M. le président. L’amendement n° 580 rectifié ter, présenté par MM. de Belenet, L. Hervé, Bonnecarrère, Duffourg, Marseille, P. Martin, Détraigne, Capo-Canellas, Kern, Henno et Levi, Mme Billon, M. Delahaye, Mme Saint-Pé, MM. S. Demilly et Laugier, Mmes Perrot et Morin-Desailly, MM. Chauvet, Le Nay, J.M. Arnaud et Folliot, Mme Gatel et M. Longeot, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Supprimer les mots :

acquis à titre gratuit

La parole est à M. Arnaud de Belenet.

M. Arnaud de Belenet. Cet amendement vise à soutenir l’objectif de l’article 28, qui permet aux associations cultuelles de posséder et d’administrer des biens acquis à titre gratuit.

Il s’agit de rétablir un équilibre et une équité avec les associations constituées en vertu de la loi de 1901 qui, depuis 2014, peuvent, elles, administrer des biens acquis à titre gratuit.

Au moment où l’on s’interroge sur la pérennisation des recettes et sur l’indépendance des associations, particulièrement cultuelles, et alors que l’on cherche à éviter qu’elles ne reçoivent des financements en provenance de l’étranger, il faut bien leur donner les moyens de vivre durablement.

Cet amendement tend donc à permettre l’acquisition par les associations cultuelles d’immeubles de rapport à titre onéreux. Le temps où la puissance d’une association, fût-elle cultuelle, se mesurait à l’aune de son patrimoine immobilier est révolu – la puissance immobilière des associations ne peut plus inquiéter la République !

En droit, cet amendement vise à rendre plus transparente la réalité d’une pratique.

M. le président. Les trois amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 265 rectifié est présenté par MM. Capus, Menonville, Guerriau et Decool, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Wattebled, Verzelen et Chasseing, Mme Joseph, M. de Legge, Mmes Bonfanti-Dossat et de Cidrac et M. Chatillon.

L’amendement n° 402 rectifié ter est présenté par M. Cuypers, Mmes Chain-Larché et Thomas, MM. Regnard, Boré, Le Rudulier et Reichardt, Mme Gruny, MM. Brisson, Longuet et Lefèvre, Mme Lassarade, MM. Bas, Houpert et de Nicolaÿ, Mme Boulay-Espéronnier, M. Bonne, Mme Pluchet, MM. Belin, Laménie et B. Fournier, Mme Lopez et MM. Charon et Mouiller.

L’amendement n° 581 rectifié ter est présenté par MM. de Belenet, L. Hervé, Bonnecarrère, Duffourg, Marseille, P. Martin, Détraigne, Capo-Canellas, Kern, Henno et Levi, Mme Billon, M. Delahaye, Mme Saint-Pé, MM. S. Demilly et Laugier, Mmes Perrot et Morin-Desailly, MM. Chauvet, Le Nay, J.M. Arnaud et Folliot, Mme Gatel et M. Longeot.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 5

Après les mots :

à titre gratuit

insérer les mots :

et à titre onéreux

La parole est à M. Jean-Louis Lagourgue, pour présenter l’amendement n° 265 rectifié.

M. Jean-Louis Lagourgue. L’article 28 prive les associations cultuelles de la possibilité de posséder et d’administrer des biens immobiliers à titre onéreux. Cette restriction porte atteinte à leur liberté de gestion et risque de compromettre gravement l’équilibre financier de bon nombre d’entre elles.

Le présent amendement vise donc à corriger cette inégalité de traitement et cette atteinte à la liberté, en inscrivant dans la loi la possibilité pour les associations de posséder et d’administrer des biens immobiliers acquis à titre onéreux.

M. le président. La parole est à Mme Anne Chain-Larché, pour présenter l’amendement n° 402 rectifié ter.

Mme Anne Chain-Larché. Nous proposons également de permettre aux associations cultuelles de gérer des immeubles acquis à titre onéreux, afin de faciliter les conditions d’exercice du culte, en élargissant les ressources propres des associations. Il s’agit de garantir réellement au culte tous les moyens de son exercice, comme le prévoit l’intitulé du titre II du projet de loi.

M. le président. La parole est à M. Arnaud de Belenet, pour présenter l’amendement n° 581 rectifié ter.

M. Arnaud de Belenet. Cet amendement vise à préciser explicitement que les associations peuvent posséder et administrer des immeubles acquis à titre à titre onéreux.

M. le président. L’amendement n° 140 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Fialaire, Guérini et Guiol, Mme Pantel, MM. Requier, Roux, Corbisez et Gold et Mme Guillotin, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Ces immeubles ne peuvent bénéficier des exonérations fiscales prévues aux articles 1380 et 1407 du code général des impôts.

La parole est à Mme Nathalie Delattre.

Mme Nathalie Delattre. Cet amendement vise à empêcher que les propriétaires d’immeubles de rapport soient exonérés de la taxe foncière et de la taxe d’habitation respectivement prévues aux articles 1380 et 1407 du code général des impôts.

Pour l’heure, sont imposables tous types de locaux meublés dédiés à l’habitation, à l’occupation à titre privatif de sociétés publiques ou d’organismes associatifs ou privés, ou à l’occupation d’organismes déconcentrés de collectivités territoriales.

Les immeubles de rapport entrent pleinement dans ces cases. Sont-ils souvent des bâtiments servant aux exploitants agricoles ? Non ! Sont-ils souvent dédiés aux écoliers de pensionnat ? Pas trop ! Sont-ils souvent des résidences universitaires ? Un peu plus…

C’est pourquoi il paraît juste et normal que les propriétaires d’immeubles de rapport ne puissent être exonérés ni de la taxe foncière ni de la taxe d’habitation.

M. le président. L’amendement n° 52 n’est pas soutenu.

L’amendement n° 432 rectifié, présenté par Mme Conway-Mouret, M. Sueur, Mmes Harribey et de La Gontrie, M. Assouline, Mmes S. Robert, Monier et Meunier, MM. Marie et Magner, Mme Lepage, MM. Féraud, Leconte, Lozach, Kerrouche, Kanner, Bourgi, Durain, Redon-Sarrazy, Antiste et J. Bigot, Mmes Bonnefoy, Briquet et Conconne, M. P. Joly, Mme Jasmin, MM. Gillé, Raynal, Mérillou, Lurel, Temal, Tissot, Jacquin, Montaugé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 6

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

« Sans préjudice de l’application aux édifices affectés à l’exercice public d’un culte du 10° de l’article 795 et du 4° de l’article 1382 du code général des impôts, les immeubles mentionnés au troisième alinéa du présent II sont soumis au droit commun des biens immobiliers. Les associations cultuelles les administrant établissent leurs comptes annuels de telle sorte que leurs activités en relation avec cette gestion constituent une unité fonctionnelle présentée séparément.

« Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application du présent article.

La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret.

Mme Hélène Conway-Mouret. L’article 28, alinéa 5, permet aux associations cultuelles de posséder et d’administrer des immeubles acquis à titre gratuit.

Or les biens immobiliers des associations cultuelles sont aujourd’hui exemptés de la fiscalité afférente, notamment de la taxe foncière, ce qui s’apparente déjà à une forme de subventionnement déguisé, bien que cela soit justifié, en l’état actuel des textes, par l’objet social étroitement défini.

Cette exemption se fonde sur le fait que ces associations ont pour objet exclusif l’exercice du culte. Il est donc indispensable que ce régime d’exemption ne soit pas étendu aux immeubles gérés en dehors de cet objet, sans quoi l’esprit de la loi de 1905 s’en trouverait violé.

Le Gouvernement justifie son projet par la nécessité d’accorder aux cultes une plus grande autonomie financière, alors que, comme cela est indiqué dans l’étude d’impact, d’une part, seuls sont concernés les immeubles acquis à titre gratuit et que, d’autre part, les revenus ainsi générés ne pourront servir qu’à financer des activités cultuelles, et ce dans un contexte où leurs financements seront plus étroitement contrôlés et où seront interdits ceux qui proviennent de l’étranger.

Si effort de rapprochement avec le droit commun il doit y avoir, alors il faut aller jusqu’au bout de la démarche. Si l’objectif d’assurer des ressources autonomes régulières aux associations cultuelles est légitime, ces dernières ne sauraient échapper au droit commun.

Afin de répondre à cette attente, le Gouvernement a retenu un amendement tendant à plafonner à 33 % la part des revenus locatifs que les associations cultuelles pourront générer dans le total de leurs ressources. Il a par ailleurs été précisé que les revenus locatifs des associations cultuelles seront assujettis à l’impôt, comme toute organisation qui possède des immeubles.

Dès lors, il nous paraît nécessaire de compléter ce dispositif dans deux directions : d’une part, en inscrivant expressément dans la loi que ces immeubles non consacrés à l’exercice du culte sont bien soumis au droit commun fiscal ; d’autre part, en dissociant dans les comptes des associations cultuelles concernées les activités en relation avec l’exercice du culte et celles qui sont relatives à la gestion des immeubles, à l’instar de la distinction faite, à l’article 30 du projet de loi, pour les associations relevant de l’article 4 de la loi du 2 janvier 1907.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Dominique Vérien, rapporteure. Cet article permet notamment aux associations cultuelles d’administrer des immeubles acquis à titre gratuit.

Jusqu’à présent, lorsqu’une association cultuelle bénéficiait d’un immeuble grâce à un don ou un legs, elle n’était pas autorisée à l’administrer. Elle était tenue de le vendre, mais elle pouvait conserver le produit de la vente.

L’article 28 permet aux associations cultuelles de disposer d’une source de revenus plus réguliers que la vente d’un immeuble. L’Assemblée nationale avait réduit cette possibilité, en plafonnant ces revenus à 33 % de leurs ressources annuelles totales.

Pour plusieurs raisons, la commission du Sénat a supprimé ce plafond. Comment en effet le calculer ? Qu’adviendrait-il en cas de dépassement ? En outre, les recettes, notamment les dons, peuvent être fluctuantes, si bien que le plafond, d’une année sur l’autre, pourrait être inférieur ou supérieur à 33 % des ressources totales. Bref, le dispositif était assez complexe.

Certaines associations cultuelles, notamment celles des orthodoxes de France, ont de peu de recettes. Le jour où elles hériteraient d’un immeuble, voire d’un simple appartement qu’elles mettraient en location, le plafond de 33 % des recettes serait largement dépassé.

L’objectif étant que les associations cultuelles puissent se financer, indépendamment des ressources étrangères, la commission a supprimé le plafond de 33 %.

Pourquoi ne pas aller plus loin et autoriser les associations cultuelles à acquérir des immeubles à titre onéreux ?

Il s’est d’abord agi de préserver un certain équilibre. Certains amendements tendent à supprimer l’article, d’autres à étendre le dispositif proposé aux immeubles acquis à titre onéreux. L’acquisition à titre gratuit nous semblait être une solution médiane plus sage. Allons déjà dans ce sens et regardons ce que cela donnera.

Ensuite, sans craindre que des associations cultuelles se constituent un empire immobilier, nous avons considéré que le fait que certaines puissent acquérir progressivement de nombreux appartements dans un même quartier pouvait présenter un risque.

Il arrive que, dans le cadre d’une société civile immobilière (SCI), les gestionnaires d’une location soient une congrégation. Les associations cultuelles n’étant pas toujours vertueuses, on pourrait imaginer qu’elles soient tentées de consentir un loyer peu onéreux à des locataires à condition que ces derniers s’engagent à fréquenter le lieu de culte qu’elles gèrent dans le même quartier. Nous ne souhaitons pas que cela soit possible.

C’est pourquoi la commission a retenu une solution médiane : oui à l’administration d’immeubles acquis à titre gratuit, sans plafonnement des ressources à 33 %, ingérable en réalité ; non à l’administration d’immeubles acquis à titre onéreux. S’il était un jour nécessaire de développer cette possibilité, nous reconsidérerions alors les choses. Mais, en l’état, il ne nous paraît pas sage de permettre l’administration d’immeubles acquis à titre onéreux.

J’en viens maintenant, après vous avoir exposé la position de la commission, aux avis sur les amendements.

Les amendements nos 431 rectifié, 473 et 139 rectifié bis visent à supprimer la possibilité pour les associations cultuelles de posséder et d’administrer des immeubles acquis à titre gratuit. La commission y est défavorable.

L’amendement n° 140 rectifié tend à exclure les immeubles de rapport du bénéfice des exonérations fiscales de taxe foncière et de taxe d’habitation. Il est en réalité satisfait. C’est pourquoi la commission sollicite son retrait, à défaut elle émettra un avis défavorable.

L’amendement n° 432 rectifié vise à soumettre au droit commun fiscal les immeubles de rapport, mais aussi à imposer une présentation comptable séparée. La première partie de cet amendement est satisfaite, tandis que la seconde, à laquelle nous sommes défavorables, n’apparaît pas souhaitable – suffisamment d’efforts ont déjà été demandés aux cultes s’agissant de la présentation de leurs comptes !

Les amendements nos 580 rectifié ter, 265 rectifié, 402 rectifié ter et 581 rectifié ter ont pour objet d’autoriser les associations cultuelles à posséder des immeubles acquis à titre onéreux. La commission est défavorable à une telle proposition, peu importe d’ailleurs la rédaction choisie, monsieur de Belenet.

Quant à l’amendement n° 451 rectifié, il vise à apporter une correction terminologique en précisant que les associations cultuelles peuvent mettre à disposition ou louer des biens qu’elles ont acquis à titre gratuit, sans être pour autant autorisées à les administrer. La commission n’ayant pas tout à fait saisi la subtilité de cette proposition, elle émet un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Le Gouvernement émet lui aussi un avis défavorable sur ces amendements, mais pour des raisons différentes.

L’intention initiale du Gouvernement était de permettre aux associations cultuelles de posséder et d’administrer des immeubles de rapport.

Le culte doit se financer ! Nous pouvons toujours rêver de vivre de paroles divines, d’eau fraîche et d’air pur, mais il nous faut rester réalistes et tirer les conclusions du monde mercantile dans lequel nous vivons. Les cultes ont besoin de financement, que ce soit pour embaucher les ministres du culte, disposer d’un bien immobilier ou exercer leurs activités cultuelles.

Nous nous sommes fixé deux règles, comme deux rails parallèles, qui, ensemble, doivent permettre d’encadrer et de garantir la liberté cultuelle.

Le premier rail, c’est la loi de 1905. L’article 2 pose le principe de non-subventionnement public des cultes. Il existe certaines exceptions de droit local en Alsace-Moselle et en outre-mer, en matière de baux emphytéotiques, de reçus fiscaux et de garanties d’emprunts, mais rien de tout cela ne constitue des subventionnements directs des cultes ou des ministres du culte.

Nous souhaitons conserver ce principe de non-subventionnement par l’État et les collectivités locales.

Le second rail, celui que nous imposons et qui, à mon avis, marque une avancée très importante dans la façon dont sont gérés les cultes dans notre pays, c’est le non-financement en provenance de l’étranger.

Je pense d’abord au financement étatique des imams détachés ; le Président de la République a indiqué qu’il y serait mis fin en 2023. Qu’est-ce qu’un imam détaché sinon une sorte de « ministre du culte » payé par un État étranger pour être fonctionnaire sur le territoire national ? Je précise d’ailleurs qu’il s’agit non pas d’interdire aux étrangers de professer sur notre sol, mais de faire en sorte qu’ils ne soient pas payés par un État étranger.

Je pense ensuite de manière générale à l’argent étranger – par exemple, des fondations dont l’objet serait détourné –, qui pourrait financer tel ou tel site cultuel. Si nous ne nous y opposons pas par principe, l’adoption d’articles ultérieurs nous permettra de connaître ces financements et de nous y opposer le cas échéant.

Une fois posés ces deux rails – pas de financement public quel qu’il soit, pas de financement en provenance de l’étranger –, il faut tout de même bien imaginer un financement national.

Les fidèles, me répondrez-vous ! En effet, les fidèles financent les cultes. Toutefois, cela suppose qu’ils veuillent donner l’obole ou verser une aide directe à leur association cultuelle. Ils y sont souvent incités par des dispositions fiscales, à condition qu’ils payent des impôts. Or 55 % des Français ne payent pas d’impôt sur le revenu et nous savons tous que, quelles que soient les religions, les fidèles sont en moyenne plus pauvres que les autres. Souvent, les reçus fiscaux ne leur sont donc d’aucune utilité.

Les Églises auraient pu demander la mise en place d’un crédit d’impôt, celui-ci permettant, chacun le sait, de contribuer au financement lorsque l’on ne paye pas d’impôts, par une sorte de crédit d’impôt négatif. Le Gouvernement n’est pas allé jusqu’à proposer le crédit d’impôt parfois demandé par les associations cultuelles.

Mme Dominique Vérien, rapporteure. Tout à fait !

M. Gérald Darmanin, ministre. Il a considéré que, en plus des dons des fidèles et sans recourir au crédit d’impôt, il était normal de trouver un financement national qui, je le répète, ne soit ni public ni étranger. Avant même la loi Hamon, vous l’avez indiqué, madame la rapporteure, il était déjà possible de donner un immeuble à son Église. C’est ce que l’on appelle un don à titre gratuit.

Il est surprenant que les associations cultuelles puissent détenir des actions, mais ne puissent pas posséder d’immeubles. Or un fidèle peut vouloir apporter un soutien particulier à son Église à son décès, sous la forme d’un héritage. Sous prétexte que cela ne serait pas directement lié au culte, on suppose que l’Église revendrait ce bien. Avouez que c’est assez hypocrite.

Il s’agit donc d’autoriser les associations cultuelles à posséder des immeubles de rapport afin que tout croyant puisse contribuer, sur le territoire national en tant que croyant national de ce culte, indépendamment de l’argent venant de l’étranger, à la construction de l’Église ou du culte en question par des immeubles dits de rapport. Pour le coup, ceux-ci portent mal leur nom, puisque, par définition, ils ne rapportent pas grand-chose, si ce n’est qu’il s’agit d’un don gratuit.

Il fallait fixer une limite, de façon à ne pas recréer des empires religieux, des puissances financières religieuses, voire des lieux communautaires,…

M. Gérald Darmanin, ministre. … puisque c’est ce que nous essayons par ailleurs de combattre.

C’est la raison pour laquelle, monsieur le sénateur Belenet, nous ne sommes pas allés jusqu’à autoriser la possession ou l’administration d’immeubles de rapport acquis à titre onéreux, même si je comprends la philosophie qui préside à cette idée. Ce faisant pourraient se créer non seulement une puissance financière, notamment par le biais de SCI, comme vous l’avez souligné, madame la rapporteure, mais aussi une géographie communautaire.

M. Gérald Darmanin, ministre. C’est d’ailleurs pour cela que nous nous opposons au regroupement par communautés religieuses et que nous essayons de faire de la mixité de manière générale.

L’Assemblée nationale a souhaité établir un taquet de 33 %. Cela a donné lieu à un débat très important : le rapporteur général a d’abord proposé une somme unitaire – on voit bien que cela dépend des associations cultuelles – ; finalement, c’est un pourcentage en recettes qui a été privilégié, sur lequel le Gouvernement a émis un avis de sagesse.

Prenons un exemple tout bête, que vous avez vous-même évoqué, madame la rapporteure, en citant les orthodoxes : avec la crise du covid, les recettes – dons ou activités caritatives – se sont écroulées, mais les recettes de l’immobilier sont demeurées solides. Par conséquent, ce dispositif serait assez absurde, sauf à prévoir des exceptions.

C’est pourquoi le Gouvernement suit la position de la commission dans son intention de faire sauter ce taquet. Pour autant, comme vous, madame la rapporteure, il ne va pas jusqu’à autoriser les acquisitions à titre onéreux pour éviter la constitution d’empires financiers.

Dans la philosophie du Gouvernement, ces immeubles de rapport ne sont pas contraires à l’esprit laïque, bien au contraire. Il n’a jamais été dans l’imaginaire des législateurs d’interdire le financement du culte par les croyants. Il s’agit d’interdire les subventions publiques, d’empêcher tout financement étranger, de garantir un financement national, qui passe notamment par le don gratuit, l’exploitation des immeubles de rapport, sans pour autant permettre la constitution d’empires puisque nous empêchons les acquisitions à titre onéreux. Tout cela contribue, me semble-t-il, à la responsabilisation du culte tout en l’empêchant de dépendre de l’argent de l’étranger.

J’en viens à la question fiscale. Il ne s’agit pas d’ouvrir d’exception fiscale aux cultes qui exploiteraient des immeubles de rapport. Les exceptions fiscales – taxe foncière, taxe d’aménagement, droits de mutation à titre onéreux – concernent uniquement le lieu de culte : tout lieu qui ne serait pas destiné au culte serait évidemment assujetti à la fiscalité que chacun doit. Il n’y a pas de doute sur ce point.

Les exonérations fiscales ne peuvent concerner que le lieu de culte. C’est pourquoi la loi de 1905 a déjà prévu une disposition en ce sens, très mal rédigée au demeurant, si je puis me permettre ce commentaire sur les pères fondateurs de la loi de 1905, et établi la liste exacte des immeubles à destination du culte.

Pour toutes ces raisons, il faut refuser l’ensemble de ces amendements, même si, je le comprends, ce débat est important. L’article 28, conformément à l’esprit laïque de la République et à la loi de 1905, permet de faire face à la réalité des choses et de lutter contre les ingérences étrangères et le financement étranger.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.

M. Jean-Yves Leconte. Madame la rapporteure, monsieur le ministre, même si l’on s’en tient à ce que vous nous avez expliqué et à la raison pour laquelle une association cultuelle doit rester une association cultuelle et ne pas devenir un gestionnaire de biens, il me semble que cela va mieux en le disant.

C’est la raison pour laquelle l’amendement n° 451 rectifié a pour objet de remplacer les termes : « et administrer » par les termes : « mettre à disposition ou louer ». On indique ainsi ce qui est autorisé et on comprend bien que ces activités ne constituent pas le cœur de métier de l’association cultuelle. Le verbe « administrer » ouvre la porte à des activités différentes, avec tous les risques, évoqués par M. le ministre, que cela peut représenter, notamment la construction d’un empire ou d’un système immobilier particulier.

La modification que nous proposons d’apporter est simple et facile : la gestion d’immeubles de rapport doit rester une activité annexe par rapport à l’activité cultuelle.

M. le président. La parole est à M. Arnaud de Belenet, pour explication de vote.

M. Arnaud de Belenet. Je ne suis pas insensible à l’avis de la commission. Par ailleurs, la détermination de M. le ministre à lutter contre ce plafond de 33 %, qui n’a aucun sens et qui est impossible à mettre en pratique, me rassérène et me conforte dans l’idée qu’il convient de retirer les amendements nos 580 rectifié ter et 581 rectifié ter.

M. le président. Les amendements nos 580 rectifié ter et 581 rectifié ter sont retirés.

La parole est à Mme Nathalie Delattre, pour explication de vote.

Mme Nathalie Delattre. Convaincue par les arguments de Mme la rapporteure, je retire l’amendement n° 140 rectifié.

M. le président. L’amendement n° 140 rectifié est retiré.

Je mets aux voix les amendements identiques nos 431 rectifié et 473.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 139 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 451 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 265 rectifié et 402 rectifié ter.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 432 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 685, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 7, seconde phrase

Après le mot :

réparations

insérer les mots :

ainsi que pour travaux d’accessibilité

La parole est à M. le ministre.

M. Gérald Darmanin, ministre. Cet amendement est important et va sans doute faire hésiter les membres du groupe CRCE !

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Aïe aïe aïe ! (Sourires sur les travées du groupe SER.)

M. Gérald Darmanin, ministre. Il s’agit en effet d’autoriser des subventions publiques aux lieux de culte pour permettre l’accessibilité de ces mêmes lieux aux handicapés.

Je rappelle que l’État, comme les collectivités, peut déjà accorder des subventions publiques aux lieux de culte pour leur sécurisation. Ainsi, le fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD) prévoit une enveloppe dédiée pour les lieux de culte, notamment pour l’acquisition de caméras de vidéoprotection. Tous les cultes – juif, musulman, catholique… – peuvent obtenir ces financements et il ne s’agit pas là de subventions directes pour le lieu de culte – le Conseil constitutionnel et le Conseil d’État en ont jugé ainsi.

La difficulté première, c’est que les bâtiments cultuels sont souvent anciens – ils ont 70, 80, 90 ans. Par ailleurs, et le dire n’a rien d’injurieux, il est souvent difficile pour les croyants, en raison de leur âge, d’accéder à ces bâtiments. Gérer ces lieux de culte coûte donc cher aux collectivités locales. Par conséquent, il semble normal de favoriser l’accessibilité voulue par la grande loi pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées de 2005.

Mesdames, messieurs les sénateurs, j’appelle votre attention sur le fait que je n’ai pas accédé à la seconde demande d’une partie des associations cultuelles, qui était de permettre des subventions de l’Ademe, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, pour des motifs énergétiques. En effet, ces aides concernent le bâti, qui appartient au culte, et il ne nous revient pas de le subventionner.

En revanche, j’ai été convaincu sur l’accessibilité. C’est pourquoi je souhaite que cet amendement soit adopté.