Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérard Collomb, ministre dÉtat. Comme vient de le dire M. le rapporteur, la Commission européenne a rédigé des brochures d’information qui, en France, ont été traduites en vingt-sept langues. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.) Nous en avons peut-être oublié quelques-unes, mais vingt-sept langues, cela permet d’informer les demandeurs d’asile, et donc de trouver le moyen de communiquer avec la personne concernée.

Mme la présidente. Madame Costes, l’amendement n° 16 rectifié est-il maintenu ?

Mme Josiane Costes. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 16 rectifié est retiré.

L’amendement n° 15 rectifié, présenté par Mme Costes, MM. Arnell et A. Bertrand, Mme M. Carrère, MM. Castelli et Collin, Mme N. Delattre, MM. Gold et Guérini, Mmes Jouve et Laborde et MM. Menonville et Requier, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Après les mots :

première demande d’asile en France

insérer les mots :

et jusqu’à la notification d’une éventuelle décision de transfert

La parole est à Mme Josiane Costes.

Mme Josiane Costes. Comme les amendements nos 5 et 11 déjà examinés, cet amendement vise à limiter la possibilité de placement en rétention à la période s’ouvrant après la notification d’une décision de transfert.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Défavorable. Je me suis déjà expliqué sur ce point.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérard Collomb, ministre dÉtat. Avis défavorable. Nous avons déjà eu un débat sur le sujet.

Mme la présidente. Madame Costes, l’amendement n° 15 rectifié est-il maintenu ?

Mme Josiane Costes. Non, dans la mesure où ce sujet a déjà été débattu, je le retire, madame la présidente. (Mme Esther Benbassa sexclame.)

Mme la présidente. L’amendement n° 15 rectifié est retiré.

Je mets aux voix l’article 1er bis.

(Larticle 1er bis est adopté.)

Article 1er bis
Dossier législatif : proposition de loi permettant une bonne application du régime d'asile européen
Article 3 (nouveau)

Article 2

Le chapitre II du titre IV du livre VII du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :

1° L’article L. 742-2 est ainsi modifié :

aa) Les premier et deuxième alinéas sont supprimés ;

ab) La première phrase du troisième alinéa est ainsi modifiée :

– au début, les mots : « Le demandeur astreint à résider dans les lieux qui lui sont fixés » sont remplacés par les mots : « L’étranger assigné à résidence en application du 1° bis de l’article L. 561-2 » ;

– sont ajoutés les mots : « ou de l’exécution de la décision de transfert » ;

ac) Au quatrième alinéa, les mots : « le demandeur » sont remplacés par les mots : « l’étranger » et, après le mot : « asile », sont insérés les mots : « ou de l’exécution de la décision de transfert » ;

a) Le cinquième alinéa est ainsi modifié :

– les mots : « le demandeur » sont remplacés par les mots : « l’étranger » ;

– les mots : « du demandeur » sont remplacés par les mots : « de l’étranger » ;

– les mots : « à la poursuite de la procédure de détermination de l’État responsable de la demande d’asile » sont supprimés ;

– les mots : « une décision d’assignation à résidence en application de l’article L. 561-2 ou » sont supprimés ;

a bis) La troisième phrase de l’avant-dernier alinéa est ainsi modifiée :

– les mots : « du demandeur » sont remplacés par les mots : « de l’étranger » ;

– les mots : « dans le cadre de la procédure de détermination de l’État responsable de la demande d’asile » sont supprimés ;

a ter) Au dernier alinéa, le mot : « cinquième » est remplacé par le mot : « troisième » ;

b) (Supprimé)

2° L’article L. 742-4 est ainsi modifié :

a) (nouveau) Au premier alinéa du I, le mot : « quinze » est remplacé par le mot : « sept » ;

b) Au premier alinéa du II, après la première occurrence du mot : « transfert », sont insérés les mots : « ou lorsque celle-ci est notifiée alors que l’étranger fait déjà l’objet d’une telle décision de placement en rétention ou d’assignation à résidence » ;

3° Au second alinéa de l’article L. 742-5, après la seconde occurrence du mot : « transfert », sont insérés les mots : « ou si celle-ci a été notifiée alors que l’étranger fait déjà l’objet d’une telle décision de placement en rétention ou d’assignation à résidence » ;

4° L’article L. 742-7 est ainsi rétabli :

« Art. L. 742-7. – La procédure de transfert vers l’État responsable de l’examen de la demande d’asile ne peut être engagée dans le cas de défaillances systémiques dans l’État considéré mentionné au 2 de l’article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride. »

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 3 rectifié bis est présenté par MM. Leconte, Kanner, Sueur, Jacquin et Boutant, Mmes Blondin, Cartron et de la Gontrie, MM. Devinaz, Durain et Fichet, Mme G. Jourda, M. Kerrouche, Mmes Lubin et S. Robert, M. Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain.

L’amendement n° 28 est présenté par Mme Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour présenter l’amendement n° 3 rectifié bis.

M. Jean-Yves Leconte. C’est un peu comme pour l’article précédent : l’article 2 laisse tout d’abord entrevoir quelques mesures de coordination avant de prévoir l’interdiction du renvoi d’une personne vers un État qui présenterait des défaillances systémiques.

Finalement, comme pour l’article 1er bis, on écrit de grands principes avant de préciser que tout ne peut pas être fait. À l’article 1er bis, on avait introduit des garanties factices. À l’article 2, on constate qu’il n’est pas possible de transférer des demandeurs d’asile vers un État présentant des défaillances systémiques en matière d’asile s’ils sont « dublinables » – veuillez m’excuser, le mot n’est pas très joli, mais c’est le mot juste.

Or, des États de la zone Schengen dans lesquels on entre pour la première fois et qui présentent des défaillances systématiques, il en existe malheureusement au moins un ou deux.

En outre, les demandeurs que l’on ne peut pas renvoyer auront tout de même été enfermés. Ils auront été placés en centre de rétention pour rien ! On les aura privés de liberté pour rien !

En soi, l’article 2 n’est pas le pire article de cette proposition de loi. Simplement, une fois l’article 1er voté, on se rend compte que certaines dispositions sont tellement inacceptables qu’il faut faire figurer des garanties dans les articles suivants.

Il faut être cohérent : nous sommes défavorables aux effets des mesures figurant à l’article 1er. Nous proposons donc la suppression de l’article 2.

Finalement, cet article ne fait que démontrer l’incohérence et le caractère absolu d’une proposition de loi, qui n’a pas de sens et va entraîner le placement en centre de rétention de demandeurs d’asile que l’on ne peut pas renvoyer vers des États membres présentant des défaillances systémiques – le plus souvent des pays de première entrée dans la zone Schengen.

Mme la présidente. La parole est à Mme Esther Benbassa, pour présenter l’amendement n° 28.

Mme Esther Benbassa. L’article 2 de la présente proposition de loi vise à rappeler qu’une procédure Dublin ne peut conduire à transférer un demandeur d’asile vers un pays présentant des défaillances systémiques en matière de procédures, bien sûr, et de conditions d’accueil des demandeurs.

Là encore, on voudrait nous faire croire que l’on apporte une garantie. En réalité, il n’en est rien, puisque cette disposition est déjà applicable en France. Elle a notamment été utilisée par la Commission européenne pour interdire les réadmissions vers la Grèce entre 2011 et 2017.

Dans le même sens, les juridictions administratives françaises ont annulé à de nombreuses reprises des procédures de réadmission vers la Hongrie.

Passons sur la désagréable impression d’être pris pour des ignorants du droit français et du droit européen des étrangers et revenons sur l’ambition première de ce texte, qui est de renforcer le règlement Dublin III : quel est l’intérêt de renforcer une législation qui s’avère aussi inéquitable qu’inefficace ?

Là encore, je citerai les propos du Défenseur des droits : « Ce dispositif est intrinsèquement inéquitable, puisqu’il tend mécaniquement à faire peser une charge d’accueil plus lourde sur les États situés aux frontières extérieures de l’Europe. Il est également inefficace, car il ignore la volonté des personnes qui, pour des raisons pouvant tenir à des proximités linguistiques, culturelles ou sociales, ne souhaitent pas déposer leur demande d’asile dans le premier État franchi. »

Que l’on ne partage pas nos convictions en matière d’accueil des exilés est une chose, mais il faut alors faire au moins preuve de pragmatisme !

Un demandeur d’asile, par exemple un Afghan, entre par la Grèce : il pourra être placé en rétention quarante-cinq jours en France avant d’être éventuellement transféré vers Athènes, où il sera de nouveau enfermé dans des conditions parfois terribles, avant d’être libéré et de repartir s’il le peut vers la France. Tout cela n’est-il pas vain, je vous le demande ?

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Nous sommes évidemment défavorables à ces deux amendements identiques de suppression de l’article.

Je rappelle que l’article 2 du présent texte a deux objectifs : procéder à des coordinations légistiques et interdire la réadmission d’un demandeur d’asile vers un pays faisant preuve de « défaillances systémiques » dans les procédures et les conditions d’accueil des demandeurs. Il paraît donc tout à fait légitime et normal d’apporter ces garanties. Autant je comprends qu’on ne soit pas d’accord avec l’article 1er, autant il paraît étonnant de vouloir supprimer l’article 2, qui tend à assurer une sécurité juridique supplémentaire aux migrants sous statut Dublin.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérard Collomb, ministre dÉtat. L’article 2 étant essentiellement un article de coordination avec l’article 1er, l’avis est défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.

M. David Assouline. Monsieur le rapporteur, vous avez exposé plus d’arguments que M. le ministre d’État, mais aucune réponse n’est apportée à la question que pose M. Leconte : si l’on ne peut pas renvoyer un demandeur d’asile vers un pays faisant preuve de « défaillances systémiques » – je trouve cette formulation un peu bizarre –, alors pourquoi le placer en centre de rétention ? Ce n’est pas un délinquant ! Pourtant, c’est l’objet de l’article 1er de cette proposition de loi. Cela démontre toute l’absurdité de ce dispositif.

D’ailleurs, un éclairage d’ensemble plus complet aurait pu nous être apporté si cette « petite » proposition de loi avait été insérée dans le prochain texte que nous examinerons.

Vous partagez avec le Président de la République une approche identique du traitement de l’accueil des migrants : vous dites que, pour mieux intégrer les uns, il faut être plus ferme avec les autres. Et, pour ce faire, vous vous livrez à des découpages, en distinguant – c’est de plus en plus difficile – les réfugiés, les migrants économiques, etc., qui se comptent déjà par millions.

Les mouvements de réfugiés climatiques provoqueront de l’instabilité politique, des persécutions et mettront en difficulté certains régimes politiques. De fait, les réfugiés pris dans ce mouvement fuiront à la fois la misère et ces persécutions, non pas pour chercher du boulot, mais tout simplement pour survivre au réchauffement climatique. D’ailleurs, 85 % de ces mouvements se font en direction des pays du Sud, eux-mêmes très pauvres ! Ce n’est pas nous qui sommes les pays de destination de ces migrations ! Nous ne recevons que des bribes.

En plaçant en centre de rétention les « dublinés », vous anticipez sur le projet de loi que vous allez présenter, car seuls pouvaient y être placés jusqu’à présent ceux qui n’avaient pas déposé une demande d’asile. Vous mélangez ainsi les différents types de migrations. Nous aurions aimé pouvoir discuter du phénomène dans son ensemble.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 3 rectifié bis et 28.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. L’amendement n° 17 rectifié, présenté par Mme Costes, MM. Arnell et A. Bertrand, Mme M. Carrère, MM. Castelli et Collin, Mme N. Delattre, MM. Gold et Guérini, Mmes Jouve et Laborde et MM. Menonville et Requier, est ainsi libellé :

Alinéas 20 et 21

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Josiane Costes.

Mme Josiane Costes. Cet amendement relève du même esprit que les amendements nos 5 rectifié, 11 rectifié et 15 rectifié.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Dans le même esprit, avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérard Collomb, ministre dÉtat. Avis défavorable.

Mme la présidente. Madame Costes, l’amendement n° 17 rectifié est-il maintenu ?

Mme Josiane Costes. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 17 rectifié est retiré.

L’amendement n° 18 rectifié, présenté par Mme Costes, MM. Arnell et A. Bertrand, Mme M. Carrère, MM. Castelli et Collin, Mme N. Delattre, MM. Gold et Guérini, Mmes Jouve et Laborde et MM. Menonville et Requier, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 20

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

…) Il est ajouté un paragraphe ainsi rédigé :

« … – L’existence d’une entrave liée aux conditions de rétention susceptible de constituer une atteinte à l’exercice des recours prévus par les I et II en suspend les délais. » ;

La parole est à Mme Josiane Costes.

Mme Josiane Costes. La proposition de loi dont nous discutons aujourd’hui procède enfin également à une autre réforme importante : la réduction du délai de recours des demandeurs d’asile en centre de rétention de quinze à sept jours.

En droit administratif français, je le rappelle, le délai de droit commun est de deux mois, ce qui est déjà court au regard des délais devant les juridictions civiles – cinq ans – ou pénales. Les délais de prescription pour les crimes viennent d’être étendus à vingt ans.

En contrepartie de la réduction de ce délai, justifié par un souci d’efficacité administrative, nous avons donc souhaité inscrire dans la loi la possibilité de constater la suspension de ce délai dans les cas où les conditions matérielles nécessaires pour mettre en œuvre ce recours ne seraient pas réunies. Il s’agit, par exemple, de s’assurer que les demandeurs d’asile placés en rétention puissent entrer en contact avec leurs avocats dans des conditions satisfaisantes.

Il convient de garantir l’application du principe général du respect des droits de la défense.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. La commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.

Nous avons voulu réduire de quinze à sept jours le délai de recours contre une décision de transfert. Je précise que ce délai de sept jours ne s’applique pas en cas de rétention, le délai de recours contre la décision de transfert étant fixé à quarante-huit heures en rétention.

Le présent amendement vise ainsi à suspendre ce délai de quarante-huit heures en cas « d’entrave à l’exercice du recours ». Or cette notion n’existe pas en droit ; elle sera difficile à apprécier en pratique et pourrait même constituer une source supplémentaire de contentieux.

En tout état de cause, tout étranger en rétention peut déposer un recours , les services de la police aux frontières n’entravant pas ce droit. Je rappelle aussi que les associations interviennent en rétention pour aider les étrangers dans leur démarche.

Enfin, il me semble impossible de prévoir une telle suspension pour les seuls migrants relevant du statut Dublin, à l’exclusion de l’ensemble des étrangers placés en rétention.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérard Collomb, ministre dÉtat. Demande de retrait ou, sinon, avis défavorable. D’une part, il existe une possibilité d’accompagnement juridique ; d’autre part, l’intervention du juge des libertés et de la détention est une garantie.

Mme la présidente. Madame Costes, l’amendement n° 18 rectifié est-il maintenu ?

Mme Josiane Costes. Oui, madame la présidente.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 18 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote sur l’article.

M. David Assouline. Avant les explications de vote sur l’ensemble du texte, j’ai peut-être là une dernière chance d’obtenir une réponse du ministre à la question que j’ai posée. Je repose donc cette question, en considérant que l’absence de toute réponse vaudrait visiblement confirmation du constat que j’ai dressé, celui d’une pratique illégale. Dans le cas contraire, le ministre doit apporter un démenti ou m’expliquer en quoi elle est légale.

Il n’est pas acceptable que cette interpellation tout à fait légitime que je fais en tant que parlementaire ne reçoive aucune réponse. En tant que représentant de la République, j’ai constaté une situation absolument anormale dont l’État est à l’origine, et je pose donc la question : place-t-on en centre de rétention des « dublinés », même pour une courte durée, alors que la loi ne le permet pas, à tout le moins tant que le présent texte n’aura pas été adopté ?

J’aimerais être soutenu par l’ensemble de nos collègues, chargés comme moi de faire la loi, car cette question est légitime.

Mme Esther Benbassa. L’année est longue !

M. David Assouline. Je pose donc une nouvelle fois ma question, puisque c’est ma dernière chance pour aujourd’hui. Je la poserai peut-être également par écrit ou au cours des prochains débats.

Mme la présidente. Monsieur Assouline, vous avez été entendu puisque M. le ministre d’État demande la parole.

Mme Esther Benbassa. Vous allez enfin avoir une réponse !

M. Gérard Collomb, ministre dÉtat. Je veux dire à M. Assouline que M. Warsmann, l’auteur de cette proposition de loi, proposait avant tout de combler un vide juridique faisant suite à une décision de la Cour de justice de l’Union européenne visant à l’origine non pas la France, mais la République tchèque. Par la suite, la Cour de cassation a estimé qu’il fallait mieux définir le risque de fuite. C’est donc bien ce à quoi s’emploie ce texte.

S’agissant des conditions de rétention, monsieur Assouline, je ne suis ministre de l’intérieur que depuis huit mois. Et je ne pense pas que, dans cet espace de temps, les conditions dans les centres de rétention se soient brusquement dégradées. Et si de mauvaises conditions régnaient auparavant, peut-être le gouvernement précédent que vous souteniez avec ardeur avait-il quelques responsabilités en la matière ? (Exclamations amusées sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

En tout cas, en tant que ministre de l’intérieur, j’essayerai de faire en sorte que vous n’ayez plus à me poser cette question à l’avenir.

M. David Assouline. Vous ne répondez pas à ma question !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 2.

(Larticle 2 est adopté.)

Article 2
Dossier législatif : proposition de loi permettant une bonne application du régime d'asile européen
Explications de vote sur l'ensemble (début)

Article 3 (nouveau)

I. – Le huitième alinéa de l’article L. 561-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est remplacé par cinq alinéas ainsi rédigés :

« La décision d’assignation à résidence est motivée. Elle peut être prise pour une durée maximale de six mois, renouvelable une fois dans la même limite de durée, par une décision également motivée.

« Par exception :

« – dans le cas prévu au 4° du présent article, la décision d’assignation à résidence peut être renouvelée tant que l’interdiction de retour ou l’interdiction de circulation sur le territoire français demeure exécutoire ;

« – dans le cas d’un étranger faisant l’objet d’un arrêté d’expulsion en application des articles L. 523-3 à L. 523-5, la durée maximale de six mois ne s’applique pas ;

« – dans le cas prévu au 5° du présent article, la durée maximale de six mois ne s’applique pas. Au-delà d’une durée de cinq ans, le maintien sous assignation à résidence fait l’objet d’une décision spécialement motivée faisant état des circonstances particulières justifiant cette prolongation au regard, notamment, de l’absence de garanties suffisantes de représentation de l’étranger ou si sa présence constitue une menace grave pour l’ordre public. »

II. – Au dernier alinéa de l’article L. 111-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, au troisième alinéa de l’article 39 de l’ordonnance n° 2000-371 du 26 avril 2000 relative aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers dans les îles Wallis et Futuna, au troisième alinéa de l’article 41 de l’ordonnance n° 2000-372 du 26 avril 2000 relative aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers en Polynésie française et au troisième alinéa de l’article 41 de l’ordonnance n° 2002-388 du 20 mars 2002 relative aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers en Nouvelle-Calédonie, le mot : « neuvième » est remplacé par le mot : « treizième ».

III. – À l’avant-dernier alinéa du I de l’article L. 561-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, le mot : « trois » est remplacé par le mot : « sept ».

Mme la présidente. L’amendement n° 29, présenté par Mme Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Esther Benbassa.

Mme Esther Benbassa. En cohérence avec nos précédents amendements, nous demandons également la suppression de l’article 3 de la présente proposition de loi.

Ce dernier, introduit sur l’initiative de la commission des lois, prévoit, pour les étrangers faisant l’objet d’une interdiction judiciaire du territoire, que le maintien sous assignation à résidence au-delà d’une durée de cinq ans fasse désormais l’objet d’une décision expresse spécialement motivée qui énonce les circonstances particulières justifiant cette prolongation, au regard notamment de l’absence de garanties suffisantes de représentation de l’étranger ou si cette présence constitue une menace grave pour l’ordre public.

Inutile, franchement, de revenir en détail sur cette disposition, qui suit la philosophie de la proposition de loi : gardons les étrangers sous la main et reconduisons le plus grand nombre à la frontière. Peu importe les violations du droit et les atteintes au droit d’asile, peu importe le prix de tout cela : quarante-cinq jours de rétention, la reconduite à la frontière, tout cela coûte beaucoup d’argent public et peu importe que tout cela soit inutile, puisque nombre de ceux qui seront reconduits, comme je l’ai déjà dit, reviendront.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Avis défavorable.

Cet article a été introduit sur l’initiative de votre serviteur pour tenir compte d’une décision rendue par le Conseil constitutionnel en décembre dernier dans le cadre d’une question prioritaire de constitutionnalité.

Il vise, je le redis devant notre Haute Assemblée, les étrangers condamnés pénalement par les tribunaux français et interdits de rester sur le territoire après l’exécution de leur peine. Certains d’entre eux sont assignés à résidence, le temps de pouvoir faire exécuter cette interdiction du territoire. Le Conseil constitutionnel demande que cette assignation à résidence ne soit pas sans terme pour ne pas contrevenir à la liberté d’aller et venir. Il demande donc à l’État de fixer un délai.

En la circonstance, nous avons proposé un délai de cinq ans au terme duquel les motifs, ainsi que les conditions d’exécution des décisions prises pendant cet intervalle, sont impérativement repris dans une nouvelle décision.

Il faut absolument garantir la possibilité d’exercer un contrôle sur certaines de ces personnes, qui peuvent parfois présenter un réel danger. C’est la raison pour laquelle j’ai proposé à la commission des lois, qui l’a accepté, que l’on règle ce problème juridique maintenant, le Conseil constitutionnel ayant donné à notre pays jusqu’à la fin du mois de juin 2018 pour ce faire.

Or nous ignorons – et je le dis très librement devant la Haute Assemblée – si l’examen du futur texte sur l’asile et l’immigration – si tant est que cette mesure y soit transcrite – sera définitivement achevé à cette date. C’est donc par précaution et par esprit de responsabilité que j’ai proposé d’insérer cet article dans cette proposition de loi.