Mme la présidente. La parole est à M. André Gattolin, pour la réplique.

M. André Gattolin. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le secrétaire d’État.

Je profite du temps qui me reste pour parler de la question du handicap.

M. Gabriel Attal, secrétaire dÉtat. Oui, j’y reviendrai !

M. André Gattolin. On le voit, le mécanisme du service civique permet d’aller plus loin en matière d’insertion. Il est étonnant de voir le nombre d’associations qui se chargent d’accompagner le handicap et qui bénéficient de ce système, mais aussi de constater combien des gens eux-mêmes en situation de handicap relativement léger parviennent aussi à aider des gens ayant un handicap plus lourd.

J’y insiste donc : le service civique a aussi une vocation d’intégration des plus fragiles.

Mme la présidente. La parole est à Mme Céline Brulin.

Mme Céline Brulin. Cela a été dit, la crise sanitaire et ses conséquences sociales et économiques mettant en lumière de profondes inégalités et, comme souvent, les jeunes en sont les premiers touchés.

Ils sont souvent dans une situation plus précaire que leurs aînés et ils font face, par exemple, au non-renouvellement d’un contrat à durée déterminée (CDD) ou d’une mission d’intérim, à l’absence de protection sociale liée à l’ubérisation de l’économie et à la difficulté, pour ne pas dire à l’impossibilité, de trouver en ce moment un job d’été, lequel représente, pour beaucoup d’entre eux, le seul revenu de l’année.

Ils s’inquiètent aussi de la remise en cause des stages ou des contrats de professionnalisation ou de la « valeur » qui sera accordée aux diplômes obtenus cette année.

Par ailleurs, alors qu’aucune date n’est fixée pour la reprise des examens du permis de conduire – chacun connaît l’engorgement habituel de ces épreuves –, ils s’interrogent sur l’échéance à laquelle ils pourront obtenir ce permis, souvent indispensable pour décrocher un emploi dans nombre de nos territoires.

Bref, il y a une multitude de questions très concrètes – pardon de cette liste à la Prévert –, auxquelles il faut, je crois, apporter des réponses, avec, comme boussole, l’accompagnement accru de cette génération du confinement, comme le préconise, par exemple, l’Organisation internationale du travail (OIT).

Le revenu de solidarité active (RSA) pourrait être un filet de sécurité salutaire dans cette période, même s’il est évidemment loin d’être suffisant et qu’il ne peut pas constituer un horizon – je vous rejoins sur ce point, monsieur le secrétaire d’État.

Or, depuis des décennies, la majorité est fixée à 18 ans. À cet âge, les jeunes peuvent voter, être salariés, ils doivent payer des cotisations et des impôts, et j’en passe, mais ils se voient toujours refuser l’accès essentiel à ce volet de la solidarité nationale. Pourquoi ?

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Gabriel Attal, secrétaire dÉtat auprès du ministre de léducation nationale et de la jeunesse. Je vais vous répondre, madame Brulin, mais je veux, au préalable, répondre très rapidement au volet de la question de M. Gattolin sur les jeunes en situation de handicap dans le service civique, que j’avais oublié d’aborder.

Oui, c’est une grande priorité. Quand j’ai été nommé, quelque 1,5 % des jeunes en service civique était en situation de handicap, me semble-t-il. Pourtant, ils ont autant envie de s’engager et autant à apporter que les autres.

Il y a, dans la région nantaise, un collectif – Cap sur l’engagement –, qui a travaillé pendant un an et qui m’a remis des propositions. Mon objectif est que, en 2022, nous ayons atteint 3 % de jeunes handicapés dans le service civique, pour permettre cet essor. Vous avez raison, c’est très important.

Madame Brulin, vous m’avez interrogé sur la question du RSA.

Tout d’abord, je partage votre constat sur les fragilités et sur les difficultés que risquent de connaître des jeunes si l’on ne fait rien. Selon moi, le débat n’est pas de savoir s’il faut agir davantage et renforcer l’accompagnement, financier ou non, des jeunes. Le débat qui crée des divergences entre nous porte sur le comment.

C’est vrai, j’ai dit que je n’étais pas favorable à l’extension du RSA aux moins de 25 ans, parce que, selon moi, nous avons des outils formidables, notamment la garantie jeunes, développée par la majorité précédente. Ces outils répondent à des situations de grande précarité de jeunes, au travers d’un accompagnement financier et humain vers l’insertion, et conduisent à des sorties positives de ce dispositif qui sont très favorables.

Je suis d’avis de parier sur ce dispositif et de continuer à le soutenir, y compris en cette période de crise. Je crains qu’un RSA pour les moins de 25 ans ne soit démobilisateur, non pas pour les jeunes, mais pour les structures qui les accompagnent. En effet, l’enjeu demeure l’accompagnement humain des jeunes vers la formation et l’insertion. Bien évidemment, il est également important de soutenir financièrement ceux qui en ont besoin.

Je rappelle qu’un grand chantier a été ouvert, celui du revenu universel d’activité (RUA), pour revoir la manière dont on accompagne les plus précaires de notre pays. La question des jeunes en fait pleinement partie.

Les travaux vont se poursuivre, mais on sait que le revenu universel d’activité doit être mis en place à l’horizon de 2023. Il ne pourra donc pas constituer une réponse immédiate à la crise que nous vivons.

Cependant, je pense que la réflexion structurelle que nous menons dans le cadre du chantier du RUA et les réponses urgentes que nous allons apporter nous permettent d’avancer pour répondre aux problématiques que vous évoquez.

Mme la présidente. La parole est à Mme Céline Brulin, pour la réplique.

Mme Céline Brulin. Vous le savez, monsieur le secrétaire d’État, le RSA, comme son ancêtre, le RMI, comporte normalement un volet insertion. On ne peut donc pas dire que l’on refuse l’insertion à ceux qui bénéficient des minima sociaux. Au contraire !

Au reste, ce que vous dites à la fois sur l’engagement des structures qui accueillent ces jeunes et sur celui des jeunes eux-mêmes est un peu limite : à vous écouter, les jeunes qui touchent ces revenus de solidarité seraient un peu moins prompts à chercher du travail.

On annonce des plans sociaux tous les jours. Nous sommes encore mobilisés, dans un certain nombre de nos départements, sur la situation de Renault. On annonce, malgré des aides de l’État, 4 600 suppressions d’emploi. Vous imaginez bien que ce sont autant de débouchés en moins pour nos jeunes dans des régions industrielles comme les nôtres, où la situation est déjà très difficile !

Il me paraît essentiel, dans la période que nous vivons, de prévoir un filet de sécurité pour nos jeunes et de leur donner le signe qu’ils ont eux aussi droit à la solidarité nationale.

Mme la présidente. La parole est à Mme Colette Mélot.

Mme Colette Mélot. Monsieur le secrétaire d’État, alors que 750 000 jeunes s’apprêtent à finir leurs études, leur insertion sur le marché du travail s’annonce particulièrement difficile cette année.

Dans son dernier communiqué de presse, l’Association pour l’emploi des cadres (APEC) observe une chute de 69 % des offres d’emploi destinées aux jeunes diplômés par rapport à l’année dernière. Le plan global en faveur de la jeunesse annoncé par le Gouvernement est, à cet égard, très attendu.

Nous serons particulièrement attentifs au volet apprentissage, qui concerne près de 500 000 apprentis en France. Alors que les centres de formation des apprentis (CFA) rouvrent progressivement depuis le 11 mai, les premières mesures en faveur de l’apprentissage devraient être annoncées cette semaine – vous les avez annoncées pour demain, monsieur le secrétaire d’État.

De nombreux centres de formation sont menacés de fermeture par la crise. En effet, depuis la dernière réforme, le financement de ces centres dépend du nombre de contrats signés. Or peu de PME et de TPE sont prêtes à signer de nouveaux contrats à la rentrée, compte tenu des incertitudes économiques qui pèsent sur de nombreux secteurs, en particulier celui de l’hôtellerie et de la restauration, qui emploie, chaque année, de nombreux apprentis.

Monsieur le secrétaire d’État, dans le contexte actuel, ne serait-il pas souhaitable, d’une part, de revoir transitoirement les règles de financement des centres de formation, en calant les sommes attribuées par les opérateurs de compétences sur les effectifs de 2019, et, d’autre part, de faciliter les entrées et sorties des élèves apprentis dans le dispositif d’apprentissage, afin de laisser davantage de temps aux entreprises de se remettre à flot sans pénaliser les jeunes, qui sont de plus en plus nombreux à souhaiter se former par cette voie ?

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Gabriel Attal, secrétaire dÉtat auprès du ministre de léducation nationale et de la jeunesse. Madame la sénatrice, vous posez la question de l’apprentissage, qui, comme je l’ai dit dans mon intervention liminaire, est une très grande priorité pour le Gouvernement.

Grâce à la mobilisation absolue de Muriel Pénicaud, nous avons enfin réussi à faire, pour notre pays, ce que beaucoup ont cherché à faire depuis longtemps, à savoir faire décoller la voie de l’apprentissage. Comme je l’ai rappelé, elle concernait 400 000 jeunes l’an dernier, soit une hausse de 16 %, et ce nombre est en augmentation constante depuis le début du quinquennat.

Nous ne voulons pas que la crise actuelle vienne « casser » cette dynamique. Il faut donc que, pour cette année 2020, nous soyons en mesure d’accueillir au moins autant de jeunes en apprentissage que l’an dernier. Je pense que c’est un objectif raisonnable que nous pouvons nous fixer.

Demain aura lieu une réunion très importante entre les partenaires sociaux et le Président de la République, pour aborder un certain nombre d’enjeux qui ont trait au marché du travail et à l’emploi. La question de l’apprentissage sera centrale dans ces discussions.

Il m’est compliqué de faire des annonces : celles-ci interviendront, par définition, après l’échange avec les partenaires sociaux. Je pense que ces derniers vivraient assez mal que les annonces interviennent avant même que la réunion ait lieu…

Quoi qu’il en soit, dans ces annonces et dans ce travail qui va être engagé avec eux demain, un soutien massif sera apporté à la fois aux entreprises, pour qu’elles accueillent des jeunes en apprentissage, aux centres de formation et aux jeunes apprentis eux-mêmes. Ce soutien sera notamment financier. Il répondra, je l’espère, à votre préoccupation, qui est légitime, puisque nous savons que l’apprentissage est une voie d’excellence en France. Nous avons réussi à le faire reconnaître dans la société, parce que nous l’avons beaucoup soutenu.

Bien évidemment, la crise que nous traversons appelle un soutien et une mobilisation encore plus importants. Nous allons nous y atteler dès demain.

Mme la présidente. La parole est à Mme Colette Mélot, pour la réplique.

Mme Colette Mélot. Monsieur le secrétaire d’État, il est vrai que vous avez fait décoller l’apprentissage, mais c’était avant la crise.

Aujourd’hui, les entreprises sont plus réticentes à recruter des apprentis. J’espère donc que, comme vous venez de le dire, vous accorderez un soutien massif à l’apprentissage, mais aussi un soutien aux entreprises – l’un ne va pas sans l’autre.

J’y serai très attentive, car, comme vous l’avez également dit, l’apprentissage est une voie d’excellence. Nous en sommes tous convaincus. Il faut absolument soutenir cette voie pour les jeunes.

Mme la présidente. La parole est à Mme Jocelyne Guidez.

Mme Jocelyne Guidez. Monsieur le secrétaire d’État, entre inquiétude face au présent et crainte du lendemain, notre jeunesse est loin d’être sereine : interruption des études, suivi plus ou moins aisé des cours à distance, arrêt de jobs qui aidaient financièrement, inégalités numériques et territoriales, menaces pesant sur les futures embauches… ces différents éléments se sont ajoutés à un quotidien qui n’était déjà pas facile avant le Covid-19.

Pour bon nombre de jeunes, la réussite tant vantée dans une société qui prône l’ascension sociale était un parcours du combattant. Désormais, elle est reléguée à l’espoir incertain.

Notre politique publique doit donc être ambitieuse. Mieux, elle doit être la plus optimiste possible, notamment en ce qui concerne la filière d’excellence qu’est l’apprentissage professionnel.

Avant la crise sanitaire, les indicateurs étaient au vert. Ainsi, en Île-de-France, près de 90 000 apprentis et préapprentis étaient inscrits à la rentrée 2018-2019. Sur l’ensemble du territoire national, l’année 2020 devait confirmer cette tendance, même s’il était parfois compliqué, pour les apprentis, de trouver une entreprise.

Cependant, les professionnels du secteur sont actuellement inquiets pour les contrats en alternance lors de la rentrée prochaine. Les effets risquent de se faire sentir, en particulier dans les petites et moyennes entreprises.

J’avais deux questions à vous poser, monsieur le secrétaire d’État. Vous avez déjà répondu à la première, sur l’apprentissage, ce dont je vous remercie.

Parallèlement, ne serait-il pas temps de réinventer les emplois d’avenir basés sur une formation professionnelle aussi bien dans le secteur marchand que dans le secteur non marchand ? C’est une demande formulée par les missions locales. En effet, ce dispositif fonctionnait très bien pour une population dite « précaire », car il apportait une formation professionnelle adaptée aux besoins de l’entreprise. La suppression brutale de cette mesure a créé un déséquilibre.

Le Covid-19 laisse craindre un renforcement de l’exclusion sociale. Il est donc important de remettre en place une mesure comme celle-ci, assortie, par exemple, d’une exonération des charges pour les entreprises, tout en maintenant la formation professionnelle. Ne sacrifions pas nos jeunes. Ils sont l’avenir !

Soyez assuré que certaines communes sont elles aussi prêtes à jouer le jeu d’un vrai contrat accompagné.

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Gabriel Attal, secrétaire dÉtat auprès du ministre de léducation nationale et de la jeunesse. Madame la sénatrice, vous êtes revenue sur l’importance de l’apprentissage.

Je veux profiter de mon temps de parole pour indiquer, en complément de ce que j’ai déjà indiqué, que, dans notre mobilisation, outre ce qui sera annoncé demain sur le soutien aux entreprises et aux centres de formation pour continuer à développer l’apprentissage, nous devons aussi aller chercher les jeunes qui étaient en apprentissage au moment du confinement et qui, pour certains, ont décroché. L’enjeu est très important.

Récemment, le haut-commissaire aux compétences, M. Jean-Marie Marx, a estimé à 15 % le taux de jeunes en apprentissage qui ont décroché à l’occasion du confinement. L’ordre de grandeur est d’ailleurs le même dans la voie professionnelle scolaire, ce qui nous a conduits, Jean-Michel Blanquer et moi-même, à annoncer que les lycées professionnels resteraient ouverts cet été pour accueillir des jeunes, y compris pour des activités ludiques, à côté de l’enseignement. Cet enjeu du « raccrochage » est extrêmement important dans l’apprentissage, comme dans l’enseignement scolaire.

Pour ce qui concerne votre seconde question, les travaux vont évidemment se poursuivre. Le Gouvernement présentera, avant l’été, un plan de relance qui insistera sur des secteurs clés pour la relance du pays, dans lesquels nous allons investir ou réinvestir. Je pense évidemment aux secteurs du soin et de la transition énergétique, pour ne citer qu’eux. On pourrait également citer le numérique.

Dans le cadre de cette mobilisation, il faudra évidemment recruter. Il y aura des perspectives d’emploi et des dispositifs permettant à des jeunes de trouver un emploi dans ces secteurs, sur lesquels nous parions. Que ces emplois puissent être couplés à une formation, dans une logique d’alternance, me semble une piste intéressante. C’est en tout cas une piste que nous creusons. Nous aurons, je l’espère, l’occasion d’en reparler.

Mme la présidente. La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone.

Mme Dominique Estrosi Sassone. Monsieur le secrétaire d’État, je m’exprime, bien sûr, en ma qualité de sénateur, mais aussi en tant que présidente de la mission locale Nice-Côte d’Azur.

Dans les Alpes-Maritimes, le nombre de demandeurs d’emploi en catégorie A a bondi de 41,5 % au cours des trois derniers mois. Ce sont évidemment les jeunes de moins de 25 ans qui paient le plus lourd tribut, avec une hausse de 39,5 % de demandes rien qu’en avril.

À la même période, en 2019, la mission locale Nice-Côte d’Azur recensait 834 recrutements, alors que 112 seulement seront finalisés cette année, soit une baisse d’insertion professionnelle de 84 % en un an.

Du côté de l’apprentissage, la situation n’est pas meilleure : les élèves sont moins nombreux à pouvoir suivre les cours dans les CFA, puisque ces établissements rouvrent à la carte.

Autre problème pour les apprentis, cela a été indiqué : leur diplôme est menacé, puisque leur formation pratique a été stoppée ou annulée. De nombreuses entreprises qui les accueillent en temps normal ont été fermées et rouvrent sous conditions.

Ces conséquences inquiétantes sur les contrats d’apprentissage se remarquent plus particulièrement dans certains secteurs importants dans les Alpes-Maritimes. Je pense à l’hôtellerie et à la restauration, puisque les offres sont moins nombreuses, alors que 80 % des contrats d’apprentissage courent entre avril et octobre.

Monsieur le secrétaire d’État, entendez-vous élargir le fonds d’aide aux jeunes afin de pouvoir apporter un soutien plus durable que l’aide exceptionnelle de 200 euros par jeune qui a été annoncée en mai ?

Comptez-vous renforcer les contrats aidés dans le secteur non marchand, notamment au sein des collectivités territoriales ?

Enfin, l’emploi des jeunes passera forcément par une baisse des charges. Il faut qu’il y ait une incitation financière. À cet égard, seriez-vous favorable à une exonération des charges pour les entreprises qui recruteraient un jeune en CDI ?

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Gabriel Attal, secrétaire dÉtat auprès du ministre de léducation nationale et de la jeunesse. Madame la sénatrice, vous avez évoqué des chiffres qui sont évidemment très inquiétants et qui appellent notre mobilisation, même s’il est logique que, durant le confinement, l’activité des CFA ait diminué et que des entreprises qui étaient fermées n’aient plus été en mesure d’accueillir de jeunes.

L’essentiel, maintenant, est que tout redémarre très vite. Sauf erreur de ma part, le taux de reprise dans l’apprentissage s’élevait, la semaine dernière, à 30 %, et l’objectif est qu’il atteigne 60 % avant l’été. Muriel Pénicaud le dirait mieux que moi, mais l’enjeu est d’aller vite. Les mesures qui seront annoncées demain sur l’apprentissage vont directement dans ce sens.

J’en profite aussi pour dire, puisque vous avez abordé le sujet du tourisme et de l’hôtellerie-restauration, que de plus en plus d’offres d’emploi sont déposées à Pôle emploi. Cela fait écho à ce qu’a dit Mme Brulin. Beaucoup de jeunes qui ont l’habitude de travailler l’été en tant que saisonniers pour financer leurs études sont très inquiets. Le message doit être clair : certes, la situation est difficile, mais il y a, aujourd’hui, des offres qui ne trouvent pas preneurs. Je pense évidemment au secteur du tourisme, au secteur agricole, où il y a aussi des besoins, et à l’animation, puisque nous aurons besoin d’animateurs formés pour l’accueil important des enfants que nous allons organiser cet été. Je ferme la parenthèse.

J’en viens aux trois questions très concrètes que vous avez posées.

Pour ce qui concerne le fonds d’aide aux jeunes, nous avons créé, pendant le confinement, une aide exceptionnelle, pour répondre à des besoins exceptionnels. Par exemple, il fallait aider les jeunes étudiants qui avaient l’habitude de se nourrir au restaurant universitaire pour un euro par repas et qui se sont retrouvés obligés d’aller au supermarché. Il fallait aider les jeunes d’outre-mer qui étaient en métropole et ne pouvaient pas se reposer sur une solidarité familiale de proximité comme les jeunes de l’Hexagone. Il fallait aider des jeunes non étudiants en situation précaire.

Nous entrons maintenant dans une période trouble sur le marché de l’emploi et pour l’insertion des jeunes. Il faudra un accompagnement plus durable dans ce contexte.

Par conséquent, oui, il faut un accompagnement financier renforcé contre la précarité des jeunes. J’ignore si cela passera de nouveau par le versement d’une prime ou par des budgets à la main des missions locales et des universités. Quoi qu’il en soit, il faudra un accompagnement supplémentaire.

J’ai déjà évoqué les perspectives qui pouvaient être données concernant les contrats aidés.

Enfin, l’incitation financière fait partie des sujets qui sont sur la table et dont nous discutons avec Bruno Le Maire. Des mesures avaient été prises en 2008 en ce sens. Il y en a peut-être d’autres à inventer. Je n’ai pas encore de réponse à vous apporter, puisque ce point n’est pas tranché.

Mme la présidente. La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, pour la réplique.

Mme Dominique Estrosi Sassone. Monsieur le secrétaire d’État, merci de votre réponse. Nous avons tous une responsabilité éminente à l’égard de la jeunesse. Cette génération ne doit pas être sacrifiée ni même pénalisée par le Covid-19.

Mme la présidente. La parole est à Mme Claudine Lepage. (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR.)

Mme Claudine Lepage. Monsieur le secrétaire d’État, face à la crise que nous traversons, notre regard doit être tourné vers la jeunesse. Nous devons aux jeunes un horizon, l’espoir d’un avenir meilleur. Cet espoir passera, c’est certain, par toujours plus d’éducation, mais aussi, j’en suis convaincue, par la rencontre avec d’autres cultures, la découverte de l’autre.

Malheureusement, les conséquences de l’épidémie de Covid-19 ont eu un impact désastreux sur la mobilité internationale des étudiants. Si la majorité de ceux qui étaient en échange à l’étranger cette année a pu rentrer avant la fermeture des frontières, l’incertitude est grande pour ceux qui avaient prévu un échange pour la prochaine rentrée universitaire.

En Europe, les échanges Erasmus pourront vraisemblablement avoir lieu, mais, pour les autres destinations, ce sont souvent des annulations ou des reports à l’année suivante qui sont proposés par les établissements. De nombreuses universités proposeront également des cours en ligne. Les Erasmus+ pourront participer à des mobilités hybrides associant des activités virtuelles avec une mobilité physique à l’étranger dès lors que la situation le permettra. Hélas, il est à craindre que ces cours en ligne ne remplacent jamais les apports résultant de l’immersion dans un autre pays et de la rencontre d’une autre culture.

Par ailleurs, de nombreux jeunes qui avaient obtenu un service civique à l’étranger ou un programme vacances-travail ont vu leur projet d’expatriation s’écrouler subitement et se retrouvent bien souvent sans perspective d’emploi. Or ces programmes sont plébiscités par des jeunes qui éprouvent des difficultés à s’insérer professionnellement en France.

Monsieur le secrétaire d’État, alors que le risque est grand que l’épidémie de Covid-19 entraîne, un peu partout dans le monde, un repli sur soi, comment comptez-vous donner un nouvel élan à la mobilité des jeunes, bien souvent indispensable pour s’insérer dans la vie professionnelle ?

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Gabriel Attal, secrétaire dÉtat auprès du ministre de léducation nationale et de la jeunesse. Madame la sénatrice, s’il est un point sur lequel nous nous accordons à 100 %, voire à 200 %, c’est bien celui de la mobilité européenne et internationale des jeunes, qui est à la fois, vous l’avez dit, essentielle pour leur formation, les compétences qu’ils développent et leur insertion dans l’emploi, mais aussi pour la destinée de nos nations et l’avenir de l’Europe.

Le Président de la République a fixé un objectif extrêmement ambitieux dans le discours de la Sorbonne : la moitié d’une classe d’âge devra avoir passé au moins six mois dans un autre pays européen à l’horizon de 2024.

Il est clair que la situation que nous vivons rend difficile cette mobilisation, mais nous allons poursuivre nos efforts, parce que nous y croyons. J’ai participé voilà deux semaines à une réunion dématérialisée des ministres européens de la jeunesse. Nous nous sommes tous accordés sur cette grande priorité. Dès que les frontières rouvriront, il faudra immédiatement faire repartir le plus fortement possible le programme Erasmus+, le corps européen de solidarité et tous les dispositifs de mobilité en direction des jeunes. C’est un engagement que je prends ici devant vous. Cela fait partie de nos très grandes priorités.

Je disais que les perspectives en matière d’emploi seraient difficiles pour certains jeunes dans les prochains mois ou dans l’année qui vient. Parmi la palette de solutions que nous devons être en mesure de leur proposer pour que le temps qui s’écoulera avant qu’ils ne trouvent leur premier emploi soit utile et formateur, figurent, selon moi, des mobilités internationales. Je pense au dispositif de volontariat international en entreprise (VIE) ou en administration (VIA), ou encore au service civique à l’étranger, que vous avez évoqué.

Tous ces dispositifs, à mon sens, peuvent faire partie d’une palette que nous allons développer très activement, sur laquelle nous allons investir, une fois que les frontières seront rouvertes, pour permettre à des jeunes d’acquérir des compétences et des expériences qui leur seront utiles lors de leur insertion sur le marché de l’emploi, lorsque les turbulences se seront éloignées.

Mme la présidente. La parole est à Mme Claudine Lepage, pour la réplique.

Mme Claudine Lepage. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État. Nous y croyons, avez-vous dit. Moi aussi, je veux y croire ! (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Guylène Pantel.

Mme Guylène Pantel. Je remercie nos collègues du groupe socialiste et républicain d’avoir organisé ce débat sur les politiques à destination de la jeunesse à mettre en œuvre au regard de la crise sanitaire qui nous touche et de la crise économique et sociale qui s’annonce.

Chaque année, de nombreux jeunes, étudiants ou non, exercent une activité rémunérée leur permettant de vivre de manière autonome. Si le Gouvernement a annoncé une aide de 200 euros aux étudiants précaires et aux jeunes de moins de 25 ans bénéficiant de l’aide personnalisée au logement (APL), force est de constater qu’une partie du public cible ne pourra pas bénéficier de cette aide. Certains jeunes précaires ne sont pas étudiants, certains étudiants précaires ne touchent pas d’APL, étant logés de manière temporaire chez des amis, de la famille ou des connaissances. Il y a des trous dans la raquette.

Avec la crise économique et sociale annoncée, il sera de plus en plus difficile, pour ces jeunes précaires, d’accéder à un travail, temporaire ou non, à temps partiel comme à temps complet. Nos jeunes, dans tous les territoires, vont être frappés de plein fouet par cette crise. Il est nécessaire d’anticiper l’avenir.

Dans un rapport remis au Premier ministre en mars 2017, Mme Célia Verot et M. Antoine Dulin proposaient la mise en place d’un revenu minimum garanti aux jeunes à partir de leur majorité, ouvert sous conditions de ressources. Ce « revenu socle », limité dans le temps, aurait pour principal atout de ne bénéficier qu’à ceux qui en ont besoin, atténuant les effets de seuil, et de permettre aux jeunes âgés de 18 à 30 ans de bénéficier d’un suivi intensif des services sociaux, veillant à la réussite de leur parcours d’acquisition de l’autonomie et à leur intégration sociale et professionnelle.

Monsieur le secrétaire d’État, au regard de la crise qui s’annonce, le Gouvernement compte-t-il travailler sur ce genre de dispositifs d’accompagnement ? Quelles mesures sont envisagées pour permettre aux jeunes les plus précaires, les plus isolés, de ne plus se retrouver en dehors des dispositifs d’aide et, grâce à la solidarité nationale, de remettre le pied à l’étrier ?