma région, la Picardie, en particulier dans le département de l’Aisne. Certains TER ont même été annulés cet été, faute de conducteurs.

Le fonctionnement de la ligne Paris – Laon souffre d’un retard endémique dû à de multiples facteurs : travaux, manque de conducteurs, trains bondés, matériel vieillissant, rodage, affaissement de talus…

De plus, le rapport Duron, remis fin mai dernier au Gouvernement, préconise de réduire les passages quotidiens des lignes Saint-Quentin – Cambrai et Saint-Quentin – Maubeuge et de supprimer la ligne Hirson – Metz.

Voilà donc un département dont la nouvelle capitale régionale sera la métropole de Lille, située à presque quatre heures de route du sud de l’Aisne. Il sera amputé de trois lignes et pénalisé, s’agissant de son axe principal qui relie Paris à la ville préfecture de Laon et, plus loin, à Hirson.

Ces retards ont même suscité une plateforme d’échanges nommée « Paris-Laon : ma 2ème maison ! ». Cet intitulé est tout à fait parlant. La pétition mise en ligne, soutenue par l’Association pour l’amélioration du transport ferroviaire, a reçu en quelques jours plus de mille signatures.

Par ailleurs, l’association UFC-Que Choisir, dénonçant ces retards à répétition et estimant que les chiffres produits par la SNCF sont peu conformes à la réalité, a mis en place une application visant à déclarer tous les incidents.

Certes, depuis quelques semaines, nous sommes régulièrement destinataires de courriers émanant de la direction régionale de la SNCF, qui tente d’expliquer les efforts mis en place pour remédier à ces dysfonctionnements récurrents : souhait d’embauches d’une dizaine de conducteurs supplémentaires, rame de réserve, etc.

Mais tout cela prend du temps, beaucoup de temps, conséquence d’un manque évident d’anticipation et surtout des reports à répétition de la convention triennale signée entre l’État et la SNCF, arrivée à échéance à la fin de l’année 2013.

J’en viens au second pan de ma question, à savoir le rapport Duron. Les élus sont stupéfaits d’apprendre, d’une part, que les décisions relatives à l’avenir de ces trains sont reportées à mai 2016 – cet attentisme est préjudiciable au secteur –, d’autre part, que les communes et intercommunalités ne sont pas invitées à participer au nécessaire dialogue qui doit s’instaurer par le biais du conseil consultatif des TET, ce qui laisse place à un dialogue exclusif entre les régions, l’État et la SNCF excluant les représentants des territoires que sont les communes et les intercommunalités. Pourtant, intrinsèquement, je le rappelle, les TET sont les trains d’équilibre des territoires. Cherchez l’erreur !

Madame la secrétaire d’État, nous insistons pour que le secrétariat d’État chargé des transports revoie sa copie s’agissant du dialogue avec les collectivités, celles qu’il vient si souvent solliciter financièrement dès lors qu’il lui faut trouver des contributions pour le financement des infrastructures de transport, en particulier au travers des contrats de plan État-région.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du numérique. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser M. Alain Vidalies, secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche, qui ne peut être présent ce matin.

Monsieur le sénateur, le Gouvernement partage votre souci de proposer aux voyageurs des transports collectifs fiables et de qualité.

Tout d’abord, pour ce qui concerne les lignes de trains d’équilibre du territoire – Paris–Saint-Quentin–Cambrai/Maubeuge et Hirson–Charleville–Metz –, l’État est devenu autorité organisatrice en 2010. Le Gouvernement partage le constat que ces trains ne répondent plus de manière satisfaisante aux attentes des voyageurs, puisque leur fréquentation a diminué de 20 % depuis 2011, en lien notamment avec le développement du covoiturage.

C’est la raison pour laquelle le secrétaire d’État chargé des transports a lancé le chantier de la renaissance de ces trains, afin qu’ils retrouvent leur pertinence. C’est dans ce cadre qu’il a confié à une commission, présidée par le député Philippe Duron et composée de parlementaires, d’élus régionaux et d’experts, le soin de formuler des recommandations. Celles-ci lui ont été remises le 26 mai dernier et ont ensuite été présentées aux commissions compétentes du Parlement.

Comme cela a été indiqué le 7 juillet dernier au cours de la présentation de la feuille de route du Gouvernement, le préfet François Philizot mène actuellement une large concertation avec les régions et les acteurs territoriaux, afin d’examiner les évolutions de l’offre et de la gouvernance de ces trains, à partir des conclusions présentées par la commission initialement saisie. Il s’agit notamment d’assurer une meilleure articulation entre TET et TER, au bénéfice des voyageurs.

Cette mission se poursuivra avec les nouveaux élus régionaux, dont ceux de la nouvelle grande région Nord-Pas-de-Calais-Picardie, afin de disposer de ses conclusions d’ici à mai 2016. Cette date peut vous paraître éloignée. Pourtant, le travail de concertation, que vous appelez vous-même de vos vœux, est absolument essentiel pour prendre les décisions les plus pertinentes sur le sujet.

Le confort et la qualité de service font également l’objet de mesures fortes dans le cadre de la feuille de route du Gouvernement, avec notamment le renouvellement des matériels des lignes structurantes, pour un montant total d’investissement de 1,5 milliard d’euros.

J’en viens aux conditions d’exploitation des TER qui assurent la desserte du département de l’Aisne, en particulier du TER Paris–Laon. Ces services sont exploités par SNCF Mobilités dans le cadre d’une convention qui la lie avec la région Picardie. En tant qu’autorité organisatrice, il appartient à cette dernière et, bientôt, à la grande région Nord–Pas-de-Calais–Picardie, de définir les services régionaux de voyageurs qu’elle souhaite voir mis en œuvre en termes d’horaires et de matériels roulants associés.

M. le secrétaire d’État chargé des transports a demandé à SNCF Mobilités comme à SNCF Réseau d’être entièrement mobilisées pour améliorer dans la durée la qualité de service de ces circulations, en particulier s’agissant du point sensible que représente la ponctualité.