COMPTE RENDU INTÉGRAL

Présidence de M. Thani Mohamed Soilihi

vice-président

Secrétaires :

Mme Agnès Canayer,

Mme Patricia Schillinger.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Mise au point au sujet d’un vote

M. le président. La parole est à M. Laurent Lafon.

M. Laurent Lafon. Monsieur le président, lors du scrutin public n° 104 sur l’amendement n° 102 rectifié ter, Mme Annick Billon a été enregistrée comme ayant voté contre, alors qu’elle souhaitait s’abstenir.

M. le président. Acte vous est donné de cette mise au point, mon cher collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.

3

Article 6 bis (Texte non modifié par la commission) (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi pour une école de la confiance
Article additionnel après l'article 6 bis - Amendements n° 16 rectifié bis et n° 373 rectifié

Pour une école de la confiance

Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, pour une école de la confiance (projet n° 323, texte de la commission n° 474, rapport n° 473).

Dans la discussion du texte de la commission, nous en sommes parvenus, au sein du chapitre Ier du titre II, aux amendements tendant à insérer un article additionnel après l’article 6 bis.

TITRE II (SUITE)

INNOVER POUR S’ADAPTER AUX BESOINS DES TERRITOIRES

Chapitre Ier (suite)

L’enrichissement de l’offre de formation et l’adaptation des structures administratives aux réalités locales

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi pour une école de la confiance
Article additionnel après l'article 6 bis - Amendements n° 375 rectifié bis et 196 rectifié bis

Articles additionnels après l’article 6 bis

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 16 rectifié bis, présenté par Mme Blondin, M. Fichet, Mmes S. Robert et G. Jourda, MM. Courteau, Botrel, Tourenne, Bérit-Débat et Montaugé et Mme Espagnac, est ainsi libellé :

Après l’article 6 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 212-8 du code de l’éducation est ainsi modifié :

1° Le cinquième alinéa est supprimé ;

2° Après le 3°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« …° À l’inscription dans un établissement scolaire proposant un enseignement de la langue régionale. »

La parole est à Mme Maryvonne Blondin.

Mme Maryvonne Blondin. Cet amendement a pour objet d’introduire à l’article L. 212-8 du code de l’éducation une disposition autorisant le versement du forfait scolaire pour un enfant scolarisé dans une autre commune que sa commune de résidence, dans le cas où cette dernière ne proposerait aucune offre d’enseignement bilingue public.

Trois cas dérogatoires déjà prévus dans la loi NOTRe : celui où les parents travaillent dans une autre commune, celui d’un regroupement de fratrie et, enfin, celui où l’enfant doit suivre un traitement médical.

Même si la loi NOTRe a permis une avancée dans ce domaine, les maires des communes de résidence ne sont pas strictement tenus de participer financièrement. Ils sont invités à trouver un accord avec les maires des communes d’accueil. À défaut, le préfet peut aussi être sollicité dans l’intérêt de l’enfant, mais il arrive parfois qu’aucun accord ne soit trouvé. La création de ce quatrième cas dérogatoire permettrait de sécuriser l’inscription des élèves et d’apaiser les relations.

La loi de notre ancien collègue Jean-Claude Carle précise que les trois dérogations que j’évoquais à l’instant figurent aussi bien à l’article L. 212-8 du code de l’éducation qu’à l’article L. 442-5-1 du même code, qui concerne l’enseignement privé. La loi Carle impose en effet que tout ce qui relève d’une obligation s’agissant de la scolarité des enfants s’applique de la même manière aux établissements publics et aux établissements privés : il doit y avoir parité de traitement. Si le quatrième cas dérogatoire était créé pour le public, il s’appliquerait de facto pour le privé.

M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 68 rectifié bis est présenté par MM. A. Marc, Bignon, Chasseing, Wattebled et Decool.

L’amendement n° 373 rectifié est présenté par MM. Dantec, Artano, A. Bertrand, Cabanel, Gabouty et Gold, Mme Guillotin et MM. Labbé et Roux.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 6 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 212-8 du code de l’éducation est ainsi modifié :

1° Le cinquième alinéa est supprimé ;

2° Après le 3°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« …° À l’inscription dans un établissement scolaire proposant un enseignement de la langue régionale en l’absence d’enseignement équivalent dans la commune de résidence de l’élève. »

L’amendement n° 68 rectifié bis n’est pas soutenu.

La parole est à M. Ronan Dantec, pour présenter l’amendement n° 373 rectifié.

M. Ronan Dantec. En raison de sa lourdeur, le dispositif mis en place par la loi NOTRe ne fonctionne pas de manière satisfaisante sur le terrain. En conséquence, les moyens pour le développement de l’enseignement bilingue ne sont pas assurés et la loi, telle qu’elle est rédigée aujourd’hui, créé beaucoup de tensions et de frustration. La mesure de simplification que nous proposons semble de bon sens

Nous n’en sommes plus aux débats d’arrière-garde où il s’agit de savoir si l’on est pour ou contre l’enseignement bilingue. Nous cherchons à mettre en place un système rationnel, fonctionnant de manière apaisée. Nos échanges d’hier soir m’ont laissé un peu sur ma faim, monsieur le ministre. Je partage votre analyse selon laquelle le rôle de l’école dans l’enseignement des langues régionales a changé. Aujourd’hui, en effet, l’école de la République ne s’oppose plus aux langues parlées dans la famille, alors que, sous la IIIRépublique, on stigmatisait les élèves surpris à parler breton. Une telle politique a surtout été appliquée en Afrique : beaucoup d’Africains de nos âges pourraient évoquer le combat mené par l’école contre le wolof ou le fon. Le ministre de l’éducation nationale doit désormais assumer le fait que l’école de la République est devenue un puissant outil de préservation et de reconquête de la diversité linguistique dans notre pays.

Cet amendement de simplification va tout à fait dans le sens de l’histoire et correspond pleinement à la volonté qui s’exprime sur le terrain, en particulier parmi les maires confrontés à des situations souvent très difficiles à gérer.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Max Brisson, rapporteur de la commission de la culture, de léducation et de la communication. Je propose d’en rester à une approche technique. Hier soir, nous avons tous manifesté notre attachement aux langues régionales. Nous avons évoqué les difficultés qui subsistent et le cadre juridique et constitutionnel, que l’on peut souhaiter changer.

Aujourd’hui, un élève qui s’inscrit dans une école publique d’une autre commune que la sienne pour suivre un enseignement bilingue peut tout à fait le faire. Cependant, le maire de la commune de résidence n’est pas tenu de verser le forfait scolaire. La loi NOTRe a mis en place un dispositif incitatif, qui passe par la médiation du préfet. En l’état actuel des choses, sachant que je connais bien les territoires concernés – la France n’est pas la Bretagne –, je préfère que l’on en reste aux dispositions de cette loi. Il est rare que je dise du bien de la loi NOTRe (M. Philippe Dallier rit.) ; c’est le cas ce matin !

Mes chers collègues, avec ces amendements, vous risquez de dresser les maires les uns contre les autres,…

M. Ronan Dantec. Mais non !

M. Max Brisson, rapporteur. … ce qui serait contre-productif pour l’enseignement des langues régionales. Étant un élu du Béarn, je peux vous dire que, dans les vastes territoires où l’on parle l’occitan, certains maires se crisperont, non seulement parce que l’école de leur commune perdra des enfants, ce qui peut menacer l’existence de classes, voire de l’école, mais aussi parce qu’ils devront en plus verser le forfait scolaire.

Votre intention est louable, madame Blondin, je respecte et je peux partager votre combat pour les langues régionales, mais je pense vraiment qu’adopter votre amendement serait contre-productif.

L’équilibre trouvé par la loi NOTRe, sous le quinquennat de François Hollande, me semble juste. J’émets donc un avis défavorable sur les amendements nos 16 rectifié bis et 373 rectifié.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de léducation nationale et de la jeunesse. Je suis heureux de reprendre ce débat extrêmement important, dans l’esprit que vous avez rappelé, monsieur Dantec. La Constitution consacre le français comme langue de la République, mais la pratique des langues régionales est encouragée. Nous n’y voyons pas de contradiction ; c’est au contraire un facteur de vitalité linguistique. Il s’agit de notre histoire, de notre patrimoine, et nous devons en tenir compte pour fonder nos décisions.

Lors de son récent déplacement en Bretagne, le Premier ministre a pris des engagements importants, qui ne sauraient être sous-estimés. Voici ce qu’il a déclaré à cette occasion :

« J’ai bien compris votre souhait de conforter le modèle de développement des écoles sous contrat bilingues, avec l’idée de permettre à ces écoles de bénéficier du versement du forfait communal par les communes. Vous comprendrez que ce n’est pas une décision complètement évidente à mettre en œuvre et qu’elle ne peut se prendre indépendamment des maires.

« C’est pourquoi nous nous sommes mis d’accord, avec Loïg Chesnais-Girard, pour laisser aux communes de Bretagne, représentées au sein de la conférence territoriale de l’action publique, et à la CTAP plus globalement, le soin de se prononcer sur la possibilité d’élargir le forfait scolaire aux écoles bilingues sous contrat. Si les maires sont d’accord et que la CTAP émet un avis favorable, alors le Gouvernement en tiendra compte pour proposer les modifications législatives nécessaires. »

Cet engagement est essentiel. Lorsqu’un pas de cette importance est accompli, j’aimerais que les acteurs concernés, y compris les plus fervents promoteurs des langues régionales, le reconnaissent. Le texte qui vous est soumis traduit cette avancée, voulue par le Gouvernement. Le rapporteur a très bien résumé la situation : aujourd’hui, la conférence territoriale de l’action publique, la CTAP, permet une forme de régulation. Prenons garde à ne pas ouvrir des vannes sans bien mesurer les conséquences que cela pourrait entraîner, de n’encourager qu’une certaine forme d’enseignement privé, au détriment de l’enseignement public et des autres établissements privés. En l’occurrence, le breton a aussi toute sa place dans l’école publique, sous diverses formes. Quand on défend l’école, il faut être attentif à éviter d’éventuels effets pervers. Nous entendons avoir une position à la fois de progrès et de raison : nous ne refusons pas le développement des langues régionales, mais le texte, dans sa rédaction actuelle, comporte déjà des avancées considérables pour les écoles privées pratiquant le bilinguisme. J’aurais aimé que l’on nous en donne acte de manière assez consensuelle, plutôt que de toujours vouloir franchir une étape supplémentaire en faisant comme si le progrès accompli n’était pas important.

M. le président. La parole est à Mme Maryvonne Blondin, pour explication de vote.

Mme Maryvonne Blondin. Je salue le pas important qui a effectivement été réalisé. Mon amendement s’inscrit dans un cadre général, qui dépasse celui de la région Bretagne. Je reconnais l’attachement de notre rapporteur aux langues régionales. Elles sont nos racines, mais aussi nos ailes, car elles nous permettent de nous ouvrir aux autres, à l’international, et favorisent l’apprentissage d’autres langues. On citait hier Claude Hagège et Mona Ozouf.

Je présenterai tout à l’heure un amendement sur la CTAP. Compte tenu de ce qui vient d’être dit, j’ose espérer qu’il recevra un avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 16 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 373 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 6 bis - Amendements n° 16 rectifié bis et n° 373 rectifié
Dossier législatif : projet de loi pour une école de la confiance
Article 6 ter A (nouveau)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 375 rectifié bis, présenté par MM. Dantec, Arnell, Artano et A. Bertrand, Mme M. Carrère et MM. Castelli, Collin, Gold, Labbé, Roux et Vall, est ainsi libellé :

Après l’article 6 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le 1° du II de l’article L. 121-3 du code de l’éducation est complété par les mots : « en particulier dans le cadre de l’enseignement bilingue en français et en langue régionale ou étrangère ».

La parole est à M. Ronan Dantec.

M. Ronan Dantec. Cet amendement vise à une reconnaissance plus explicite de l’enseignement bilingue en français et en langue régionale lors des examens et pour les thèses ou les mémoires. Aujourd’hui, la situation est très variable à cet égard selon les académies. Il me semble important de procéder à une harmonisation.

Monsieur le rapporteur, sur ce sujet, la technique et la politique restent étroitement mêlées ! Si vraiment il n’y a plus de débat de fond sur la nécessité de développer l’enseignement bilingue de manière homogène sur tout le territoire, et ce avant tout dans le public, alors nous devons avoir une discussion exclusivement technique, centrée sur les points de blocage. Hier, nous avons ainsi défendu un amendement, dont je reconnais qu’il était mal rédigé, portant sur les risques de concurrence entre l’enseignement des langues régionales et celui des langues étrangères. Ce matin encore, nos amendements, qui n’ont rien d’idéologique, portent sur des points précis : nous ne lançons pas des débats généraux sur les bénéfices de l’enseignement immersif pour les élèves, estimant, peut-être à tort, qu’il existe aujourd’hui un consensus dans notre pays sur le sujet.

En l’espèce, par le présent amendement, nous demandons une meilleure reconnaissance du cursus des élèves de l’enseignement bilingue lors de certains examens. Il s’agit de remédier à des difficultés rencontrées sur le terrain.

M. le président. L’amendement n° 196 rectifié bis, présenté par MM. Canevet, Longeot et Kern, Mme Loisier, M. Delcros, Mmes Vermeillet et Saint-Pé, M. Capo-Canellas, Mmes Gatel et N. Goulet, M. Moga, Mme Perrot et MM. Bockel et Laurey, est ainsi libellé :

Après l’article 6 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le 1° du II de l’article L. 121-3 du code de l’éducation, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« …° Dans le cadre de l’enseignement bilingue en français et en langue régionale ; ».

La parole est à M. Jean-François Longeot.

M. Jean-François Longeot. Une reconnaissance plus explicite de l’enseignement bilingue en français et en langue régionale lors des examens ou à l’occasion des thèses et des mémoires permettrait la valorisation des parcours bilingues. Elle aurait également l’avantage de prendre en compte les aspirations des jeunes bilingues passant des examens comme le baccalauréat ou le brevet des collèges.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Max Brisson, rapporteur. Ma réponse sera technique et politique…

Sur le plan technique d’abord, l’objectif, y compris pour les écoles immersives, étant d’aller vers le bilinguisme, il y a des épreuves en français et des épreuves en langue régionale lors des examens nationaux. Vouloir que l’ensemble des épreuves se déroulent en langue régionale ne me paraît donc pas correspondre aux vœux des fédérations d’écoles immersives.

Sur le plan politique, j’estime qu’il faut veiller à ne pas aller trop vite. Pour ma part, je mène ce combat en faveur des langues régionales en gardant toujours à l’esprit qu’il faut que la société dans son ensemble, et les élus en particulier, suive. Faisons attention à ne pas susciter des crispations en voulant aller trop loin : ce serait contre-productif. Monsieur Dantec, je travaille sur ces sujets depuis suffisamment longtemps pour pouvoir m’exprimer ainsi.

Ce que je souhaite, c’est que les dérogations existantes pour le passage des examens en langue régionale dans certaines disciplines soient clairement confortées et ne dépendent pas exclusivement du bon vouloir du représentant du ministre dans l’académie. J’aimerais obtenir de votre part des assurances sur ce point, monsieur le ministre. Il y a un subtil équilibre à trouver pour promouvoir les langues régionales tout en maintenant le cadre national des examens, auquel je crois la Haute Assemblée attachée.

Je demande aux auteurs de ces amendements de bien vouloir les retirer. À défaut, j’y serai défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-Michel Blanquer, ministre. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.

M. Ronan Dantec. Je reconnais volontiers les efforts du rapporteur et son habileté pour essayer de trouver un équilibre, mais nous sommes devant un paradoxe, voire une contradiction, sur cette question.

D’un côté, on défend l’école de la République, ce qui suppose que les règles soient à peu près les mêmes partout ; de l’autre, pour ce qui concerne les langues régionales, on va de plus en plus vers des situations disparates. Cela vaut d’ailleurs pour l’engagement pris par M. Édouard Philippe, qui ne concerne que la Bretagne.

Nous ne souhaitons nullement, monsieur le rapporteur, que tous les examens puissent être présentés en langue régionale, mais, aujourd’hui, on peut passer des épreuves de mathématiques en langue basque, mais pas en langue bretonne : la décision est laissée à la discrétion des rectorats. Dans un pays républicain comme la France, on ne peut pas accepter une telle disparité ! Mon amendement tend précisément à rétablir de l’uniformité sur le territoire national. Pour l’heure, le ministre ne nous a pas donné les assurances que vous lui avez demandées, monsieur le rapporteur.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Max Brisson, rapporteur. Monsieur Dantec, vous êtes un adepte du droit à la différenciation. Or, sur cette question, l’appétence diffère selon les territoires où sont enseignées les langues régionales. Pour un territoire comme celui dont je suis élu, l’établissement d’un cadre national pourrait constituer une régression, en particulier pour ce qui concerne la langue basque. Il faut tenir compte de la diversité des situations.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 375 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 196 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 6 bis - Amendements n° 375 rectifié bis et 196 rectifié bis
Dossier législatif : projet de loi pour une école de la confiance
Article 6 ter

Article 6 ter A (nouveau)

Après le cinquième alinéa de l’article L. 442-5-1 du code de l’éducation, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« En outre, après accord de la conférence territoriale de l’action publique, la participation financière à la scolarisation des enfants dans les établissements privés du premier degré sous contrat d’association dispensant un enseignement de langue régionale situés sur le territoire régional, fait l’objet d’un accord entre la commune d’accueil et la commune de résidence, à la condition que cette dernière ne dispose pas d’école dispensant un enseignement de langue régionale. À défaut d’accord, le représentant de l’État dans le département réunit les maires de ces communes afin de permettre la résolution du différend en matière de participation financière, dans l’intérêt de la scolarisation des enfants concernés. »

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 389 rectifié bis, présenté par Mme L. Darcos, MM. Cambon et Bazin, Mmes A.M. Bertrand et Bories, M. Charon, Mme Deromedi, MM. Dufaut et Gremillet, Mme Gruny, M. Laménie, Mme Lamure, MM. Lefèvre, H. Leroy et Mandelli, Mme M. Mercier, MM. Mouiller et Pierre, Mme Procaccia et MM. Revet, Segouin et Sido, est ainsi libellé :

Alinéa 2, première phrase

1° Supprimer les mots :

dispensant un enseignement de langue régionale situés sur le territoire régional,

2° Après les mots :

commune de résidence

supprimer la fin de cette phrase.

La parole est à Mme Laure Darcos.

Mme Laure Darcos. Il s’agit avant tout d’un amendement d’appel, visant à attirer l’attention du Sénat et du Gouvernement sur la rupture d’égalité qu’engendrerait la mise en œuvre du dispositif de cet article.

En effet, il ne me paraîtrait pas juste qu’une école privée sous contrat touche des forfaits scolaires bien supérieurs à ceux dont bénéficie une autre école privée située dans la même commune, du seul fait qu’elle proposerait un enseignement de langue régionale. Il y a un vrai risque de rupture d’égalité.

Monsieur le ministre, j’aimerais que vous développiez davantage les propos que vous avez tenus en rappelant l’engagement du Premier ministre. C’est une Bretonne qui vous le demande !

M. le président. L’amendement n° 18 rectifié bis, présenté par Mmes Blondin et S. Robert et MM. Fichet, Botrel et Tourenne, est ainsi libellé :

Alinéa 2, première phrase

Après chaque occurrence du mot :

enseignement

insérer le mot :

bilingue

La parole est à Mme Maryvonne Blondin.

Mme Maryvonne Blondin. L’article 6 ter A a été adopté en commission après la réunion de la CTAP de Bretagne, qui a émis un avis favorable sur la possibilité de faire bénéficier les écoles bilingues en français et en langue régionale du forfait scolaire communal. Il s’inscrit donc bien dans le respect du pacte signé entre l’État et le conseil régional.

Mon amendement rédactionnel vise à bien distinguer l’initiation à la langue régionale dans les écoles maternelles ou primaires de l’enseignement bilingue à proprement parler.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Max Brisson, rapporteur. L’amendement n° 389 rectifié bis a pour objet de supprimer la distinction entre écoles privées selon qu’elles dispensent ou non un enseignement de langue régionale. Il a le mérite de mettre en lumière l’un des défauts de l’article 6 ter A, à savoir la création d’une rupture d’égalité entre écoles privées.

Je regrette que le Gouvernement n’ait pas proposé de nouvelle rédaction pour cet article. Nous nous trouvons de ce fait tenus d’adopter un dispositif qui, outre le problème d’égalité que je viens d’évoquer, est inopérant à plusieurs titres.

Premièrement, il repose sur une décision de la conférence territoriale de l’action publique. Or la CTAP n’est pas une instance décisionnaire et les petites communes, qui sont les plus concernées par ce dispositif, y sont sous-représentées.

Deuxièmement, le forfait scolaire étant, le cas échéant, versé directement par la commune de résidence à l’établissement privé sous contrat, l’accord entre la commune d’accueil et la commune de résidence n’a pas lieu d’être.

Troisièmement, sa rédaction est tellement alambiquée que le dispositif de cet article ne constitue pas une obligation de contribuer. Si tel était le cas, cela représenterait une charge considérable pour les communes, particulièrement les plus petites, qui ne ferait l’objet d’aucune compensation.

L’article 6 ter A devra faire l’objet d’une réécriture. C’est pourquoi je regrette l’absence d’initiative du Gouvernement. S’agissant de la transcription d’un engagement pris par lui, la commission s’en remet à l’avis du Gouvernement sur les amendements nos 389 rectifié bis et 18 rectifié bis.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-Michel Blanquer, ministre. La critique est aisée, mais l’art est difficile… Après vous avoir tous écoutés, mesdames, messieurs les sénateurs, m’est également venu à l’esprit un autre adage, latin cette fois : in medio stat virtus – virtus pouvant aussi signifier « courage ».

L’engagement pris par le Premier ministre que j’ai rappelé était souhaité par bon nombre d’entre vous. Cet engagement, nous le mettons en œuvre. Le rapporteur vient d’indiquer que la rédaction de l’article est imparfaite. C’est possible, mais on ne m’a pas présenté d’autre proposition.

Quant à l’amendement de Mme la sénatrice Darcos, il me semble satisfait, parce que nous n’avons évidemment aucunement l’intention d’introduire des disparités financières entre écoles.

Si le dispositif de l’article est insuffisamment précis, je suis tout à fait disposé à poursuivre la discussion après la promulgation de la loi de façon à garantir l’équité. Il y aura d’ailleurs un dialogue continu avec la CTAP. En tout état de cause, comme je l’ai déjà indiqué, on ne doit pas créer d’inégalités entre les différentes formes d’enseignement privé sous contrat, et encore moins, évidemment, entre l’enseignement privé sous contrat et l’école publique. J’en profite pour rappeler que nous encouragerons fortement l’enseignement des langues régionales dans l’enseignement public, au travers notamment de la réforme du lycée.

J’entends les critiques du rapporteur sur la rédaction de l’article 6 ter A, même si je ne les partage pas. Si elle comportait une ambiguïté, il pourrait aisément y être remédié lors de la mise en œuvre, sachant que le principe d’équité est clairement posé.

En conclusion, je demande le retrait de ces amendements, faute de quoi j’y serai défavorable.

M. le président. Quel est maintenant l’avis de la commission ?

M. Max Brisson, rapporteur. Je n’ai pas tout compris des propos du ministre. (Rires.) J’ai en tout cas bien senti une certaine gêne dans sa réponse.

Le Gouvernement a pris de grands engagements, qu’il n’est pas capable de traduire correctement dans le présent projet de loi. C’est en quelque sorte une méthode de gouvernement… La commission s’en remet à la sagesse du Sénat.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Jean-Michel Blanquer, ministre. Je ne peux laisser sans réponse ces propos exagérément sévères du rapporteur, avec lesquels je suis en profond désaccord. Nous pourrions faire des comparaisons avec d’autres périodes législatives, monsieur le rapporteur ; c’est un exercice auquel je me prêterais volontiers…

Concernant l’article 6 ter A, peut-être n’ai-je pas été clair, mais, pardonnez-moi de vous le dire, monsieur le rapporteur, si vous ne comprenez ni sa teneur ni ce que je dis, il faut aussi s’interroger sur le récepteur ! En l’occurrence, un article a été élaboré ; nos appréciations sur sa rédaction divergent, mais je pense avoir été très clair sur les grands principes : aucune discrimination ne doit être faite entre différentes catégories d’établissements. Cette position explique ma demande de retrait de ces amendements.

Les discours un peu complexes des uns et des autres ne doivent pas masquer ce fait très simple : le Premier ministre a pris un engagement très fort, inédit, qui trouve sa mise en œuvre au travers de l’article 6 ter A. Sur ce sujet comme sur d’autres, mille discours viennent brouiller les choses, et l’on finit par oublier l’essentiel : cet article représente un progrès énorme pour le développement du bilinguisme et nous sommes déterminés à le mettre en œuvre dans le respect des grands principes. Si cela n’est pas clair, qu’on me le dise !