Enseignement scolaire
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2018
Articles additionnels après l'article 55 bis

Mme la présidente. Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Enseignement scolaire », figurant à l’état B.

ÉTAT B

(En euros)

Mission

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Enseignement scolaire

71 791 382 462

71 720 905 182

Enseignement scolaire public du premier degré

22 081 567 753

22 081 567 753

Dont titre 2

22 041 027 496

22 041 027 496

Enseignement scolaire public du second degré

32 831 958 425

32 831 958 425

Dont titre 2

32 698 673 979

32 698 673 979

Vie de l’élève

5 418 212 960

5 418 212 960

Dont titre 2

2 508 775 132

2 508 775 132

Enseignement privé du premier et du second degrés

7 576 526 491

7 576 526 491

Dont titre 2

6 782 567 074

6 782 567 074

Soutien de la politique de l’éducation nationale

2 429 745 718

2 359 268 438

Dont titre 2

1 619 993 893

1 619 993 893

Enseignement technique agricole

1 453 371 115

1 453 371 115

Dont titre 2

956 569 076

956 569 076

Mme la présidente. L'amendement n° II-179 rectifié bis, présenté par MM. Ouzoulias, P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme :

Enseignement professionnel sous statut scolaire

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Enseignement scolaire public du premier degré

dont titre 2

 

 

 

 

Enseignement scolaire public du second degré

dont titre 2

 

4 426 343 205

 

4 426 343 205

Enseignement professionnel sous statut scolaire

4 949 403 534

 

4 949 403 534

 

Vie de l’élève dont titre 2

 

 

 

 

Enseignement privé du premier et du second degrés

dont titre 2

 

788 361 457

 

788 361 457

Soutien de la politique de l’éducation nationale

dont titre 2

 

 

 

 

Enseignement technique agricole

dont titre 2

265 301 128

 

265 301 128

 

TOTAL

5 214 704 662

5 214 704 662

5 214 704 662

5 214 704 662

SOLDE

0

0

La parole est à M. Pierre Ouzoulias.

M. Pierre Ouzoulias. L’objet de cet amendement est de créer un programme dédié à l’enseignement professionnel sous statut scolaire, afin de donner à cette filière toute l’importance qu’elle mérite.

Sur le fond, il faut redonner symboliquement de la valeur à l’intelligence des interactions de la main, de l’outil et de la matière. Pratiquement, nous pensons qu’il est nécessaire de mieux accompagner les élèves des filières techniques et les bacheliers techniques vers des formations supérieures adaptées à leurs besoins, tout en refusant de considérer que, pour eux, l’apprentissage serait la seule voie possible.

On ne peut notamment continuer d’accepter que ces bacheliers échouent dans de fortes proportions à entrer dans les instituts universitaires de technologie pour, ensuite, s’égarer dans des formations généralistes qui ne leur sont pas toujours destinées et pour lesquelles ils participent au fort taux d’échec en licence.

La résorption de l’encombrement de certaines filières dites « en tension » peut plus justement être trouvée dans le développement de nouvelles formations supérieures pour ces élèves. Cet effort d’adaptation doit nécessairement être entrepris dès le cycle du second degré.

S’agissant de l’enseignement agricole, nous regrettons amèrement les fortes difficultés budgétaires auxquelles il est confronté et qui vont encore empirer avec le projet budgétaire pour l’année 2018.

Le réchauffement climatique, la protection de l’environnement et les nécessaires mutations des systèmes de culture rendent indispensables de lourds investissements dans la recherche et la formation des agriculteurs. Ces efforts doivent être engagés dans le cadre de l’enseignement agricole. Ils seront effectivement d’autant plus efficaces s’ils s’adressent aux plus jeunes.

Par ailleurs, il est grand temps de corriger les distorsions de statut qui isolent les corps de l’éducation agricole. Je pense aux assistants d’éducation de l’enseignement agricole, mais aussi à tous ces postes à responsabilités qui mériteraient d’être accueillis dans des corps plus amples et interministériels.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. L’adoption de cet amendement aurait pour effet, en réalité, de priver l’apprentissage de moyens, au moment même où chacun constate dans notre pays qu'il est une forme d'accès à l'insertion professionnelle parfaitement réussie. C’est la raison pour laquelle la commission n'a pas suivi les auteurs de cet amendement.

J’émets donc un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-Michel Blanquer, ministre. Monsieur Ouzoulias, je suis d'accord avec certains de vos tenants, mais pas du tout avec vos aboutissants !

M. Pierre Ouzoulias. Comme souvent !

M. Jean-Michel Blanquer, ministre. Vous avez évidemment raison de souligner l'importance de l'enseignement professionnel. Vous avez raison d'insister sur la nécessité de créer des débouchés post-bac pour l'enseignement professionnel et l'enseignement technologique. C’est d'ailleurs ce que nous allons faire, notamment avec la création, l’an prochain, de places de brevet de technicien supérieur, c'est-à-dire de BTS, destinées aux bacheliers professionnels. Nous leur accorderons certaines priorités.

Sur ces tenants, je vous rejoindrai, mais pas sur l'aboutissant qui consisterait à créer un budget propre à l'enseignement professionnel.

Tout est entremêlé, vous le savez. L’exemple des classes de troisième préparatoire à l’enseignement professionnel, dite « troisième prépa-pro », l’illustre parfaitement.

En outre, comme vient de le souligner M. le rapporteur spécial, il n’y a aucune raison de procéder à de telles évolutions au détriment de l'apprentissage, alors même que nous sommes en train de démontrer, dans le cadre des deux concertations en cours, qu'il faut pousser, et l'apprentissage, et l'enseignement professionnel, certainement pas les opposer. L’un et l’autre forment un ensemble qui mène à l'emploi et à la réussite.

Je partage donc votre préoccupation s’agissant de l’insertion réussie des élèves concernés – c’est, je le rappelle, ma deuxième priorité après celle qui concerne l’école primaire. En revanche, je n’en tire pas les mêmes conclusions sur le plan budgétaire.

Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques-Bernard Magner, pour explication de vote.

M. Jacques-Bernard Magner. Il n'est pas infondé de vouloir isoler l'enseignement professionnel dans un programme spécifique, afin d’en retracer les crédits. D'ailleurs, cela a déjà été fait par le passé, avec une clarté un peu plus grande que celle dont nous disposons aujourd'hui…

Le groupe socialiste votera donc cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Didier Guillaume, pour explication de vote.

M. Didier Guillaume. Je voudrais saluer M. le rapporteur pour avis Antoine Karam pour son évocation de l’enseignement agricole, qui est toujours un peu le parent pauvre de ce grand budget de l’enseignement scolaire.

Il a été question d’un cheval de course… Mais l'enseignement agricole, mes chers collègues, c'est plus qu'un cheval de course ; c’est une Formule 1 !

On ne dira jamais assez combien la réussite dans ce secteur est immense. On ne dira jamais assez combien de jeunes, parfois issus de milieux défavorisés et qui ne pourraient suivre l’enseignement du cursus général, voire professionnel, trouvent une solution dans les structures de l'enseignement agricole, notamment les maisons familiales rurales, dont le rôle en matière d'insertion est immense. Ces structures offrent, depuis quelques années, un débouché vers la filière générale, et permettent d’obtenir jusqu’à un brevet de technicien agricole ou un brevet de technicien supérieur.

On ne dira jamais assez combien l'enseignement agricole repose à la fois sur l’enseignement public et l’enseignement privé ! Alors que l’on a parfois tendance à opposer les deux, il faut insister sur la fonction essentielle que l'enseignement privé remplit dans l'enseignement agricole.

Les ingénieurs et les experts qui travaillent dans les lycées agricoles sont remarquables. On y trouve des fermes expérimentales tout aussi remarquables. Ainsi, les élèves sont en mesure d’apprendre les nouvelles techniques agraires et les nouveaux circuits économiques.

Ce n’est pas une explication de vote sur l'amendement, madame la présidente – je l’avoue humblement, mais je pense que vous vous en étiez aperçue ! (Sourires.)

Il m’importait de dire combien ce joyau qu’est l'enseignement agricole doit être conservé en l'état. Merci donc, monsieur le ministre, d’avoir cette année, comme les années précédentes, augmenté son budget. Cet enseignement et les jeunes qui le suivent le méritent ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe La République En Marche, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains. – Mme Françoise Gatel applaudit également.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-179 rectifié bis.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° II-178, présenté par MM. Ouzoulias, P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Enseignement scolaire public du premier degré

dont titre 2

1 500 000 000

 

1 500 000 000

 

Enseignement scolaire public du second degré

dont titre 2

1 500 000 000

 

1 500 000 000

 

Vie de l’élève

dont titre 2

1 000 000 000

 

1 000 000 000

 

Enseignement privé du premier et du second degrés

dont titre 2

 

4 000 000 000

 

4 000 000 000

Soutien de la politique de l’éducation nationale

dont titre 2

 

 

 

 

Enseignement technique agricole

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

4 000 000 000

4 000 000 000

4 000 000 000

4 000 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Pierre Ouzoulias.

M. Pierre Ouzoulias. C'est un plaisir de vous avoir dans cet hémicycle, monsieur le ministre, parce que, à chaque fois, vous ranimez le clivage gauche-droite et les valeurs de chacun.

La répartition des votes est claire quand vous êtes là, et c’est très bien ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Pierre Ouzoulias. L'amendement que je vous propose maintenant, mes chers collègues, et qui donnera sans doute lieu au même vote, découle de nos observations sur le projet de budget et de la nécessité, impérieuse à nos yeux, de poursuivre le travail de mise à niveau de l'enseignement public.

Cet amendement tend à affirmer un choix philosophique au profit de l'école laïque et républicaine, que nous revendiquons et que nous assumons. Cette école est la seule qui accueille encore les élèves sans aucune sélection, qu'elle soit sociale, économique ou communautaire.

Mme Françoise Gatel. Ce n’est pas vrai !

M. Pierre Ouzoulias. Voyez, monsieur le ministre, toute la justesse de ma remarque sur les valeurs !

Cette mission de service public est d'autant plus difficile à exercer que les quartiers sont en difficultés, car les ghettos sociaux sont aussi des ghettos scolaires. À défaut de pouvoir réduire la ségrégation sociale, notamment par une politique du logement correctrice, l'État doit apporter plus à celles et ceux qui ont moins.

L’adoption de notre amendement devrait ainsi permettre de financer, dès 2018, le dédoublement de toutes les classes des réseaux d'éducation prioritaire et l'accueil des élèves pour les devoirs du soir.

Il nous semblerait juste que les crédits accordés aux institutions privées soient attribués en fonction des charges de service public que celles-ci assument, notamment pour l'accueil des élèves des familles les plus défavorisées. Dans ce domaine comme dans de nombreux autres, il ne serait pas inepte, au moins, de connaître l'utilité sociale d'aides financées par l'impôt citoyen.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. Ce n’est pas tout à fait une surprise, la commission des finances est hostile à cet amendement ! (Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)

Notre collègue Pierre Ouzoulias, qui est parfois mieux inspiré, nous propose en effet de supprimer 60 % des crédits de l'enseignement privé, donc de renvoyer les élèves, leurs enseignants et les familles à un désarroi total,…

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. … alors que nous avions réussi, à peu près, à organiser la paix scolaire depuis la loi Debré de 1959.

Je crois que s'il y avait un seul amendement à voter, ce serait exactement l’amendement inverse : il s’agirait de suivre les demandes des parents, plutôt que d'en arriver à un tel blocage.

Toutefois, je ne suis pas là pour déclencher une guerre, et c’est pourquoi, mes chers collègues, je vous propose de refuser celle dans laquelle M. Ouzoulias cherche à nous engager !

La commission émet donc un avis défavorable. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-Michel Blanquer, ministre. Cette fois-ci, monsieur Ouzoulias, même vos tenants ne me séduisent pas ! Mais c’était le but recherché.

Je vois dans votre affirmation plusieurs contradictions.

Une contradiction, tout d’abord, avec les propos que vous m’avez tenus en commission. Elle porte sur certains points que nous pouvions avoir en commun.

Une contradiction, ensuite, avec les objectifs que vous affichez. Par exemple, nous avons entendu tout à l'heure que l’enseignement privé avait largement sa part dans l'enseignement agricole, dont nous savons tous à quel point il joue un rôle social très important.

Une contradiction interne, enfin. Aujourd'hui même, une parlementaire de votre parti m'a alerté sur les difficultés de l'enseignement privé dans un département particulièrement pauvre, où cet enseignement participe de manière significative à la mission de service public, en accueillant de nombreux élèves issus de milieux défavorisés.

Pour ces raisons, l’avis du Gouvernement est évidemment défavorable. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Canevet, pour explication de vote.

M. Michel Canevet. Le groupe Union Centriste, particulièrement attaché à la réussite scolaire, ne peut accepter un discours présentant une vision aussi étriquée de la scolarisation de nos enfants sur le territoire français !

Nous tenons au pluralisme scolaire, qui est certainement une source de la réussite scolaire. Je puis en tout cas en témoigner en tant qu’élu de Bretagne : ce pluralisme est un des facteurs essentiels de la réussite que nos élèves affichent.

M. Michel Canevet. Il faut donc l'encourager.

On ne peut pas non plus accepter que l’on prive de moyens des réseaux d'enseignement participant au service public de l'éducation dans notre pays. On ne peut pas accepter que les enseignants de ces établissements puissent voir leur rémunération diminuer au détour de l’adoption d’un tel amendement. On ne peut pas accepter que les enfants scolarisés dans les différents réseaux d'enseignement ne puissent suivre leur scolarité dans les meilleures conditions.

Tout cela est totalement inacceptable !

Notre vision de la scolarisation des enfants en France est totalement opposée à celle qui vient d'être exposée à l'instant. Nous sommes clairement pour le pluralisme scolaire. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Gatel, pour explication de vote.

Mme Françoise Gatel. Je vous rassure, mes chers collègues, ce n'est pas un assaut de bonnets rouges bretons ! (Sourires.)

Je voudrais dire à mon collègue Pierre Ouzoulias que je suis pour la paix scolaire : l'enjeu qui nous préoccupe tous, c'est la réussite de tous les enfants et l'égalité des chances !

En Bretagne – la bonne conduite vient souvent de l'ouest –, nous connaissons depuis fort longtemps la valeur d'un engagement privé, très souvent catholique – un régime sous contrat –, ayant permis à de nombreux délégués syndicaux agricoles, mais aussi à de grands ministres, dont certains le sont encore aujourd'hui, d’accéder à l'éducation.

J'invite donc mon collègue à un stage en Bretagne. J'aurai grand plaisir à lui faire découvrir ce qu'est l'enseignement privé sur notre territoire et ce qu'est la diversité sociale dans les établissements bretons.

Oui, la diversité sociale existe dans nos établissements. Notre école n’est pas une école pour privilégiés, et je rappelle, comme l'a dit Michel Canevet, que grâce à cette dualité de l'enseignement et à de très bonnes relations entre les deux secteurs, la Bretagne fait aujourd'hui partie des académies enregistrant les meilleurs taux de réussite.

Il ne faut pas confondre et assimiler l'ensemble des établissements privés. Certaines situations quelque peu curieuses appellent effectivement une réaction, et j'ai déposé une proposition de loi en ce sens, à la suite de l’adoption de la loi relative à l'égalité et à la citoyenneté.

Toutefois, je vous invite, monsieur Ouzoulias, à faire toutes les vérifications nécessaires avant de tenir un discours un peu trop caricatural. Vous êtes le bienvenu en Bretagne, quand vous voulez. Michel Canevet et moi-même serons très heureux de vous faire découvrir les réussites de l'éducation bretonne ! (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)

M. Michel Canevet. Absolument !

Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Paccaud, pour explication de vote.

M. Olivier Paccaud. Je suis un enfant de l'école publique à double titre.

D’abord parce que, comme beaucoup d'entre vous, mes chers collègues, j'ai fréquenté ses bancs, de l'école maternelle jusqu'à l'université, en passant par les classes préparatoires.

Ensuite, parce que je suis petit-fils, fils, époux d'enseignants, et moi-même professeur agrégé d'histoire-géographie. En tant que tel, j'ai toujours enseigné dans des établissements publics, et j'en suis fier. Pour autant, je ne considère pas l'école privée comme l'ennemi, comme un repère obscurantiste ou le fief du mal.

Comme vous, je fais le constat depuis des années de l’existence d’un appel d’air vers l'école privée. Je ne m'en réjouis pas, mais cette attractivité n'a strictement rien à voir avec une espèce de crise mystique. Loin de là !

Ce que souhaite l'immense majorité des parents d'élèves qui inscrivent aujourd'hui leurs enfants dans les établissements privés, c’est ce qu'incarnait jadis l'école publique.

M. Olivier Paccaud. Leur choix n’est pas guidé par des raisons religieuses. Ils veulent simplement un peu plus d'autorité – une autorité du maître qui ne soit pas contestée – et de discipline ; ils veulent que leurs enfants travaillent et apprennent. Ni plus ni moins !

M. Didier Guillaume. On ne peut pas dire ça !

M. Olivier Paccaud. Le succès du privé est la meilleure illustration des échecs et du malaise de l'école publique. On peut toujours vouloir plus de moyens, mais il me semble que la crise de l’éducation nationale vient bien plus du dogmatisme idéologique (Exclamations sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.), qui l’a hypnotisée, guidée et emprisonnée depuis des années.

Mme Françoise Gatel. C’est vrai !

Mme Éliane Assassi. Vous en portez la responsabilité !

M. Olivier Paccaud. Soyons donc lucides ! Pour terminer, je ferai deux rappels.

Premièrement, les parents des enfants accueillis dans les établissements privés sont des contribuables et ils ont bien le droit, eux aussi, d’avoir un juste retour « scolaire » de leur contribution.

M. Michel Canevet. C’est vrai !

M. Olivier Paccaud. Deuxièmement, j'ai été pendant deux ans et demi le vice-président en charge des collèges de mon département, l'Oise, qui compte 44 000 collégiens, dont 37 000 suivent leur scolarité dans le secteur public et 7 000 dans le secteur privé. Si nous devions accueillir ces 7 000 gamins dans des établissements publics, nous serions contraints de construire 10 collèges, pour un investissement de 200 millions d'euros. Nous n’avons pas cet argent !

C’est pourquoi je ne voterai pas cet amendement. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)

Mme la présidente. La parole est à M. Martin Lévrier, pour explication de vote.

M. Martin Lévrier. Nous voterons bien sûr contre cet amendement. Je rappelle que l’enseignement privé sous contrat assure une mission de service public clairement affichée. Les enseignants sont formés de la même façon dans les secteurs public et privé. Cette guerre ne sert donc à rien et ne rend pas service aux enfants, qui, je le rappelle, sont notre richesse.

La diversité est productrice de richesse ! Profitons des différents types d’établissements dont nous disposons pour faire grandir nos enfants.

Mme la présidente. La parole est à Mme Annick Billon, pour explication de vote.

Mme Annick Billon. J'ai cru entendre dans les propos de M. Pierre Ouzoulias que les écoles publiques étaient les seules à ne pas faire de sélection. C'est totalement faux ! C'est vraiment méconnaître la réalité des écoles publiques que d’avancer une telle affirmation. Il arrive effectivement que l'école privée comble l'absence d'écoles publiques dans certains endroits.

La Vendée s'alliera donc à la Bretagne pour voter contre cet amendement ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.

M. Didier Guillaume. Et maintenant, les Ardennes ! (Rires.)

M. Marc Laménie. Je vous rassure, mes chers collègues, je serai bref, mais je tiens tout de même à m’exprimer sur cet amendement. Comme tous les amendements, il a ses avantages, ses inconvénients et sa légitimité, que je respecte.

Cela étant, il représente 4 milliards d'euros, ce qui n’est pas mince au regard du montant total de la mission.

En outre, gardons en tête que nous avons consacré sept heures de débat à la mission précédente, qui comptait pour 3,6 milliards d'euros, au moment d’examiner cet amendement de 4 milliards d'euros tendant à proposer une véritable mutation dans l’affectation des crédits, tant en autorisations d’engagement qu’en crédits de paiement.

L'enseignement privé a toute sa légitimité. Des professionnels de qualité y travaillent et il accueille des élèves de qualité, dans le respect des familles. Il en va de même pour l'enseignement public. Il ne faut surtout pas opposer l'un et l’autre.

Ce qui compte, et ce qui conditionne tout cela, c'est l'intérêt des élèves, comme l'a fort justement indiqué, avec passion et conviction, Gérard Longuet. J’irai donc dans son sens. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.

M. Pierre Ouzoulias. Mes chers collègues, j’ai envie de vous dire : Diable ! Quel émoi ! (Rires.)

Tout à fait solennellement, j’ajoute que je tiens, comme vous, au pluralisme de l'enseignement, et ce de façon absolue ! (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)

L’argumentaire que j’ai exposé dans cet hémicycle est simple : j’estime que les crédits publics doivent être modulés en fonction de la charge de service public assumée par les établissements.

Élu du département des Hauts-de-Seine, je crois connaître la parlementaire à laquelle vous avez fait référence, monsieur le ministre. Je sais, en effet, que certains établissements privés réalisent un énorme travail pour accueillir des enfants en difficultés. Et figurez-vous que, au conseil départemental des Hauts-de-Seine, je vote, avec la majorité, les crédits pour les aider. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et sur des travées du groupe Les Républicains. – M. Martin Lévrier applaudit également.)

En revanche, je n'admets pas que d'autres établissements aient des préoccupations très étrangères à celles-là, et dans de tels cas, il me semble illégitime qu’ils bénéficient comme les autres, dans les mêmes proportions, des crédits publics. C'est tout !

Mme Éliane Assassi. Et il n’y a pas que la Bretagne !

Mme Françoise Gatel. Dit comme cela, nous sommes presque d’accord !

Mme la présidente. La parole est à Mme Christine Prunaud, pour explication de vote.

Mme Christine Prunaud. Je ne voulais pas en rajouter, ce soir, dans les interventions de la Bretagne, mais je me dois de soutenir mon camarade. Son explication de vote démontre bien que son approche ne relève ni du sectarisme ni du dogmatisme.

M. Jacques Grosperrin. On a compris !

Mme Christine Prunaud. Toutefois, à l’écoute des interventions de mes collègues de Bretagne et de Vendée, on constate que le sujet de l'école privée et de l'école publique reste plus prégnant sur ces territoires que dans d’autres régions.

M. Jacques Grosperrin. Dans le Nord, il en est de même !

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-178.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° II-150, présenté par M. Carle, au nom de la commission de la culture, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Enseignement scolaire public du premier degré

dont titre 2

 

 

 

 

Enseignement scolaire public du second degré

dont titre 2

40 000 000

 

40 000 000

 

Vie de l’élève

dont titre 2

 

 

 

 

Enseignement privé du premier et du second degrés

dont titre 2

10 000 000

 

10 000 000

 

Soutien de la politique de l’éducation nationale

dont titre 2

 

50 000 000

 

50 000 000

Enseignement technique agricole

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

50 000 000

50 000 000

50 000 000

50 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur pour avis. Cet amendement, que je présente au nom de la commission de la culture, vise le financement des manuels scolaires.

La précédente ministre s'était engagée à consacrer 300 millions d'euros au renouvellement des manuels scolaires au collège. Sur les précédents budgets, une somme de 260 millions d'euros a été inscrite – 150 millions d'euros en 2016 et 110 millions d'euros en 2017 –, mais en réalité, ce sont 235 millions d'euros – 135 millions d’euros en 2016 et 100 millions d’euros en 2017 – qui ont été consacrés à la question.

Il reste donc un minimum de 65 millions d’euros à engager. Or votre projet de budget, monsieur le ministre, fait apparaître une inscription de seulement 16 millions d'euros. Les mathématiques étant une science exacte, le delta s’élève à 50 millions d'euros.

Cet amendement vise à financer ces 50 millions d'euros manquants, sans mettre à contribution les départements – je n’ai pas prétendu les décharger de leurs responsabilités, mais les collèges ne manqueront pas de se tourner vers leur collectivité de tutelle pour demander une augmentation de leurs dotations en vue de faire face à cette dépense.

Effectivement, il existe une anomalie par rapport aux lycées ou aux écoles primaires, et une harmonisation s’impose peut-être. Je partage l’analyse que vous nous avez présentée en commission, monsieur le ministre. Il faut, c'est vrai, revoir la question des manuels scolaires à l’aune de l’essor des nouvelles technologies et ne plus la considérer comme on le faisait dans les années cinquante. Pour autant, l’écrit doit rester un pilier de notre éducation.

Je profite de cette prise de parole pour rappeler la demande que j’ai formulée dans mes propos liminaires : monsieur le ministre, êtes-vous d’accord pour que nous ayons un débat d'orientation avant les calages budgétaires, de façon à prendre un peu plus de temps sur un sujet qui est de la première importance ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste.)