M. Olivier Jacquin. La branche a besoin d’un socle social solide, qui assure son attractivité pour les salariés, sachant qu’une part importante des métiers du transport ferroviaire présentent des contraintes fortes pour les salariés. C’est une condition du développement d’un transport ferroviaire de qualité et sûr.

Afin d’éviter le développement de pratiques de dumping social allant à l’encontre des objectifs du présent projet de loi, il est nécessaire que les décisions qui seront prises dans le cadre de la convention collective prévalent sur d’éventuels accords d’entreprise portant sur les mêmes sujets. Une telle approche est cohérente avec le fait que, à défaut d’aboutissement de la négociation de branche, la législation prévoit que l’État intervienne par décret.

Nous utilisons là une spécificité de la convention collective nationale de la branche ferroviaire, qui figure à l’article L. 1321-3-1 du code des transports.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Cornu, rapporteur. Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Élisabeth Borne, ministre. Un tel dispositif s’inscrit en rupture avec les évolutions du droit du travail les plus récentes, visant à donner la primauté aux accords d’entreprise négociés par les partenaires sociaux de proximité. Vous ne serez donc pas surpris, monsieur le sénateur, que le Gouvernement soit défavorable à votre amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.

M. Olivier Jacquin. J’ai été moi-même surpris de découvrir que cette disposition figurait dans la convention collective nationale de la branche ferroviaire, étant donné l’ambiance présidant aujourd’hui à la négociation des accords… Cela m’a cependant bien été confirmé.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Élisabeth Borne, ministre. La primauté de l’accord de branche vaut pour les seules dispositions relatives au temps de travail, pour des raisons de sécurité, comme dans tous les métiers du transport. Les autres mesures relèvent du droit commun. Je confirme donc l’avis défavorable du Gouvernement.

Mme la présidente. L’amendement n° 218 est-il maintenu, monsieur Jacquin ?

M. Olivier Jacquin. S’il s’agit des dispositions relatives au temps de travail liées aux questions de sécurité, je le maintiens.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Élisabeth Borne, ministre. Je reprécise que la primauté de l’accord de branche existe aujourd’hui – et sera maintenue – en ce qui concerne les dispositions relatives au temps de travail, pour des raisons de sécurité. Or vous visez là d’autres dispositions, pour lesquelles il n’y a pas d’enjeu de sécurité.

M. Olivier Jacquin. Dans ces conditions, je retire l’amendement, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 218 est retiré.

Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 103, présenté par Mme Assassi, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Alinéas 23 à 26

Replacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

« III. – Le refus du salarié n’emporte aucune conséquence sur la poursuite de son contrat de travail.

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Cet amendement est défendu.

Mme la présidente. L’amendement n° 172 rectifié, présenté par MM. Gold, Arnell et A. Bertrand, Mme M. Carrère, MM. Castelli, Collin et Corbisez, Mme Costes, MM. Dantec, Gabouty, Guérini et Guillaume, Mme Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et MM. Léonhardt, Menonville, Requier et Vall, est ainsi libellé :

Alinéa 24, première phrase

Remplacer les mots :

la même région ou, à défaut, situé sur le territoire national dans l’entreprise

par les mots :

le même département ou dans un département limitrophe

La parole est à M. Éric Gold.

M. Éric Gold. Dans le cas d’un refus de transfert d’un salarié dont le taux moyen d’affectation au service transféré sur les douze mois est inférieur à 50 %, l’article 2 quinquies prévoit actuellement que ce salarié se voie proposer une offre d’emploi dans la même région ou, à défaut, sur le territoire national de l’entreprise.

Il nous paraît préférable de proposer une offre d’emploi alternative dans le département de résidence du salarié ou les départements limitrophes, car le dispositif actuel fait peser un trop grand risque de bouleversement de la vie du salarié et de sa famille.

Cet amendement vise donc à mieux protéger les intérêts des salariés, tout en restant dans le cadre de la réforme.

Mme la présidente. L’amendement n° 180 rectifié, présenté par MM. Corbisez, Arnell et Collin, Mme Costes, M. Dantec, Mme N. Delattre, M. Guillaume, Mme Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et MM. Menonville et Requier, est ainsi libellé :

Alinéa 24, première phrase

Supprimer les mots :

ou, à défaut, situé sur le territoire national

La parole est à M. Jean-Pierre Corbisez.

M. Jean-Pierre Corbisez. Il y a eu l’amendement du méchant, voici maintenant l’amendement du gentil ! (Sourires.)

Alors que mon collègue Éric Gold propose de retenir, pour les transferts de personnel, un périmètre départemental, je suggère de fixer un cadre régional.

Il est vrai que le transfert d’une partie de l’activité de la SNCF à un nouvel opérateur emporte des conséquences non négligeables pour les agents de l’entreprise publique. Certes, le projet de loi comporte des garde-fous et des dispositions protégeant les employés, mais il me semble nécessaire de le faire évoluer concernant la question de la mobilité professionnelle en cas de refus du transfert.

Comme l’a dit Éric Gold, la référence au territoire national paraît tout à fait excessive, surtout s’agissant d’agents dits d’exécution, auxquels un changement de lieu d’affectation pouvant s’opérer à l’échelle du territoire national poserait de réelles difficultés familiales, sociales et financières.

Vous avez évoqué tout à l’heure, madame la ministre, des exemples de transferts de personnel entre des entreprises privées telles que Transdev ou Veolia. Voilà quelques mois, j’étais encore vice-président d’un syndicat mixte des transports. Effectivement, l’entreprise entrante doit reprendre les salariés de l’entreprise sortante, mais les chauffeurs de la première récupèrent les « bonnes » lignes, tandis que ceux de la seconde doivent assurer les horaires décalés… S’il existe une garantie de reprise du personnel, les conséquences du transfert peuvent néanmoins être très négatives pour les salariés concernés. Dans le même ordre d’idées, à l’occasion de fusions-absorptions de grands groupes agroalimentaires au niveau européen, on a parfois proposé aux salariés des emplois en Slovénie, en Slovaquie ou même en Amérique du Sud, à 300 ou 400 euros par mois !

Si vous estimez que, pour l’affectation d’un salarié refusant le transfert, le périmètre départemental est trop étroit, acceptez au moins de retenir le périmètre régional.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Cornu, rapporteur. La commission est défavorable à l’amendement n° 103, comme je l’avais indiqué par anticipation tout à l’heure.

Pour ce qui concerne l’amendement n° 172 rectifié, la limite départementale n’est vraiment pas suffisante pour assurer le reclassement des salariés. La commission y est donc défavorable.

J’en viens à l’amendement n° 180 rectifié de M. Corbisez. Au départ, j’avais prévu un reclassement à l’échelle du territoire national, mais les syndicats qui ont bien voulu échanger avec moi m’ont indiqué que ce périmètre était trop large et qu’il serait préférable de retenir l’échelon régional. Cependant, un reclassement au sein du périmètre régional ne sera pas toujours possible. C’est pourquoi j’ai voulu trouver un équilibre, en donnant la priorité à l’échelon régional tout en laissant la possibilité de passer à l’échelon national si nécessaire, afin d’éviter le licenciement.

Ne souhaitant pas modifier cette rédaction équilibrée, qui a reçu l’aval des syndicats que j’ai évoqués, la commission donne un avis défavorable à cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Élisabeth Borne, ministre. S’agissant de l’amendement n° 103, je mesure parfaitement le caractère sensible de la disposition en question, pour en avoir beaucoup discuté avec certaines organisations syndicales.

Je suis convaincue que les dispositions relatives à la cessation du contrat de travail n’auront pas à s’appliquer. Je l’ai dit tout à l’heure, seuls les cheminots majoritairement affectés au service transféré et résidant dans la région pourront être concernés par un transfert obligatoire. Ils exerceront alors le même métier, en résidant au même endroit, en bénéficiant de garanties de très haut niveau en matière d’emploi, de régime de retraite, de maintien de la rémunération, de facilités de circulation, d’accès à la médecine de soins ou de logement.

Pour autant, eu égard au principe de transfert obligatoire, le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’amendement n° 103.

J’en viens aux amendements nos 172 rectifié et 180 rectifié.

Le périmètre départemental est à mes yeux trop restreint. Il faut donner toutes ses chances au reclassement, en élargissant son périmètre à l’échelle régionale, voire nationale. Les cheminots ont l’habitude de la mobilité : elle est, pour ces agents à statut comme pour les fonctionnaires, la contrepartie de la garantie de l’emploi. Le Gouvernement est défavorable à ces deux amendements.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 103.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 172 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Gérard Cornu, rapporteur. Je pensais que MM. Gold et Corbisez retireraient leurs amendements.

Monsieur Corbisez, je vous le dis solennellement, la mise en œuvre des dispositions de l’amendement n° 180 rectifié pourrait être contraire aux intérêts des salariés. Pour le démontrer, je prendrai un exemple très concret.

Vous voulez limiter le périmètre de reclassement à la région. Notre collègue Pascale Bories a été adjointe au maire de Villeneuve-lès-Avignon, qui appartient à la communauté d’agglomération d’Avignon. Or Avignon se trouve dans la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, et Villeneuve-lès-Avignon dans la région Occitanie…

Si votre amendement était adopté, un tel transfert deviendrait impossible en raison d’un simple changement de région. Vous constatez quels problèmes une telle disposition pourrait susciter.

Voilà pourquoi cette mesure irait au détriment des salariés, ce que je tiens absolument à éviter. À mon sens, je le répète, il faut garantir l’équilibre défini.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Corbisez, pour explication de vote.

M. Jean-Pierre Corbisez. Monsieur le rapporteur, nous avons déjà beaucoup travaillé avec vous sur ce texte, et je vous propose d’apporter une légère modification à mon amendement : il s’agirait d’y introduire la mention « de la région ou des régions limitrophes ».

Cette rédaction permettrait d’élargir davantage le périmètre considéré. Les espaces ainsi définis pourraient couvrir plusieurs centaines de kilomètres ! Or, pour aller de Paris à Marseille, il faut franchir seulement 900 kilomètres.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Gérard Cornu, rapporteur. Monsieur Corbisez, pardonnez-moi d’insister, mais les salariés ont besoin de souplesse ! Certains d’entre eux travaillent dans une région, puis, pour tel ou tel motif, notamment pour des raisons familiales ou pour retrouver leur province natale, souhaitent être mutés très loin du lieu où ils se trouvent.

Prenons l’exemple d’une personne née à Marseille, et qui travaille à Lille.

M. Louis-Jean de Nicolaÿ. C’est Bienvenue chez les Chtis ! (Sourires.)

M. Gérard Cornu, rapporteur. Eh bien, cette personne pourra souhaiter bénéficier d’un poste vacant à Marseille. De grâce, laissons de la souplesse !

En l’occurrence, les dispositions que vous proposez relèvent d’une logique de contrainte, et je le regrette sincèrement. Le Sénat décidera par son vote. J’espère toutefois qu’il ne supprimera pas une mesure de progrès en optant pour une restriction sociale.

Mes chers collègues, sur ce projet de loi, j’ai accompli un important travail au titre des mesures sociales (M. Jean-Pierre Corbisez acquiesce.), et je ne voudrais pas que toutes ces dispositions, acquises en commission, soient détricotées ou dénaturées en séance. C’est toujours ce que je redoute lors des débats en séance publique. En la matière, il ne faut pas légiférer au détriment des salariés !

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.

M. Daniel Chasseing. Monsieur le rapporteur, dans ce cas, il fallait voter l’amendement n° 172 rectifié, présenté par M. Gold. (M. le rapporteur manifeste son impatience.)

Ces dispositions étaient très claires : en vertu de cet amendement, les salariés « dont le taux moyen d’affectation au service transféré sur les douze derniers mois est inférieur à 50 % » devaient de se voir proposer « une offre d’emploi disponible dans le même département ou dans un département limitrophe. »

Mme Élisabeth Borne, ministre. Non, ce n’était pas mieux !

Mme la présidente. Mes chers collègues, le règlement de notre assemblée défend de modifier un amendement dès lors qu’il a été appelé en discussion. Il existe certes des exceptions, notamment lorsqu’un consensus semble se dessiner.

Toutefois, en l’occurrence, M. le rapporteur semble très réservé, et il paraît difficile de rectifier cet amendement.

M. Hervé Maurey, président de la commission de laménagement du territoire et du développement durable. Tout à fait !

M. Pierre Cuypers. Excellent !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 180 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 263, présenté par M. Cornu, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéa 29

Remplacer les mots :

de ses

par le mot :

des

La parole est à M. le rapporteur.

M. Gérard Cornu, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Élisabeth Borne, ministre. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 263.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 219, présenté par MM. Jacquin, Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Bonnefoy et Cartron, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte et Madrelle, Mmes Préville et Tocqueville, MM. Daudigny, Tissot et M. Bourquin, Mmes de la Gontrie et Lienemann, MM. Cabanel, Montaugé, Durain et Kerrouche, Mmes Meunier et Lubin, MM. Courteau, Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 29

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Par dérogation aux mêmes articles L. 2261-14, L. 2261-14-2 et L. 2261-14-3 et en l’absence d’accord ou de convention de substitution prévue au premier alinéa dudit article L. 2261-14, les salariés issus de l’opérateur cédant conservent les droits individuels résultant des conventions, décisions unilatérales, usages ou accords qui leur étaient applicables avant leur transfert dans le nouvel opérateur.

La parole est à M. Jean-Michel Houllegatte.

M. Jean-Michel Houllegatte. Il s’agit là d’un amendement de sécurisation et d’incitation à la négociation.

Mes chers collègues, vous le savez, l’article L. 2261-14 du code du travail précise que, lorsque l’application d’une convention ou d’un accord est mise en cause par telle ou telle mesure, notamment une cession, cette convention continue de produire effet jusqu’à l’entrée en vigueur de la convention qui se substitue à elle, et ce pendant une durée d’un an.

De plus, en l’absence de convention, il existe un socle de garanties, lequel porte exclusivement sur le niveau des rémunérations – ce dernier ne peut être inférieur à la rémunération versée lors des douze derniers mois.

Avec cet amendement, nous vous proposons que, par dérogation à ces dispositions du code du travail, et en l’absence d’accord ou de convention de substitution, les salariés issus de l’opérateur cédant conservent les droits individuels résultant des conventions, décisions unilatérales, usages ou accords qui leur étaient applicables avant leur transfert au sein du nouvel opérateur. Cette disposition complémentaire doit inciter les partenaires sociaux à une contractualisation positive de substitution en cas de transfert d’activité.

La survivance, au-delà de la durée légale d’un an, des droits individuels issus des accords, décisions et usages préexistants est sécurisante pour les salariés transférés. De plus, elle rend indispensable l’inventaire des droits et pratiques existants dans le périmètre de chaque lot transféré, afin de déterminer le cadre social nouveau qui devrait s’y substituer en tenant compte des enjeux économiques et sociaux propres au marché concerné.

Cette mesure est nécessaire pour garantir la confiance et l’engagement des salariés dans le cadre de l’ouverture à la concurrence, alors même que seraient prévues des situations de transfert obligatoire. Ce sont là des cas de figure que nous avons déjà évoqués.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Cornu, rapporteur. Mes chers collègues, en la matière comme précédemment, nous sommes face à une question d’équilibre.

En vertu de cet amendement, quand, au sein du nouvel opérateur, un accord d’entreprise n’a pas été conclu, les droits individuels résultant des accords collectifs, des décisions unilatérales ou des usages en vigueur au sein de l’opérateur sortant seraient applicables aux salariés transférés.

Une telle mesure reviendrait à transférer l’ensemble des droits individuels prévus par le statut et figurant dans les actes réglementaires et non réglementaires propres à la SNCF. Je songe, par exemple, aux usages locaux conférant des avantages aux salariés, lesquels sont nombreux et parfois non écrits.

Or, je le rappelle, le texte issu des travaux de la commission garantit aux salariés de SNCF Mobilités l’essentiel des droits prévus par le statut : la garantie de l’emploi, l’affiliation au régime spécial de retraites et le maintien d’une rémunération identique comprise dans un sens large – cette dernière englobe en effet la rémunération fixe, les primes, les indemnités, les allocations et les gratifications.

Ces droits auront d’ailleurs vocation à être complétés par un accord de branche. En outre, chaque opérateur pourra étendre ces avantages par des accords collectifs qui lui seront propres.

Le texte de la commission contient donc déjà des garanties fortes pour les salariés transférés. Monsieur Houllegatte, préservons l’équilibre atteint : je suis déjà allé très loin, ne faisons pas de surenchère !

En conséquence, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Élisabeth Borne, ministre. Cet amendement vise à préciser que les droits individuels des salariés sont acquis, sans limites, dans l’attente de la conclusion d’un accord de substitution.

Monsieur Houllegatte, vous le savez, un tel dispositif serait totalement dérogatoire aux principes généraux du code du travail. (M. Jean-Michel Houllegatte acquiesce.) Or, compte tenu de toutes les garanties qui sont déjà inscrites dans ce projet de loi et que M. le rapporteur vient de rappeler, il ne peut s’agir que de dispositions très ponctuelles ou très locales.

Comme vous, je souhaite que les salariés concernés soient rapidement couverts par un accord de substitution. Mais la durée légale doit suffire, comme dans tous les autres secteurs : c’est là un principe général fixé par le code du travail. Ce délai incitera les partenaires sociaux à une contractualisation positive.

Pour ces raisons, j’émets un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 219.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 123 rectifié bis, présenté par MM. Longeot et Gremillet, est ainsi libellé :

Alinéa 31, première phrase

Supprimer le mot :

, allocations

La parole est à M. Jean-François Longeot.

M. Jean-François Longeot. Au travers de cet amendement, j’attire l’attention de la Haute Assemblée sur une difficulté : inscrire le mot « allocations » dans ce projet de loi sans prévoir l’application du traitement fiscal et des taux de cotisations salariales et patronales actuellement pratiqués par le groupe public ferroviaire aurait des conséquences négatives, non seulement pour les nouveaux opérateurs, mais aussi pour les salariés.

Il serait donc plus sage de supprimer ce terme : à mon sens, mieux vaut débattre de ce sujet lors de la négociation de la convention collective.

Mme la présidente. L’amendement n° 135, présenté par MM. Malhuret, Fouché et les membres du groupe Les Indépendants – République et Territoires, est ainsi libellé :

Alinéa 31

Après le mot :

allocations

insérer les mots :

, en assurant le même traitement fiscal et en conservant les mêmes taux en matière de cotisations salariales et patronales,

La parole est à M. Daniel Chasseing.

M. Daniel Chasseing. Cet amendement tend à garantir, pour le même travail, l’application du même traitement fiscal et des mêmes taux de cotisation aux allocations des salariés transférés de la SNCF aux nouveaux opérateurs.

Les allocations aujourd’hui perçues par les salariés du groupe public ferroviaire correspondent à des défraiements, par exemple au titre des repas ou du découchage.

L’article L. 2121-23 du code du travail précise que les employés SNCF dont le contrat de travail se poursuit auprès d’un autre opérateur ferroviaire conservent un niveau de rétribution égal ou supérieur à leur ancienne rémunération, s’ils exercent, bien sûr, le même travail.

Afin de garantir une équité entre les entreprises ferroviaires, il est nécessaire de garantir l’application des taux de cotisations patronales et salariales pour un même travail.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Cornu, rapporteur. Monsieur Longeot, j’entends bien les arguments que vous avez avancés en présentant l’amendement n° 123 rectifié bis.

Toutefois, je le répète, il convient de maintenir l’équilibre atteint, lequel repose, pour partie, sur des engagements pris envers certains syndicats. Je ne suis donc pas favorable à ce que les allocations soient exclues du dispositif. Il faut respecter les négociations menées, d’autant qu’en la matière l’on suit parfois une ligne de crête bien étroite ! Je vous demande donc de bien vouloir retirer cet amendement.

Monsieur Chasseing, au travers de l’amendement n° 135, qui m’apparaît en somme comme un amendement de repli, vous attirez notre attention sur un véritable problème, et je comprends la préoccupation que vous exprimez.

À vos yeux, la prise en compte des allocations dans la rémunération garantie aux salariés transférés doit assurer aux nouveaux opérateurs une équité fiscale et sociale. Il s’agit là d’une préoccupation tout à fait légitime. Dans sa rédaction actuelle, je le rappelle, ce projet de loi garantit aux salariés qui sont transférés un montant de rémunération, mais il n’oblige pas les nouveaux entrants à verser eux-mêmes de telles allocations aux salariés transférés.

Par ailleurs, il est vrai que les taux de cotisations patronales et salariales appliqués à la rémunération des salariés de la SNCF diffèrent de ceux des opérateurs privés : c’est bien là le problème. On pourrait presque aboutir à une situation de concurrence déloyale. (M. Jean-Marc Gabouty manifeste son scepticisme.)

Cette difficulté tient notamment au fait que, compte tenu de la garantie de l’emploi dont bénéficient les salariés sous statut, la SNCF dispose de son propre régime d’assurance chômage, lequel est moins coûteux.

Toutefois, à mon sens, c’est dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale, le PLFSS, qu’il convient d’adapter les montants de taux de cotisations salariales et patronales. En tant que rapporteur de ce projet de loi, j’estime qu’un tel travail n’est pas de ma compétence. Or, d’ici à ce que les transferts dont il s’agit aient lieu, le Parlement examinera deux projets de loi de financement de la sécurité sociale… Nous avons donc le temps d’agir.

J’y insiste, les dispositions de cet amendement sont tout à fait justes. Il ne faudrait pas que les avantages dont dispose SNCF Mobilités conduisent à des situations de concurrence déloyale. Mais ces questions ne sont pas du ressort de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable.

Voilà pourquoi je vous invite vivement à présenter ce très sérieux amendement lors de l’examen du prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale. Pour l’heure, et dans cette attente, je vous invite à le retirer.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Élisabeth Borne, ministre. L’amendement n° 123 rectifié bis tend à écarter la prise en compte des allocations dans la rémunération garantie en cas de transfert.

C’est à la suite des concertations menées avec deux organisations syndicales que les allocations ont été introduites parmi les éléments garantis à ce titre. Le but est de permettre aux agents concernés par les transferts de conserver l’intégralité de leur rémunération : il s’agit là du principe de droit commun en pareil cas.

J’ajoute que ces dispositions ne devraient pas conduire à faire peser des charges excessives sur les nouveaux opérateurs. L’objectif est simplement d’assurer le maintien intégral de la rémunération. C’est là, me semble-t-il, une condition sine qua non de l’acceptabilité des transferts, laquelle est indispensable pour favoriser au maximum le volontariat, conformément aux vœux du Gouvernement.

Monsieur Longeot, je vous invite donc à retirer cet amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

L’amendement n° 135, quant à lui, vise à assurer le maintien du régime social et fiscal des allocations. Je comprends le souci d’assurer un traitement équitable des entreprises de la branche ferroviaire.

Entre autres rôles, l’observatoire du dialogue au sein de la branche aura précisément pour mission d’alerter le Gouvernement sur d’éventuels sujets fiscaux ou sociaux posant difficulté. Ces derniers auraient dès lors vocation à être traités dans le cadre du projet de loi de finances ou du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Monsieur Houllegatte, je vous propose de retirer cet amendement. À défaut, j’émettrais, au nom du Gouvernement, un avis défavorable.