Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Julien Denormandie, ministre. J’émets également un avis défavorable, pour des raisons de forme et de fond, comme Mme la rapporteure.

Mme la présidente. La parole est à M. Arnaud Bazin, pour explication de vote.

M. Arnaud Bazin. Comme vous le découvrirez demain, j’ai fait paraître dans VSD une tribune contre la corrida.

Je suis donc très embarrassé par la survenue brutale de cette question dans notre débat. Je pensais qu’elle n’entrait pas dans le périmètre de la proposition de loi et que cet amendement serait déclaré irrecevable au titre de l’article 45 de la Constitution, sinon j’aurais moi aussi saisi l’occasion d’en parler. Cette question doit être réglée, mais pas à l’occasion d’un débat de quelques minutes.

Cela étant, par cohérence avec la tribune que je publierai demain, je ne peux que voter cet amendement, mais je comprendrais qu’il ne soit pas adopté : ce sujet mérite que l’on y consacre plus de temps.

Je vous rappelle que la dérogation autorisant la corrida et les combats de coqs remonte à 1951 ! De l’eau est passée sous les ponts depuis… Un débat sur ces sujets est donc tout à fait légitime.

Je vous avoue ma grande surprise de voir que cet amendement n’a pas été déclaré irrecevable, mais je voterai en sa faveur.

Mme la présidente. La parole est à Mme la présidente de la commission.

Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Je tiens à expliquer pourquoi cet amendement sur la tauromachie n’a pas été déclaré irrecevable – la question se posera également au sujet de l’amendement suivant déposé par Mme Benbassa.

La tauromachie n’entre pas, en effet, dans le périmètre du texte, c’est la raison pour laquelle la commission a émis un avis défavorable. En revanche, l’amendement vise à supprimer un alinéa d’un article du code pénal qui est bien présent dans la proposition de loi. (Mme Esther Benbassa acquiesce).

Par conséquent, je n’ai pas pu opposer l’article 45 à cet amendement, même si j’ai essayé de le faire, je l’avoue ! (Sourires.) C’est la raison pour laquelle cette question n’a pas été écartée aujourd’hui. Nous souhaitons toutefois qu’elle soit reportée à une discussion plus importante et documentée, comme Arnaud Bazin l’a proposé.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.

M. Daniel Salmon. La corrida mérite un véritable débat, ce sujet ne pouvant pas être abordé en quelques minutes.

Cela étant, alors que l’objet de ce texte est de renforcer la lutte contre la maltraitance animale, on se dit qu’il y manque un élément essentiel, la corrida étant passée à la trappe. Nous devrons absolument revenir sur ce sujet, qui ne doit pas être éludé. Nous ne manquerons pas de l’aborder de nouveau très rapidement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 79 rectifié.

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant de la commission des affaires économiques.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 185 :

Nombre de votants 280
Nombre de suffrages exprimés 265
Pour l’adoption 19
Contre 246

Le Sénat n’a pas adopté.

Je mets aux voix l’article 8.

(Larticle 8 est adopté.)

Article 8
Dossier législatif : proposition de loi visant à lutter contre la maltraitance animale et conforter le lien entre les animaux et les hommes
Article 8 bis (supprimé)

Article 8 bis A

Le titre II du livre V du code pénal est ainsi modifié :

1° Le chapitre unique devient le chapitre Ier ;

2° Il est ajouté un chapitre II ainsi rédigé :

« CHAPITRE II

« Des atteintes volontaires à la vie dun animal

« Art. 522-1. – Le fait, sans nécessité, publiquement ou non, de donner volontairement la mort à un animal domestique, ou apprivoisé, ou tenu en captivité est puni de six mois d’emprisonnement et de 7 500 euros d’amende.

« Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux courses de taureaux lorsqu’une tradition locale ininterrompue peut être invoquée. Elles ne sont pas non plus applicables aux combats de coqs dans les localités où une tradition ininterrompue peut être établie.

« Art. 522-2. – Les personnes physiques coupables de l’infraction prévue à l’article 522-1 encourent également les peines complémentaires d’interdiction, à titre définitif ou non, de détenir un animal et d’exercer, pour une durée de cinq ans au plus, une activité professionnelle ou sociale dès lors que les facilités que procure cette activité ont été sciemment utilisées pour préparer ou commettre l’infraction. Cette interdiction n’est toutefois pas applicable à l’exercice d’un mandat électif ou de responsabilités syndicales. »

Mme la présidente. L’amendement n° 136, présenté par Mme Benbassa, est ainsi libellé :

Alinéa 7

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme Esther Benbassa.

Mme Esther Benbassa. Cet amendement a pour objet de supprimer la dérogation actuelle accordée aux courses de taureaux et aux combats de coqs, car ces animaux appartiennent également à des espèces dont la sensibilité est reconnue par la science.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne Chain-Larché, rapporteure. L’avis est défavorable, pour les mêmes raisons que celles que j’ai invoquées précédemment.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Julien Denormandie, ministre. Il est également défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 136.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 3 rectifié bis, présenté par Mmes Boulay-Espéronnier et Belrhiti, M. Saury, Mmes Dumas, Bellurot et Noël, M. Sol, Mme Muller-Bronn et MM. Genet et H. Leroy, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 7

Insérer trois alinéas ainsi rédigés :

« Lorsqu’il est sollicité par une personne physique, propriétaire, pour procéder à l’euthanasie non médicalement justifiée de son animal de compagnie ou de son équidé, l’animal n’étant pas jugé dangereux après l’évaluation comportementale prévue à l’article D. 211-3-1 du code rural, le vétérinaire convoque dans les cinq jours ouvrés une réunion collégiale. Cette réunion est chargée, en vue de statuer sur le sort de l’animal en fonction de son intérêt, de proposer le cas échéant des alternatives dans les cinq jours ouvrés suivants.

« Le fait d’avoir fait procéder à l’euthanasie de l’animal sans la tenue d’une réunion collégiale est passible de la sanction prévue au présent article.

« Un décret fixe les conditions de mise en œuvre de ces dispositions. »

La parole est à Mme Céline Boulay-Espéronnier.

Mme Céline Boulay-Espéronnier. L’euthanasie dite « de convenance » est demandée par le propriétaire de l’animal alors qu’elle n’est justifiée ni d’un point de vue médical ni d’un point de vue sanitaire.

En ce sens, elle devrait être condamnée au titre de l’article R. 655-1 du code pénal. Or il n’en est rien, le propriétaire pouvant toujours invoquer une nécessité économique ou sociale que les tribunaux lui reconnaissent beaucoup trop facilement.

L’euthanasie de convenance est une préoccupation majeure de l’ensemble des associations de protection animale. À cet égard, sa suppression était incluse dans les propositions portées par le collectif AnimalPolitique lors de la dernière élection présidentielle.

L’amendement a spécifiquement pour objet les animaux de compagnie et les équidés possédés par un particulier. Sa motivation est d’ordre pragmatique : il s’agit de rejoindre la proposition du Comité d’éthique Animal, Environnement, Santé remise en juillet 2020 à la demande de l’Ordre des vétérinaires. En instaurant une réunion collégiale, ce dernier cherche à offrir une dernière chance à l’animal et à desserrer l’étau autour du vétérinaire seul.

Les vétérinaires sont formés pour soigner les animaux. Lorsqu’ils doivent prendre seuls une décision d’euthanasie de convenance, un grand nombre d’entre eux sont confrontés à un dilemme moral.

Le burn-out compassionnel lié aux euthanasies de convenance a fait l’objet de nombreuses communications scientifiques. Les vétérinaires se sentent coincés par la demande pressante du propriétaire de l’animal et obligés de procéder à un acte qu’ils réprouvent.

Enfin, cet amendement appelle par la suite un financement permettant de venir en aide aux animaux susceptibles d’être euthanasiés. Il vise aussi à rendre visible une situation trop souvent cachée.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne Chain-Larché, rapporteure. Cet amendement, qui a déjà été rejeté en commission, vise à lutter contre les euthanasies non médicalement justifiées, dites de convenance. Il tend ainsi à prévoir une réunion collégiale de vétérinaires en cas de demande d’euthanasie non médicalement justifiée.

La mise en œuvre d’une réunion collégiale relève du domaine réglementaire. En outre, on ne voit pas bien ce qu’elle apporterait.

D’une part, les vétérinaires sont tenus de respecter un code de déontologie. Celui-ci précise entre autres que « l’exercice de l’art vétérinaire est personnel », que « chaque vétérinaire est responsable de ses décisions et de ses actes » et « respecte les animaux ».

D’autre part, rien n’oblige aujourd’hui les vétérinaires à procéder à une euthanasie qu’ils ne jugeraient pas nécessaire. Tout les pousse, au contraire, à refuser des euthanasies qui ne sont pas médicalement justifiées ; leur conscience, leur expérience et leur professionnalisme demeurent les meilleurs garde-fous contre ces dérives.

En conséquence, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Julien Denormandie, ministre. Même avis, pour les mêmes raisons.

Mme la présidente. La parole est à M. Arnaud Bazin, pour explication de vote.

M. Arnaud Bazin. Je ne voterai pas en faveur de cet amendement, mais je souhaite tout de même apporter quelques explications.

Le vétérinaire doit, en raison des règles déontologiques qui s’imposent à lui, éviter ces pratiques que vous souhaitez interdire dans la loi.

Le Comité d’éthique Animal, Environnement, Santé, créé par le Conseil national de l’Ordre des vétérinaires, a récemment rendu un avis sur l’euthanasie. Le CNOV va mettre en œuvre cet avis. Il va en particulier mettre à la disposition des vétérinaires des référents dans les situations où ils ne savent pas quelle décision prendre.

Il n’y a jamais de situation blanche ou noire en matière d’euthanasie ; la plupart du temps, il n’y a que du gris entre les deux. Il est très difficile pour le vétérinaire de prendre une décision en pareil cas. L’objectif est donc de ne pas le laisser la prendre seul et de lui permettre de s’appuyer sur ses pairs : il pourra solliciter l’aide d’un référent départemental.

Durcir davantage la réglementation en matière d’euthanasie produirait un effet contraire à celui qui est recherché. Mieux vaut laisser le vétérinaire prendre la décision la plus adaptée possible, en conscience et avec l’aide de ses pairs, dans le respect du code de déontologie édicté par le Conseil national de l’Ordre.

Mme la présidente. Mme Boulay-Espéronnier, l’amendement n° 3 rectifié bis est-il maintenu ?

Mme Céline Boulay-Espéronnier. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 3 rectifié bis est retiré.

Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 35 rectifié quater est présenté par MM. Duplomb, J.M. Boyer et Gremillet, Mmes Chauvin et Noël, MM. Chaize et Cuypers, Mme Gruny, M. Chevrollier, Mme Pluchet, MM. Pointereau et Anglars, Mme Demas, M. Panunzi, Mme Lopez, MM. Sido et J.P. Vogel, Mme Belrhiti, MM. Burgoa, Genet, H. Leroy et Cardoux, Mme Delmont-Koropoulis, MM. Chasseing, Piednoir, Bascher, Rietmann et Saury et Mmes Di Folco et Perrot.

L’amendement n° 43 rectifié est présenté par MM. Patriat et Buis.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’alinéa 7

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux blessures mortelles, occasionnées aux animaux dans le cadre d’activités légales. »

La parole est à M. Olivier Rietmann, pour présenter l’amendement n° 35 rectifié quater.

M. Olivier Rietmann. L’article 8 bis A crée une nouvelle infraction sanctionnant le fait de donner volontairement la mort à un animal domestique, apprivoisé ou tenu en captivité.

L’amendement de mon collègue Laurent Duplomb vise à sécuriser le dispositif de cet article, dont il approuve l’objectif. En effet, tel qu’il est actuellement rédigé, cet article pourrait être mal interprété et créer des effets de bord pour un certain nombre d’activités de loisir ou professionnelles.

Ainsi, sanctionner la tenue en captivité d’animaux ou leur mise à mort dans le cadre d’activités d’élevage agricole, par exemple dans les ateliers d’engraissement – le but est tout de même de nourrir la population ! – pourrait avoir des conséquences extrêmement néfastes pour la profession.

Bref, nous proposons de sécuriser le dispositif prévu en posant les limites qui s’imposent.

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Buis, pour présenter l’amendement n° 43 rectifié.

M. Bernard Buis. Nous partageons pleinement les objectifs de cet article. Cependant, tel qu’il est rédigé, il risque d’entraîner des effets de bord indésirables. C’est donc un amendement de cohérence que nous défendons, visant à sécuriser un certain nombre d’activités de loisirs ou professionnelles.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne Chain-Larché, rapporteure. Le délit d’atteinte volontaire à la vie d’un animal ne réprime pas les activités légales. Cela va de soi, mais il est préférable de le dire clairement et de l’inscrire dans la loi.

La commission émet donc un avis favorable sur ces deux amendements identiques.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Julien Denormandie, ministre. Le Gouvernement émet un avis de sagesse extrêmement bienveillante. (Sourires.)

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 35 rectifié quater et 43 rectifié.

(Les amendements sont adoptés.)

Mme la présidente. L’amendement n° 117 rectifié bis, présenté par MM. Bazin et Karoutchi, Mmes Lassarade et Dumont, MM. Cambon et Mandelli, Mme M. Mercier, M. Sol, Mme Eustache-Brinio, M. Hingray, Mme Muller-Bronn, M. Chasseing et Mme Bellurot, est ainsi libellé :

Alinéa 8, seconde phrase

Supprimer cette phrase.

La parole est à M. Arnaud Bazin.

M. Arnaud Bazin. Rien ne justifie que les élus ou les responsables syndicaux bénéficient d’une dérogation de peine complémentaire lorsqu’ils donnent volontairement et sans raison la mort à un animal domestique. C’est choquant ! La raison pour laquelle cette dérogation a été prévue m’échappe complètement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne Chain-Larché, rapporteure. À première vue, il peut paraître surprenant de prévoir une exonération de peine pour les élus et les responsables syndicaux. Au nom de quoi seraient-ils irresponsables de leurs actes de maltraitance commis sur des animaux ?

À y regarder de plus près, la peine d’interdiction d’exercer une activité professionnelle ne peut jamais conduire à priver un individu du droit de se faire élire ou d’exercer des responsabilités syndicales. Pourquoi déroger à cette règle en cas de maltraitance animale, mais pas pour les autres délits ? On ne peut pas bousculer ainsi l’équilibre de nos libertés publiques. Une telle dérogation pour tout délit serait de toute façon irrecevable au titre de l’article 45 de la Constitution.

Pour les élus et les responsables syndicaux, il existe d’autres peines qui peuvent avoir le même effet punitif et préventif, telles que l’interdiction de détenir un animal.

En conséquence, la commission sollicite le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Julien Denormandie, ministre. Même avis !

Mme la présidente. Monsieur Bazin, l’amendement n° 117 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Arnaud Bazin. Oui, je le maintiens, madame la présidente.

Mme la présidente. Je le mets aux voix.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 8 bis A, modifié.

(Larticle 8 bis A est adopté.)

Article 8 bis A
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Article 8 ter

Article 8 bis

(Supprimé)

Mme la présidente. L’amendement n° 143 rectifié, présenté par Mmes Bellurot, Belrhiti et Dumas, MM. Lefèvre et Laménie et Mme Demas, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

À l’article 122-7 du code pénal, après le mot : « autrui », sont insérés les mots : « , un animal » et, après la seconde occurrence du mot : « personne », sont insérés les mots : « , de l’animal ».

La parole est à Mme Nadine Bellurot.

Mme Nadine Bellurot. Cet amendement vise à garantir l’irresponsabilité pénale d’un individu qui commet une infraction dans l’accomplissement des actes nécessaires à la sauvegarde d’un animal. La reconnaissance d’une telle irresponsabilité est déjà possible en application de l’article 122-7 du code pénal. Pourquoi dès lors ne pas la prévoir dans le cas de la sauvegarde d’un animal ?

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne Chain-Larché, rapporteure. Lors des travaux en commission, j’avais précisé que l’article 8 bis était inutile. C’est pourquoi nous l’avons supprimé.

Aux termes de l’article 122-7 du code pénal, qui définit l’état de nécessité, toute personne peut déjà être exonérée de responsabilité pénale pour un délit qu’elle aurait commis afin de sauver une personne ou un bien. Or, de jurisprudence constante, les animaux sont soumis au régime des biens et sont déjà couverts par l’état de nécessité – il n’y a aucune ambiguïté sur ce point, même si les animaux ont leurs spécificités, bien entendu. (M. le ministre acquiesce.)

En conséquence, la commission émet un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Julien Denormandie, ministre. Même avis !

Mme Nadine Bellurot. Je retire mon amendement, madame la présidente !

Mme la présidente. L’amendement n° 143 rectifié est retiré.

En conséquence, l’article 8 bis demeure supprimé.

Article 8 bis (supprimé)
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Article additionnel après l'article 8 ter - Amendement n° 85 rectifié ter

Article 8 ter

Après le dernier alinéa de l’article 521-1 du code pénal, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Est considéré comme circonstance aggravante de l’acte d’abandon le fait de le perpétrer dans des conditions présentant un risque de mort immédiat ou imminent pour l’animal domestique, ou apprivoisé, ou tenu en captivité. »

Mme la présidente. L’amendement n° 47 rectifié bis, présenté par Mmes Borchio Fontimp, Bellurot et Belrhiti, M. Cambon, Mmes Demas, Dumont et Drexler, MM. Genet, Houpert, Laménie et H. Leroy et Mme Boulay-Espéronnier, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Après le mot :

perpétrer

insérer les mots :

, intentionnellement ou non,

La parole est à Mme Céline Boulay-Espéronnier.

Mme Céline Boulay-Espéronnier. Cet amendement vise à prendre en compte le caractère intentionnel de l’abandon. L’objectif est d’empêcher certains propriétaires de se dédouaner ou d’atténuer leur responsabilité lorsqu’ils abandonnent leur animal, au prétexte qu’ils n’avaient pas l’intention de mettre en péril la vie de ce dernier.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne Chain-Larché, rapporteure. Il me semble que cet amendement est déjà satisfait par le droit : il n’est pas besoin de prouver une quelconque intention pour établir cette circonstance aggravante.

Toutefois, je partage la crainte de l’auteur de l’amendement de voir des personnes se dédouaner de leur responsabilité et tenter d’échapper à cette circonstance aggravante en arguant de leur inconscience ou de leur négligence. On est en droit d’attendre du propriétaire ou du détenteur d’un animal qu’il soit conscient des situations qui peuvent présenter un risque de mort pour ce dernier. Sinon, ce serait le signe que le certificat d’engagement et de connaissance prévu à l’article 1er ne fonctionne pas.

En conséquence, la commission émet un avis favorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Julien Denormandie, ministre. J’émets un avis défavorable sur cet amendement, madame la rapporteure.

La rédaction proposée, qui précise que peut être considérée comme circonstance aggravante de l’acte d’abandon le fait de le perpétrer intentionnellement, est susceptible de provoquer de la confusion. C’est d’autant plus problématique que l’on va déjà très loin en comparaison avec d’autres dispositions du code pénal. Bref, je crains que cela ne nous rende in fine contre-productifs.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 47 rectifié bis.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 48 rectifié, présenté par Mmes Borchio Fontimp, Bellurot et Belrhiti, M. Cambon, Mmes Demas, Dumont et Drexler et MM. Genet, Houpert, Laménie et H. Leroy, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

« L’acte d’abandon perpétré dans les conditions mentionnées au présent article est puni d’une peine de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende ainsi qu’à l’accomplissement d’un stage de sensibilisation à la prévention et à la lutte contre la maltraitance animale prévu à l’article 131-5-1 du code pénal. »

La parole est à Mme Nadine Bellurot.

Mme Nadine Bellurot. Le présent amendement tend à accoler à la sanction pénale prévue en cas d’abandon le suivi d’un stage de sensibilisation à la prévention et à la lutte contre la maltraitance animale, dont la durée serait fixée par la juridiction de jugement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne Chain-Larché, rapporteure. Cet amendement vise à autoriser le juge à prononcer une peine de sensibilisation à la prévention et à la lutte contre la maltraitance animale en cas d’abandon présentant un risque de mort pour l’animal. Or il n’est pas nécessaire de le préciser, l’article 131-5-1 du code pénal prévoyant déjà la possibilité pour le juge de prononcer une peine de stage pour tout délit puni d’une peine d’emprisonnement.

L’amendement étant satisfait, la commission en demande le retrait ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Julien Denormandie, ministre. Même avis !

Mme la présidente. Madame Bellurot, l’amendement n° 48 rectifié est-il maintenu ?

Mme Nadine Bellurot. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 48 rectifié est retiré.

Je mets aux voix l’article 8 ter, modifié.

(Larticle 8 ter est adopté.)

Article 8 ter
Dossier législatif : proposition de loi visant à lutter contre la maltraitance animale et conforter le lien entre les animaux et les hommes
Article 8 quater

Article additionnel après l’article 8 ter

Mme la présidente. L’amendement n° 85 rectifié ter, présenté par MM. Bazin et Karoutchi, Mmes Lassarade et Dumont, MM. Cambon et Mandelli, Mme M. Mercier, M. Sol, Mme Eustache-Brinio, MM. Brisson, Hingray, Genet et Chasseing et Mme Bellurot, est ainsi libellé :

Après l’article 8 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La section 1 du chapitre Ier du titre préliminaire du livre II du code rural et de la pêche maritime est complétée par un article L. 201-… ainsi rédigé :

« Art. L. 201-…. – On entend par abandonner un animal le fait de laisser un animal en un lieu quelconque avec l’intention de s’en défaire ou sans s’en soucier ni s’en occuper davantage et sans s’assurer du transfert direct de responsabilité. »

La parole est à M. Arnaud Bazin.

M. Arnaud Bazin. Cet amendement vise à définir l’abandon d’un animal comme le fait de le laisser « en un lieu quelconque avec l’intention de s’en défaire ou sans s’en soucier ni s’en occuper davantage et sans s’assurer du transfert direct de responsabilité. »

Le texte ne contient toujours aucune définition de l’abandon alors même que, à de nombreuses reprises, nous avons envisagé la question des circonstances aggravantes et que, à l’article 4 quinquies, nous avons parlé d’animaux « issus d’abandon ».

Certes, il existe une définition jurisprudentielle de l’abandon d’un animal, forgée par la Cour de cassation, mais il serait utile d’inscrire une définition dans la loi.

Il conviendrait ainsi de ne plus parler d’abandon en cas de cession contrainte, c’est-à-dire lorsqu’une personne ne peut plus ou ne doit pas assumer la charge d’un animal. À défaut, un individu qui recueillerait un animal à la suite du décès de son propriétaire pour le confier à un refuge, en vue de son adoption, se rendrait coupable d’abandon. Il faut absolument éviter cela, les pénalités prévues étant extrêmement lourdes.

Se pose aussi la question des animaux qui tombent dans la catégorie des res nullius, tels que les chats que l’on trouve dans son jardin. Alors qu’ils n’appartiennent à personne, ils peuvent conduire un individu sur le terrain duquel il se trouve à être reconnu coupable d’abandon.

Ces deux sujets sont délicats. Il paraît dès lors nécessaire d’arrêter une définition précise de l’abandon. Tel est l’objet du présent amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne Chain-Larché, rapporteure. Je rappelle que seules mille personnes sont condamnées chaque année pour l’abandon d’un animal.

L’amendement vise à clarifier la notion d’abandon, mais la définition proposée risque d’être trop restrictive. Ainsi, un propriétaire qui abandonnerait son animal, mais qui par ailleurs se soucierait de son sort ou chercherait à s’en occuper, ne serait pas coupable d’abandon. Ce serait lui donner un moyen facile de se dédouaner en lui permettant d’arguer que, pris de remords, il a tenté de retrouver son animal quelques jours après l’avoir abandonné.

Laissons plutôt le juge apprécier la situation au cas par cas. Je ne partage pas l’intention des auteurs de cet amendement, qui revient à distinguer entre de « vrais » et de « faux » abandons.

Cet amendement, comme cela est précisé dans son objet, vise à exclure le fait de confier un animal à un refuge de la définition de l’abandon, alors que formellement, il s’agit non pas d’un abandon, mais d’une cession à titre gratuit.

Ce n’est pas en restreignant cette définition que l’on réduira l’ampleur du phénomène. En conséquence, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.