M. le président. L’amendement n° II-708, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Remplacer cet alinéa par douze ainsi rédigés :

I. – A. 1° Il est institué, pour 2019, un fonds de soutien interdépartemental à destination des départements ;

2° Ce fonds est alimenté, à hauteur de 250 millions d’euros, par un prélèvement proportionnel sur le montant de l’assiette de la taxe de publicité foncière et des droits d’enregistrement perçus par les départements en 2018 en application des articles 682 et 683 du code général des impôts.

B. Les ressources du fonds sont réparties entre les départements en deux fractions :

1° a) La première fraction, dont le montant représente 60 % des ressources définies au 2° du A bénéficie aux départements dont le potentiel financier net par kilomètre carré est inférieur à 50 % du potentiel financier net moyen par kilomètre carré de l’ensemble des départements, et dont le nombre d’habitants par kilomètre carré est inférieur à 70 ;

b) Cette fraction est répartie entre les départements éligibles en fonction d’un indice synthétique plafonné à 1,3 composé pour un tiers du rapport entre le potentiel financier net moyen par habitant de l’ensemble des départements et le potentiel financier net par habitant du département, pour un tiers du rapport entre le revenu moyen par habitant de l’ensemble des départements et le revenu par habitant du département et pour un tiers du rapport entre le taux d’imposition de taxe foncière sur les propriétés bâties du département et le taux moyen national d’imposition de taxe foncière sur les propriétés bâties pour l’ensemble des départements ;

2° a) La seconde fraction, dont le montant représente 40 % des ressources définies au 2° du A, bénéficie aux départements répondant aux critères cumulatifs suivants :

- le produit par habitant perçu par le département en application des droits de mutation à titre onéreux mentionnés aux articles 1594 A et 1595 du code général des impôts est inférieur à 90 % du produit moyen de ces mêmes droits par habitant de l’ensemble des départements ;

- un revenu par habitant inférieur au revenu moyen par habitant de l’ensemble des départements ;

- un taux de pauvreté supérieur ou égal à 15 % ;

b) Cette fraction est répartie entre les départements éligibles en fonction d’un indice synthétique composé pour moitié du rapport entre le potentiel financier net moyen par habitant de l’ensemble des départements et le potentiel financier net par habitant du département et pour moitié du rapport entre le revenu moyen par habitant de l’ensemble des départements et le revenu par habitant du département. Pour l’application du présent b, l’indice est pondéré par la population.

C. 1° Pour l’application du présent I, le potentiel financier net utilisé est le potentiel financier minoré des prélèvements et majoré des reversements au titre des fonds prévus aux articles L. 3335-1, L. 3335-2, L. 3335-3 et L. 3335-4 du code général des collectivités territoriales.

2° Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application du présent I, notamment la définition et les dates de référence des données utilisées.

La parole est à M. le ministre.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, cet amendement, évoqué lors de la discussion générale, a pour objet la péréquation horizontale, à hauteur de 250 millions d’euros.

Je le rappelle, c’est la première fois que nous procédons de cette façon. Lors du congrès de Rennes, nous avions proposé à l’Assemblée des départements de France, l’ADF, de trouver un accord sur des critères de péréquation horizontale entre les départements qui bénéficient de recettes dynamiques et ceux qui ont des recettes moins dynamiques.

Le président de l’ADF, après une concertation au sein de son association, nous a proposé différents critères pour répartir 250 millions d’euros, mais seulement sur l’année 2019.

Il s’agit pour nous d’un point de départ, qui reprend l’intégralité de la proposition de l’ADF.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Charles Guené, rapporteur spécial. Cet amendement est issu d’un accord conclu avec l’ADF.

Aussi, la commission émet un avis favorable.

M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.

M. Marc Laménie. Certains départements se trouvent dans des situations délicates, notamment à cause des restes à charge sur les compétences à caractère social.

Il existait auparavant un fonds d’urgence pour les situations les plus complexes. Je ne suis plus conseiller général depuis 2015, mais mon département des Ardennes perd des habitants, comme d’autres. Il semblerait pourtant que ce nouveau dispositif de péréquation horizontale lui fasse perdre 1,5 million d’euros. Des départements en difficulté seraient donc pénalisés !

Le fossé risque encore de se creuser avec les départements en difficulté démographique et économique.

M. le président. La parole est à M. Olivier Henno, pour explication de vote.

M. Olivier Henno. Effectivement, un accord a été trouvé avec l’ADF sur la péréquation horizontale. Le dispositif proposé présente toutefois un certain nombre d’inconvénients.

Ainsi, la contribution des départements repose sur les droits de mutation à titre onéreux, les DMTO. Or certains départements présentent des DMTO importants, mais des restes à charge qui le sont plus encore. Pour le département du Nord, par exemple, les simulations font apparaître une contribution d’environ 8 millions d’euros, pour un versement de 16 millions d’euros.

Je m’abstiendrai donc sur cet amendement, car je ne suis pas certain que la contribution soit aussi favorable qu’elle devrait l’être pour les départements les plus en difficulté.

M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.

M. Philippe Dallier. Tous les ans, on essaye de corriger le tir, si j’ose dire, pour ce qui concerne les départements. En effet, les sommes perdues par les départements depuis le transfert de compétences sont considérables !

En Seine-Saint-Denis, le reste à charge sur les allocations individuelles de solidarité, les AIS, s’élève à 200 millions d’euros cette année. En cumul depuis 2004, on doit atteindre environ 2 milliards d’euros, soit l’équivalent de la dette du département. Quels que soient les dispositifs que l’on met en place, on ne s’en sortira pas !

La situation au sein de l’ADF me semble en outre un peu plus complexe que celle que vous décrivez, monsieur le ministre. Le président du conseil départemental de Seine-Saint-Denis a d’ailleurs écrit au Premier ministre pour lui dire que ces mesures étaient insuffisantes.

Après l’interruption de séance, je viens d’échanger avec le président du conseil départemental, Stéphane Troussel. Même en cumulant les trois dispositifs, il semblerait que la Seine-Saint-Denis touchera moins que ce qu’elle percevait avec le fameux fonds d’urgence de 200 millions d’euros.

Le département ne s’en sortira pas ! Les mineurs non accompagnés coûtent 37 millions d’euros au département, 10 % seulement de cette somme étant prise en charge. Et dorénavant, les mineurs qui reviennent de Syrie – c’est une nouveauté – dépendent du tribunal de Bobigny, ce qui a suscité 3 millions d’euros de dépenses supplémentaires l’an dernier.

Vous pouvez toujours multiplier les emplâtres sur les jambes de bois, mais ce département continuera de s’enfoncer. Il n’a plus de capacités d’investissement. Nous ne parvenons plus à faire face à nos obligations de dépenses en matière sociale. Il faut vraiment trouver une solution pérenne, plutôt que de voter, chaque année, un dispositif ad hoc.

Entre les 10 milliards d’euros que l’État devait débourser s’il prenait en charge toutes ces dépenses et ce qu’il verse actuellement, l’écart est considérable.

Parmi les raisons qui me font plaider pour une métropole du Grand Paris véritablement intégrée, qui supprimerait les départements de la petite couronne et celui de Paris, il y a bien cette raison-là. La Seine-Saint-Denis reste un département entièrement à part, qui continue de s’enfoncer, malgré les points positifs que l’on peut relever.

Comme mon collègue du Nord, je m’abstiendrai sur cet amendement. La somme de 250 millions d’euros est certes supérieure à celle qui a été versée l’an dernier, mais c’est toujours nettement insuffisant.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Vincent Éblé, président de la commission des finances. Avant d’émettre le moindre avis sur le fond de cet amendement, je voudrais m’arrêter un instant sur la méthode.

Nous n’avons eu connaissance de l’amendement n° II-991, qui est directement lié à celui-ci, qu’à neuf heures trente ce matin, heure du début de la séance publique. Très sincèrement, on ne peut pas travailler ainsi, ce n’est tout simplement pas possible ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste, ainsi quau banc des commissions. – M. Jean-Yves Leconte applaudit également. – MM. Philippe Dallier et Roger Karoutchi renchérissent.)

Ce type de dispositif est très technique, et le sujet ne date pas du milieu de la semaine dernière, il est connu depuis de nombreuses années.

Dans ces conditions, je ne sais pas ce qui est le mieux : s’abstenir, au risque qu’un sujet aussi important ne soit arbitré par seulement deux ou trois voix, ou voter contre.

Vous pourriez, monsieur le ministre, revenir devant nous dans quelques mois avec un texte spécifique, qui aura été préparé de manière sérieuse. D’ailleurs, nous sommes censés être saisis au printemps prochain d’un projet de loi de finances rectificative consacré à la fiscalité locale ; ce sujet pourrait, le cas échéant, y être intégré.

En tout cas, saisir la commission et le Sénat à la dernière seconde n’est pas une méthode acceptable. Nous ne sommes pas en situation de faire notre travail : interroger les experts, vérifier que le consensus existe bien au sein de l’ADF, dont les composantes sont diverses, comme chacun sait.

M. Philippe Dallier. Il n’y a pas de consensus au sein de l’ADF, c’est certain !

M. Vincent Éblé, président de la commission des finances. Ce qui est certain, c’est qu’il n’y a pas de consensus à ce stade dans les territoires.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite préciser à nouveau la manière dont les choses se sont passées et présenter, le cas échéant, mes excuses au Sénat, si ses conditions de travail ne sont pas optimales.

J’ai cru comprendre que le Gouvernement, sûrement pour de bonnes raisons d’ailleurs, s’est beaucoup vu reprocher, ces derniers mois, de ne pas travailler avec les associations d’élus.

Sur le sujet qui nous occupe, j’ai fait le choix – nouveau, me semble-t-il – de faire confiance à l’ADF et de ne pas jouer sur les fractures qui peuvent exister. Vous le savez, j’ai été maire et président de conseil départemental. Plusieurs d’entre vous sont d’anciens présidents de conseil départemental, et vous connaissez de l’intérieur, comme moi, la manière dont l’ADF fonctionne – il ne revient pas au ministre que je suis de s’exprimer sur ce point.

Lors du congrès de Rennes de l’ADF, le Gouvernement, respectueux de la place des associations, a voulu laisser ses différentes instances – commission plénière, bureau… – proposer des critères de péréquation horizontale. L’amendement n° II-708 vise à reprendre les propositions de l’ADF à ce sujet ; il a été déposé la semaine dernière, vous avez donc pu y travailler.

Monsieur Dallier, ce dispositif est-il suffisant ? Telle était votre interrogation. En tant qu’ancien président de conseil départemental, j’ai évidemment un avis sur cette question, qui ne date pas d’hier, chacun le sait. J’ai d’ailleurs écouté avec intérêt les débats que nous avons eus mercredi sur le fonds de solidarité pour les départements d’Île-de-France, le FSDRIF, qui répond en partie à la problématique de la Seine-Saint-Denis. Nous referons le point sur votre département et, je vous le redis, je me tiens à votre disposition pour avancer sur les différents points que vous avez évoqués, y compris sur la situation de la métropole du Grand Paris.

Toutefois, chemin faisant, nous nous sommes aperçus que l’accord trouvé au sein de l’ADF pour cette péréquation horizontale entraînait des effets de bord pour un certain nombre de départements. Il ne me revient pas de m’exprimer ni de porter un jugement sur les critères retenus par l’association, mais le fait est qu’il faut prendre en compte les conséquences de ce dispositif. Tel est l’objet de l’amendement n° II-991, qui a été déposé, il est vrai, tardivement – je vous prie, monsieur le président de la commission des finances, mesdames, messieurs les sénateurs, de m’en excuser.

Je le redis, il ne s’agit aucunement de critiquer l’accord trouvé au sein de l’ADF, mais de prendre en compte ses effets de bord. Il est vrai qu’il nous a fallu un peu de temps pour élaborer ce second amendement, qui vient affiner les choses.

J’anticipe quelque peu sur l’organisation des débats, monsieur le président, mais je voudrais préciser dès maintenant que cet amendement n° II-991 vise à créer une garantie pour un certain nombre de départements.

Je précise aussi d’ores et déjà, monsieur le président, que le Gouvernement présentera dans quelques minutes une version rectifiée de cet amendement, pour répondre par avance à quelques interrogations et à la situation particulière de certains départements, dont celui du Nord.

Mesdames, messieurs les sénateurs, nous n’avons pas du tout voulu manquer de respect à la Haute Assemblée, mais vous devez prendre en compte le fait que nous travaillons en collaboration avec un autre partenaire, l’ADF, et qu’il fallait donc un peu de temps pour caler les choses.

Voilà les explications que je voulais donner, avec calme, au Sénat.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Je suis d’accord avec le ministre sur un point : ce sujet ne date pas d’hier ! Le dispositif de solidarité à l’égard des départements les plus pauvres a été mis en place il y a longtemps – je m’en souviens, j’étais déjà membre de la commission des finances – et nous n’allons pas résoudre la question aujourd’hui.

Sur la méthode, je rejoins malheureusement ce qu’a dit le président de la commission des finances. La commission était réunie hier soir entre dix-neuf heures trente et vingt heures trente. Entre les réunions de la commission et la séance publique, nous sommes amenés à travailler littéralement jour et nuit !

Mon intervention portera plus précisément sur l’amendement n° II-991. Monsieur le ministre, auriez-vous découvert entre hier soir et ce matin que l’accord trouvé au sein de l’ADF avait des effets de bord ? On en vient à ne même pas respecter le règlement du Sénat, puisque tous les amendements sont censés être d’abord examinés par la commission compétente !

Au mieux, la commission va donner un avis de sagesse. Si j’avais une bassine, je me laverais les mains devant vous, mes chers collègues !

Monsieur le ministre, mes chers collègues, nous risquons fort de nous apercevoir dans quelques jours que le dispositif ne fonctionne pas. Les présidents de département reviendront alors vers nous, en nous disant que nous avons voté n’importe quoi ! Si nous étions un tant soit peu sérieux, nous rejetterions donc ce second amendement. Nous pourrions alors étudier ce dispositif dans un collectif budgétaire, par exemple dans celui qui sera consacré aux collectivités territoriales – il est vrai que nous ne savons pas quand il sera déposé…

Je ne compte plus le nombre de fois où nous avons été amenés à voter des mesures pour mieux y revenir quelques semaines plus tard.

Il se trouve par ailleurs que, depuis cette année, nous n’avons plus de filet de sécurité, monsieur le ministre, puisque le collectif budgétaire de fin d’année ne contient plus de mesures fiscales. Auparavant, on nous renvoyait souvent vers le collectif, quand on voulait temporiser…

M. Julien Bargeton. Et vous le regrettez ?

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Non, monsieur Bargeton, mais je vous rappelle que le ministre de l’économie et des finances et celui de l’action et des comptes publics nous ont expliqué qu’ils voulaient changer de méthode, qu’ils entendaient travailler avec nous en amont, que nous n’aurions plus d’amendements de dernière minute ou non évalués…

Nous y avons cru ! Malheureusement, les vieux travers, les trucs bricolés à la dernière minute, réapparaissent très vite. Je le redis, si nous adoptons le dispositif qui nous est proposé, nous risquons de nous apercevoir dans quelques jours ou semaines qu’il ne fonctionne pas et devoir y revenir dans le collectif de printemps consacré aux collectivités locales.

L’esprit de sérieux devrait donc nous amener à rejeter l’amendement n° II-991 ; pour ma part, je ne peux pas y souscrire, et je m’abstiendrai.

Il est aussi possible que tout cela fonctionne, mais si l’amendement n° II-708 a bien été travaillé avec l’ADF, je ne suis pas sûr que ce soit le cas pour l’autre amendement. Certaines collectivités pourraient donc réagir de manière négative.

Je souscris aux propos du président de la commission des finances : on ne peut pas travailler dans ces conditions ! Qui plus est, si j’ai bien compris, le ministre a annoncé qu’il rectifiait l’amendement qu’il vient à peine de déposer ! Il faut vraiment changer de méthode.

M. le président. La parole est à M. Éric Bocquet, pour explication de vote.

M. Éric Bocquet. Je voudrais tout d’abord féliciter le rédacteur de l’amendement n° II-708. Je vais vous en lire une phrase, qui est un peu longue – ce n’est pourtant pas du Proust… (Sourires.)

« Cette fraction est répartie entre les départements éligibles en fonction d’un indice synthétique plafonné à 1,3 composé pour un tiers du rapport entre le potentiel financier net moyen par habitant de l’ensemble des départements et le potentiel financier net par habitant du département, pour un tiers du rapport entre le revenu moyen par habitant de l’ensemble des départements et le revenu par habitant du département et pour un tiers du rapport entre le taux d’imposition de taxe foncière sur les propriétés bâties du département et le taux moyen national d’imposition de taxe foncière sur les propriétés bâties pour l’ensemble des départements. » (Exclamations amusées. – Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, du groupe socialiste et républicain, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)

M. Philippe Dallier. Et maintenant, interrogation écrite !

M. Éric Bocquet. Les ministères emploient vraiment des génies…

Or la situation des départements a été rappelée : les dépenses sociales explosent, la pauvreté s’aggrave – l’actualité nous le rappelle tous les jours – et ils dépensent énormément d’argent pour aider les gens qui ne vont pas bien.

Et là, le Gouvernement nous trouve un dispositif vraiment génial, une innovation formidable : un fonds de soutien interdépartemental – jusqu’ici, tout va bien – de 250 millions d’euros. Chapeau bas !

Vous me direz que c’est déjà quelque chose, mais en fait non, parce qu’il est abondé par les propres ressources des départements ! C’est exactement comme si quelqu’un vous disait : « Donnez-moi votre portefeuille pour que je vous laisse une pièce ! » (Sourires.)

Le groupe CRCE votera contre cet amendement. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, ainsi que sur des travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à M. Thierry Carcenac, pour explication de vote.

M. Thierry Carcenac. Bien des choses ont été dites sur la situation des départements et sur le financement des allocations individuelles de solidarité, dont le reste à charge oscille entre 9 milliards et 10 milliards d’euros. Il est donc dérisoire de parler d’enveloppes de 250 millions d’euros par-ci, 150 millions d’euros par-là, ou de péréquation verticale ou horizontale… Et je ne parle pas des critères de répartition, qui ont l’air particulièrement intéressants, Éric Bocquet vient de le souligner.

Je ne sais pas si l’ADF est d’accord avec cette proposition et ces critères, mais pour ma part, je suis assez perplexe, parce que ce dispositif, dérisoire, n’est pas du tout à la hauteur de la situation. Il me semble que nous devrions en reparler à un autre moment. Ce n’est pas aujourd’hui que nous arriverons à régler ce problème.

Dans le dispositif de péréquation horizontale de 250 millions d’euros qui est prévu, le département que je représente est à la fois contributeur et bénéficiaire ! À la fin, les choses s’équilibrent à peu près, ce qui montre clairement les insuffisances de cette mesure.

Pour autant, même si elle n’est pas du tout à la hauteur, on ne peut pas priver complètement les départements de cette péréquation. C’est pourquoi j’aurais plutôt tendance à m’abstenir sur cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Sébastien Meurant, pour explication de vote.

M. Sébastien Meurant. Monsieur le ministre, je veux vous parler d’un département que vous connaissez bien, le Val-d’Oise.

Cher Philippe Dallier, il n’y a pas que la Seine-Saint-Denis qui glisse dans les abîmes financiers. Le Val-d’Oise n’a rien à envier à la Seine-Saint-Denis !

M. Philippe Dallier. Nous ferons les comparaisons !

M. Sébastien Meurant. La deuxième ville du Val-d’Oise vient de nommer son quatrième maire en deux ans. Il faut être bien conscient de la situation. Et contrairement à la Seine-Saint-Denis, le Val-d’Oise est exclu de facto des projets du Grand Paris en matière de transports. Ce sont donc de nombreux départements qui connaissent un appauvrissement.

En ce qui concerne l’amendement, il est évident que nous ne disposons pas des éléments pour juger en connaissance de cause. Pourtant, nous siégions tard le soir et tôt le matin !

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Je soutiens évidemment la position du président et du rapporteur général de la commission des finances.

Monsieur le ministre, heureusement que l’examen des derniers amendements de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » a été décalé à ce matin ! Nous devions normalement terminer mercredi soir… Si nous n’avions pas eu ce décalage, comment auriez-vous fait pour présenter un amendement aussi brillant, inventif et créatif ? (Sourires.)

M. Julien Bargeton. Bonne question !

Mme Nathalie Goulet. Vous comprendrez qu’il ne nous est pas possible d’accepter de telles conditions de travail. C’est pourquoi je ne le voterai pas !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Charles Guené, rapporteur spécial. Nous travaillons effectivement dans des conditions assez déplorables, et je puis comprendre l’énervement qui gagne certaines de nos travées.

Cependant, il faut bien distinguer l’amendement n° II-708, que nous allons maintenant voter et qui ne fait l’objet d’aucun contentieux particulier, et l’amendement n° II-991, éventuellement rectifié comme nous le verrons.

Le premier de ces amendements vise à traduire une rédaction conjointe des départements et du Gouvernement ; il tend à prévoir une péréquation horizontale opérée sur la base des droits de mutation à titre onéreux, les DMTO. Conformément à nos engagements, il me semble que nous devons voter cet amendement.

L’agitation qui vient de parcourir notre assemblée concerne en fait le second amendement, sur lequel nous aurons effectivement un certain nombre de choses à dire. Il faut vraiment distinguer les deux dispositions, et je rappelle que l’avis de la commission a émis un avis favorable sur l’amendement n° II-708.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-708.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° II-991, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 2

Après les mots :

et d’outre-mer

insérer les mots :

, de la métropole de Lyon, de la collectivité de Corse, aux collectivités territoriales de Guyane et de Martinique, et au Département de Mayotte,

II. – Alinéa 23

Rédiger ainsi cet alinéa :

E. – L’attribution annuelle définitive revenant à chaque département éligible, calculée dans les conditions prévues au D, ne peut excéder 10 % du montant total à répartir au titre du présent fonds ni , pour la seule année 2019, être inférieure à 50 % du montant perçu en 2018 au titre du fonds de soutien exceptionnel à destination des départements et collectivités prévu à l’article 95 de la loi n° 2017-1775 du 28 décembre 2017 de finances rectificative pour 2017.

La parole est à M. le ministre.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite rectifier cet amendement, en supprimant l’une des phrases de son II.

Le Gouvernement avait initialement envisagé un plafond. Nous souhaitons à présent le supprimer, afin de ne conserver que la garantie de sortie.

M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° II-991 rectifié, présenté par le Gouvernement, et ainsi libellé :

I. – Alinéa 2

Après les mots :

et d’outre-mer

insérer les mots :

, de la métropole de Lyon, de la collectivité de Corse, aux collectivités territoriales de Guyane et de Martinique, et au Département de Mayotte,

II. – Alinéa 23

Rédiger ainsi cet alinéa :

E. – L’attribution annuelle définitive revenant à chaque département éligible, calculée dans les conditions prévues au D, pour la seule année 2019, ne peut être inférieure à 50 % du montant perçu en 2018 au titre du fonds de soutien exceptionnel à destination des départements et collectivités prévu à l’article 95 de la loi n° 2017-1775 du 28 décembre 2017 de finances rectificative pour 2017.

Veuillez poursuivre, monsieur le ministre.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Je voudrais tout d’abord dire à M. Bocquet que la phrase dont il s’est gentiment moqué a été rédigée par l’ADF, et non par les collaborateurs de mon ministère.

M. Éric Bocquet. Cela ne change rien à sa qualité ! (Sourires.)

M. Sébastien Lecornu, ministre. Cela ne change surtout rien au fait que nous traitons de sujets complexes ! En tout cas, je suis heureux, en tant qu’élu local et grand électeur, de savoir que les sénateurs ont pour souci de simplifier les choses…

Il est vrai que nous ne travaillons pas dans des conditions optimales, puisque nous cherchons ici à corriger les effets de bord que nous avons découverts sur le premier amendement.

Madame Goulet, nous avons le droit d’avoir de la chance… Je dois d’ailleurs remercier le Sénat d’avoir longuement débattu des articles et amendements relatifs à la mission « Relations avec les collectivités territoriales ». Cela nous permet de revenir devant vous ce matin pour affiner les choses. Il n’est jamais trop tard pour bien faire !

Cet amendement a pour objet la mise en place d’une garantie pour les départements qui sortent du dispositif.

Je vous rappelle, mesdames, messieurs les sénateurs, qu’il y a deux jours ce principe de garantie a retenu toute votre attention en ce qui concerne la part « cible » de la dotation de solidarité rurale. Il s’agissait de garantir aux communes rurales qui perdent le bénéfice de la DSR « cible » de percevoir 50 % du montant de la dotation de l’année précédente. Un tel dispositif permet d’amortir le choc pour les communes concernées.

Le présent amendement vise à reprendre le même principe pour un département qui perdrait l’éligibilité au fonds de soutien, qui est maintenant appelé fonds de stabilisation et qui est créé pour trois ans. La garantie qui est prévue permet à ces départements de percevoir, en 2019, quelque 50 % de l’attribution de l’année 2018, ce qui leur permet d’amortir le choc.

À partir de là, des effets de bord apparaissent entre certains départements pauvres selon leur population. Certes, c’est une question qui est moins consensuelle au sein de l’ADF, mais je ne crois pas qu’il faille monter les collectivités les unes contre les autres. Les difficultés rencontrées par les départements sont très diverses, et il faut les appréhender de manière plurielle.

Outre le principe de la garantie, le Gouvernement proposait initialement de mettre en place un plafond pour l’attribution de la dotation. L’amendement tel qu’il est rectifié vise à prévoir uniquement un principe de garantie en cas de sortie du dispositif. Je crois, mesdames, messieurs les sénateurs, messieurs les rapporteurs spéciaux, que nous partageons ce principe, qui aide à amortir les chocs et qui assure une transition plus douce.

Pour être précis – je m’excuse par avance auprès du sénateur Bocquet, parce que la phrase est un peu longue –, l’amendement n° II-991 rectifié a pour objet que « l’attribution annuelle définitive revenant à chaque département éligible, calculée dans les conditions prévues au D, pour la seule année 2019, ne peut être inférieure à 50 % du montant perçu en 2018 au titre du fonds de soutien exceptionnel à destination des départements et collectivités » concernés.

Il est possible que le texte de l’amendement ainsi rectifié n’emporte pas votre adhésion en termes de méthodes de travail – je m’en suis expliqué et j’ai présenté mes excuses au Sénat –, mais sur le fond, il ne peut que recueillir votre agrément. En prévoyant une garantie de sortie, nous sommes, en tout cas, cohérents avec les travaux que mène habituellement la Haute Assemblée.