M. Emmanuel Macron, ministre. J’entends votre argument, monsieur Reichardt, mais je suis réservé sur la méthode : je considère que, lorsque le président d’une autorité administrative indépendante a discuté de son budget avec le ministre en charge, il n’est pas de bonne pratique qu’il revienne en quelque sorte par la fenêtre.

Je considère que les missions nouvelles confiées à l’Autorité de la concurrence par la loi du 6 août dernier ont été prises en compte. En effet, je rappelle que la trajectoire d’efforts – substantiels – qui avait été discutée et votée en 2014 a été largement corrigée.

La création de quinze équivalents temps plein va porter l’effectif total de l’Autorité à cent quatre-vingt-douze ETP. La masse salariale passera de 15,8 millions à 17 millions d’euros, soit une augmentation de 1,2 million d’euros. Je vous mets au défi de trouver des autorités administratives indépendantes ou des directions d’administration qui connaissent un tel mouvement : c’est à rebours de tout ce que l’on fait par ailleurs !

Dans le même temps, les dotations hors personnel, qui abondent les postes de dépenses stratégiques pour l’Autorité, augmentent de 14 %, puisqu’elles passeront, en 2016, de 4,19 millions d’euros à 5 millions d’euros en crédits de paiement.

En outre, ponctionner 300 000 euros sur les crédits de la Banque de France obligerait celle-ci à consentir un effort, soit sur les études, soit sur le réseau.

J’y insiste, la démarche qui sous-tend l’amendement me semble de mauvaise pratique. Le budget de l’Autorité de la concurrence a été concerté avec le président de celle-ci. M. Lasserre est conscient des enjeux des nouvelles missions dévolues à l’autorité administrative indépendante ! Nous les avons pris en compte dans le budget.

Dans ces conditions, je vous demande vraiment, à la lumière des chiffres que je vous ai communiqués et, surtout, des incidences financières du dispositif que vous proposez, de retirer votre amendement. À défaut, je serai obligé d’émettre un avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-206.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Économie », figurant à l’état B.

Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits.

(Ces crédits sont adoptés.)

Mme la présidente. J’appelle en discussion les articles 52 à 53 bis, qui sont rattachés pour leur examen aux crédits de la mission « Économie ».

Économie

Etat B
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2016
Article 53

Article 52

I. – L’article 1600 du code général des impôts est ainsi modifié :

(nouveau). – Le début de la première phrase du premier alinéa du I est ainsi rédigé : « I. – Il est pourvu au fonds de modernisation, de rationalisation et de solidarité financière mentionné à l’article L. 711-16 du code de commerce et à une partie des dépenses de CCI France et des chambres de commerce et d’industrie de région ainsi… (le reste sans changement). » ;

B. – Le III est ainsi modifié :

1° (nouveau) À la première phrase du dernier alinéa du 1, après les mots : « perçus l’année précédente », sont insérés les mots : « par le fonds mentionné au premier alinéa du I et » ;

2° Le 2 est ainsi modifié :

aa) (nouveau) Le premier alinéa est ainsi modifié :

– à la première phrase, après le mot : « région », sont insérés les mots : « et de CCI France » ;

– à la fin de la seconde phrase, les mots : « des chambres de commerce et d’industrie de région » sont supprimés ;

ab) (nouveau) Après le sixième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Il est opéré en 2016, au profit de CCI France, un prélèvement sur le fonds de financement mentionné au premier alinéa du présent 2, d’un montant égal à 2,2 % de la somme des plafonds prévus au I de l’article 46 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012 au titre de la taxe mentionnée au même premier alinéa et de celle mentionnée au 1 du II du présent article. À compter de 2017, le montant de ce prélèvement est égal à celui de l’année précédente pondéré par le rapport entre la somme des plafonds précités prévus pour l’année de référence et la somme des plafonds de l’année précédente. » ;

a) L’avant-dernier alinéa est ainsi modifié :

– après la première occurrence du mot : « région », sont insérés les mots : « et de CCI France » ;

– la seconde occurrence des mots : « des chambres de commerce et d’industrie de région » est supprimée ;

– les mots : « du montant mentionné aux cinquième et sixième » sont remplacés par les mots : « des montants mentionnés aux cinquième, sixième et septième » ;

– les mots : « différence et » sont remplacés par le mot : « différence, » ;

– après les mots : « mêmes cinquième et sixième alinéas », sont insérés les mots : « et à CCI France le montant mentionné au septième alinéa » ;

b) Le dernier alinéa est remplacé par six alinéas ainsi rédigés :

« Si le produit de la taxe additionnelle à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises affecté, au titre d’une année, au fonds de financement des chambres de commerce et d’industrie de région et de CCI France est inférieur à la somme des différences calculées en application des deuxième à quatrième alinéas du présent 2 et des montants mentionnés aux cinquième, sixième et septième alinéas du présent 2, le fonds de financement verse à CCI France le montant mentionné au septième alinéa et verse aux chambres de commerce et d’industrie de région concernées :

« a) Un montant égal au produit de la différence résultant de l’application des deuxième à quatrième alinéas du présent 2, corrigé par un coefficient unique d’équilibrage. Pour la chambre de commerce et d’industrie de Mayotte, le montant est celui mentionné aux cinquième et sixième alinéas du présent 2, corrigé par le même coefficient unique d’équilibrage. Le coefficient unique d’équilibrage est calculé de sorte que la somme des versements au titre du présent a soit égale au produit de la taxe additionnelle à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises affecté, au titre de l’année, au fonds, minoré du montant mentionné au septième alinéa du présent 2 et de 20 millions d’euros ;

« b) Un montant déterminé, dans des conditions fixées par décret, par une délibération de l’assemblée générale de CCI France prise au plus tard le 30 juin, dans la limite d’un plafond de 18 millions d’euros, destiné à financer des projets structurants de modernisation des chambres ou à contribuer à la solidarité financière à laquelle une chambre de commerce et d’industrie de région serait contrainte au titre de l’article L. 711-8 du code de commerce.

« Un montant de 2 millions d’euros est versé au fonds mentionné au premier alinéa du I par le fonds de financement des chambres de commerce et d’industrie de région et de CCI France pour financer des projets d’intérêt national en faveur de l’innovation et de la modernisation du réseau, dans des conditions fixées par décret et après délibération de l’assemblée générale de CCI France.

« La différence entre le montant de 20 millions d’euros mentionné au a et la somme des montants mentionnés au b et au douzième alinéa du présent 2 n’ayant pas fait l’objet d’une affectation avant le 1er juillet est reversée par le fonds de financement des chambres de commerce et d’industrie de région et de CCI France au budget général au cours de l’exercice.

« L’utilisation par les chambres du montant mentionné au b du présent 2 ainsi que l’activité nationale de CCI France et du fonds mentionné au premier alinéa du I font l’objet d’une information annuelle mise à la disposition de l’autorité de tutelle. »

II (nouveau). – L’article 711-16 du code de commerce est complété par un 10° ainsi rédigé :

« 10° Elle gère, dans des conditions définies par décret en Conseil d’État, le fonds de modernisation, de rationalisation et de solidarité financière des chambres de commerce et d’industrie. Ce fonds est destiné à financer des projets d’intérêt national en faveur de l’innovation et de la modernisation du réseau. Il bénéficie à ce titre d’une contribution versée par le fonds de financement des chambres de commerce et d’industrie de région et de CCI France, dans les conditions prévues à l’article 1600 du code général des impôts. »

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L'amendement n° II-114 rectifié est présenté par M. Delattre, Mmes Deromedi, Deroche et Garriaud-Maylam, MM. Laufoaulu, Mayet, Huré, Lefèvre, B. Fournier, Portelli et del Picchia, Mme Mélot, MM. Houel et Malhuret, Mme Imbert et MM. Pointereau, G. Bailly, Morisset, Masclet, Houpert, Charon et Chasseing.

L'amendement n° II-245 est présenté par M. Bouvard.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Rédiger ainsi cet article :

L’article 1600 du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Le début de la première phrase du premier alinéa du I est ainsi rédigé :

« I. – Il est pourvu au fonds de modernisation, de rationalisation et de solidarité financière mentionné à l’article L. 711-16 du code de commerce, à une partie des dépenses des chambres de commerce et d'industrie de région ainsi qu'aux contributions allouées par ces dernières, selon des modalités fixées par décret en Conseil d'État, aux chambres de commerce et d'industrie territoriales et à CCI France au moyen d'une taxe pour frais de chambres constituée de deux contributions : … (le reste sans changement) » ;

2° Le septième alinéa du 2 du III est ainsi modifié :

a) Les mots : « la somme du » sont remplacés par le mot : « le » ;

b) Les mots : « et, pour 2015, du prélèvement exceptionnel prévu au III de l'article 33 de la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015, » sont supprimés ;

c) Le mot : « affectée » est remplacé par le mot : « affecté » ;

d) Le mot : « supérieure » est remplacé par le mot : « supérieur » ;

e) Le mot : « égale » est remplacé par le mot : « égal » ;

3° Le dernier alinéa du III est remplacé par quatre alinéas ainsi rédigés :

« Si le produit de la taxe additionnelle à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises affecté, au titre d'une année, au fonds de financement des chambres de commerce et d'industrie de région, est inférieur à la somme des différences calculées en application des deuxième au quatrième alinéas du présent 2 et du montant mentionné aux cinquième et sixième alinéas du présent 2, le fonds de financement des chambres de commerce et d'industrie de région verse aux chambres de commerce et d'industrie de région concernées :

« a) Un montant égal au produit de la différence résultant de l’application des deuxième au quatrième alinéas du présent 2 corrigé par un coefficient unique d'équilibrage. Pour la chambre de commerce et d'industrie de Mayotte le montant est celui mentionné aux mêmes cinquième et sixième alinéas corrigé par le même coefficient unique d'équilibrage. Le coefficient unique d'équilibrage est calculé de sorte que la somme des versements au titre du présent a soit égale au produit de la taxe additionnelle à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises affecté, au titre de l'année, au fonds, minoré de 20 millions d’euros ;

« b) Un montant déterminé, dans les conditions fixées par décret, par délibération de l’assemblée générale de CCI France, prise au plus tard le 30 juin, dans la limite d’un plafond global de 20 millions d’euros, en vue de financer des projets structurants de portée nationale ou régionale d’investissement des chambres ou de contribuer à la solidarité financière à laquelle une chambre de commerce et d’industrie de région serait contrainte au titre de l’article L. 711-8 du code de commerce ;

« La différence entre le plafond global de 20 millions d’euros et le montant mentionné au b et n’ayant pas fait l’objet d’une affectation avant le 1er juillet est reversée par le fonds de financement des chambres de commerce et d’industrie de région au budget général au cours de l’exercice. »

L’amendement n° II-114 rectifié n’est pas soutenu.

En conséquence, le sous-amendement n° II-325, présenté par M. Canevet, n’a plus d’objet.

Toutefois, pour la bonne information du Sénat, j’en rappelle les termes :

Amendement n° 114 rectifié, alinéa 13, dernière phrase, alinéas 14 et 15

Remplacer le montant :

20 millions

par le montant :

30 millions

La parole est à M. Michel Bouvard, pour présenter l'amendement n° II-245.

M. Michel Bouvard. J’adhère tout à fait à l’idée de mise sous plafond des taxes affectées qui ont été levées par les chambres de commerce et d’industrie. Cela ne me pose pas de problème métaphysique, si je puis m’exprimer ainsi. Au contraire, la réduction de ces taxes me paraît répondre à un souci de bonne gestion, de rationalisation et d’allégement des charges des entreprises.

Ce qui me pose problème, ce n’est pas le texte initial ; ce sont les dispositions introduites par l’Assemblée nationale à l’article 52.

La création d’un fonds d’intervention doté de 20 millions d’euros me semble bienvenue, compte tenu des difficultés financières que rencontrent un certain nombre de chambres et de la nécessité de créer les conditions d’actions communes.

En fait, la rédaction de cet article, telle qu’elle a été modifiée par l’Assemblée nationale, remet en cause les fondements de la loi du 23 juillet 2010 relative aux réseaux consulaires, au commerce, à l'artisanat et aux services, puisqu’elle introduit une novation juridique dans le mode de gouvernance des CCI, en modifiant le financement de la tête de réseau. En effet, elle crée un mode de financement direct, qui, d’une certaine manière, prive les chefs d’entreprise membres de l’assemblée générale des CCI de la prérogative du vote du budget de la structure de tête.

Le Parlement s’est évidemment interrogé sur ce fonctionnement de la tête de réseau, comme en témoignent, notamment, les travaux à ce sujet de la mission d’évaluation et de contrôle de l’Assemblée nationale.

D'ailleurs, cette proposition ne fait pas non plus l’unanimité au sein du réseau des CCI. En effet, le comité directeur, composé de quarante représentants de chambre sur cent cinquante, est le seul à avoir été consulté et vingt-deux chambres ont contesté la méthode. Autrement dit, il n'existe pas, globalement, de majorité de représentants des CCI pour valider le dispositif tel qu’il a été adopté par l’Assemblée nationale.

Monsieur le ministre, si l’on souhaite rester fidèle à l’état d’esprit qui est le vôtre et à votre souci de faire évoluer le système, de manière à le rendre plus performant dans l’accompagnement des entreprises, en concertation avec les CCI, il est nécessaire de revenir au système prévu dans le texte initial du projet de loi de finances.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jacques Chiron, rapporteur spécial. Nous considérons que l’attribution de ressources propres à CCI France assure à celle-ci une capacité d’initiative. C’est cela qui est important ! D'ailleurs, je rappelle que la création d’une ressource propre pour CCI France faisait l’objet de l’une des recommandations du rapport publié, en 2014, par nos collègues Jean-Claude Lenoir et Claude Bérit-Débat. Cette idée a été reprise par notre collègue députée Monique Rabin. Toujours en 2014, un rapport allant dans le même sens a été transmis au Premier ministre par Clotilde Valter. Il existe donc un ensemble de réflexions qui convergent dans la même direction.

Au reste, le président et les autres membres du bureau de CCI France, qui ont naturellement été reçus à la fois par le rapporteur général, par la présidente de la commission et par les deux rapporteurs spéciaux, nous ont bien expliqué leur position sur cette question, laquelle fait effectivement débat entre les CCI qui émaillent le territoire, les CCI riches, comme les CCI de Savoie et de Haute-Savoie, qui sont dans une situation confortable, ou la CCI de Paris (MM. Philippe Dallier et Roger Karoutchi s’exclament.) s’opposant plutôt, et on les comprend, à ce projet.

Mes chers collègues, nous considérons qu’il faut s’abstenir d’entrer dans un tel conflit. CCI France est d’accord avec nous sur ce point. Par conséquent, la commission sollicite le retrait de l’amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Depuis la réforme de 2010, les taxes pour frais de chambre de commerce et d’industrie sont perçues par les CCI régionales, qui en répartissent le produit entre les CCI territoriales. Cette réforme est positive.

L’article 52 prévoit de créer un fonds de péréquation doté d’un montant, très limité, de 20 millions d’euros. La gestion en reviendrait, en effet, à CCI France. Comme cela a été rappelé par M. le rapporteur spécial, ce dispositif s’inspire d’une proposition contenue dans le rapport Lenoir–Bérit-Débat et reprise par Monique Rabin.

Il ne nous revient pas d’arbitrer un chicaya entre Paris et CCI France – au fond, c’est exactement ce que l’on nous demande ici. S’il était décidé de ne pas confier la gestion du fonds à CCI France, il faudrait bien que l’on répartisse les 20 millions d’euros entre les CCI. Instruit par l’expérience de l’année dernière, je ne suis pas candidat à un tel exercice… J’estime préférable que nous n’ayons pas à assumer cette contrainte, compte tenu des sujets structurants en cause et des règles que nous avons définies. Cela me paraît beaucoup plus sain et beaucoup plus responsabilisant. Sinon, nous devons aller au bout du raisonnement et nous demander collectivement à quoi sert CCI France !

Monsieur Bouvard, le dispositif de l’article 52 ne change pas la nature de la réforme de 2010. Il va dans le sens d’une plus grande mutualisation et évite que nous ayons à trancher un débat entre les chambres de commerce.

Vous avez soulevé la question des modalités du vote. En effet, la procédure a été contestée, mais, dès lors que le vote a eu lieu et qu’il a été considéré comme régulier par les CCI, il me semble qu’il faut le respecter.

Le Gouvernement sollicite donc le retrait de l’amendement. À défaut, il émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. Monsieur Bouvard, l'amendement n° II-245 est-il maintenu ?

M. Michel Bouvard. Non, je le retire.

M. Michel Bouvard. Si je suis conscient que les petites CCI ont besoin d’être soutenues, il faut veiller à éviter que l’aide qui pourra être distribuée ne soit un frein à la restructuration et, surtout, ne pénalise des projets structurants que peuvent porter les grandes CCI.

M. Emmanuel Macron, ministre. Oui !

M. Jacques Chiron, rapporteur spécial. Tout à fait !

M. Michel Bouvard. On nous explique, à chaque fois, que les CCI « riches » – celles qui s’en sortent – doivent être solidaires avec les autres. Je l’entends tout à fait, mais, à force de demander aux plus performantes de renoncer à un certain nombre de ressources au nom d’une certaine forme de solidarité, on ne favorise pas la restructuration du reste du réseau et on pénalise des projets d’équipements structurants, qui ont un effet d’entraînement pour l’ensemble du territoire et sont créateurs de valeur et de richesse.

Cela étant, je comprends que le rôle du Gouvernement ne soit pas d’arbitrer les affaires entre CCI.

M. Roger Karoutchi. C’est tout de même lui qui donne l’argent !

Mme la présidente. L'amendement n° II-245 est retiré.

Les amendements nos II-238 rectifié bis et II-239 rectifié bis, présentés par M. Bertrand, ne sont pas soutenus.

Je suis saisie de deux amendements identiques.

L'amendement n° II-237 est présenté par MM. D. Robert, Fontaine, Soilihi, Houpert et Milon.

L'amendement n° II-243 est présenté par MM. Karam, Patient et Mohamed Soilihi, Mme Claireaux et MM. Antiste et S. Larcher.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’alinéa 21

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Au titre de cette solidarité financière, il est alloué sur cette somme, une dotation de 3 millions d’euros aux cinq chambres de commerce et d’industrie régionales des départements et régions d’outre-mer pour tenir compte de leur situation spécifique de chambres territoriales et régionales. Cette dotation est répartie entre elles au prorata de leur recette issue de la taxe additionnelle à la valeur ajoutée.

L'amendement n° II-237 n'est pas soutenu.

La parole est à M. Antoine Karam, pour présenter l’amendement n° II-243.

M. Antoine Karam. Il a été rappelé voilà quelques instants que les chambres de commerce et d’industrie ont fait l’objet d’une réforme en profondeur, à l’occasion de la loi du 23 juillet 2010. Celle-ci a réorganisé leur réseau en créant, pour chaque région, une CCI régionale, qui mutualise l’ensemble des moyens supports des CCI territoriales.

L’un des objectifs de la loi était de permettre aux CCI de réaliser des économies de moyens, en regroupant au niveau régional tous les services supports des CCI locales. De fait, les économies qui ont résulté de la suppression des services supports des CCIT au profit des services régionaux mutualisés ont été substantielles en France hexagonale, où chaque région dispose de quatre à huit CCIT.

Or force est de constater que cette réforme n’a pas tenu compte du cas particulier des CCI des départements d’outre-mer, tout à la fois territoriales et régionales du fait de la superposition, sur le même périmètre, des échelons départemental et régional. Bien au contraire, ces chambres ont même perdu, par l’effet de la loi, la concession des ports et aéroports, les privant ainsi des mutualisations existant à ce niveau.

À cela s’ajoute le fait que les CCI des départements et régions d’outre-mer, les DROM, ont subi les mêmes baisses successives de la taxe additionnelle à la cotisation sur la valeur ajoutée, la TACVAE, alors même qu’elles n’ont pu bénéficier des économies issues de la mutualisation résultant de la réforme de 2010.

Si l’article 14 du projet de loi finances pour 2016 prévoit une nouvelle baisse de 130 millions d’euros du plafond de la TACVAE, l’article 52 crée un fonds de péréquation de 20 millions d’euros pour permettre à la solidarité financière de s’exprimer.

Cet amendement vise donc à corriger substantiellement l’absence de prise en compte de la situation des CCI des DROM par la loi de 2010 et le traitement fiscal qui s’en est suivi.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jacques Chiron, rapporteur spécial. La commission des finances n’a pas examiné cet amendement. Je m’exprimerai donc à titre personnel.

Je rappelle que les CCI d’outre-mer ont été préservées des décisions de 2014 et de 2015, qui ont permis de prélever respectivement 170 millions d’euros et 500 millions d’euros sur les CCI.

Nous craignons le saupoudrage : faisons en sorte de ne pas fragiliser ces 20 millions d’euros. C'est la raison pour laquelle j’émettrai plutôt un avis ou de sagesse ou défavorable sur cet amendement en attendant d’entendre celui du Gouvernement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Il est important de rappeler, comme cela vient d’être fait, que des efforts ont déjà été accomplis afin de tenir compte de la réalité des chambres de commerce et d’industrie d’outre-mer : la baisse de la taxe affectée a été de 23 % pour les CCI de métropole et de 18 % pour celles d’outre-mer.

Par ailleurs, et M. le rapporteur spécial l’a également rappelé, les CCI d’outre-mer ont été exclues des prélèvements exceptionnels de 2014 et de 2015, ce qui leur a permis de préserver 3,8 millions d’euros au titre de 2014 et 10 millions d’euros au titre de 2015, deux CCI ayant disposé de fonds de roulement supérieurs à 120 millions d’euros cette année.

Plus largement, monsieur le sénateur, je comprends votre préoccupation, notamment eu égard à la situation financière de votre CCI. Le problème est que la situation des départements et régions d’outre-mer est très hétérogène. La Martinique et la Guadeloupe, par exemple, se portent plutôt bien : à la fin de 2014, le niveau des fonds de roulement de la CCI de Guadeloupe était de 249 jours et celui de la CCI de Martinique de 268 jours, c’est-à-dire parmi les plus élevés du réseau. À la fin de 2015, si l’on en croit les données recueillies par la mission d’évaluation et de contrôle de l’Assemblée nationale, le fonds de roulement est de 181 jours pour la CCI de Guadeloupe et de 70 jours pour celle de Martinique, alors que le fonds de roulement de la CCI de Guyane est négatif et que celui de La Réunion est inférieur à 60 jours. La situation de ces deux dernières CCI, principalement celle de Guyane, est préoccupante.

C'est la raison pour laquelle je m’engage tout d’abord à tenir compte de la situation des CCI en difficulté – ce qui ne passe pas par une hausse de la taxe affectée, mais par un examen beaucoup plus précis de leurs problèmes. Il faut ensuite que CCI France prenne également ces réalités en compte lors de l’affectation des 2 millions d’euros qui ont été votés, sur les 20 millions d’euros que compte le fonds de péréquation. Enfin, sur les 18 millions d’euros restants, je m’engage à ce que la situation de ces deux CCI en difficulté soit bien prise en considération afin de ne pas pénaliser les projets les plus structurants.

M. Marc Daunis. Très bien !

M. Emmanuel Macron, ministre. À la lumière de ces engagements, notamment en faveur de la CCI de Guyane, je vous invite à retirer votre amendement, sans doute un peu trop large.

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Magras, pour explication de vote.

M. Michel Magras. À titre personnel, je n’ai aucune difficulté à comprendre et à partager le choix de réduire les taxes affectées aux CCI. Toutefois, comme vous venez de le souligner, monsieur le ministre, les CCI ultramarines ne sont pas toutes dans la même situation financière que certaines chambres consulaires de métropole.

Le fonds de péréquation me semble aller dans le bon sens et constituer un outil pertinent. Mais, dans le même temps, certaines CCI ultramarines sont légitimes à réclamer un traitement différencié. Or je sais qu’une telle démarche n’aurait pas la faveur de CCI France ni des CCI non ultramarines.

Il faut donc, malgré ces deux avis mi-défavorables, mi-sagesse, s’efforcer a minima de rassurer nos collègues ultramarins, comme vous venez de le faire, monsieur le ministre, sur l’utilisation de ce fonds de péréquation, de leur expliquer qu’elle fera l’objet d’un suivi, d’un contrôle, d’une surveillance. Il ne s’agit d’ailleurs pas d’une subvention, mais bien d’un fonds destiné à financer des projets précis.

Si M. Karam ne retire pas son amendement, je ne voterai pas contre ; je m‘abstiendrai.