compte rendu intégral

Présidence de M. Gérard Larcher

Secrétaires :

M. Victorin Lurel,

M. Michel Raison.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Questions d’actualité au Gouvernement

M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.

Monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, je vous rappelle que la séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur notre site internet.

J’invite chacun à faire preuve à la fois de courtoisie et de respect, tant des uns et des autres que du temps de parole.

sommet france-océanie

M. le président. La parole est à M. Robert Laufoaulu, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste.)

M. Robert Laufoaulu. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères et porte sur la tenue du cinquième sommet France-Océanie.

Initiés par le Président Chirac en 2003, ces sommets permettent de renforcer le rôle de la France et la place de ses collectivités du Pacifique dans cette région océanienne que le Président Emmanuel Macron englobe désormais dans l’axe indopacifique, comme il l’a évoqué dans ses discours à Sydney et à Nouméa en mai 2018. Cet élargissement stratégique entraînera-t-il un nouveau format du sommet ?

Pour l’heure, nous ne savons presque rien sur le cinquième sommet. Aura-t-il bien lieu cette année ? À quelle date ? Le Président de la République s’y rendra-t-il ? Sa présence est symboliquement indispensable.

Le quatrième sommet a eu lieu à Paris juste avant la COP21 ; le climat en fut le thème principal. Les chefs d’État et de gouvernement présents, conscients que leur région est celle où le plus grand nombre d’États pourraient disparaître à cause du réchauffement, se sont battus pour la limitation à 1,5 degré au lieu de 2 degrés. Le cinquième sommet France-Océanie interviendra à l’approche d’échéances majeures en matière de biodiversité. Ne pourrait-il alors être l’occasion non seulement de faire un bilan des objectifs de la COP21, mais aussi de mobiliser la communauté internationale sur la biodiversité, notamment sur la question des aires marines protégées, qui est au cœur des préoccupations des États du Pacifique ?

Notre pays a un rôle à jouer en Océanie où s’exprime un désir de France certain et où il sera, après le Brexit, le seul pays européen présent. Il y contribuera à la promotion des valeurs démocratiques, au maintien de la paix et à la lutte contre les tentations hégémoniques.

Le cinquième sommet sera-t-il le lieu et le temps d’une explication plus complète de la stratégie de l’axe indopacifique ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires, ainsi que sur des travées du groupe La République En Marche, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains. – M. Jean-Luc Fichet applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères.

M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire dÉtat auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères. Monsieur le sénateur, je vous remercie de votre question. La France, nous pouvons le mesurer au travers de l’action et de la représentation des sénateurs des territoires d’outre-mer, est un pays monde.

Voilà pourquoi la stratégie indopacifique est assumée et revendiquée par le Président de la République. Vous le savez, celui-ci a déjà participé en mai dernier à un dialogue de haut niveau avec un certain nombre de chefs d’État et de gouvernement des États insulaires voisins des territoires ultramarins concernés, et il a souhaité pouvoir tenir un cinquième sommet France-Océanie.

Ce sommet aura lieu soit dans les derniers mois de l’année 2019, soit dans les tout premiers mois de l’année 2020. Il s’agit d’un rendez-vous important, car la France compte 1,5 million de compatriotes dans le Pacifique. Par ailleurs, ces territoires constituent une richesse inégalable en termes de biodiversité. Ils font aussi l’objet de partenariats stratégiques, en particulier avec l’Australie. C’est pourquoi le Président de la République, le Premier ministre et de nombreux ministres, dont Frédérique Vidal dernièrement, se sont rendus dans cette zone.

À l’ordre du jour du sommet, il sera opportun d’inscrire, comme vous le proposez, l’économie verte, l’économie bleue, mais aussi les sujets géostratégiques liés à la liberté de circulation et à la liberté de navigation, que vous évoquez en filigrane dans votre question. Il s’agit, en effet, de sujets d’intérêt commun.

Quoi qu’il en soit, monsieur le sénateur, soyez assuré de la détermination du Président de la République et du Gouvernement à porter une politique ambitieuse dans la zone indopacifique à laquelle nous participons pleinement. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche, ainsi que sur des travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe Union Centriste.)

situation dans les ehpad

M. le président. La parole est à Mme Brigitte Micouleau, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe Union Centriste.)

Mme Brigitte Micouleau. Ma question s’adresse à Mme la ministre des solidarités et de la santé.

Madame la ministre, lundi matin, la France, la région Occitanie, le département de la Haute-Garonne et particulièrement la ville du Lherm se sont réveillés sous le choc. Je souhaite d’abord apporter tout mon soutien et ma compassion aux familles endeuillées.

Ce que redoutaient toutes les personnes concernées par la dépendance et par l’accueil réservé à nos aînés venait de se produire : une crise sanitaire majeure s’est produite dans un Ehpad. Cette situation dramatique a entraîné le décès dans la nuit de cinq pensionnaires et conduit à l’hospitalisation d’une quinzaine d’autres.

Je ne reviendrai pas, madame la ministre, sur la chaîne de dysfonctionnements qui a conduit à ce désastre humain. Laissons la justice faire son travail.

Vous avez insisté sur votre volonté de comprendre les causes de ce drame et de tirer les enseignements de ces tragiques événements. Mais nous connaissons une partie des causes de cette crise. Le 12 février dernier, je vous avertissais déjà au travers d’une question orale tristement prémonitoire. J’attirais alors votre attention sur le manque cruel d’effectifs, sur l’absence de revalorisation des métiers du grand âge et des rémunérations, et sur l’épuisement du personnel, qui, régulièrement, en se mettant en grève, tente d’alerter sur les rythmes de travail et dénonce les conditions de prise en charge de nos aînés.

L’humain n’est plus au cœur de notre mission d’accompagnement des personnes âgées, alors même que certains Ehpad génèrent des profits substantiels.

Madame la ministre, ma double question est simple. Le rapport Libault sur le grand âge et l’autonomie, qui vient de vous être remis, avance un certain nombre de propositions. Quand seront-elles mises en œuvre ? Quels seront les financements dédiés ? L’urgence est là, nous ne pouvons plus attendre ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe Union Centriste.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre des solidarités et de la santé.

Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé. Madame la sénatrice Micouleau, je vous sais gré de me permettre de répondre sur un enjeu majeur de société. Nous sommes tous sensibles au drame survenu dans la nuit de dimanche à lundi dans un Ehpad de votre département. Je m’y suis rendue mardi pour rencontrer les familles des victimes et les personnes qui ont été hospitalisées, ainsi que le personnel, également très choqué. D’après les familles que j’ai pu rencontrer, il s’agit d’un personnel très engagé.

Une instruction est en cours. J’attends de connaître ses résultats pour en tirer toutes les conclusions. Si cela s’avère nécessaire, des mesures supplémentaires seront prises dans les Ehpad afin d’assurer une chaîne alimentaire de très grande qualité. Des recommandations ont déjà été formulées par la Haute Autorité de santé en 2018. Il faudra s’assurer que celles-ci ont bien été suivies.

Au-delà de ce drame, vous abordez une question beaucoup plus générale, qui inquiète tous les Français, à savoir la prise en charge du grand âge et de la perte d’autonomie. Nous sommes tous concernés. Il y a urgence à agir. Nous reculons depuis trop longtemps devant cet obstacle, car il faudrait effectivement pour le franchir une réorganisation complète du secteur ainsi que d’importants financements. Quoi qu’il en soit, il importe d’améliorer la prise en charge de nos aînés, y compris à domicile, d’augmenter le nombre de personnels auprès des personnes âgées et de revaloriser les métiers. Ce sont les pistes tracées par le rapport de Dominique Libault, qui m’a été remis le 28 mars dernier.

Un groupe de travail m’apportera en urgence ses conclusions sur la revalorisation des métiers autour de la personne âgée pour les rendre de nouveau attractifs et veiller à la bientraitance des personnes âgées.

Au-delà, nous présenterons un projet de loi avant la fin de l’année sur la base du rapport qui m’a été remis et des 175 propositions de Dominique Libault. Celles-ci sont en cours d’examen et seront discutées en concertation avec les différentes parties prenantes. Le texte sera prêt avant la fin de l’année, je m’y suis engagée devant les Français. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche, ainsi que sur des travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe Union Centriste.)

M. Pierre-Yves Collombat. Nous voilà rassurés !

M. le président. La parole est à Mme Brigitte Micouleau, pour la réplique.

Mme Brigitte Micouleau. Madame la ministre, nous serons très attentifs aux résultats de vos travaux. Nos aînés méritent mieux qu’un abandon de la solidarité nationale et nos personnels soignants méritent mieux qu’un désengagement de l’État !

crise sanitaire forestière

M. le président. La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et sur des travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)

Mme Anne-Catherine Loisier. Ma question s’adresse à M. le ministre de la forêt ! (Sourires.)

Contrairement à ce que beaucoup de personnes pensent, les forêts ne sont pas immuables. Elles sont vulnérables et requièrent toute notre attention.

Les forêts dont nous profitons à ce jour sont le fruit des choix et du travail des générations passées. Aujourd’hui, nous exploitons, mais nous ne plantons plus suffisamment : 80 millions d’arbres sont plantés par an en France, contre 300 millions en Allemagne et 1 milliard en Pologne. D’où les crises d’approvisionnement, notamment du chêne, et les importations de résineux.

Face à ces usages multiples de la forêt et du bois, face aux changements climatiques, vous le savez, monsieur le ministre, la forêt a besoin en urgence d’une politique forestière volontaire et d’un fonds stratégique alimenté à la hauteur des besoins. Fragilisées depuis plusieurs mois par des déficits hydriques et des températures particulièrement clémentes, nos forêts sont victimes d’attaques de parasites et subissent des crises sanitaires d’ampleur.

Le sujet pourrait paraître secondaire, sauf qu’il concerne déjà plus de 1 million de mètres cubes d’essences résineuses, soit 30 % de la récolte annuelle dans les seules régions Bourgogne-Franche-Comté et Grand Est.

Toute l’Europe du Nord est touchée, ce qui risque d’engorger les marchés, de faire chuter les cours, de mettre en difficulté nos entreprises et de déstabiliser durablement l’approvisionnement de secteurs stratégiques ; je pense à la construction, secteur pour lequel la France importe déjà.

Au-delà des pertes économiques, estimées à 71 millions d’euros en Bourgogne-Franche-Comté et dans le Grand Est, l’impact environnemental lié aux risques d’incendie ou aux coupes rases sur des milliers d’hectares est également majeur.

Monsieur le ministre, pour enrayer ces phénomènes, les professionnels de la filière attendent en urgence de votre part la mise en place d’un plan de transport longue distance permettant d’évacuer rapidement les bois scolytés des régions productives vers les régions demandeuses, et ce avant que le parasite ne se multiplie et ne ruine toutes les parcelles. Ils attendent également un accompagnement pour le reboisement adapté des milliers d’hectares rasés.

Qu’avez-vous donc prévu, monsieur le ministre, pour accompagner la filière forêt-bois face à ces urgences économiques et sanitaires ? (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et sur des travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)

M. Loïc Hervé. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire.

M. François de Rugy, ministre dÉtat, ministre de la transition écologique et solidaire. Madame la sénatrice, je partage votre analyse sur l’importance de la forêt et de la filière bois. Nous ne la valorisons pas encore assez. Je travaille avec le ministre de l’agriculture pour la mettre davantage en valeur dans tous les secteurs d’utilisation.

Concernant la crise sanitaire que vous évoquez, le risque de dissémination des insectes lors du transport des bois scolytés existe, mais il est heureusement très faible. Lors de l’exploitation des bois, la plupart du temps mécanisée, une bonne partie des insectes sont éliminés.

De façon plus générale, j’ai conscience que cette menace inédite crée une inquiétude dans toute la filière. L’intensité des dommages occasionnés par les scolytes sera largement tributaire des conditions météorologiques de ce printemps. Pour calibrer au mieux la réponse que nous devons apporter à cette crise, il faut d’abord disposer d’un état des lieux précis.

C’est pourquoi le ministère de l’agriculture et de l’alimentation a organisé et financé, depuis l’automne dernier, un état des lieux complet par télédétection sur les deux régions que vous avez évoquées.

Les premiers résultats de cette enquête ont été portés à la connaissance de l’ensemble des acteurs de la gestion et de l’exploitation forestière des régions concernées. Le but est de leur permettre de mieux cibler leur action et d’accélérer la dynamique de récolte des bois attaqués afin d’enrayer la propagation des scolytes.

Ces premiers résultats permettent de localiser les peuplements qui étaient attaqués à l’automne. Une prochaine mise à jour de cette cartographie permettra d’apprécier les évolutions de l’atteinte des peuplements d’épicéa au début du printemps.

Au-delà de ces mesures d’observation, les services de nos ministères étudient actuellement le cadre dans lequel pourraient être mises en place des mesures complémentaires à celles qui sont déjà engagées par la filière. Soyez assurée, madame la sénatrice, que l’État sera aux côtés des forestiers. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche. – M. Jean-Marc Gabouty applaudit également.)

stratégie nationale de l’autisme

M. le président. La parole est à M. Bernard Buis, pour le groupe La République En Marche. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

M. Bernard Buis. Ma question s’adresse à Mme la secrétaire d’État chargée des personnes handicapées.

Ce mardi 2 avril était la Journée mondiale de l’autisme. Beaucoup d’internautes ont habillé de bleu leurs posts sur les réseaux sociaux pour manifester leur solidarité avec cette cause. Aujourd’hui, en France, on estime qu’environ 700 000 personnes vivent avec le spectre de l’autisme, dont 100 000 enfants. Il n’y a qu’assez peu de temps que ce trouble est correctement diagnostiqué. Par conséquent, les patients étaient souvent mal accompagnés jusqu’alors.

Nous avons tous dans notre entourage des parents d’enfants, d’adolescents ou de jeunes adultes démunis face à la difficulté de vie ou de communication de leur enfant.

J’ai en tête l’exemple d’une jeune femme, Éva, dont le diagnostic Asperger, une des diverses formes de l’autisme, ce syndrome prenant lui-même des formes multiples, a été posé très tardivement. Jusqu’à ce diagnostic, elle qualifiait ses relations sociales d’enfer. Je reprends ses mots : « L’autisme seul a ses bons côtés et ses mauvais, et je ne le vois pas du tout comme un handicap, mais plutôt comme une différence. C’est avec les autres que ça devient un handicap, un enfer. » Pourtant, il a fallu commencer par ce diagnostic et ce constat, et donc par sa prise en charge pour que la vie de cette jeune femme change.

Après un parcours scolaire et professionnel chaotique – vendeuse dans un commerce de bouche avec une relation clientèle difficile –, elle a été reçue fin 2018 à Grenoble École de Management pour suivre la formation Data Asperger. Elle se dit enfin « soulagée et heureuse d’être considérée en tenant compte de ce syndrome ».

Nous serons amenés à discuter prochainement de l’inclusion des enfants en situation de handicap dans le projet de loi pour une école de la confiance. Il sera essentiel de réfléchir à la prise en compte spécifique des élèves autistes.

Il me semble aujourd’hui nécessaire, un an après le lancement de la stratégie nationale pour l’autisme pour les années 2018 à 2022, de nous faire part des avancées de ce plan, évidemment pour les aspects relatifs à la scolarisation de ces enfants, mais aussi pour le diagnostic et l’intervention précoces. De nombreuses personnes sont, hélas ! concernées.

M. le président. Il faut conclure !

M. Bernard Buis. Pouvez-vous, madame la secrétaire d’État, nous éclairer sur ce sujet ? (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche. – Mme Nassimah Dindar applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée des personnes handicapées.

Mme Sophie Cluzel, secrétaire dÉtat auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées. Monsieur le sénateur Buis, un point d’étape est important, car nous avons souscrit le 6 avril de l’année dernière à cinq engagements dans le cadre de la stratégie nationale pour l’autisme au sein des troubles du neuro-développement, pour une enveloppe de 344 millions d’euros nouveaux. Ces engagements sont portés par une conviction, celle de mobiliser la recherche et la science. Notre objectif est de faciliter le parcours de vie des personnes avec autisme et de leur famille. Il s’agit surtout d’un engagement de responsabilité collective du Gouvernement.

Nous nous engageons d’abord sur une action résolue en faveur du repérage et du diagnostic précoce des troubles neuro-développementaux, parmi lesquels l’autisme. Avec Agnès Buzyn, nous investirons massivement 90 millions d’euros d’ici à 2022 pour prévenir, dès les premiers âges, les sur-handicaps avec un reste à charge zéro pour les familles.

J’ai rencontré hier dans un centre d’action médico-sociale précoce, un CAMSP, une maman dont l’enfant a été pris en charge dès l’âge de 2 ans. Sa petite fille, qui était mutique, dans sa bulle, a réussi à faire, au bout d’un an, sa rentrée à l’école maternelle. Il importe de mettre tout le focus sur la scolarisation, qui est très importante. Nous devons donc rattraper notre retard. C’est tout l’enjeu du déploiement du grand service public de l’école inclusive avec Jean-Michel Blanquer.

Ce projet trouve des déclinaisons particulières dans le champ de l’autisme, avec la création de petites classes dédiées – plus de 180 unités supplémentaires en maternelle, 40 unités en élémentaire – pour garantir un parcours de scolarisation plus soutenante, au milieu des autres.

Enfin, nous améliorons la pertinence des accompagnements des personnes adultes en les diagnostiquant, ainsi qu’en prévoyant un parcours inclusif vers le logement et l’emploi. Nous soutenons par ailleurs les familles fatiguées et fragilisées par leur rôle d’aidant au long cours.

Beaucoup reste à faire, c’est indéniable. Néanmoins, les avancées sont tangibles. Comme vous, j’entends les associations qui nous font savoir que le temps des familles n’est pas celui de l’administration, et qu’il nous faut accélérer. L’enjeu est collectif, les responsabilités sont collectives. Nous avons des fondations solides et nous allons pouvoir avancer tous ensemble ! (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche, ainsi que sur des travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe Union Centriste. – Mme Fabienne Keller et M. René Danesi applaudissent également.)

collectivités et décentralisation

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Roux, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)

M. Jean-Yves Roux. Ma question s’adresse à M. le ministre auprès de Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement.

Lors de la première conférence des territoires en juillet 2017 au Sénat, le Président de la République avait indiqué qu’il fallait « renforcer la déconcentration pour adapter les politiques de l’État aux territoires ». Le 21 mars, M. le ministre Darmanin a déclaré, pour sa part, vouloir « mobiliser davantage de fonctionnaires au plus près du terrain ».

Je ne vous cache pas, monsieur le ministre, que cette perspective, en théorie, nous va droit au cœur tant il nous paraît indispensable que les services publics d’État puissent être pleinement déployés et tant il nous paraît indispensable également que ces fonctionnaires puissent être mieux identifiés afin de les mobiliser facilement chaque fois que c’est nécessaire. En effet, la dématérialisation n’est pas la seule réponse possible.

Il est temps aujourd’hui que nos concitoyens comme leurs représentants, les élus, puissent apprécier la réalité de cette déconcentration, pleinement partenaire d’initiatives locales démultipliées.

Or, en tant qu’élus de la République, que constatons-nous ? Nous constatons que des fonds ne sont pas consommés ou sont souvent mobilisés par les mêmes, faute d’une ingénierie suffisante pour décrypter les circulaires. Notre collègue Maryse Carrère avait ainsi pointé du doigt sur nos travées la sous-consommation dramatique de fonds européens et leur possible annulation à hauteur de centaines de millions d’euros.

Nous constatons que des collectivités locales, faute d’interlocuteurs d’État, font appel à des cabinets privés afin d’éviter des contentieux lourds.

Nous notons que les préfectures et les sous-préfectures n’accompagnent plus assez, comme elles le devraient, les maires et communautés de communes tout au long des procédures d’application des normes, et pire encore dans la quête tortueuse des demandes de subventions !

Mes chers collègues, vous ne me démentirez pas, combien d’élus nous disent qu’ils ont besoin d’être accompagnés en amont de manière directe et concrète, réactive et proche des réalités !

Monsieur le ministre, il est temps de redonner du lustre à la présence territoriale de l’État : comment comptez-vous mieux mobiliser le maillage territorial de l’État et redonner ainsi du souffle aux initiatives locales, et ce dans tous les territoires et pour toutes les communes ? (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, ainsi que sur des travées du groupe La République En Marche et du groupe Les Indépendants – République et Territoires.)

M. le président. La parole est à M. le ministre chargé de la ville et du logement.

M. Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement. Monsieur le sénateur, je vous le confirme, il faut plus de déconcentration, mais surtout une déconcentration qui tienne compte des spécificités du territoire, car ces dernières sont essentielles.

Vous avez évoqué plusieurs points.

Premier point, je suis d’accord avec vous : le numérique ne peut pas tout. Contrairement à ce que l’on peut dire, il a aggravé les fractures territoriales. Telle est la réalité ! Il les a aggravées en termes d’abord d’infrastructures et ensuite d’usages. C’est pourquoi le Gouvernement, sous l’égide du Premier ministre, a lancé une politique ambitieuse pour renforcer les infrastructures, mais aussi les usages du numérique.

Le deuxième point que vous soulignez et auquel je suis profondément attaché concerne le volet accompagnement. L’État doit être un acteur qui accompagne les collectivités. C’est fondamentalement le rôle de l’État que d’améliorer cet accompagnement. Cela veut dire moins de normes, conformément aux directives envoyées par le Premier ministre. Cela veut aussi dire des structures de l’État qui intègrent l’idée que leur rôle est d’appuyer les collectivités. C’est tout le sens de l’Agence nationale de la cohésion des territoires, en cours de finalisation dans le cadre des débats parlementaires. Notre ambition est de mettre sur pied une structure au service des collectivités, pour les accompagner, notamment dans le secteur de l’ingénierie.

Enfin, monsieur le sénateur, vous évoquez une question qui nous concerne tous, celle de la sous-consommation des fonds européens. Le ministre de l’Europe et des affaires étrangères et les secrétaires d’État se battent pour renforcer ces fonds, car ils constituent une manne financière importante. Il importe, là aussi, de mieux accompagner les régions dans leurs prérogatives. L’État continuera à distribuer, comme il le fait depuis quelques mois, des guides d’information pour que nous puissions mieux bénéficier collectivement de cette manne financière à laquelle vous êtes très attachés. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche. – MM. Alain Cazabonne et Jean-Marc Gabouty applaudissent également.)

projet de loi pour une école de la confiance

M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Mme Céline Brulin. Monsieur le ministre, à mesure que les Français découvrent votre projet de loi pour l’école, leur colère grandit. Les nombreuses actions organisées aujourd’hui – il y en a en ce moment même – en témoignent.

La création des établissements publics des savoirs fondamentaux cristallise les mécontents. Concevoir un établissement unique école-collège, sous gouvernance de ce dernier, c’est porter une attaque sans précédent à l’école.

M. Martial Bourquin. Très bien !

Mme Céline Brulin. Dans ces établissements, les directeurs d’école disparaîtraient au profit de chefs d’établissement et d’adjoints davantage missionnés pour gérer la pénurie de moyens que pour porter un projet pédagogique et accompagner les élèves. (Protestations sur les travées du groupe La République En Marche.)