M. Bruno Sido. Tout à fait !

M. Jean-Claude Lenoir. À l’époque, il s’agissait d’engager un processus de recherche sur le devenir de ces déchets. D’ailleurs, la loi du 30 décembre 1991 – adoptée, donc, par une majorité de gauche –, qui en est résultée, prévoyait la possibilité de solutions, réversibles comme irréversibles, et fixait un délai de quinze ans pour que cette notion de réversibilité, qui, aujourd’hui comme hier, est au centre du débat – elle le sera encore longtemps –, soit précisée par une loi.

Quinze ans plus tard, en 2006 donc, une loi, votée, cette fois, par une majorité de droite, a défini de façon beaucoup plus précise la notion de réversibilité et a engagé un processus visant à ce qu’un centre de stockage puisse faire l’objet d’une étude approfondie.

La démarche de nos collègues est aussi, je l’ai dit, responsable. Je veux saluer ici la responsabilité de nos collègues Bruno Sido et Gérard Longuet, qui ont porté ce dossier, ainsi que d’autres élus des deux départements de Haute-Marne et de la Meuse. Je n’oublie pas notre collègue Christian Namy, dont la contribution a également été particulièrement importante.

L’esprit de responsabilité dont ils ont fait preuve sur ce dossier perdure. Comme vous l’avez rappelé, madame la secrétaire d’État, une version du texte qui nous est proposé aujourd’hui a été déposée sur le bureau de l’Assemblée nationale, avec, entre autres signataires, des membres de la majorité socialiste. (M. Gérard Longuet opine.)

Si je suis impressionné par ce large consensus, à peine égratigné par quelques interventions isolées (M. Ronan Dantec fait un signe de dénégation), je m’interroge : dès lors que nous sommes tous d’accord, y compris le Gouvernement, avec cette proposition de loi, j’en déduis que le Gouvernement ou la majorité des membres de l’Assemblée nationale l’inscriront, une fois que nous l’aurons votée, à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale,…

M. Jean-Claude Lenoir. … pour que ce texte entre en vigueur sans plus tarder.

D’une part, cette proposition de loi est attendue, en ce qu’elle permet de tirer les conséquences de la loi de 2006 et de respecter le processus qui a été engagé.

D’autre part, confortée et améliorée par la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, elle apporte des précisions extrêmement utiles à la notion de réversibilité, engage un processus industriel et rappelle un calendrier, qu’elle modifie légèrement, d’actions obligatoires pour le Gouvernement – l’actuel ou le suivant. Une série de rendez-vous seront donc organisés sur ce sujet majeur, ce qui assoit la crédibilité de notre maîtrise du cycle nucléaire.

Enfin, j’ajoute que les territoires où ce centre de stockage sera sans doute réalisé en attendent évidemment des bénéfices sur le plan économique, en termes d’emplois.

M. Bruno Sido. Bien sûr !

M. Jean-Claude Lenoir. Je voudrais en conclusion flétrir la formule choisie tout à l’heure par l’un d’entre nous. Il ne s’agit pas de faire comme en 1830 – car c’était la référence, mon cher collègue –, quand on voulait calmer le peuple qui grondait en lui faisant creuser des tranchées sur le Champ-de-Mars, puis en les lui faisant reboucher. Non, cher collègue, les travaux dont il est question ici démontrent une fois de plus la forte maîtrise dont notre pays fait preuve dans les domaines où la technologie est au rendez-vous.

Nous sommes aujourd’hui sans doute les seuls à posséder cette maîtrise – en tout état de cause, nous sommes les premiers à la posséder. Saluons à la fois les chercheurs, les ingénieurs ainsi que, je le dis avec beaucoup de sincérité, toutes celles et tous ceux qui, dans nos assemblées parlementaires, soutiennent, avec lucidité et détermination, cette vaste entreprise. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur plusieurs travées du RDSE. – Mmes Anne-Catherine Loisier et Delphine Bataille applaudissent également.)

(M. Jean-Pierre Caffet remplace M. Jean-Claude Gaudin au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. Jean-Pierre Caffet

vice-président

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Roux.

M. Jean-Yves Roux. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, notre discussion porte sur un champ très encadré et prévu de longue date par la représentation nationale : celle de l’autorisation du lancement d’une phase industrielle pilote de stockage de matières et déchets radioactifs, ainsi que la définition de critères, dont la réversibilité, rendant la mise en service complète possible.

Nous nous situons donc à une étape, certes cruciale, de la mise en œuvre d’une solution de long terme pour gérer ces déchets.

Quels que soient les choix énergétiques retenus, la question du stockage des matières et déchets de haute et moyenne radioactivité se pose.

Le rapport d’information de nos collègues députés Christophe Bouillon et Julien Aubert, remis en 2013 au nom de la mission d’information sur la gestion des matières et déchets radioactifs, mentionne ainsi, parmi différents scénarios énergétiques, que même « l’arrêt de la production électronucléaire et du traitement du combustible usé se traduirait […] par la nécessité de gérer un volume moindre de déchets HA et de déchets MA-VL [et de] devoir opérer le stockage des combustibles usés ».

Or, si la responsabilité qui nous incombe est nationale, puisqu’il s’agit de la gestion de nos propres déchets tout autant que de notre indépendance énergétique, la réponse de notre pays à la gestion des stocks de déchets nucléaires est bien le fruit d’une coopération étatique, scientifique, associative internationale, qui n’a pas cessé de s’intensifier depuis plus de quarante ans.

Je veux, à ce titre, rappeler que nous sommes liés par les traités européens. Je pense bien évidemment à Euratom, l’un des traités essentiels de l’Union européenne. Son préambule pose très clairement comme principe fondateur un souci d’établir les conditions de sécurité qui écarteront les périls pour la vie et la santé des populations. Nous sommes également régis par une exigence de transparence et d’information sincère à l’égard de nos partenaires européens, notamment en cas d’accident. Très concrètement, enfin, la Commission européenne dispose de la possibilité d’envoyer des inspecteurs sur les sites, quels qu’ils soient. Je suis de ceux qui déplorent que cette coopération n’aille pas encore plus loin.

La coopération internationale scientifique est, pour sa part, mobilisée de manière institutionnelle par des accords-cadres avec l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs, l’ANDRA, et ses homologues. De manière plus générale, l’Autorité de sûreté nucléaire, l’ASN, est reconnue pour la qualité de ses expertises.

Enfin, et c’est là un point majeur, nous disposons du retour d’expérience de pays plus avancés dans la procédure définitive de création. Ainsi, la Finlande a donné le feu vert, le 12 novembre dernier, à la création d’un centre de stockage définitif sur le site d’Onkalo, alors que l’ouverture de Cigéo est envisagée pour 2025. Nous serons également regardés avec la même exigence par nos partenaires européens, l’Allemagne en tête.

J’ai été convaincu, sur la foi notamment de ces expériences internationales, par la nécessité de gérer en responsabilité, sur le long terme, les déchets les plus nocifs. Certes, l’entreposage en surface et en subsurface sont des solutions choisies par différents pays, comme les Pays-Bas ou, après l’échec de Gorleben, l’Allemagne, mais il s’agit de solutions d’attente, qui plus est nous paraissant trop risquées.

Pouvons-nous attendre ? Qu’attendons-nous réellement ? La séparation-transmutation continue d’être étudiée, notamment par les équipes de l’ANDRA, mais la technique produit elle-même des déchets qu’il n’est, à ce jour, pas possible d’éliminer. La création de centres de stockages internationaux n’est plus d’actualité. La recherche sur l’envoi de colis dans l’espace est aujourd’hui considérée comme aussi dangereuse que fantaisiste, tandis que l’hypothèse du stockage en mer est heureusement enterrée depuis 1993.

Devons-nous attendre ? Je ne le crois pas. Les garanties de sécurisation sur le long, voire le très long terme de ces sites entreposés en surface ne me paraissent pas suffisantes, politiquement et, surtout, éthiquement. Le Gouvernement que je soutiens a fait le choix, à maintes reprises, d’assumer la responsabilité collective immédiate plutôt que de transmettre le mistigri aux générations futures : il a fait le choix de la transition énergétique, de la reconquête de la biodiversité, de la mise en place de politiques budgétaires responsables et volontaires. En matière de gestion des matières et déchets radioactifs, plus que sur tout autre sujet, nous ne devons pas attendre.

Dans leur rapport, MM. Bouillon et Aubert indiquent que « le consensus international des experts en matière de gestion des déchets estime qu’une installation technique à grande profondeur – stockage géologique – est la meilleure solution qui soit actuellement disponible dans un horizon prévisible ».

L’échange d’expérience et le consensus scientifique n’excluent pas une spécificité nationale, là encore validée par la communauté internationale.

La spécificité française tient à deux éléments : d’une part, à une classification exigeante des déchets qui prend en compte non seulement la radioactivité, mais aussi la durée estimée de nocivité ; d’autre part, au choix d’un futur centre sur le site de Bure, après que d’autres types d’implantations géologiques eurent été envisagées. La Finlande et la Suède ont, ainsi, retenu des implantations en zone granitique, tandis que l’Allemagne a fait le choix de mines de sel, ce qui, on le sait, pose problème. La France a, pour sa part, opté pour un environnement géologique argileux, réputé et éprouvé pour sa qualité de barrière naturelle. Les responsables scientifiques présents lors de la table ronde préalable au débat public sur Cigéo, un rapport de l’École des mines, comme les travaux parlementaires récents ont très clairement posé que la nature géologique retenue ne posait pas de problème en soi et qu’il importait également de prendre en compte la qualité des matériaux et les conditions du stockage.

Mais, à ce titre, la phase industrielle pilote, prévue dans tous les processus internationaux de centres de stockage en cours, sera sans nul doute déterminante. Elle donnera, après d’éventuels réajustements, des garanties supplémentaires, validées par plusieurs experts.

Je veux évoquer un dernier point, et non le moindre : la coopération internationale porte sur des échanges d’informations scientifiques, mais elle s’intéresse également aux conditions de concertation avec la population. Cette phase n’est pas négociable. Elle participe du pacte de notre nation avec le nucléaire.

J’ai, pour ma part, un souhait à formuler : les conditions de sécurisation du site, les contrats de sous-traitance, la sécurité des personnels et leur formation continue ne doivent en aucun cas être relégués en arrière-plan des préoccupations des industriels et des donneurs d’ordre. La sûreté du site en dépend.

Je souhaite que nous continuions à maintenir ce niveau de dialogue tout au long de la phase industrielle proprement dite, parce qu’il s’agit de la seule façon d’avancer en responsabilité. Ce dialogue doit être contenu, maintenu, intensifié s’il le faut. La réversibilité, nous devons en être conscients, est aussi la possibilité d’effectuer, à long terme, des choix différents.

En conclusion, au regard des coopérations internationales en cours et de l’état actuel des recherches, nous disposons d’éléments probants permettant d’autoriser cette phase industrielle pilote, sous réserve que la concertation et la sécurité soient assurées avec le plus haut niveau d’exigence possible. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et sur plusieurs travées du groupe Les Républicains. – Mme Françoise Laborde et M. Christian Namy applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. Bruno Sido.

M. Bruno Sido. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, monsieur le vice-président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, je veux, en guise de conclusion des nombreuses interventions qui ont jalonné la discussion générale et mis en perspective cette excellente et nécessaire proposition de loi, rappeler quelques éléments fondamentaux.

En premier lieu, comme Jean-Claude Lenoir l’a souligné, la pérennité de la filière nucléaire dépend de notre capacité collective à apporter une réponse responsable au défi du stockage des déchets radioactifs de haute et moyenne activité à vie longue. Ce faisant, nous assumons les conséquences des choix énergétiques passés, qui ont doté la France de cinquante-huit réacteurs, représentant 75 % de la production d’électricité depuis des décennies. Ce faisant, nous confortons un domaine d’excellence français, dans lequel notre pays fait figure de référence mondiale, pour la qualité de ses chercheurs, de ses ingénieurs et de ses techniciens, surtout dans la période de turbulence actuelle.

Qu’est-ce qu’une réponse responsable à ce défi immense pour notre génération ? Il ressort des travaux menés en France comme à l’étranger que la voie du stockage en couche géologique profonde s’impose comme la solution techniquement maîtrisable, la solution de référence.

Pour autant, la gestion de ces déchets radioactifs s’inscrit dans le temps long – très long même. En conséquence, la mise en œuvre des solutions permettant la gestion de ces déchets implique plusieurs générations. Il convient de prendre en compte cette particularité, qui a des incidences politiques et sociétales évidentes.

Si notre génération doit prendre ses responsabilités, elle ne doit pas imposer aux générations futures un mode de gestion des déchets radioactifs sur lequel celles-ci ne pourraient plus agir.

C’est tout l’intérêt du concept de réversibilité, monsieur Masson : pouvoir adapter les modes de gestion futurs aux évolutions technologiques, aux retours d’expérience. Cette notion de réversibilité est importante. Le concept s’est enrichi au fil du temps ; il s’est affiné. Il permet de bâtir des solutions intelligentes, évolutives, flexibles, agiles, adaptables.

Cette démarche est d’ailleurs conforme à l’esprit de la loi de 1991, dite « loi Bataille », en matière de déchets radioactifs de haute activité et à vie longue : pas de décision brutale, mais plutôt des étapes, une progression pas à pas, beaucoup de pragmatisme et de réalisme.

C’est dans cet esprit que j’avais déposé un amendement, au dispositif d’ailleurs très voisin de celui de la présente proposition de loi, sur le texte du projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte. L’objectif était d’autoriser, par voie législative, la phase de réalisation du projet de Centre industriel de stockage géologique, Cigéo, comme le prévoit la loi de programme du 28 juin 2006 relative à la gestion durable des matières et déchets radioactifs. Dans cet hémicycle, la ministre Mme Ségolène Royal m’avait assuré qu’un projet de loi serait déposé en 2016 sur ce sujet spécifique. J’avais donc bien volontiers retiré mon amendement.

Dès lors, même s’il reste encore six mois, je me réjouis que notre collègue Gérard Longuet ait pris l’initiative de la présente proposition de loi, en ce milieu d’année, avec le soutien de Christian Namy. Cette initiative rappelle au Gouvernement son engagement et prévoit un véhicule législatif parfaitement adapté aux enjeux.

Mes chers collègues, quel beau symbole de responsabilité collective nous pourrions offrir à nos concitoyens en adoptant, avec le soutien du Gouvernement, la proposition de loi présentée aujourd’hui ! Celle-ci est l’aboutissement de multiples travaux, de nombreux débats, d’analyses fouillées.

Sur un tel sujet, qui, comme nous nous en sommes aperçus au cours de la présente discussion générale, dépasse les clivages partisans et les convictions de chacun sur ce qu’est le bon mix énergétique – puisqu’il faut bien gérer cet héritage du passé ! –, je forme le vœu que nous puissions aboutir à un consensus.

Mes chers collègues, vous savez que les départements de la Meuse et de la Haute-Marne sont particulièrement concernés par cette question, car le choix a été collectivement fait de localiser le projet Cigéo de l’ANDRA sur ces territoires.

Nous portons, avec mes collègues meusiens et haut-marnais, une vision partagée des enjeux liés à la gestion des déchets produits par notre filière nucléaire.

Ce texte en est une nouvelle illustration, d’autant qu’il a été encore amélioré par le travail de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, notamment de son rapporteur, Michel Raison, que je veux saluer.

Après des travaux scientifiques nombreux menés depuis plus de vingt ans, après des essais techniques réalisés dans le laboratoire souterrain Meuse - Haute-Marne de l’ANDRA, situé sous le territoire des communes de Bure et de Saudron, après des débats publics – ceux qui ont été organisés en 2013 par la commission désignée à cet effet par la Commission nationale du débat public et ceux qui ont eu lieu dans les collectivités ou au sein du comité local d’information et de suivi –, après bien des travaux d’évaluation, notamment au sein de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, après tant de contributions, le projet Cigéo doit entrer dans une phase de concrétisation préindustrielle.

C’est l’intérêt de l’État et de nos territoires.

Afin de permettre à tous les acteurs concernés de mesurer l’ampleur de ce projet national et d’envisager concrètement sa réalisation, je renouvelle au Gouvernement, à la suite de Christian Namy, ma demande que puisse être rapidement organisé un comité de haut niveau…

M. Gérard Longuet. Absolument !

M. Bruno Sido. … sur le site de Bure-Saudron,…

M. Gérard Longuet. Par exemple !

M. Bruno Sido. … à l’instar de ce qui avait été fait, avec succès, sous la présidence de Mme Delphine Batho, lorsque celle-ci était chargée de ces questions. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – MM. Christian Namy et Jacques Mézard applaudissent également.)

M. Gérard Longuet. Remarquable !

M. le président. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte de la commission.

proposition de loi précisant les modalités de création d’une installation de stockage réversible en couche géologique profonde des déchets radioactifs de haute et moyenne activité à vie longue

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : proposition de loi précisant les modalités de création d'une installation de stockage réversible en couche géologique profonde des déchets radioactifs de haute et moyenne activité à vie longue
Article additionnel après l'article unique

Article unique

I. – Au 2° de l’article 3 de la loi n° 2006-739 du 28 juin 2006 de programme relative à la gestion durable des matières et déchets radioactifs, l’année : « 2015 » est remplacée par l’année : « 2018 ».

II. – L’article L. 542–0–1 du code de l’environnement est ainsi modifié :

1° Après le premier alinéa, sont insérés quatre alinéas ainsi rédigés :

« La réversibilité est la capacité, pour les générations successives, soit de poursuivre la construction puis l’exploitation des tranches successives d’un stockage, soit de réévaluer les choix définis antérieurement et de faire évoluer les solutions de gestion.

« La réversibilité est mise en œuvre par la progressivité de la construction, l’adaptabilité de la conception et la flexibilité d’exploitation d’un stockage de déchets radioactifs en couche géologique profonde permettant d’intégrer le progrès technologique et de s’adapter aux évolutions possibles de l’inventaire des déchets consécutives notamment à une évolution de la politique énergétique. Elle inclut la possibilité de récupérer des colis de déchets déjà stockés selon des modalités et pendant une durée cohérentes avec la stratégie d’exploitation et de fermeture du stockage.

« Le caractère réversible d’un stockage en couche géologique profonde doit être assuré dans le respect de la protection des intérêts mentionnés à l’article L. 593-1. Des revues de la mise en œuvre du principe de réversibilité dans un stockage en couche géologique profonde sont organisées au moins tous les dix ans, en cohérence avec les réexamens périodiques prévus par l’article L. 593-18.

« L’exploitation du centre débute par une phase industrielle pilote permettant de conforter le caractère réversible et la démonstration de sûreté de l’installation, notamment par un programme d’essais in situ. Tous les colis de déchets doivent rester aisément récupérables durant cette phase. La phase industrielle pilote comprend des essais de récupération de colis de déchets. » ;

2° Après le troisième alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« - les deux dernières phrases du III de l’article L. 593-6, l’alinéa 2 du III de l’article L. 593-7 et l’article L. 593-17 ne s’appliquent qu’à compter de la délivrance de l’autorisation de mise en service mentionnée à l’article L. 593-11. Celle-ci ne peut être accordée que si l’exploitant est propriétaire des terrains servant d’assiette aux installations de surface, et des tréfonds contenant les ouvrages souterrains ou s’il a obtenu l’engagement du propriétaire des terrains de respecter les obligations qui lui incombent en application de l’article L. 596-5 ;

« - pour l’application du titre IX du présent livre, les tréfonds contenant les ouvrages souterrains peuvent tenir lieu de terrain servant d’assiette pour ces ouvrages ; »

3° Le quatrième alinéa est complété par deux phrases ainsi rédigées :

« . Le délai de cinq ans mentionné à l’article L. 121-12 est porté à dix ans. Le présent alinéa ne s’applique pas aux nouvelles autorisations mentionnées à l’article L. 593-14 relatives au centre » ;

4° Après le sixième alinéa, sont insérés quatre alinéas ainsi rédigés :

« - lors de l’examen de la demande d’autorisation de création, la sûreté du centre est appréciée au regard des différentes étapes de sa gestion, y compris sa fermeture définitive. Seule une loi peut autoriser celle-ci. L’autorisation fixe la durée minimale pendant laquelle, à titre de précaution, la réversibilité du stockage doit être assurée. Cette durée ne peut être inférieure à cent ans. L’autorisation de création du centre est délivrée par décret en Conseil d’État, pris selon les modalités définies à l’article L. 593-8, sous réserve que le projet respecte les conditions fixées au présent article ;

« - l’autorisation de mise en service mentionnée à l’article L. 593-11 est limitée à la phase industrielle pilote.

« Les résultats de la phase industrielle pilote font l’objet d’un rapport de l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs, d’un avis de la commission mentionnée à l’article L. 542-3, d’un avis de l’Autorité de sûreté nucléaire et du recueil de l’avis des collectivités territoriales situées en tout ou partie dans une zone de consultation définie par décret.

« Le rapport de l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs, accompagné de l’avis de la commission nationale mentionnée à l’article L. 542-3 et de l’avis de l’Autorité de sûreté nucléaire est transmis à l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, qui l’évalue et rend compte de ses travaux aux commissions compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat. » ;

5° Le septième alinéa est ainsi rédigé :

« - le Gouvernement présente, le cas échéant, un projet de loi adaptant les conditions d’exercice de la réversibilité du stockage afin de prendre en compte les recommandations de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques ; »

6° Le huitième alinéa est ainsi rédigé :

« - l’Autorité de sûreté nucléaire délivre l’autorisation de mise en service complète de l’installation. Cette autorisation ne peut être délivrée à un centre de stockage en couche géologique profonde de déchets radioactifs ne garantissant pas la réversibilité de ce centre dans les conditions prévues par la loi. » ;

7° L’avant-dernier alinéa est supprimé ;

8° (nouveau) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Pour les ouvrages souterrains des projets de centres de stockage de déchets radioactifs en couche géologique profonde, l’autorisation de création prévue à l’article L. 542-10-1 dispense de la déclaration préalable ou du permis de construire prévus au chapitre Ier du titre II du livre IV du code de l’urbanisme. »

M. le président. La parole est à M. Jean Louis Masson, sur l’article unique.

M. Jean Louis Masson. Je le répète, je suis tout à fait conscient que l’intérêt de la France est de développer l’utilisation de l’énergie nucléaire, comme je suis tout à fait conscient que nous sommes obligés d’éliminer les déchets radioactifs.

En revanche, je ne peux accepter certains propos qui ont été tenus, qui tendent à nous faire croire qu’il n’y aurait qu’une solution, l’enfouissement irréversible dans les couches profondes. Il s’agit bien, je le répète, d’un enfouissement irréversible. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur plusieurs travées du groupe CRC.)

M. Jean Louis Masson. Dans cette affaire, on joue sur les mots pour tromper nos concitoyens. Quand on parle français, un enfouissement est réversible si on peut retirer ce qui a été stocké ; sinon, c’est qu’il est irréversible !

Le problème, le scandale de cette proposition de loi est qu’elle qualifie de « réversible » quelque chose que l’on enfouit sous terre de manière irréversible.

Je veux pour preuve de ce double langage l’alinéa 7 de l’article unique : « Tous les colis de déchets doivent rester aisément récupérables durant cette phase.», c'est-à-dire la première phase en cours. Cette rédaction implique bien que ces colis ne seront pas récupérables après cette phase et, donc, que l’on autorise un enfouissement irréversible, ce que je trouve scandaleux compte tenu de notre responsabilité à l’égard des générations futures.

Selon certains, l’enfouissement se justifie précisément par la responsabilité qui est la nôtre vis-à-vis de l’avenir. Non ! Il y a d’autres solutions, la première étant l’enfouissement réversible, véritablement réversible. Il ne faut pas faire de la réversibilité bidon comme celle que l’on nous propose ici !

Ce point est extrêmement important, compte tenu des progrès considérables que fera la science. Je rappelle qu’il est question de centaines d’années, etc. Je rappelle également que, en 1950, celui qui aurait affirmé que l’homme marcherait un jour sur la lune serait passé pour fou ! Par comparaison, il me paraît moins aberrant de penser, aujourd’hui, que l’on pourra retraiter les déchets radioactifs à haute intensité dans des réacteurs comme ITER.

Il est facile de se moquer des uns ou des autres sous le prétexte qu’ils défendent tel ou tel point de vue. Tous les points de vue sont respectables ! D’ailleurs, que certains défendent la non-réversibilité me paraît tout à fait normal, à condition qu’ils le disent et ne cherchent à tromper personne.

Pour ma part, je considère que la non-réversibilité est extrêmement dangereuse.