Mme le président. L’amendement n° 47 rectifié, présenté par MM. Cigolotti, Longeot et Janssens, Mme N. Goulet, M. Kern, Mmes Jacquemet et Billon et MM. Henno, Lafon, Le Nay, Duffourg et Hingray, est ainsi libellé :

Alinéa 11

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Olivier Cigolotti.

M. Olivier Cigolotti. L’alinéa 11 de l’article 2 dispose que « les conditions générales de vente indiquent si un contrat de vente, conformément à l’article L. 631-24 du code rural et de la pêche maritime, portant sur les matières premières agricoles entrant dans la composition de la denrée alimentaire, est déjà conclu ».

Une telle indication constitue une contrainte et la finalité de cette rédaction n’apparaît pas clairement aux yeux des signataires de cet amendement. C’est pourquoi il en est demandé la suppression.

Mme le président. Les deux amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 119 rectifié est présenté par MM. Menonville, Chasseing, Decool, Wattebled et Guerriau, Mme Paoli-Gagin, M. Capus, Mme Mélot et MM. Lagourgue, Malhuret et Médevielle.

L’amendement n° 131 rectifié est présenté par MM. Cabanel, Corbisez, Fialaire, Gold et Guiol, Mme Pantel, MM. Requier, Roux et Bilhac et Mmes Guillotin et N. Delattre.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 12

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

La publication de ce décret est précédée de l’avis de l’interprofession permettant d’objectiver les difficultés rencontrées par les opérateurs.

La parole est à M. Franck Menonville, pour présenter l’amendement n° 119 rectifié.

M. Franck Menonville. Cet amendement vise à mieux encadrer le décret permettant d’exclure certains produits du champ d’application de l’article 2, en faisant précéder sa publication d’une concertation ou d’un avis de l’interprofession pour éviter toute sortie abusive.

En effet, de nombreuses filières ou de nombreux maillons de celles-ci souhaitent être exclus du champ d’application de l’article 2. Il semble important de préciser que l’accord de tous est requis pour qu’un produit ou un opérateur sorte du processus prévu par l’article. Cette garantie paraît absolument nécessaire.

Mme le président. La parole est à M. Henri Cabanel, pour présenter l’amendement n° 131 rectifié.

M. Henri Cabanel. L’article 2 ayant pour principal objet de sanctuariser les matières premières agricoles lors des négociations commerciales, il est important qu’une majorité des filières puisse participer à cet effort. C’est une demande de la plupart des organisations représentatives des exploitants agricoles.

Comme Franck Menonville l’a rappelé, le texte prévoit cependant un champ d’exclusion pour un certain nombre de produits alimentaires dont la liste serait définie par décret. L’amendement vise à encadrer les modalités d’adoption de ce décret afin que sa publication soit précédée de l’avis de l’interprofession.

Si l’on peut comprendre que soient sortis du dispositif certains produits, en particulier les fruits et légumes frais vendus en l’état ou à la filière viticole, il faut prévoir pour d’autres produits que les opérateurs justifient leur demande de dérogation. L’avis de l’interprofession doit être un préalable.

Mme le président. L’amendement n° 157, présenté par Mme Loisier, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéa 13

Après le mot :

article

insérer les mots :

, notamment la définition du tiers indépendant mentionné aux I et II,

Cet amendement a déjà été défendu.

L’amendement n° 146 rectifié, présenté par MM. Canévet, Longeot, Janssens et Kern, Mme Billon, MM. Détraigne, S. Demilly, Hingray et Duffourg, Mme Jacquemet et MM. Le Nay, Delcros et Vanlerenberghe, est ainsi libellé :

Alinéa 13

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

La publication de ce décret est précédée de l’avis de l’interprofession permettant d’objectiver les difficultés rencontrées par les opérateurs.

La parole est à M. Michel Canévet.

M. Michel Canévet. Il est défendu.

Mme le président. L’amendement n° 95, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéas 15 à 30

Remplacer ces alinéas par vingt-sept alinéas ainsi rédigés :

« Art. L. 443-8. – I. – Pour les produits alimentaires dans la composition desquels entrent des matières premières agricoles ou des produits transformés soumis aux dispositions du I de l’article L. 441-1-1, une convention écrite conclue entre le fournisseur et son acheteur mentionne les obligations réciproques auxquelles se sont engagées les parties à l’issue de la négociation commerciale, dans le respect des articles L. 442-1 à L. 442-3. Cette convention est établie soit dans un document unique, soit dans un ensemble formé par un contrat-cadre et des contrats d’application.

« La convention mentionne chacune des obligations réciproques, et leur prix unitaire, auxquelles se sont engagées les parties à l’issue de la négociation commerciale.

« Lorsqu’elle est conclue avec un distributeur, la convention est conclue dans les conditions prévues aux articles L. 441-3 et L. 441-4, sous réserve du présent article.

« II. – La négociation commerciale ne porte pas sur la part agrégée, dans le tarif du fournisseur, du prix des matières premières agricoles et des produits transformés mentionnés au II de l’article L. 441-1-1.

« III. – Dans l’hypothèse mentionnée au 1° du I de l’article L. 441-1-1, la convention mentionne, aux fins de concourir à la détermination du prix convenu, la part du prix des matières premières agricoles et des produits transformés, tels qu’ils figurent dans les conditions générales de vente. La convention précise les modalités de prise en compte de ce prix d’achat dans l’élaboration du prix convenu.

« L’acheteur peut, à ses frais, demander au fournisseur de mandater un tiers indépendant pour attester l’exactitude des éléments figurant dans les conditions générales de vente. Dans ce cas, le fournisseur remet au tiers indépendant les pièces justifiant l’exactitude de ces éléments.

« La mission du tiers indépendant consiste exclusivement, sur la base d’un contrat conclu avec le fournisseur, à :

« 1° Réceptionner les informations transmises par le fournisseur et les pièces justificatives ;

« 2° Attester l’exactitude des informations transmises, notamment la part¸ dans le tarif du fournisseur, de chaque matière première agricole et de chaque produit transformé mentionnés au II de l’article L. 441-1-1 et la conformité des modalités de révision du prix aux dispositions du VII du présent article ;

« 3° Transmettre cette attestation à l’acheteur.

« IV. – Dans l’hypothèse mentionnée au 2° du I de l’article L. 441-1-1, la convention mentionne, aux fins de concourir à la détermination du prix convenu, la part du prix agrégé des matières premières agricoles et des produits transformés mentionnés au même I, tels qu’ils figurent dans les conditions générales de vente. La convention précise les modalités de prise en compte de ce prix d’achat dans l’élaboration du prix convenu.

« Le fournisseur mandate un tiers indépendant pour attester l’exactitude des éléments figurant dans les conditions générales de vente. La mission du tiers indépendant consiste, outre les éléments mentionnés aux 1° et 3° du III, à attester de la détermination du prix agrégé des matières premières agricoles et produits transformés mentionnés au II de l’article L. 441-1-1, de la part de ce prix dans le tarif du fournisseur, et de la conformité des modalités de révision du prix aux dispositions du VII du présent article.

« Le fournisseur répondant à la définition des petites et moyennes entreprises, au sens de l’article L. 123-16, peut ne pas mandater un tiers indépendant. Dans ce cas, l’acheteur peut, à ses frais, demander au fournisseur de mandater un tiers indépendant pour attester l’exactitude des éléments figurant dans les conditions générales de vente.

« V. – Dans l’hypothèse mentionnée au 3° du I de l’article L. 441-1-1, le fournisseur transmet à un tiers indépendant les pièces qui justifient la part de l’évolution de son tarif qui résulte de l’évolution du prix des matières premières agricoles ou des produits transformés composés de plus de 50 % de matières premières agricoles.

« Le tiers indépendant atteste du respect des dispositions du II et du VII, au plus tard dans le mois qui suit la conclusion du contrat. En l’absence de cette attestation, si les parties souhaitent poursuivre leur relation contractuelle, elles modifient leur contrat dans un délai de deux mois suivant la signature du contrat initial. Le tiers indépendant est saisi dans les mêmes conditions et aux mêmes fins du contrat modifié au terme de la nouvelle négociation.

« VI. – Le tiers indépendant mentionné aux III, IV et V est astreint au secret professionnel pour les faits, actes et renseignements dont il a pu avoir connaissance à raison de ses fonctions.

« Le recours à un tiers indépendant ne dispense pas le fournisseur de conserver un exemplaire des pièces justificatives afin de répondre, le cas échéant, aux demandes de l’administration.

« VII. – La convention comporte une clause de révision automatique des prix du contrat en fonction de la variation du coût de la matière première agricole entrant dans la composition du produit alimentaire. Les parties déterminent librement, selon la durée du cycle de production, la formule de révision et, en application du III de l’article L. 631-24- 1 du code rural et de la pêche maritime, les indicateurs utilisés.

« VIII. – La convention mentionnée au I du présent article est conclue pour une durée d’un an, de deux ans ou de trois ans. La convention est conclue au plus tard le 1er mars et le fournisseur communique ses conditions générales de vente à l’acheteur au plus tard trois mois avant cette date ou, pour les produits soumis à un cycle de commercialisation particulier, deux mois avant le point de départ de la période de commercialisation.

« Le distributeur dispose d’un délai d’un mois à compter de la réception des conditions générales de vente pour soit motiver explicitement et de manière détaillée, par écrit, le refus de ces dernières ou, le cas échéant, les dispositions des conditions générales de vente qu’il souhaite soumettre à la négociation, soit notifier leur acceptation.

« IX. – Sans préjudice des articles L. 442-1 à L. 442-3, tout avenant à la convention mentionnée au I du présent article fait l’objet d’un écrit, qui mentionne l’élément nouveau le justifiant.

« X. – Le présent article n’est applicable ni aux contrats de vente de produits agricoles mentionnés à l’article L. 631-24 du code rural et de la pêche maritime, ni aux grossistes au sens du II de l’article L. 441-4 du présent code.

« XI. – Le présent article n’est pas applicable à certains produits alimentaires ou catégories de produits dont la liste est définie par décret, en raison des spécificités de leur filière de production.

« XII. – Tout manquement aux dispositions du présent article est passible d’une amende administrative dont le montant ne peut excéder 75 000 € pour une personne physique et 375 000 € pour une personne morale. Le maximum de l’amende encourue est doublé en cas de réitération du manquement dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle la première décision de sanction est devenue définitive. » ;

2° bis Après le mot : « pour », la fin de la seconde phrase du VI de l’article L. 441-4 est ainsi rédigée : « soit motiver explicitement et de manière détaillée, par écrit, le refus de ces dernières ou, le cas échéant, les dispositions des conditions générales de vente qu’il souhaite soumettre à la négociation, soit notifier leur acceptation » ;

3° Après le mot : « écrits », la fin du dernier alinéa du I de l’article L. 443-2 est ainsi rédigée : « est obligatoire en application de l’article L. 631-24 du code rural et de la pêche maritime. » ;

4° Au I de l’article L. 443-4, les mots : « et L. 443-2 » sont remplacés par les mots « L. 443-2 et L. 443-8 ».

Cet amendement a déjà été défendu.

L’amendement n° 3 rectifié bis n’est pas soutenu.

L’amendement n° 126 rectifié, présenté par MM. Somon et Burgoa, Mmes Belrhiti et Dumont, MM. Cuypers, Bonhomme, Saury, Belin et Genet et Mme Deromedi, est ainsi libellé :

Alinéa 27

Rédiger ainsi cet alinéa :

« VI bis. – Le présent article n’est pas applicable à certains produits alimentaires, catégories de produits ou d’opérateurs, dont la liste est définie par décret sur proposition des organisations interprofessionnelles, en raison des spécificités des filières de production. La publication de ce décret est précédée de l’avis favorable de l’interprofession permettant d’objectiver les difficultés rencontrées par les opérateurs.

La parole est à M. Laurent Somon.

M. Laurent Somon. Pour préciser les modalités d’exclusion de certains produits alimentaires ou catégories de produits définis par décret du champ d’application de l’article, cet amendement a pour objet d’inclure dans la rédaction du décret l’objectivation des difficultés rencontrées par les opérateurs et les spécificités causales validées par l’interprofession.

L’accord de tous doit être requis pour qu’un produit ou un opérateur sorte du processus prévu par la proposition de loi.

Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure. Monsieur le ministre, sur l’amendement 94, je persiste et signe ! L’option 1 n’apporte aucune transparence supplémentaire et aucune garantie pour la non-négociabilité des matières premières agricoles visée par cet article.

J’apporterai quelques précisions sur les débats que nous venons d’avoir. L’industriel qui souhaite communiquer toutes les informations que nous avons citées dans les conditions générales de vente peut déjà le faire, alors qu’aucune loi ne le précise, et il pourra continuer à le faire à l’avenir. Rien ne l’empêchera, en effet, de mentionner ce qu’il souhaite dans ces conditions générales de vente.

Comme je l’ai déjà souligné, inscrire dans le texte l’option 1 comme option prioritaire revient à donner un outil de pression aux distributeurs. En effet, ces derniers demanderont aux industriels transformateurs de leur communiquer la totalité des informations, déséquilibrant ainsi le rapport de force entre les parties que nous souhaitons précisément rééquilibrer dans cette proposition de loi.

J’en viens à la question du surcoût représenté par le recours à un tiers de confiance. Pour rappel, dans la version du texte proposée par la commission, l’intervention de ce dernier n’est pas obligatoire. Elle n’a lieu qu’à la demande du distributeur. C’est donc ce dernier qui le financera s’il souhaite obtenir un supplément d’informations.

J’en viens à l’affaire du zeste de citron. (Sourires.) Le principe de la forme agrégée permet justement d’éviter d’entrer dans les détails de la répartition des différents ingrédients et, ce faisant, il simplifie notablement le dispositif.

M. Laurent Duplomb. Exactement !

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure. Le distributeur a uniquement besoin de connaître la partie du tarif qui est non-négociable. Il n’a pas besoin de savoir si ce montant protégé recouvre du lait, des fraises ou d’autres produits. L’essentiel est que la partie liée aux matières premières agricoles soit non négociable et rémunérée à la hauteur des frais engagés par le producteur.

Je rappelle également que, dans le schéma proposé par cette proposition de loi, l’industriel est tenu par le contrat écrit qu’il devra désormais souscrire et qui le liera directement à l’agriculteur. Lorsqu’il obtiendra une revalorisation du tarif auprès du distributeur, celle-ci découlera de la hausse tarifaire dont il se sera acquitté, en amont, auprès de l’agriculteur. Il est en outre lié à une clause de révision automatique des prix. Il ne peut donc échapper à cette revalorisation tarifaire.

Un événement subi par l’agriculteur – une hausse du prix d’achat des intrants, par exemple – sera répercuté chez l’industriel, qui le répercutera ensuite chez le distributeur. Cet effet de cascade et la marche en avant du prix sont bien sanctuarisés et garantis dans le dispositif de la commission.

J’émets donc un avis défavorable sur l’amendement n° 94, ainsi que sur les amendements identiques nos 118 rectifié et 135 rectifié, qui visent en réalité le même objectif. Ces derniers s’appliquent en outre, au-delà des matières premières agricoles, à toutes les matières premières, ce qui n’est pas le but de ce texte.

En revanche, la commission émet un avis favorable sur l’amendement n° 108 rectifié, qui tend à élargir le champ d’application de l’article 2 aux produits destinés à l’alimentation des animaux de compagnie.

Les amendements identiques nos 6 rectifié et 16 rectifié ter tendent à prévoir que le décret d’exonération ne peut être pris qu’après un avis favorable des interprofessions. Or cela revient à inverser la hiérarchie des normes, l’action du pouvoir réglementaire étant tributaire de l’acceptation préalable d’acteurs privés. La commission émet donc un avis défavorable sur ces amendements.

Sur l’amendement n° 113 rectifié quater, qui vise à exclure les produits soumis à accise du principe de transparence et de non-négociabilité, nous attendrons l’avis de M. le ministre. La commission s’en remet donc à la sagesse de la Haute Assemblée.

L’amendement n° 47 rectifié tend à supprimer la mention dans les conditions générales de vente de l’établissement, en amont, d’un contrat de vente par l’industriel. Cette disposition nous semble particulièrement utile, notamment dans le cadre du débat que nous venons d’avoir : il faut que le distributeur sache qu’il lui sera aisé de vérifier les informations affichées par l’industriel dans ses CGV. J’émets donc un avis défavorable, car cette mention constitue un outil de transparence utile dans la chaîne des intervenants.

La commission émet également un avis favorable sur les amendements identiques nos 119 rectifié et 131 rectifié. Compte tenu de l’impact que ces exemptions peuvent avoir en matière d’efficacité sur l’ensemble du dispositif de transparence et de non-négociabilité de la matière première agricole, il importe d’y associer plus étroitement les interprofessions susceptibles d’être concernées.

La commission émet un avis favorable sur l’amendement n° 146 rectifié. L’avis des interprofessions est toujours utile pour prendre en compte les spécificités des filières, y compris s’agissant de la taille des entreprises.

L’amendement n° 95 s’inscrit dans la lignée de l’amendement n° 94 et vise à revenir sur les modifications apportées par la commission, cette fois-ci pour la partie liée à la convention écrite signée à l’issue de la négociation. La commission émet un avis défavorable, d’autant que cet amendement part du principe que l’option 1, à laquelle nous nous opposons, est réintroduite.

Enfin, l’amendement n° 126 rectifié a le même objet que les amendements identiques nos 6 rectifié et 16 rectifié ter, mais vise un autre alinéa de l’article. C’est pourquoi la commission émet un avis défavorable à son sujet, pour les mêmes motifs.

Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Julien Denormandie, ministre. Je reviens sur l’amendement n° 94 du Gouvernement et sur la première des trois options possibles pour garantir la transparence des prix. Madame la rapporteure, vous affirmez qu’il sera toujours possible d’indiquer les prix de manière transparente. Vous avez raison, mais il sera nécessaire, en sus de cette démarche, de choisir entre l’option 2 et l’option 3. En définitive, seules ces deux dernières constitueront des socles. Or c’est sur ce point que portait mon argumentation.

L’option 1 est à mon sens celle qui garantit la plus grande transparence. Nous sommes tous convaincus de la nécessité de la transparence pour mettre un terme à la guerre des prix. De plus, la transparence des prix unitaires n’implique pas une rupture du secret des affaires,…

M. Julien Denormandie, ministre. Non !

…d’autant que l’amendement du Gouvernement vise non seulement à mettre au même niveau les trois options, mais aussi à introduire des sanctions, sous la forme d’une amende administrative, à l’égard du distributeur pour le cas où il serait tenté d’imposer par lui-même le recours à l’option 1.

Sur ce volet, à mon sens, nous faisons fausse route. L’objectif est d’être le plus transparent possible. Or, par la suppression de la première option, vous réduisez la transparence ! Le texte joue, à mes yeux, à contresens. J’insiste vraiment là-dessus.

Par ailleurs, selon vous, la première option pourrait constituer un outil de pression pour la grande distribution. Celle-ci a déjà mille fois la possibilité d’exercer une pression sur ce point ! Le texte n’y changera rien.

Revenons-en au zeste de citron. Après la contractualisation et la non-négociabilité des tarifs des matières premières agricoles, le troisième étage de la fusée est formé par ce que l’on appelle la non-discrimination tarifaire, celle-là même qui a été introduite par la loi Galland et supprimée par la loi de modernisation de l’économie, dite loi LME. Or ces trois étages sont coordonnés entre eux. La non-discrimination tarifaire et la non-négociabilité des matières premières agricoles vont de pair, et cette dernière s’applique à tous ceux qui entrent dans le cadre de l’article 2 par un élément agricole.

Si ce texte est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission, une marque d’eau qui mettrait un peu de zeste de citron dans ses bouteilles deviendrait donc éligible à la non-discrimination du tarif par rapport à la grande distribution.

Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Et alors ?

M. Julien Denormandie, ministre. S’il y a bien un secteur où la grande distribution doit être en position de négociation, c’est davantage face à ces grandes multinationales que face aux coopératives ou aux industriels qui transforment les produits locaux. Nous l’avons tous bien en tête. (Mme la présidente de la commission manifeste son désaccord.)

M. Laurent Duplomb. C’est l’inverse qui se passe !

M. Julien Denormandie, ministre. Nous n’avons aucun intérêt à donner un tel bénéfice aux grands groupes internationaux qui sont en position de force par rapport à notre grande distribution.

M. Laurent Duplomb. Ils ne négocient déjà pas !

M. Julien Denormandie, ministre. Ils auront deux fois plus de possibilités d’établir un rapport de force.

Je suis convaincu que le retrait de l’option 1, qui est celle qui garantit la plus grande transparence, ne va pas dans le bon sens.

Le Gouvernement demande le retrait des amendements identiques nos 118 rectifié et 135 rectifié au profit de l’amendement du Gouvernement, puisqu’ils s’inscrivent dans la même lignée.

Le Gouvernement s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée sur l’amendement n° 108 rectifié. Il nous faut bien identifier les effets de bord potentiels de la disposition proposée – nous avons jusqu’à la commission mixte paritaire pour le faire –, mais je partage bien évidemment son esprit.

J’émets un avis très défavorable sur les amendements identiques nos 6 rectifié et 16 rectifié ter, qui visent à faire précéder la publication du décret d’exclusion d’un avis conforme de l’interprofession, pour les mêmes raisons que celles que j’ai déjà mentionnées. Une interprofession qui ne veut pas mettre en œuvre les modalités du décret ne statuera pas. Nous aurons beau la consulter, elle ne donnera pas d’avis ! Si nous conditionnons tout à des avis, et non à des consultations, nous risquons de tomber dans un piège.

S’agissant de l’amendement n° 156 et des délais que doit respecter l’intervention du tiers indépendant, ainsi que de l’amendement n° 157 et de la définition de cette dernière notion, je trouve, à titre personnel, que l’on régule trop l’action de ce tiers. Par définition, un tiers indépendant est indépendant des deux parties. Le Gouvernement demande donc le retrait de ces amendements.

J’en viens à l’amendement n° 113 rectifié quater. Je le confirme, le décret prévu par la proposition de loi retirera les produits soumis à accise du champ d’application de la loi. C’était d’ailleurs précisé dans l’objet de l’amendement introduisant le décret. Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement, qui est satisfait.

Comme Mme la rapporteure, j’émets un avis défavorable sur l’amendement n° 47 rectifié.

Le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements identiques nos 119 rectifié et 131 rectifié, qui tendent à faire précéder la publication du décret d’exclusion du champ d’application de la loi d’un avis simple de l’interprofession. J’y insiste : il nous faut sortir des avis pour privilégier la consultation.

Enfin, pour les mêmes raisons que la commission, le Gouvernement émet un avis tout à fait défavorable sur les amendements identiques nos 119 rectifié et 131 rectifié, ainsi que sur l’amendement n° 146 rectifié.

Enfin, j’émets un avis défavorable sur l’amendement n° 126 rectifié, qui tend également à introduire un avis conforme de l’interprofession avant la publication du décret d’exclusion.

Mme le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.

Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Monsieur le ministre, je ne partage pas votre avis selon lequel l’option 1 serait absolument indispensable. Vous ne m’avez pas convaincue et je ne comprends toujours pas en quoi la transparence, qui ouvre à la grande distribution la radiographie de l’ensemble des transformateurs agroalimentaires, améliorera la rémunération des agriculteurs. Cela m’échappe.

Cela me semble, en revanche, placer les industries agroalimentaires et les transformateurs – les petits comme les grands – en situation de fragilité par rapport à la distribution. Or fragiliser l’industrie agroalimentaire revient à fragiliser à terme les agriculteurs. À quoi sert cette transparence totale ?

Encore une fois, comme l’a indiqué Mme la rapporteure, si les industriels veulent communiquer l’ensemble de leurs coûts à la distribution, ils sont parfaitement en droit de le faire. Je vous le dis sans agressivité, monsieur le ministre : je ne comprends absolument pas votre argument.

Vous soutenez que cette transparence n’emporte pas de rupture du droit des affaires. Imaginons toutefois que j’achète des pizzas en bénéficiant de la transparence totale de la part de tous mes fournisseurs, grands comme petits, car, dans ce secteur, les très grands côtoient les petits. Grâce à cela, je découvre que le prix d’achat des tomates des grands groupes est évidemment inférieur à celui des PME.

La comparaison à laquelle procéderont les acheteurs de la grande distribution jouera, à mon sens, en défaveur des PME à qui l’on opposera qu’elles achètent leurs tomates à un prix 20 % ou 30 % supérieur que les autres et à qui l’on demandera de faire des efforts. La transparence totale de l’ensemble des matières premières emporte donc des effets pervers, en particulier pour les PME.

Vous évoquez la complexité. Pour ma part, je ne connais pas d’entreprise de l’agroalimentaire qui n’ait pas un contrôleur de gestion connaissant parfaitement les recettes et le coût de chaque ingrédient, y compris celui du zeste de citron.

Lorsque les acheteurs de la grande distribution indiqueront qu’ils sont prêts à négocier tel produit, mais pas tel autre, et que des vendeurs auront des catalogues indiquant que tel produit est négociable, mais pas tel autre, là, nous aurons de la complexité.

Je le répète : la transparence globale n’apporte rien, sinon qu’elle fragilisera les entreprises agroalimentaires ; quant à la complexité, elle me semble plutôt provenir de la diversité des modes de négociation que de l’unicité du modèle.

Dans une soupe au potiron, le potiron constitue 40 % ou 50 % du prix de revient ; pour fabriquer une soupe aux neuf légumes qui contient notamment cet ingrédient, l’industrie agroalimentaire achète le même potiron au même fournisseur. C’est aussi de là que provient la complexité.