M. le président. La parole est à M. Jérôme Bignon. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)

M. Jérôme Bignon. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission, madame, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilités durables » recouvrent un ensemble de programmes au périmètre très large. Je m’associe donc aux regrets exprimés par différents membres de la Haute Assemblée quant au peu de temps imparti pour discuter de sujets qui sont si importants pour la vie de notre société, puisqu’ils la traversent.

Je vais essayer de parler rapidement du programme 203 « Infrastructures et services de transports ». La Cour des comptes a plusieurs fois alerté le Parlement à propos de la sous-budgétisation chronique de l’AFITF. En 2018, encore, cette agence ne disposera que de 2,4 milliards d’euros au lieu des 3 milliards d’euros nécessaires au respect de ses engagements, cela a été souligné. En juillet dernier, le Président de la République a souhaité geler certains grands projets d’infrastructures, allégeant la charge de cette agence, mais les risques continuent de peser. Les assises nationales de la mobilité, que vous conduisez, madame la ministre, seront donc importantes pour fixer le cap ; notre groupe y sera attentif.

Pour ce qui concerne les aides à la mobilité routière, les crédits de cette mission continuent d’encourager le développement des mobilités propres ; c’est une excellente chose. Néanmoins, le recentrage des aides et leur diminution, voire leur suppression – je pense par exemple au bonus pour l’achat d’une bicyclette électrique –, m’incitent à appeler l’attention du Gouvernement sur la nécessité – ce n’est pas l’opinion de tout le monde – de poursuivre l’accompagnement de la révolution énergétique dans les transports. L’impulsion fiscale donnée par ces aides est essentielle à la transformation des esprits ; c’est bien par l’action de chacun et non par d’immenses actions collectives que nous avancerons dans la voie de la transition énergétique et, à moyen terme, du « verdissement » de notre système de transports.

En ce qui concerne le transport ferroviaire, les TER et les trains d’équilibre du territoire, les TET, seront ouverts à la concurrence le 3 décembre 2019 ; les TGV, un an plus tard. Cette refonte de notre système ferroviaire doit nous inviter à engager un grand mouvement de modernisation et de rénovation de ce mode de transport ; Dieu sait qu’il y a à faire… Cette initiative sera particulièrement importante pour le secteur du fret ferroviaire : l’établissement Fret SNCF est endetté à une hauteur abyssale, et souffre de surcoûts critiques liés à l’organisation du temps de travail. Le Gouvernement doit proposer rapidement des mesures pour anticiper ces changements.

Au travers du programme 205 « Affaires maritimes », le Gouvernement propose de faire de la sécurité maritime une priorité stratégique. Dans un monde bouleversé par la piraterie, le terrorisme, les migrations de populations et les phénomènes climatiques, la défense de nos mers, en lien, évidemment, avec la marine nationale, est en effet essentielle. Notre flotte reçoit chaque année près de 20 000 demandes d’interventions de secours en mer, et les centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage, les CROSS, doivent bénéficier des moyens nécessaires à l’accomplissement de leurs missions. La modernisation de l’École nationale supérieure maritime et la diversification de ses formations font aussi partie de cette dynamique.

Par ailleurs, notre groupe tient à souligner l’importance des crédits accordés à la préservation de l’environnement marin. Le dispositif de contrôle et de surveillance des affaires maritimes porte aujourd’hui une quarantaine d’actions en mer, pour assurer, entre autres, la surveillance des espaces marins protégés, le contrôle des pêches maritimes en eaux françaises ou encore les opérations de constat de pollutions marines.

Il convient, sur ce point, de saluer le travail des CROSS en matière d’identification des navires pollueurs responsables. J’ai eu la chance de visiter, tout récemment, le CROSS de la Méditerranée, à Toulon, dans le cadre de la formation proposée par l’Institut des hautes études de défense nationale, l’IHEDN, et j’ai pu apprécier le professionnalisme des agents qui y travaillent.

En écho au débat de notre dernière semaine de contrôle consacré aux énergies de demain, permettez-moi d’évoquer à nouveau la question des énergies marines renouvelables. J’y suis, évidemment, très favorable. Le sujet mérite une grande attention : ce sont des énergies prometteuses, à tous les égards, pour le succès de la révolution énergétique, mais – cela n’est pas rien – elles ne rencontrent pas toujours l’aval des populations locales.

Vous connaissez, madame la ministre, mes attaches picardes ; je veux appeler à cet égard toute votre attention sur le risque sérieux que court le projet du Tréport. Ne nous exonérons pas de l’avis des territoires ; nous n’avons pas besoin d’une crise supplémentaire sur le sujet de la transition énergétique, nous en avons déjà suffisamment…

Dans le cadre du programme 345 « Service public de l’énergie », le Gouvernement maintient son engagement en faveur d’une égalité des territoires dans l’accès à l’énergie. Le maintien d’un prix unique pour les consommateurs des zones non interconnectées est une bonne chose, et notre groupe sera attentif à sa pérennisation. Quant à la montée en charge des tarifs sociaux de l’énergie, s’il nous semble important de mener rapidement une discussion sur le déséquilibre des traitements entre les énergies choisies, le groupe Les Indépendants – République et Territoires s’engage à préserver ces dispositifs de soutien aux 3 millions de ménages souffrant aujourd’hui des prix de l’énergie.

En ce moment, 5 millions de ménages français souffrent non seulement de la faim, mais encore du froid. Ces aides sont essentielles pour protéger les Français. L’État a donc toute sa place à la tête de ces engagements et la généralisation du chèque énergie, expérimenté dans quatre départements depuis mai 2016, nous paraît être une mesure nécessaire dans l’accompagnement des ménages modestes ; il faudra que nous prenions connaissance du rapport sur ces expérimentations.

Il faut d’ailleurs que ces ménages soient entendus, c’est la raison pour laquelle nous saluons la dotation de nouveaux moyens en faveur du Médiateur national de l’énergie, dont les compétences ont été élargies par la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte.

Sur les programmes 181 et 217, représentant ensemble un tiers du budget de la mission, le Gouvernement propose une priorisation des actions avec, néanmoins, des moyens contraints. Notre groupe s’inquiète de la réduction des moyens de l’ADEME, étant donné l’ampleur des tâches à accomplir pour atteindre nos objectifs en matière de transition énergétique.

Enfin, pour ce qui concerne les programmes 113, 159 et 174, regroupant 10 % des crédits de la mission, il convient de noter que ces budgets doivent prendre en compte la création de la nouvelle Agence française pour la biodiversité. En tant que membre du conseil d’administration de cette agence, je suis son premier budget avec une vigilance quasi affective.

Mon groupe s’inquiète de la charge portée par les agences de l’eau, dont nous avons supprimé, en adoptant l’amendement de notre collègue Jean-François Husson, le plafonnement des redevances perçues. Ces agences ont un rôle indéniable à jouer auprès de cette nouvelle agence, mais leur participation devrait être plus mesurée. Si la disposition introduite par cet amendement était supprimée par l’Assemblée nationale, l’équilibre financier des politiques de biodiversité en serait menacé.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le Gouvernement propose un budget en transition sur ces questions. Nous voterons donc en faveur des crédits de cette mission, mais nous resterons vigilants. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et du groupe La République En Marche. – M. Jean-François Husson, rapporteur spécial de la commission des finances, applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Frédéric Marchand.

M. Frédéric Marchand. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, les crédits que nous examinons ce jour doivent être envisagés au travers d’une double optique.

La première est celle du court terme, de l’immédiat, de l’instant. C’est l’optique dominante de notre univers, tant les difficultés rencontrées par nos concitoyens sont aujourd’hui nombreuses : difficultés à trouver un emploi ou à le garder, revenus souvent trop modestes, risques pesant sur la qualité de vie en raison d’un environnement dégradé, besoins de mobilité pour travailler ou pour les loisirs ; autant de briques de lien social qui apparaissent immédiatement de manière aiguë dans tous nos territoires. Cette optique dicte aujourd’hui sa loi, et c’est normal, tant les souffrances du quotidien sont immédiatement palpables pour beaucoup.

La deuxième optique est celle du long terme, du futur. Le ministre d’État Nicolas Hulot le disait récemment, elle est indispensable au politique, qui ne peut pas utiliser correctement son microscope si sa longue-vue ne fonctionne pas. En effet, pour faire entrer notre pays et ses territoires dans le XXIe siècle, il faut avoir un œil sur le volant et l’autre sur la route et sur l’horizon.

Réinventer le modèle français et entraîner notre pays dans la transition écologique et solidaire, c’est bien cette volonté qui sous-tend la dynamique budgétaire du premier projet de loi de finances du quinquennat, que nous examinons ce jour.

Les crédits du ministère de la transition écologique et solidaire traduisent concrètement le plan Climat présenté en juillet dernier. Ce plan vise à protéger les plus fragiles, qui sont les premières victimes des dégâts causés par le modèle de développement économique dont nous cherchons à sortir progressivement. Il constitue un objectif transversal, qui se traduit dans l’ensemble des politiques du ministère : l’énergie, les transports, la prévention des risques ou encore la gestion des milieux naturels.

Vous me permettrez de citer quelques mesures précisant ces objectifs : le plan de rénovation thermique et le recentrage du crédit d’impôt pour la transition énergétique, la prime à la conversion des véhicules et le soutien aux véhicules électriques, ou encore la croissance du financement des énergies renouvelables, dans le cadre de l’élaboration de la prochaine programmation pluriannuelle pour l’énergie et du grand plan d’investissement voulu par le Président de la République et le Premier ministre. Ce sont autant de traductions concrètes et robustes de l’engagement du Gouvernement en faveur de la préservation du climat et de la planète que l’on retrouve dans ce projet de loi de finances.

Ce budget vise également à accompagner et à protéger les plus fragiles. Tel est l’objet du « paquet de solidarité climatique », et en particulier de la généralisation du chèque énergie. C’est aussi en menant conjointement une action résolue dans le domaine de la santé, de l’environnement, de la protection de la biodiversité et de la prévention des risques que nous assurerons cette protection des plus fragiles.

En matière de transports, cela a été dit et répété, madame la ministre, il s’agit d’un budget de transition qui marque une nouvelle étape de la réorientation engagée en faveur des transports du quotidien et de la remise à niveau, tant attendue, des réseaux existants. À ce titre, les assises de la mobilité permettront de préparer la loi d’orientation sur les mobilités à laquelle sera associée une loi de programmation équilibrée en ressources et en dépenses. Nous aurons donc l’occasion de débattre largement de ce sujet au printemps prochain.

Ce budget clarifie aussi les priorités et dessine le cadre d’action des cinq prochaines années. Non, tout n’a pas été possible dès cette première année, mais, le ministre d’État Nicolas Hulot l’indiquait devant le Conseil économique, social et environnemental mardi dernier, le temps de la concertation est sans doute du temps gagné dans l’action.

Le cap est désormais clair et nul doute que ce budget, accompagné du grand plan d’investissement, exprime l’ambition du Président de la République et du Gouvernement pour mettre en œuvre les feuilles de route données par le Premier ministre au ministre d’État Nicolas Hulot, à vous, madame la ministre, et à vos collègues Brune Poirson et Sébastien Lecornu.

Avant de terminer mon intervention, je souhaite insister, au sein de cet hémicycle, sur trois thématiques qui illustrent, je pense, l’ambition forte de ce premier budget, conforme aux engagements du Président de la République.

Tout d’abord, sur la mobilité, conformément aux priorités définies par le Gouvernement, les investissements dans le domaine des transports privilégieront les transports de la vie quotidienne, la recherche d’une meilleure efficacité dans l’exploitation des réseaux existants et leur optimisation.

Le projet de budget pour 2018 acte le retour d’un État stratège en la matière, un État qui assume enfin pleinement ses responsabilités. N’ayons pas peur de le dire, mes chers collègues, au cours des dernières années, les financements indispensables pour maintenir et régénérer les réseaux existants ont été négligés. La précédente majorité s’était engagée sur de nouveaux projets par trop déconnectés, hélas, des ressources disponibles.

Cette situation a conduit à une impasse budgétaire de près de 10 milliards d’euros. Elle a affaibli la parole de l’État, alors que les acteurs ont justement besoin de clarté, de financements lisibles et d’une programmation pluriannuelle de qualité.

Sans un cadre précis, il ne nous sera pas possible de tenir nos objectifs de report modal et de modernisation des infrastructures. C’est pourquoi je salue le réexamen du périmètre et des modalités du financement des transports mené au travers des assises nationales de la mobilité lancées en septembre dernier et qui associent l’ensemble des acteurs du territoire pour, notamment, identifier les besoins de chacun et les attentes prioritaires de tous.

La politique des transports va désormais s’appuyer pleinement sur les nouveaux usages, en fixant une stratégie claire des mobilités. Elle hiérarchisera mieux les choix d’investissement de la part tant de l’État que des collectivités territoriales.

Chers collègues, le budget pour 2018 assainit les bases à partir desquelles le Parlement pourra opérer les choix de financement pluriannuel. D’ores et déjà, nous constatons que la sincérité et la lisibilité du budget sont au rendez-vous. De même, la diminution du taux de la réserve de précaution apporte des marges de manœuvre inédites, car les gels pénalisaient particulièrement notre programme et l’exposaient aux annulations en cours d’exercice.

Loin de marquer un désengagement de l’État, les crédits budgétaires du programme 203 atteindront un montant significatif, en hausse de 200 millions d’euros par rapport à la prévision d’exécution de l’année 2017. Parallèlement, cela a été indiqué, le budget de l’AFITF, porté à 2,4 milliards d’euros, sera également en hausse de 200 millions d’euros, grâce aux recettes fiscales que lui affecte ce projet de loi de finances.

Cet effort est prioritairement orienté vers l’entretien et la régénération du réseau national routier non concédé et des canaux. Les concours à SNCF Réseau permettront aussi d’améliorer la rénovation des réseaux existants et de moderniser les systèmes d’exploitation du trafic ferroviaire.

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.

M. Frédéric Marchand. Je veux retenir aussi la conversion des véhicules les plus polluants.

Enfin, je souhaite m’arrêter quelques instants sur les mesures prises pour soutenir équitablement les ménages en situation de précarité énergétique.

M. le président. Il faut conclure, cher collègue !

M. Frédéric Marchand. L’enjeu de la transition n’est pas seulement énergétique, mais aussi économique et social. Il ne saurait y avoir de progrès écologique sans progrès social.

Ces crédits pour 2018 sont donc l’illustration d’un gouvernement résolu à faire rimer long terme et court terme ; voilà pourquoi les sénateurs du groupe La République En Marche le soutiendront. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

M. le président. La parole est à Mme Michèle Vullien.

Mme Michèle Vullien. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, comme nous disposons de peu de temps pour étudier ces sujets importants – cela a été dit –, mon intervention se concentrera sur les crédits affectés au financement du transport dans la mission « Écologie, développement et mobilité durables », même s’il faut considérer que les mobilités sont transversales et entrent en ligne de compte dans le plan Climat, dans les enjeux de santé publique, dans la politique de la ville ou encore dans le développement économique.

La présentation budgétaire de ces crédits en dit long sur la situation des transports dans notre pays, alors que tout le monde en reconnaît l’importance pour la vie quotidienne de nos concitoyens.

Une part seulement de ces crédits est retracée en loi de finances, et encore de façon éclatée, puisqu’ils sont répartis entre le programme 203 « Infrastructures et services de transport », les deux comptes d’affectation spéciale « Aides à l’acquisition de véhicules propres » et « Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs » et le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ».

Enfin, une part des crédits des transports, composée des taxes affectées à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, l’AFITF, ne figure pas dans le projet de loi de finances, un collègue l’a souligné, et le Parlement ne peut pas en avoir précisément connaissance, puisque le budget de cette agence n’est établi qu’en décembre. Ce télescopage est un peu regrettable, madame la ministre.

Cet éclatement et ce manque de visibilité budgétaire sont symptomatiques de la difficulté que nous avons à mettre en place une vraie politique des transports qui obéisse à un plan d’ensemble. C’est bien ce que nous attendons des assises de la mobilité qui se sont ouvertes en septembre dernier, sous votre présidence, madame la ministre, et dont les conclusions serviront de base au projet de loi d’orientation sur les mobilités. J’ai eu personnellement l’occasion de participer au lancement de ces assises à Lyon et à Paris et j’irai, le 13 décembre prochain, à la séance de clôture.

Nous attendons ce texte avec d’autant plus d’impatience que le financement actuel de la politique des transports est très clairement non soutenable. L’État a pris trop d’engagements, ce qui a conduit le Gouvernement à décréter une pause dans les grands projets d’infrastructures, alors que les citoyens sont en attente.

C’est à la faveur de cette pause que le budget de 2,4 milliards d’euros, prévu pour l’AFITF, pourrait sembler suffisant. Toutefois, la situation financière de cet établissement n’en demeure pas moins préoccupante. Comme l’ont rappelé nos rapporteurs, dont je salue au passage l’excellent travail, l’AFITF aura à débourser 12,3 milliards d’euros dans les années à venir ; nous n’en avons pas fini de payer le camouflet de l’écotaxe…

La dette de SNCF Réseau compromet également son action de modernisation du réseau ferré. On ne peut que s’inquiéter de voir notre rapporteur remettre en cause la crédibilité du contrat de performance décennal signé entre cet établissement et l’État.

La non-soutenabilité caractérise également le financement du Grand Paris Express, dont le coût, initialement évalué à 25 milliards d’euros, déraperait pour atteindre la bagatelle de 35 milliards d’euros !

Voies navigables de France va de son côté devoir mettre en œuvre un plan social du fait de l’obsolescence de la taxe hydraulique.

Il n’y a guère que le secteur de l’aviation qui se maintienne, cela a été évoqué, malgré la forte concurrence internationale. Il faut donc rester vigilant sur ce sujet.

Ce constat impose à mon sens deux actions.

En premier lieu, il faut remettre à plat la fiscalité affectée aux transports. À ce titre, il me semble important de sanctuariser le versement transport – vous vous souvenez que certains suggéraient sa suppression lors des dernières campagnes électorales –, de reconsidérer le taux de TVA sur des services de première nécessité – la proposition de mon collègue Antoine Lefèvre, vendredi dernier, a sans doute été refusée un peu rapidement – et, enfin, de s’interroger à nouveau sur la circulation des poids lourds de transit.

M. le président. Veuillez conclure, chère collègue, votre temps de parole est épuisé.

Mme Michèle Vullien. Oui, mais je continue tout de même. (Marques d’amusement sur diverses travées.)

En second lieu, il convient de faire des choix clairs et programmés, en misant sur l’intermodalité, qui s’appuiera sur des pratiques nouvelles et des technologies d’avenir, dans une optique de développement durable.

M. le président. Il faut conclure !

Mme Michèle Vullien. Je croyais que cette discussion générale avait lieu ce matin, j’ai tout décalé et, par conséquent, j’ai manqué mon train. Donc je continue…

M. le président. Ne racontez pas votre vie !

Mme Michèle Vullien. En attendant, les principales options du budget de transition qui nous sont présentées vont dans le bon sens. Nous ne pouvons par exemple que soutenir l’effort de 200 millions d’euros consenti en direction de l’AFITF pour rénover les réseaux existants et améliorer les transports du quotidien.

Pour toutes ces raisons, et sous réserve des réformes de structure à venir, le groupe Union Centriste soutiendra les crédits transport de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)

M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur spécial. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Joël Bigot.

M. Joël Bigot. Monsieur le président, madame la ministre, madame, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, voilà un peu plus d’un an, le 4 novembre 2016, la diplomatie française remportait un succès inégalé sur le terrain de la lutte contre le réchauffement climatique, en obtenant la ratification de l’accord de Paris par 55 États représentant 55 % des émissions de gaz à effet de serre. Aujourd’hui, ce ne sont pas moins de 168 États cumulant plus de 80 % des émissions de gaz à effet de serre qui l’ont ratifié.

Le changement climatique devient une réalité palpable pour chacun de nous. Prenons un exemple simple, l’extinction, en Europe, des insectes pollinisateurs, comme les abeilles ou les papillons. Des études très sérieuses démontrent combien nos écosystèmes sont en danger, certaines atteintes étant même irréversibles.

M. Joël Bigot. Il est donc urgent d’agir, d’autant plus que la COP23 s’achève sans grand engagement, excepté pour ce qui concerne le charbon. L’avertissement lancé par 15 000 scientifiques, le 13 novembre dernier, contre la mutilation définitive infligée à notre planète ne doit pourtant pas demeurer lettre morte !

À bien des égards, ce budget de la mission « Écologie, développement et mobilités durables » s’inscrit dans la continuité des budgets précédents,…

M. Roland Courteau. C’est vrai !

M. Joël Bigot. … et affiche sa volonté d’accélérer la transition énergétique. Vous présentez ce budget comme la mise en musique du plan Climat, ce fameux Green New Deal annoncé en juillet dernier : recentrage du crédit d’impôt, généralisation du chèque énergie, extension de la prime à la conversion des véhicules polluants avec doublement de la prime de 1 000 euros pour les ménages à revenus modestes, ou encore hausse de la fiscalité énergétique, au travers de la taxe carbone. Sur ce dernier point, nous veillerons à ce que cette fiscalité n’aggrave pas les inégalités sociales et territoriales ; nous aurons sans doute l’occasion d’en reparler plus tard.

Il y a continuité, disais-je, et cela s’applique à l’Agence française de la biodiversité, l’AFB, créée par la loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages. Grand opérateur public de la biodiversité, conçu sur le modèle de l’ADEME, l’AFB regroupe aujourd’hui l’Office national de l’eau et des milieux aquatiques, l’ONEMA, l’Agence des aires marines protégées, l’AAMP, l’Atelier technique des espaces naturels, l’ATEN et Parcs nationaux de France, ou PNF. C’est un outil unique de gouvernance, qui peut nous permettre d’affronter les défis du changement climatique et de la sixième extinction de masse provoquée par l’homme.

En revanche, nous nous interrogeons fortement sur la pérennité du financement des agences de l’eau, qui réalisent pourtant un travail formidable, notamment dans nos territoires ruraux ; cela a été dit à de nombreuses reprises.

Lors de l’examen de la première partie du projet de loi de finances, nous avons examiné l’article 19, qui prévoit la baisse, dès 2019, de 190 millions d’euros du plafond d’affectation de leurs ressources, ainsi que le prélèvement, en 2018, de 200 millions d’euros sur leur fonds de roulement. Beaucoup de parlementaires, dont ceux du groupe socialiste et républicain, se sont opposés à cette baisse de plafond et, si le Sénat en a acté la suppression, celle-ci sera très certainement remise en cause par l’Assemblée nationale.

Nous aborderons tout à l’heure l’examen de l’article 54, qui institue une contribution annuelle des agences de l’eau au profit, d’une part, de l’AFB, pour un montant compris entre 240 millions et 260 millions d’euros, et, d’autre part, de l’Office national de la chasse et de la faune sauvage, l’ONCFS, pour un montant compris entre 30 millions et 37 millions d’euros. Cet article suscite également des questions.

L’étude d’impact de ce projet de loi reconnaît ainsi que, si cette mesure est neutre pour les organismes visés – AFB et ONCFS –, elle pourrait à court terme « engendrer une modification de la fiscalité acquittée par certaines catégories d’usagers de l’eau », c’est-à-dire les agriculteurs au premier chef, puis les industriels et enfin les particuliers. Attention à ne pas bousculer les équilibres en place !

En outre, en ce qui concerne le financement de l’ONCFS, qui constitue un vrai coût supplémentaire pour les agences de l’eau, l’étude d’impact précise que « cette mesure devrait inciter les agences de l’eau à prioriser leurs dépenses, à travers la rationalisation de dispositifs d’intervention dont l’efficience et l’efficacité n’ont pas été démontrées ».

Vous pouvez comprendre, madame la ministre, que cette seule déclaration suscite des interrogations de notre part et qu’elle nécessite des précisions.

Je ne reviendrai pas sur nos craintes concernant les territoires à énergie positive, Roland Courteau s’en chargera dans quelques instants.

Je souhaite plutôt aborder la baisse de 7,2 millions d’euros de la subvention pour charges de service public accordée au Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement, le CEREMA, structure à laquelle je suis particulièrement attaché en tant qu’élu des Ponts-de-Cé, dans le Maine-et-Loire, où siège le CEREMA Ouest.

Cette diminution, même si elle est légèrement compensée par une augmentation de ses ressources propres, nous inquiète fortement, car elle est combinée à une forte diminution des emplois. En effet, le CEREMA est un interlocuteur essentiel des collectivités territoriales en matière d’ingénierie et de conseil. Espérons que la future agence nationale de la cohésion des territoires saura préserver les missions et les effectifs de cette structure, qui accompagne efficacement les collectivités dans leurs projets environnementaux.

Enfin, pour ce qui concerne le volet « transports » de la mission, nous savons qu’il s’agit là d’un budget de transition, dans l’attente des résultats des assises de la mobilité. La remise à plat des investissements destinée à reprioriser les grands projets de transports sur le territoire va dans le bon sens.

Nous serons très attentifs aux propositions formulées en début d’année prochaine par le Conseil d’orientation des infrastructures. Un autre dossier retiendra notre attention pour l’année 2018, je veux bien sûr parler de l’ouverture à la concurrence du réseau ferroviaire, qui devra garantir le bon accomplissement des missions de service public.

Vous l’aurez compris, nous dressons un bilan contrasté de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » telle que présentée par le Gouvernement. C’est pourquoi nous nous abstiendrons sur les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)