M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Tissot. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. Jean-Claude Tissot. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame, monsieur les rapporteurs, madame la présidente de la commission, chers collègues, nous sommes nombreux, dans cet hémicycle, à avoir regretté que la loi qui devait décliner les états généraux de l’alimentation ne soit pas allée plus loin.

Finalement, la loi Égalim n’aura permis ni de garantir un revenu réellement rémunérateur pour les agriculteurs ni d’améliorer réellement l’accès à une alimentation saine, durable et de qualité. Il était donc d’autant plus regrettable que les quelques avancées obtenues au cours de nos travaux aient été retoquées par le Conseil constitutionnel, pour une raison de forme.

Il n’était bien évidemment pas possible pour nous de nous pencher de nouveau sur l’ensemble des dispositions rejetées. Avec cette proposition de loi, notre collègue Marie-Pierre Monier nous invite donc à nous concentrer sur l’amélioration du dispositif relatif aux signes de qualité et d’origine.

Cette démarche me semble tout à fait pertinente, les SIQO étant fortement emblématiques de ce que nous voulons pour l’agriculture et l’alimentation de demain. Ils permettent en effet de valoriser la qualité des produits, le savoir-faire de nos producteurs, y compris à travers le prix de vente.

Avec les SIQO des produits fermiers, seul le producteur reçoit le bénéfice de la plus-value dont il est à l’origine. Ils constituent aussi l’une des réponses à la demande croissante des consommateurs d’une plus grande transparence en matière de qualité et de sécurité alimentaire.

Plusieurs des dispositions de ce texte sont ainsi très attendues par les agriculteurs. La plupart de ces mesures avaient été adoptées à une large majorité, tant dans cette chambre qu’à l’Assemblée nationale. Elles ne devraient donc pas a priori susciter de clivage politique profond entre nous. D’ailleurs, j’imagine que nos collègues du groupe Les Républicains, en saisissant le Conseil constitutionnel, n’avaient pas particulièrement l’intention de faire tomber ces dispositions, qu’ils avaient eux-mêmes soutenues.

Le choix, inhabituel pour un texte qui ne comporte que cinq articles, de deux corapporteurs, issus l’un de notre groupe et l’autre de la majorité sénatoriale, marque cette volonté de parvenir à un consensus large sur cette proposition de loi. Henri Cabanel et Anne-Catherine Loisier, qui étaient rapporteurs de ces mêmes articles pour la loi Égalim, pourront ainsi enrichir nos débats de leur expertise.

Nous aurons peut-être des divergences sur la rédaction « technique » de ces articles, notamment à l’article 4, mais nous souhaitons réellement parvenir à un accord, afin que les SIQO puissent bénéficier de la juste reconnaissance que cette proposition de loi peut leur apporter.

C’est aussi pour cela que nous avons fait le choix, à l’article 1er et, initialement, à l’article 3, de nous en tenir à la rédaction de l’Assemblée nationale lors de la dernière lecture de la loi Égalim. Nous souhaitions ainsi permettre à ce texte d’être le mieux armé pour affronter les écueils de la navette parlementaire.

L’article 2 ne devrait pas poser de difficulté puisqu’il est rédigé dans les mêmes termes que la proposition de loi concernant la Clairette de Die de notre collègue Gilbert Bouchet, laquelle est d’ailleurs annexée au présent texte.

Avec cette proposition de loi, nous avons la possibilité de mieux reconnaître et protéger des produits français qui sont constitutifs de notre patrimoine commun. Je pense, en particulier, aux vins et aux fromages fermiers.

Nous avons l’occasion de redonner de la sérénité aux consommateurs qui veulent pouvoir acheter en confiance des produits de qualité, sains et au moindre impact environnemental. La question de l’étiquetage des miels en est particulièrement symbolique.

Enfin, nous avons une occasion de nous appuyer sur de bonnes pratiques existantes, en les confortant, afin de faire un pas supplémentaire vers le modèle agricole que nous avons le devoir de mettre en place pour notre planète et les générations qui vont nous succéder.

Pour ces raisons, mon groupe votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste. – M. Joël Labbé applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme Françoise Férat. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)

Mme Françoise Férat. Monsieur le président, madame la présidente de la commission, madame, monsieur les rapporteurs, monsieur le ministre, mes chers collègues, le Sénat avait amendé la loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, afin d’améliorer le revenu des agriculteurs et de réduire leurs contraintes réglementaires, d’une part, et de protéger l’information et la santé des consommateurs, d’autre part.

L’Assemblée nationale n’a pas retenu toutes nos remarques, c’est le moins que l’on puisse dire. Le Conseil constitutionnel, quant à lui, a censuré quelques articles, notamment ceux qui étaient exposés dans la proposition de loi de nos collègues Marie-Pierre Monier et Gilbert Bouchet telles que l’affichage de la provenance des vins et du miel ou la notion qualificative de fromages fermiers.

Les raisons invoquées pour exclure ces articles du texte voté par les députés sont qu’ils n’auraient pas de lien avec le texte visant à une alimentation saine et durable. En revanche, le Conseil constitutionnel a validé que la fin des pics à steak ou des plateaux-repas en plastique avaient, quant à eux, bel et bien un rapport avec le texte… Soit !

Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Bonne remarque !

Mme Françoise Férat. Le Sénat a pris acte de cette décision et propose de reprendre certaines des dispositions censurées. Il le fait avec un esprit d’ouverture et de consensus, puisque cette initiative législative émane des groupes socialiste et républicain et Les Républicains, et reprend quelques-unes des dispositions introduites par des membres du groupe Union Centriste. Nous travaillons donc à l’intérêt général.

Si ce texte est voté, monsieur le ministre, soyez convaincant auprès de nos collègues du Palais Bourbon afin qu’eux aussi répondent à l’intérêt général.

M. Jean-Claude Tissot. Tout à fait !

Mme Françoise Férat. Si les sénateurs réintroduisent si rapidement ces mesures, c’est que leur portée est partagée et dense.

D’une part, nous souhaitons protéger nos appellations dans un monde qui tend à s’uniformiser. Les fromages sont l’une des identités de notre patrimoine culinaire français. Ils font partie des ingrédients élémentaires du repas gastronomique français reconnu par l’Unesco, vous l’avez signalé, monsieur le ministre.

D’autre part, il s’agit également d’assurer la compétitivité de la Ferme France, ce qui aurait dû être l’un des objectifs de la loi Égalim.

La concurrence libre et non faussée est un pilier de la construction européenne et des règles qui organisent le marché commun et le commerce international. Par les dispositions présentes et par certains amendements qui seront débattus aujourd’hui, la transparence due aux consommateurs s’améliore : les producteurs français et européens pourront mettre en valeur leurs produits et se servir de cette visibilité retrouvée pour développer leur secteur et, pourquoi pas, augmenter et rendre de la valeur ajoutée à leurs productions.

Si je prends l’exemple du miel, traité à l’article 3, la France en consomme près de 40 000 tonnes par an, ce qui la place parmi les plus forts consommateurs d’Europe. Or seulement 20 000 tonnes au mieux, soit la moitié environ, sont fournies par des apiculteurs français. La valorisation de leur gamme leur donnera un souffle nouveau.

Donner des précisions sur la provenance de l’origine des miels est une idée simple et bienvenue. En effet, on pouvait lire, conformément à la réglementation : « Mélange de miels originaires et non originaires de l’Union européenne »… Autant inscrire « Miel de la planète Terre », on donnerait autant d’informations à l’amateur de produits sucrés ! (Sourires.) Citer les pays, et cela conformément au droit européen, renverse cette tendance. Voilà une sorte de « sur-transposition » des normes européennes en France que personne ne devrait contester !

Les auteurs de la proposition de loi souhaitent également que l’étiquette d’une bouteille de vin ou de tout autre contenant comporte en évidence la mention du pays d’origine afin de ne pas induire en erreur le consommateur, même si des attributs français, comme le nom, un dessin de château, perturbent la compréhension du produit. Les rapporteurs ont estimé que l’article 4 ne changerait pas la donne.

En revanche dans le rapport, une phrase m’interpelle : « La provenance doit donc être précisée selon des formules précisées à l’article 45 de ce règlement : “vin de” ou “produit de”, suivi du nom de l’État membre où les raisins sont “récoltés et transformés en vin” ».

Comme il n’est fait référence qu’aux États membres de l’Union européenne, la rédaction proposée par cette proposition de loi constituera-t-elle une avancée pour la transparence à l’égard des vins des pays tiers ? En tout état de cause, permettez-moi un aparté, à un mois et demi des élections européennes : si l’Europe est souveraine pour l’inscription de la décroissance des ingrédients d’un bien de consommation sur une étiquette, on peut comprendre que nos concitoyens s’interrogent sur son efficacité.

C’est pourquoi je maintiens que définir clairement l’origine de nos produits, notamment pour le miel, épouse parfaitement les attentes des consommateurs français et européens et ne trahit pas l’esprit de l’Union européenne de la défense du droit des consommateurs.

Mme Françoise Férat. Faire apparaître tous les pays et, de surcroît, par ordre d’importance ne choquera pas, je pense, les commissaires de Bruxelles. De plus, monsieur le ministre, je veux croire que vous serez un ambassadeur fidèle de la volonté du Parlement français de défendre les droits des consommateurs et n’aurez donc pas de mal à convaincre vos collègues européens.

J’ajouterai par ailleurs que ces normes auront d’autant plus d’efficacité que les contrôles seront nombreux et coercitifs, ce qui ne manque pas d’inquiéter au regard des moyens alloués à la DGCCRF.

Mme Françoise Férat. Ce sont des mots, monsieur le ministre, que j’ai déjà prononcés lors de l’examen budgétaire, que ce soit pour le Brexit ou pour tous les autres contrôles : il faut suffisamment de vétérinaires et d’agents de répression des fraudes pour respecter les règles.

Le respect des normes, c’est ce qui fait la qualité des productions et la confiance des consommateurs. Le respect des normes, c’est aussi l’expression d’un terroir et de ses produits qui peuvent être mentionnés dans le cahier des charges d’une appellation.

La Clairette de Die répond à ces exigences. Un accord local semble unanime pour abroger la loi du 20 décembre 1957. S’il n’est Clairette de Die qu’en vallée de la Drôme, l’interprofession y veillera. Je n’ai que très peu de mots à dire à ce sujet puisque tout le monde semble unanime et j’imagine, monsieur le ministre, que vous avez un avis très personnel sur ce sujet.

Ce menu législatif nous amène bien évidemment au fromage… (Sourires.) Les auteurs du présent texte ont voulu préciser les conditions d’usage de la mention « fermier », afin de sécuriser le cadre juridique de l’affinage extérieur à la ferme. En effet, il conviendrait de rectifier l’arrêt du Conseil d’État de 2015, qui dispose que seuls les fromages affinés sur l’exploitation peuvent bénéficier du terme « fermier », puisqu’il ne correspond pas à la réalité de certains cahiers des charges de telle ou telle appellation.

Comme l’a détaillé le rapport d’Anne-Catherine Loisier, l’article 9-1 du décret du 27 avril 2007 relatif aux fromages encadre déjà très strictement ces pratiques en réservant l’usage de la mention aux fromages fabriqués « selon des techniques traditionnelles ».

Une loi est cependant nécessaire pour permettre de nouveau l’affichage de la mention « fromage fermier » en cas d’affinage à l’extérieur de la ferme, et les modalités techniques encadrant cet affichage sont à définir au niveau réglementaire. Monsieur le ministre, il vous appartiendra donc de prendre les dispositions administratives accomplissant la volonté du législateur.

Mes chers collègues, le groupe Union Centriste se prononcera favorablement sur cette proposition de loi si celle-ci reste dans l’esprit des mesures introduites par le Sénat lors de l’examen de la loi Égalim et si les productions agricoles hexagonales sont préservées et défendues. Quelques amendements ont été déposés, dont l’adoption devrait permettre de parfaire ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains et au banc des commissions.)

M. le président. La parole est à M. Gilbert Bouchet. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Gilbert Bouchet. Monsieur le président, madame la présidente de la commission, madame, monsieur les rapporteurs, mes chers collègues, monsieur le ministre, j’adresse mes remerciements au président Larcher, aux deux présidents de groupe MM. Retailleau et Kanner, à ma collègue Marie-Pierre Monier, ainsi qu’à l’ensemble des membres de la commission des affaires économiques, qui me permettent d’intervenir ce jour, afin de vous présenter ma proposition de loi tendant à abroger la loi de 1957 interdisant la fabrication de vins mousseux autres que la Clairette de Die à l’intérieur de l’aire géographique de production des appellations « Clairette de Die ».

La Clairette de Die constitue la production principale des viticulteurs du Diois. Elle est élaborée d’après la méthode dioise ancestrale, issue de l’assemblage de muscat blanc et de la clairette blanche.

En 1908, la Clairette produite était blanche ou rosée. L’appellation d’origine datant de 1910, il faut préciser que, dans le premier cahier des charges AOC de 1942, la production de rosé n’avait pas été mentionnée. En décembre 1957, date à laquelle a été votée la loi visant à interdire la production de tout vin effervescent hors AOC dans l’aire d’appellation, il est apparu nécessaire de protéger l’appellation naissante « Clairette de Die » contre la concurrence déloyale des vins étiquetés « clairette muscat ».

Cette proposition de loi se compose de la manière suivante : le premier article dispose que toute élaboration de vins mousseux autres que des vins mousseux à appellation d’origine contrôlée « Clairette de Die et « Crémant de Die » est interdite dans l’aire géographique de production concernée. L’article 3 prévoit des sanctions en cas de méconnaissance de cette interdiction.

Force est de constater que, depuis cette époque, les goûts des consommateurs ont changé. Il est donc apparu normal, aujourd’hui, de permettre aux producteurs du Diois d’adapter leur gamme à la demande de la clientèle, afin de sauver leurs entreprises et de répondre aux nouveaux enjeux du XXIe siècle.

Ils ont souhaité produire des vins mousseux « rosés » sous appellation « AOC Clairette de Die », conscients de la nécessité d’une modification du cahier des charges de l’AOC. En 2016, cette dernière a été homologuée par un arrêté du ministre de l’économie et des finances et du ministre de l’agriculture et la production de ces vins effervescents rosés a donc démarré. Depuis lors, deux décisions juridiques sont venues stopper ce processus.

La première est celle du Conseil d’État, qui a annulé l’arrêté homologuant le cahier des charges de la Clairette de Die, mettant en graves difficultés trois cents vignerons drômois. Il leur a été demandé de cesser toute production et de rappeler toutes les bouteilles mises sur le marché, soit l’équivalent de 1,5 million de bouteilles.

La seconde est intervenue à la fin de l’année 2018, à la suite de la saisine du Conseil constitutionnel sur la loi Égalim. Elle a entraîné la censure de l’amendement d’abrogation de la loi de décembre 1957, pourtant voté en termes identiques par les deux assemblées, au motif qu’il s’agissait d’un cavalier budgétaire.

Face à la concurrence de pays voisins, producteurs en grande quantité de vins rosés, l’évolution législative est fondamentale pour maintenir la vitalité de cette partie de la Drôme.

Conscient de cette situation délicate, je vous ai alerté dès le mois de janvier, monsieur le ministre, par le biais d’une question orale sur ce dossier que, en tant que Drômois, vous connaissez bien, et j’ai décidé de reprendre les modifications portées par l’amendement adopté dans la loi Égalim sous la forme d’une proposition de loi, afin d’attirer votre attention et celle de l’ensemble de mes collègues sur les conséquences économiques désastreuses pour la Drôme.

Sur ce dossier, nous avons été entendus, je le crois, pour essayer de résoudre le problème.

Nous avons été entendus par la Haute Assemblée, qui a bien voulu inscrire à l’ordre du jour, de façon conjointe avec Marie-Pierre Monier, et je l’en remercie, nos deux propositions de loi, prouvant qu’au Sénat nous travaillons dans un esprit constructif.

Nous avons été entendus également sur le terrain puisque, en collaboration avec mon collègue Chaize, sénateur de l’Ain, nous travaillons, avec les représentants des fédérations de vins de nos régions respectives, à la rédaction d’un protocole d’accord permettant, d’un côté, d’écouler ce stock, et, de l’autre, de s’engager à ce qu’aucun vin effervescent de couleur rosé présenté comme de la « Clairette de Die » ou effervescent de son ressort ne soit élaboré à l’avenir en l’absence de bases réglementaires.

Fort de tout cela, je vous demanderai de bien vouloir voter pour l’abrogation de cette loi du 20 décembre 1957 relative à la Clairette Die. Ainsi, pour reprendre une phrase employée précédemment : le soleil brille pour tout le monde ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. Franck Montaugé. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame, monsieur les rapporteurs, chers collègues, pour le citoyen qui en fait un enjeu de confiance, pour le consommateur qui s’y réfère dans son choix et pour le producteur qui y trouve le moyen de la différenciation et de la performance économique, la transparence, la traçabilité et les conditions de production sont aujourd’hui et plus que jamais au centre de l’acte commercial alimentaire.

Ces principes figuraient en bonne place dans la loi Égalim adoptée, et nous avons trouvé pour le moins surprenantes les très nombreuses décisions de rejet par le Conseil constitutionnel des articles les traduisant.

Montesquieu disait qu’il ne faut toucher aux lois que d’une main tremblante. Certainement faut-il aussi saisir le Conseil constitutionnel d’une main tout aussi tremblante. Nous avons perdu du temps, le travail est à reprendre… Soit ! Je tiens à remercier Marie-Pierre Monier, les rapporteurs Anne-Catherine Loisier et Henri Cabanel, ainsi que tous nos collègues qui se sont saisis de l’opportunité de cette proposition de loi pour remettre sur le métier l’ouvrage de la valorisation des produits agricoles et alimentaires.

L’article 1er, en complément de l’arrêt du Conseil d’État relatif à l’usage du mot « fermier », permet l’affinage extérieur à la ferme de produits sous SIQO si les liens entre les producteurs, le produit final et les pratiques traditionnelles d’affinage sont avérés. Le dispositif est offensif, tout en respectant le client final. Ce sera un progrès.

L’article 2 prend en compte des productions de vins en AOC, en permettant leur adaptation au changement climatique et à l’attente des consommateurs. Du pragmatisme qui ne lèse personne et qui conforte les économies territoriales concernées, drômoises en l’occurrence.

L’abrogation de la loi de 1957 ne provoquera pas la disparition de l’AOC « Clairette de Die » ou le changement de son cahier des charges. Elle permettra aux producteurs concernés de se diversifier dans une autre production, les vins mousseux rosés notamment, afin d’améliorer leurs revenus.

Toutefois, et c’est essentiel, ce vin ne pourra pas être appelé « Clairette de Die », dans la mesure où le cahier des charges de l’AOC ne le prévoit pas. Ce sera un vin mousseux rosé, produit dans la Drôme, qui pourrait bénéficier d’une IGP ou d’une appellation spécifique dans cinq ans, dix ans ou plus.

Pour protéger nos apiculteurs et informer le consommateur, il faut aller au-delà des strictes obligations européennes de 2001 concernant la provenance de l’UE ou hors de l’UE. Dans un contexte où la production de miel en France a été divisée par deux en quinze ans, la situation actuelle ne peut plus durer. Il y va de la survie de la filière française apicole, pour reprendre les mots du rapporteur Henri Cabanel ce matin en commission. Pour aller dans ce sens, l’article 3 précise l’étiquetage des miels par l’indication des pays d’origine et de la proportion des composants.

Dans le même esprit de respect du consommateur, la provenance des pays d’origine sera indiquée sur les étiquettes des vins vendus sans indication géographique. La renommée des vins français, le travail de nos vignerons n’en seront que mieux reconnus.

Aujourd’hui, en grandes surfaces, cela a été dit surtout pour les bag in box, les consommateurs sont dupés du fait que certains vins sont vendus comme français, en jouant sur l’étiquetage, le nom francisé, en mettant en valeur un cépage, alors qu’ils sont étrangers. Les cas de tromperie sont extrêmement nombreux, on le sait.

Pour aller toujours dans le même sens, celui de la transparence et du respect in fine du client, nous regrettons que, au titre de l’article 45, les amendements identiques portés par de nombreux groupes de notre assemblée et visant au maintien du caractère obligatoire de la déclaration de récolte ne puissent être débattus et votés aujourd’hui par la Haute Assemblée.

Pour terminer, je veux saluer le travail très constructif réalisé au sein de la commission des affaires économiques sur ce texte. Les échanges ont été nourris, sans qu’à aucun moment soit perdu l’enjeu d’aboutir positivement. Pour l’essentiel, ce texte permettra de progresser vers plus de transparence et de respect des consommateurs. Les acteurs des filières concernées s’en trouveront, à n’en pas douter, renforcés.

Pour ces raisons, le groupe socialiste et républicain le votera. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste. – M. Joël Labbé applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Patrick Chaize.

M. Patrick Chaize. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame, monsieur les rapporteurs, madame la présidente de la commission, mes chers collègues, le texte que nous avons à étudier aujourd’hui concerne diverses dispositions, issues de quatre articles du projet de loi Égalim censurés par le Conseil constitutionnel, au motif qu’ils n’avaient pas de lien direct avec le texte.

Pour ma part, je concentrerai mon intervention sur l’article 2 portant sur l’abrogation de la loi de 1957 protégeant l’appellation « Clairette de Die ». En effet, cet article avait été adopté conforme par les deux assemblées. Selon les auteurs de l’amendement à l’Assemblée nationale, cette loi était certes nécessaire à l’époque pour protéger l’appellation naissante Clairette de Die contre la concurrence déloyale des vins étiquetés « Clairette muscat », mais elle n’avait plus lieu d’être dès lors que cette protection est assurée par d’autres textes, nationaux et européens.

Vous n’êtes pas sans savoir, monsieur le ministre, que ce sujet m’intéresse particulièrement, par rapport à la Clairette de Die, vin pétillant produit par les viticulteurs du Diois dans la Drôme, mais aussi et surtout par rapport à la situation conflictuelle avec les vins du Bugey (Ah ! sur des travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.), notamment le Bugey Cerdon, vin mousseux rosé produit dans l’Ain, ces vins bénéficiant tous deux d’une appellation d’origine contrôlée. Nous avons eu en effet à nous opposer, sur ses bancs, pour défendre nos territoires respectifs, et pour cause !

Je ne reviendrai pas sur les décisions juridiques qui ont définitivement tranché les procédures engagées. Je souhaite en revanche exprimer la bonne volonté des viticulteurs, qu’ils soient de la Drôme ou de l’Ain, pour trouver des solutions communes et intelligentes à la sortie du conflit les opposant. C’est en ce sens que nous avons œuvré, avec mon collègue Gilbert Bouchet, que je tiens ici à saluer au regard des actions que nous avons menées.

Mes chers collègues, je dois néanmoins vous avouer que l’inscription de ce texte dans cette période de négociations n’a pas facilité nos discussions.

Aussi, je tiens à annoncer aujourd’hui qu’un protocole d’accord a été conclu entre le Syndicat de la Clairette de Die et des vins du Diois et le Syndicat des vins du Bugey. Il doit faire l’objet d’une signature dans les prochains jours, pour venir clore définitivement cette situation, en redonnant à chacun une stabilité et une sérénité utiles.

Vous le voyez, monsieur le ministre, parole est tenue ! Je m’étais engagé à apporter une réponse pragmatique et rationnelle à ce sujet, tout en ayant à cœur d’y intégrer la valeur humaine.

Je veux ici remercier les rapporteurs, Anne-Catherine Loisier et Henri Cabanel, ainsi que l’ensemble de nos collègues. L’examen d’amendements à l’article 2 de la présente proposition de loi aurait eu pour seul effet de durcir les positions des uns et des autres, et ils ont eu la sagesse de ne pas en déposer.

Je suis heureux de constater que le bon sens et le pragmatisme ont primé pour venir à bout de ce dossier important pour nos territoires. Ils mettent en valeur notre belle région Auvergne-Rhône-Alpes. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.

Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Monsieur le ministre, je vous le dis avec une pointe d’affection, vous avez beaucoup de talent ! Pour parvenir à se faire applaudir dans cet hémicycle sur la loi Égalim, que le Sénat n’a pas votée, il faut assurément être très fort ! (Sourires.)

En ce qui concerne la première partie de ce texte, comme vous le savez, nous avons mis en place un groupe de travail pour suivre les effets de la loi Égalim sur le revenu des agriculteurs. Nous auditionnerons demain Agnès Pannier-Runacher, qui dressera un premier bilan des négociations commerciales.

Ce matin, l’Association nationale des industries alimentaires, l’ANIA, a annoncé une diminution des prix alimentaires de 0,1 % à 1 % – parfois plus –, et a confirmé que le « ruissellement » n’était pas au rendez-vous, puisque quelque 88 % des entreprises considèrent que la situation s’était plutôt dégradée.

Nous allons continuer à enquêter sur les effets de cette loi et y apporter, le cas échéant, les correctifs nécessaires. Nous attendons de vous, monsieur le ministre, que des contrôles soient réalisés partout sur le territoire français.

Également avec affection, je veux dire à notre collègue Noëlle Rauscent que je félicite La République En Marche d’avoir déposé une proposition de loi à l’Assemblée nationale. Nous ne revendiquons pas la paternité des bonnes initiatives, même si nous ne devons pas nous lancer dans une course entre l’Assemblée nationale et le Sénat, ou entre les différents groupes politiques.