M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Les auteurs de ces amendements abordent un vrai sujet, particulièrement pour cette année. Dans la presse, toutes les associations, toutes les fondations tirent la sonnette d’alarme quant à la baisse des dons. Ce n’est pas un fantasme, cette baisse est réelle, elle atteint 15 %, voire 20 %, soit un niveau plus élevé encore que ce qu’indiquent les objets de ces amendements.

La commission des finances a auditionné France Générosité et un certain nombre d’organismes qui ont tous fait état du même phénomène, dû à plusieurs facteurs.

Qu’on le veuille ou non, la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune, l’ISF, en est un, car certains de ceux qui y étaient soumis le réduisaient en donnant. Cette possibilité subsiste toutefois avec l’IFI. L’augmentation de la CSG des retraités en est un autre. Elle pèse sur leur pouvoir d’achat alors que, historiquement, ceux-ci sont les donateurs les plus importants, étant libérés des charges de famille ou des placements. Les retraités avaient tendance à être généreux, la hausse de la CSG les touche directement et diminue leurs capacités.

Un autre facteur, encore, est lié à la mise en œuvre du prélèvement à la source, qui a créé des incertitudes, puisque le Gouvernement n’a annoncé que récemment la création d’un crédit d’impôt reprenant une partie des dons. Le taux du prélèvement à la source lui-même, qui sera appliqué chaque mois sur les salaires à compter du 1er janvier 2019, ne tient pas compte des dons effectués et des réductions d’impôt qu’ils permettent. C’est d’ailleurs un des reproches que le Sénat adresse à ce système. Plutôt que de prendre, d’un côté, une fraction du salaire et d’en restituer une partie, de l’autre, par un chèque, il aurait été plus facile que l’administration fiscale calcule le taux du prélèvement en tenant compte des réductions d’impôt de manière à permettre un prélèvement mensualisé contemporain.

Cela aurait permis d’éviter la survenue de ce phénomène : avec la mise en œuvre du prélèvement à la source, les particuliers sont amenés à différer leurs dons et les associations, les fondations et les organismes reconnus d’utilité publique déplorent tous une baisse importante de la générosité des Français.

Cette année, le coût du dispositif fiscal au titre de 2018 risque donc d’être inférieur à ce qu’il était précédemment – c’est-à-dire à peu près 1,5 milliard d’euros, M. le secrétaire d’État nous le confirmera peut-être –, en raison de cette forte baisse des dons.

Les amendements proposés visent à améliorer cette situation. Nous rencontrons toutefois un obstacle : nous ne disposons pas de chiffrage. Il est donc très difficile pour moi de trancher entre le relèvement de l’abattement à 75 % ou à 68 %, voire la hausse du plafond de 20 % à 30 % du revenu imposable.

La commission comprend la portée de ces mesures, mais faute de chiffrage, son avis est très réservé sur ces amendements, uniquement en raison de leur coût, s’agissant d’une niche très importante. Le Gouvernement aura peut-être un avis différent.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. L’avis du Gouvernement est tout aussi réservé que celui de la commission, considérant, d’une part, les difficultés que poserait l’adoption de ces amendements en termes de coût budgétaire, d’autre part, que le taux de 75 % de réduction d’impôt sur le revenu, à l’exception de ce qui a été rappelé par le sénateur Olivier Léonhardt, s’applique à un certain nombre d’organismes particuliers, reconnus pour leur utilité sociale spécifique. Nous avons tous en tête les associations qui en bénéficient principalement.

Par ailleurs, en écho aux propos du rapporteur, à la demande du Président de la République, le Premier ministre, Gérald Darmanin et moi-même avons pris la décision de verser, au 15 janvier prochain, un acompte de 60 % sur le montant du crédit ou de la réduction d’impôt liés à des dons pour les contribuables, afin que la mise en œuvre du prélèvement à la source ne se traduise pas par une quelconque perte de trésorerie au premier semestre.

Je forme le vœu que ce versement d’acomptes de 60 % au 15 janvier soit de nature à inciter nos concitoyens à donner de nouveau.

L’avis est donc défavorable.

M. le président. Mes chers collègues, vous allez devoir voter sur trois amendements en discussion commune qui tendent à proposer des taux de déduction d’impôt différents, respectivement 75 %, 70 % et 68 %.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Le premier vise également à relever le plafond de 20 % à 30 % du revenu imposable !

M. le président. La parole est à M. Olivier Léonhardt, pour explication de vote sur l’amendement n° I-974 rectifié.

M. Olivier Léonhardt. Je souhaite rappeler pourquoi nous avons choisi 75 % plutôt que 70 % ou 68 % : c’est tout simplement parce que c’est le taux qui s’applique déjà à l’IFI. Je ne comprends donc pas l’argument selon lequel il serait réservé à des associations humanitaires très particulières : c’est le taux en vigueur pour l’IFI.

Il me semble qu’il faut mettre tout le monde au même niveau. Je vous rappelle que ce sont les moins riches qui bénéficient le plus des déductions d’impôt dans notre pays, car ce sont eux qui donnent le plus au monde associatif.

M. le président. La parole est à M. Jacques-Bernard Magner, pour explication de vote.

M. Jacques-Bernard Magner. Je propose que le groupe socialiste et républicain se rallie à la proposition de M. Léonhardt. Nous voterons donc pour la proposition visant à porter la réduction à 75 %.

M. le président. Monsieur Magner, retirez-vous en conséquence l’amendement n° I-331 rectifié ?

M. Jacques-Bernard Magner. Non, monsieur le président, nous le maintenons en attendant de connaître le sort de celui de M. Léonhardt !

M. le président. La parole est à M. Claude Raynal, pour explication de vote.

M. Claude Raynal. Je suis bien entendu d’accord avec Jacques-Bernard Magner, mais je demande à nos collègues du RDSE de faire preuve d’une complète logique. Nous voterons évidemment cet amendement, qui vise à porter l’abattement à 75 % ; je trouve d’ailleurs que l’idée d’aligner le taux commun sur celui qui s’applique à l’IFI est convaincante.

En revanche, il me semble qu’il faudra en tirer toutes les conclusions : s’il y a un problème de financement des associations, c’est tout simplement en raison de la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune. J’espère donc que nos amis radicaux voteront avec nous l’amendement visant à le recréer quand nous le proposerons !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-974 rectifié.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 27 :

Nombre de votants 342
Nombre de suffrages exprimés 339
Pour l’adoption 113
Contre 226

Le Sénat n’a pas adopté.

La parole est à M. François Bonhomme, pour explication de vote sur l’amendement n° I-102 rectifié ter.

M. François Bonhomme. J’ai bien écouté le rapporteur général et je souscris à son point de vue et à son diagnostic. Les associations tirent en effet le signal d’alarme. France Générosité, le syndicat des associations qui font appel aux dons, a aussi manifesté une très forte inquiétude quant à l’effet psychologique des dernières mesures du Gouvernement. Dans la réalité, leurs conséquences sont déjà tangibles : les retraités, qui constituent une part importante des donateurs, ont vécu très difficilement celles qui les concernent, comme la hausse de la CSG ou la non-indexation des pensions, et cela se répercute sur les dons.

Laure Darcos a cité l’Institut Pasteur et la fondation Apprentis d’Auteuil, laquelle est présente dans tous nos territoires. Ces organismes nous ont dit très clairement que cette situation se traduisait, pour l’un, par des centres de recherche qui ne verront pas le jour, pour l’autre, par des formations moins nombreuses.

M. le président. La parole est à Mme Laure Darcos, pour explication de vote.

Mme Laure Darcos. Je suis désolée pour mon collègue Olivier Léonhardt, mais il est vrai que j’avais regardé le code général des impôts en préparant mon amendement. J’ai choisi de proposer 70 % en étant consciente que le taux de 75 % était réservé à des associations très spécifiques, comme la Banque alimentaire ou les Restos du cœur. Je sais que, symboliquement, vous vouliez vous aligner sur le chiffre de l’IFI.

Quant à moi, j’ai choisi un chiffre au doigt mouillé, entre 66 % et 75 %, pour renforcer l’incitation par une déduction fiscale supplémentaire. En outre, comme l’a fait notre rapporteur général, je souhaitais alerter l’opinion publique sur la situation des associations, qui va devenir dramatique.

J’espère que M. Jacques-Bernard Magner se ralliera à mon amendement, 70 % étant toujours mieux que 68 % !

M. le président. La parole est à M. Jacques-Bernard Magner, pour explication de vote.

M. Jacques-Bernard Magner. Notre collègue Laure Darcos a bien anticipé : le groupe socialiste et républicain votera en faveur de cet amendement et du taux de 70 % qu’il vise à instaurer.

Nous prendrons ainsi date en espérant un vote positif, de manière que les associations et les fondations reconnues d’utilité publique sachent que le Sénat a tenté de leur éviter de se trouver en difficulté durant le prochain exercice.

M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.

M. Philippe Dallier. Je voterai l’amendement n° I-102 rectifié ter, bien qu’on ne connaisse pas clairement son coût, car il faut tirer le signal d’alarme. Les questions de pouvoir d’achat expliquent en partie cette situation, mais, à mon sens, le changement que va représenter le passage au prélèvement à la source en est le principal responsable.

Heureusement, le Gouvernement a pris des dispositions, qui n’étaient pas prévues à l’origine, afin de verser un acompte de 60 % en janvier. Monsieur le secrétaire d’État, peut-être faudrait-il aller plus loin et augmenter cet acompte ? Avec ce nouveau système, une bonne partie des contribuables doit en effet faire une avance de trésorerie. Le système mis en place pour janvier résout le problème en partie, mais augmenter l’acompte aurait été une meilleure solution, moins coûteuse pour l’État que l’adoption de l’amendement qui nous est proposé, et que je vais tout de même voter !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Je souhaite répondre au sénateur Philippe Dallier en deux points.

Tout d’abord, en fixant l’acompte à 60 %, nous nous sommes assurés qu’il n’y aurait pas de pertes de trésorerie à l’échelle du premier semestre, jusqu’à la régularisation par les contribuables.

Ensuite, si l’acompte n’excède pas 60 %, au-delà des considérations budgétaires et de l’aggravation du besoin de financement infra-annuel de l’État, c’est pour une raison simple : en gardant 40 % à solder au moment de la notification de l’impôt en septembre, après la déclaration de revenus effectuée au printemps, nous pouvons procéder à des régularisations. Au mois de janvier, nous ne disposons que d’une estimation des dons réalisés, qui tient compte de l’année n-1 ; si un contribuable donne moitié moins que l’année précédente, il faut opérer une régularisation. Avec un acompte à 100 %, les opérations de retour auraient été extrêmement lourdes.

M. Philippe Dallier. C’est aussi de la trésorerie !

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Ces amendements me rappellent Le Choix de Sophie ! Nous savons que les associations ont absolument besoin de trésorerie, que la recherche n’est pas financée, nous savons également que les Français sont très généreux et qu’il faut protéger cette générosité. Nous voudrions donc voter cet amendement.

D’un autre côté, la commission des finances se bat tous les jours pour ne pas augmenter la dépense publique. Cette situation est complexe, mais le groupe Union Centriste va suivre, à regret, l’avis du rapporteur général.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-102 rectifié ter.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 2 quinquies, et l’amendement n° I-331 rectifié n’a plus d’objet.

Article additionnel après l'article 2 quinquies - Amendement n° I-331 rectifié
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2019
Article additionnel après l'article 2 sexies - Amendement n° I-449

Article 2 sexies (nouveau)

Au huitième alinéa du 3° de l’article 83 du code général des impôts, après le mot : « chevaux, », sont insérés les mots : « du type de motorisation du véhicule ».

M. le président. L’amendement n° I-194 rectifié, présenté par MM. Genest, Darnaud et Rapin, Mmes Bories et Noël, MM. B. Fournier, Karoutchi, Babary, D. Laurent, Priou et Cuypers, Mme Deromedi, MM. Revet, Sido et Pellevat, Mme Morhet-Richaud et M. Meurant, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Jacques Genest.

M. Jacques Genest. Monsieur le secrétaire d’État, vous voulez ajouter un nouveau paramètre pour déterminer les déductions fiscales : la motorisation du véhicule.

Cela risque de pénaliser un membre de la classe laborieuse, par exemple, qui possède une voiture un peu ancienne avec beaucoup de chevaux fiscaux, et qui n’a pas les moyens de la changer, par rapport à quelqu’un de plus aisé, qui aura les moyens d’acheter une voiture hybride avec très peu de chevaux fiscaux, laquelle sera, de surcroît, subventionnée par l’État.

Il me semble qu’il faut conserver les paramètres actuels – la puissance et les kilomètres parcourus – afin de ne pas pénaliser davantage ceux qui le sont déjà tous les jours par les taxes.

Je vois d’ailleurs que le Gouvernement va également présenter un amendement à ce sujet.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. On peut être partagé à propos de cet article, puisque modifier le barème pour le rendre plus « vert » en incluant certaines motorisations n’encourage pas à changer de véhicule et n’aide pas les ménages les plus modestes à le faire, au contraire des systèmes de primes à la conversion, d’aides à l’achat ou de prêts à taux zéro.

Prendre en compte le type de motorisation pour la détermination des frais réels ne profite qu’à ceux qui ont les moyens de changer de véhicule.

Pour cette raison, sans s’opposer à l’article, la commission s’en remet à la sagesse du Sénat, sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Le Gouvernement souhaite le retrait de cet amendement, pour trois raisons.

La première est que nous ne considérons pas cette disposition comme une incitation à changer de véhicule. Personne n’imagine, en effet, que la revalorisation du barème kilométrique permettant une déduction à l’occasion de la déclaration de revenus suffirait à provoquer un tel changement. Il s’agit, par cet article, de corriger une injustice, puisque les véhicules électriques font l’objet d’un barème kilométrique extrêmement bas – un cheval fiscal. Nous souhaitons donc le fixer à un niveau correct.

Je tiens à rassurer le sénateur Jacques Genest, cet amendement n’entraîne aucune diminution des déductions que nous autorisons pour les véhicules à essence ou diesel. Il s’agit simplement d’améliorer celle qui s’applique aux véhicules électriques.

Deuxième raison : l’adoption de cet amendement priverait d’objet l’amendement n° I-808 du Gouvernement, qui le suit, et qui vise justement à améliorer la déduction et le montant retenu par kilomètre pour les véhicules à moteur thermique, notamment pour les petites cylindrées. Il serait dommage de ne pas saisir cette occasion.

La troisième raison est plus malicieuse, mais dans la mesure où c’est Jacques Genest qui a signé cet amendement, je vais la développer.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Ce sont des histoires ardéchoises !

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Je m’étonne, monsieur le sénateur, que vous vous opposiez à une revalorisation de la déduction des frais kilométriques pour les véhicules électriques, alors qu’ayant longtemps présidé un syndicat, qui vous est cher, la dernière action phare que vous ayez mise en place était précisément l’installation de bornes de recharge pour les véhicules électriques dans votre département.

Le Gouvernement souhaite donc le retrait de cet amendement, afin de favoriser le recours aux véhicules électriques, mais aussi de permettre, si vous en êtes d’accord, l’adoption de l’amendement n° I-808, qui vise à revaloriser l’ensemble des barèmes.

M. le président. La parole est à M. Jacques Genest, pour explication de vote.

M. Jacques Genest. Je ne souhaitais pas polémiquer avec vous, monsieur le secrétaire d’État, puisque je vous connais bien par ailleurs. Si j’ai installé cent cinq bornes de recharge en Ardèche, c’est bien pour promouvoir l’usage de la voiture électrique. Aujourd’hui, toutefois, vous proposez d’avantager ceux qui sont déjà favorisés et qui peuvent en acheter une. Le pauvre petit travailleur laborieux n’en a pas les moyens. Par respect pour les plus humbles, je maintiens donc cet amendement. (M. Laurent Duplomb applaudit.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-194 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l’article 2 sexies est supprimé, et l’amendement n° I-808 n’a plus d’objet.

L’amendement n° I-808, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

Le huitième alinéa du 3° de l’article 83 du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Après le mot : « chevaux, », sont insérés les mots : « du type de motorisation du véhicule » ;

2° Est ajoutée par une phrase ainsi rédigée : « Le montant admis en déduction en application du barème forfaitaire précité est majoré de 10 % pour les véhicules d’une puissance administrative égale à 3 CV ou moins et de 5 % pour ceux d’une puissance administrative de 4 CV. »

Article 2 sexies (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2019
Article 2 septies (nouveau)

Article additionnel après l’article 2 sexies

M. le président. L’amendement n° I-449, présenté par MM. Bocquet, Savoldelli et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 2 sexies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Au 2° du 3 de l’article 158 du code général des impôts, le taux : « 40 % » est remplacé par le taux : « 20 % ».

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à Mme Céline Brulin.

Mme Céline Brulin. Cet amendement, inspiré d’une proposition formulée voilà quelque temps par le Conseil des prélèvements obligatoires, vise à réduire de 40 % à 20 % le taux de l’abattement proportionnel sur le montant des dividendes perçus.

Historiquement, le taux de cet abattement, qui a remplacé l’avoir fiscal, pouvait se justifier, le taux de l’impôt sur les sociétés étant de l’ordre de 50 %.

Seulement, le taux de cet impôt est en baisse programmée, et, aujourd’hui, le taux effectif ne dépasse pas 12 % ou 13 %. Certains estiment même qu’il est plutôt aux alentours de 8 %, notamment pour les entreprises du CAC 40. Ainsi, la Banque mondiale, dans un rapport rédigé voilà quelques années, a établi que le taux de prélèvement de l’impôt sur les sociétés en France s’établissait à seulement 8,7 %, soit très loin du taux facial, souvent agité comme une sorte d’épouvantail.

À la vérité, l’impôt sur les sociétés est tellement dénaturé par les dérogations, régimes particuliers et exemptions d’assiette qu’il est aujourd’hui avéré que son rendement est inférieur aux sommes mobilisées pour en alléger le poids sur la comptabilité des entreprises…

En pratique, on constate qu’il est très faible pour les grandes entreprises, qui jouent habilement des niches fiscales et des dérogations, et plus élevé, hélas, pour les petites entreprises, qui ne peuvent quasiment rien « optimiser » – je mets évidemment ce verbe entre guillemets.

De fait, les bénéfices substantiels échappent à cette imposition grâce à divers dispositifs, notamment celui que nous appelons la « niche Copé ». Mais le summum est sans doute atteint avec le régime des sociétés mères et celui d’intégration fiscale, dont le coût excédera le rendement de l’impôt l’année prochaine.

Dans son rapport sur la progressivité des prélèvements obligatoires et leurs effets redistributifs sur les ménages, le Conseil des prélèvements obligatoires a estimé à quelque 2 milliards d’euros pour 2009 le coût fiscal de cet abattement sur les dividendes. L’évaluation des voies et moyens pour 2019 chiffre les pertes de recettes à plus de 2 milliards d’euros.

Mes chers collègues, nous vous invitons donc à suivre cette juste préconisation du Conseil des prélèvements obligatoires en soutenant notre amendement !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Le Conseil des prélèvements obligatoires n’est pas allé jusqu’à proposer la division par deux du taux de l’abattement qui a remplacé l’avoir fiscal. Avis défavorable sur l’amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-449.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 2 sexies - Amendement n° I-449
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2019
Article additionnel après l'article 2 septies - Amendement n° I-217 rectifié

Article 2 septies (nouveau)

I. – Le montant de la taxe foncière d’un bien immobilier mis gracieusement à la disposition d’une association d’accueil et de logement des personnes défavorisées ou de ressources modestes reconnue d’utilité publique est déductible de l’impôt sur le revenu du propriétaire dudit bien.

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I du présent article est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. le président. L’amendement n° I-1013, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Le présent amendement tend à supprimer l’article 2 septies, qui permet aux propriétaires mettant gratuitement un logement à la disposition d’une association reconnue d’utilité publique qui réalise des actions en faveur de l’accueil et du logement des personnes défavorisées de déduire le montant de la taxe foncière correspondante de leur impôt sur le revenu.

Cette mesure, qui se cumulerait avec les avantages fiscaux déjà octroyés à raison de la mise à disposition à titre gratuit d’un local au profit d’un organisme d’intérêt général, constituerait un pur effet d’aubaine pour ces propriétaires.

En effet, il est déjà admis que la mise à disposition à titre gratuit d’un local, lorsqu’elle est prévue dans le cadre d’un contrat de location, ouvre droit à la réduction d’impôt au titre des dons réalisés par les particuliers pour un montant équivalent au loyer que le propriétaire renonce à percevoir. Par ailleurs, le loyer que le propriétaire renonce à percevoir reste soumis à l’impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus fonciers, desquels peut être déduite la taxe foncière.

Il n’y a donc pas lieu de permettre que la taxe foncière, déjà déductible du revenu foncier, qui, de surcroît, ouvre lui-même droit à une réduction d’impôt au titre des dons, puisse être, en plus, déduite de l’impôt sur le revenu.

Quant aux centres d’hébergement temporaire ou d’urgence, ils sont déjà exonérés de taxe foncière pour une durée de quinze ans, en application de l’article 1384 D du code général des impôts, aux termes duquel « les locaux acquis, aménagés ou construits en vue de la création de structures d’hébergement temporaire ou d’urgence faisant l’objet d’une convention entre le propriétaire ou le gestionnaire des locaux et le représentant de l’État dans le département et destinées aux personnes [en difficulté] sont exonérés de taxe foncière sur les propriétés bâties pendant une durée de quinze ans ».

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. La commission n’a pas proposé la suppression de cet article, mais il ne paraît pas forcément très opérant. D’ailleurs, j’observe que nos collègues du groupe La République En Marche proposent de le modifier. Réservés sur un dispositif dont nous ne voyons pas très bien comment il fonctionnerait, nous sommes plutôt bienveillants à l’égard de l’amendement de suppression.

M. le président. Je propose de laisser l’un des auteurs de l’amendement n° I-878 le présenter maintenant.

Cet amendement, présenté par MM. Yung, Bargeton, Patient, Rambaud, Amiel et Buis, Mme Cartron, MM. Cazeau, de Belenet, Dennemont, Gattolin, Hassani, Haut, Karam, Lévrier, Marchand, Mohamed Soilihi, Navarro et Patriat, Mme Rauscent, M. Richard, Mme Schillinger, M. Théophile et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 1

Après le mot :

association

insérer les mots :

, spécialement agrée à ce titre,

II. – Après l’alinéa 1

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

La liste d’associations agréées permettant le bénéfice de la déductibilité de taxe foncière est fixée par un arrêté conjoint des ministres chargés du budget et des affaires sociales.

Un décret fixe les conditions d’application du présent article.

La parole est à M. Richard Yung.