Mme la présidente. Je suis saisie de sept amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 78 rectifié, présenté par Mme Gruny, est ainsi libellé :

Après l’article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le I de l’article 12 de la loi n° 2021-1040 du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :

« …. – Par dérogation au 4° du I, l’obligation vaccinale mentionnée au premier alinéa du même I n’est pas applicable, lorsqu’elles ne relèvent pas des catégories de professionnels mentionnées aux 2° et 3° du même I, aux personnes travaillant dans les établissements d’accueil du jeune enfant situés hors des structures mentionnées au 1° dudit I. »

La parole est à Mme Pascale Gruny.

Mme Pascale Gruny. Cet amendement vise l’exclusion des personnels de crèche du champ de l’obligation vaccinale.

Je le rappelle, l’obligation s’applique aux personnels exerçant dans les mêmes lieux que des professionnels de santé soumis à l’obligation. Par exemple, tous les personnels d’un cabinet médical y sont soumis, quelle que soit leur activité.

Notre collègue, Mme Else Joseph, avait soulevé la question des personnels de crèche au moment de la discussion de la loi du 5 août 2021. Nous avions rappelé que l’intention était bien de ne pas les intégrer, à l’exception des puériculteurs et infirmiers et du cas où ces crèches se trouvaient au sein d’un établissement de santé.

Or, dans une ordonnance du 25 octobre 2021, le Conseil d’État a estimé que l’obligation vaccinale prévue par la loi du 5 août 2021 s’appliquait à l’ensemble des personnels de crèche, quand bien même celle-ci serait située hors d’un établissement de santé.

Cette décision retient une interprétation de la loi qui n’est pas conforme aux intentions du Gouvernement, telles qu’elles se sont exprimées lors du dépôt du projet de loi en juillet, pas plus qu’elle ne reflète l’intention du législateur au moment du vote de cette loi.

Aussi, par souci de sécurité juridique, le présent amendement vise à préciser les dispositions de l’article 12 de ladite loi, afin d’exclure expressément du champ de l’obligation vaccinale les personnels des établissements d’accueil du jeune enfant qui ne sont pas des professionnels de santé.

Mme la présidente. L’amendement n° 61 rectifié bis, présenté par M. L. Hervé et Mmes Noël, Devésa et Herzog, est ainsi libellé :

Après l’article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I – Après le III de l’article 12 de la loi n° 2021-1040 du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :

« …. – Ne sont pas concernés par l’obligation vaccinale les professionnels de crèche, d’établissements ou de services de soutien à la parentalité ou d’établissements et services de protection de l’enfance. »

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Loïc Hervé.

M. Loïc Hervé. Je reprendrai à mon compte, quasiment mot pour mot, l’argumentaire que vient de développer excellemment Mme Gruny, même si la rédaction de mon amendement est légèrement différente.

Il s’agit bien de clarifier une situation. J’ajoute simplement un élément de comparaison : les personnels de l’éducation nationale et des collectivités locales qui s’occupent des enfants ne sont évidemment pas soumis à l’obligation vaccinale.

Par cohérence, il convient de dire clairement dans la loi, et non pas par la voie réglementaire, que ces personnels de crèche sont également dispensés.

Mme la présidente. L’amendement n° 63 rectifié, présenté par M. Lévrier et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :

Après l’article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Après le III de l’article 12 de la loi n° 2021-1040 du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :

« …. – Le I ne s’applique pas aux professionnels de crèche, d’établissements ou de services de soutien à la parentalité ou d’établissements et services de protection de l’enfance. »

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Ludovic Haye.

M. Ludovic Haye. Comme cela a été rappelé, ces amendements ont été déposés à la suite d’une décision du Conseil d’État qui a été rendue publique hier.

Il semble indispensable d’en revenir à l’intention du législateur, telle qu’exprimée dans la loi du 5 août dernier. En effet, le curseur de l’obligation vaccinale que nous avions mise en place était ajusté sur la protection des publics fragiles susceptibles de développer des formes graves de covid-19.

Nous le savons aujourd’hui, les jeunes enfants ne font partie de ce public. En cohérence, nous proposons de clarifier le régime de l’obligation vaccinale, en disposant que celle-ci ne s’applique pas aux professionnels travaillant au sein des crèches. La rédaction proposée, plus précise que les précédentes, tend à traduire autant que possible l’esprit et l’intention du législateur d’août dernier.

Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 24 rectifié est présenté par Mmes Noël et Goy-Chavent.

L’amendement n° 56 rectifié bis est présenté par M. L. Hervé, Mme Devésa, M. Mizzon et Mme Herzog.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 14 de la loi n° 2021-1040 du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire est abrogé.

La parole est à Mme Sylviane Noël, pour présenter l’amendement n° 24 rectifié.

Mme Sylviane Noël. Pas plus tard que cette après-midi, un représentant du collectif Inter-hôpitaux m’a contactée pour m’alerter sur la situation catastrophique des services de pédiatrie dans notre pays, où les enfants en urgence vitale ne peuvent plus être soignés en raison du manque d’effectifs.

On parle aujourd’hui, mes chers collègues, de tri et de perte de chance dans ces services.

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Je ne peux pas entendre cela !

Mme Sylviane Noël. Si les causes de ces défections sont diverses, nombreuses et parfois anciennes, ne sous-estimons pas l’effet de la mise en œuvre de l’obligation vaccinale des soignants.

Cet amendement vise donc à abroger la suspension du contrat de travail des soignants non vaccinés, prévue par la loi du 5 août 2021. Alors que les soignants sont à bout et en nombre insuffisant, se priver d’une telle main-d’œuvre qualifiée en pleine pandémie est une aberration.

Dans mon département, des établissements de santé sont tenus de déprogrammer plus de 50 % des interventions chirurgicales, faute de personnel ; des Ehpad dépourvus d’aide-soignant gèlent des lits ; des centres médico-psychologiques renvoient leurs patients souffrant de lourds handicaps chez leurs parents, souvent âgés, qui sont dans l’impossibilité de les prendre en charge ;…

M. Loïc Hervé. Tout à fait ! Je l’ai vécu !

Mme Sylviane Noël. … des maires déplorent la suspension de médecins généralistes, alors que les déserts médicaux sont déjà si nombreux. Les situations de ce type se comptent par milliers, laissant des malades et des familles dans une détresse extrême.

M. Loïc Hervé. Absolument !

Mme Sylviane Noël. Déjà, avant l’épidémie, les hôpitaux français souffraient d’un manque criant de personnel. En 2020, d’après la Fédération hospitalière de France, dans les établissements publics comme privés, il manquait 34 000 infirmières et 24 000 aides-soignants.

Pis, le mercredi 13 octobre dernier, Olivier Véran estimait que l’obligation avait fonctionné, puisque seulement 15 000 soignants restaient encore non vaccinés. Qui peut se satisfaire d’un tel résultat ? Pensez-vous vraiment que l’on puisse se le permettre ?

Nous devons revenir à la raison et supprimer ces sanctions, dont les conséquences sont néfastes pour les soignants et tous les usagers du service public hospitalier.

Mme la présidente. La parole est à M. Loïc Hervé, pour présenter l’amendement n° 56 rectifié bis.

M. Loïc Hervé. Nombre d’établissements médico-sociaux vivent une crise inédite et très préoccupante en matière de recrutement et de gestion des ressources humaines.

Les professionnels qui restent poursuivent leur engagement au risque d’un épuisement pouvant les conduire à un arrêt maladie, voire à une démission. Je n’ai rien à retirer à ce que vient de dire Sylviane Noël.

Nous venons tous deux d’un département frontalier, et les obligations ne sont pas exactement les mêmes de part et d’autre de la frontière. Il faut savoir que la tension était déjà forte auparavant. Mme de Montchalin était d’ailleurs venue à la rencontre des fonctionnaires des trois fonctions publiques du département pour se rendre compte de la situation, que le passe sanitaire n’a fait qu’aggraver lourdement.

On parle en Haute-Savoie de 5 % des personnels de la fonction publique hospitalière. Vous imaginez ce que cela peut donner dans un département en tension : des accueils de jour et des lits ferment faute de personnel ; les soins prodigués dans les hôpitaux se dégradent toujours plus.

Les familles sont en proie à une profonde détresse et doivent, par exemple, reprendre à leur domicile leurs enfants ou des adultes en situation de handicap.

Madame la ministre, nous sommes sur le terrain,…

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Moi aussi !

M. Loïc Hervé. … dans nos permanences, au contact des familles, qui viennent nous faire part de ces situations.

J’imagine que vous êtes aussi sur le terrain et que vous entendez donc la même chose que nous. Nous avons la responsabilité collective, le Gouvernement comme le Parlement, de trouver des solutions pour ces familles en désarroi.

M. André Reichardt. Très bien !

Mme la présidente. L’amendement n° 62 rectifié, présenté par M. L. Hervé, Mmes Noël, Devésa et Herzog et M. J. M. Arnaud, est ainsi libellé :

Après l’article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Après le I de l’article 14 de la loi n° 2021-1040 du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :

« …. – Pour les professionnels de crèches, d’établissements ou de services de soutien à la parentalité ou d’établissements et services de protection de l’enfance, les délais sont :

« – le lendemain de l’entrée en vigueur de la loi, tous les salariés non vaccinés sont tenus de présenter un test PCR négatif ;

« – le 15 décembre 2021, ne peuvent travailler que les salariés ayant reçu une dose de vaccin contre la covid-19, ceux présentant le résultat d’un examen de dépistage virologique ne concluant pas à une contamination par la covid-19, ou le certificat de rétablissement à la suite d’une contamination par la covid-19 ;

« – le 15 janvier 2022 ne peuvent travailler que les salariés présentant un statut vaccinal complet. »

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Loïc Hervé.

M. Loïc Hervé. Il s’agit d’un amendement de repli, au cas où il serait refusé de donner une valeur législative à l’instruction relative à la mise en œuvre de l’obligation vaccinale et du passe sanitaire dans les établissements de santé, sociaux et médico-sociaux de la direction générale de la cohésion sociale, en date du 20 août 2021.

Cette instruction précisait que n’étaient pas concernés par l’obligation vaccinale les personnels de crèche, d’établissement ou de service de soutien à la parentalité ou d’établissement de service de la protection de l’enfance.

Mme la présidente. L’amendement n° 34 rectifié, présenté par Mmes Noël, Goy-Chavent et Berthet et M. Chaize, est ainsi libellé :

Après l’article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le III de l’article 14 de la loi n° 2021-1040 du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :

« … – Les personnels pouvant exercer leurs fonctions en télétravail ne sont pas concernés par ces dispositions.»

La parole est à Mme Sylviane Noël.

Mme Sylviane Noël. Il s’agit d’un amendement de repli, pour permettre aux personnels visés par l’obligation vaccinale qui le peuvent et qui le souhaitent d’exercer leurs fonctions en télétravail.

Il est en effet surprenant de constater que des médecins ne souhaitant pas se faire vacciner et proposant d’exercer leur mission uniquement en téléconsultation se soient vu refuser cette possibilité.

Notre pays souffre de nombreux déserts médicaux, particulièrement en zone rurale, et nous ne pouvons pas nous permettre de perdre davantage de médecins. Dans la mesure où il n’y aura plus de contact avec les patients, l’obligation vaccinale serait injustifiée dans ce cas.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission de la commission des affaires sociales ?

Mme Pascale Gruny, rapporteur pour avis. La commission a émis un avis favorable sur l’amendement n° 78 rectifié, que j’ai présenté en mon nom propre.

Les auteurs des amendements nos 61 rectifié bis et 63 rectifié partagent la même intention, mais leur rédaction me semble problématique en ce qu’elle lève totalement l’obligation vaccinale dans ces établissements, y compris pour les professionnels de santé, qui sont tous légalement concernés. Cela exclurait par exemple les infirmiers qui travaillent dans une crèche, ce qui n’est pas justifié.

Je demande donc le retrait de ces deux amendements, faute de quoi mon avis serait défavorable.

De même, les amendements identiques nos 24 rectifié et 56 rectifié bis ont reçu un avis défavorable. On recense un peu moins de 8 000 suspensions prononcées pour refus vaccinal. Si celles-ci ont pu effectivement occasionner des perturbations dans certains établissements, elles ne doivent pas occulter l’esprit de responsabilité dont a fait preuve l’immense majorité, soit 95 % des soignants, qui se sont engagés dans une démarche vaccinale conformément à la réglementation.

Les sanctions sont efficaces et proportionnées. On sait ainsi que deux tiers des professionnels suspendus ont finalement été réintégrés après s’être conformés à l’obligation vaccinale. Cela montre aussi que le choix que nous avions fait, mes chers collègues, de privilégier la suspension du contrat de travail au licenciement était le plus pertinent.

N’oublions pas que les sanctions restent indispensables pour garantir le succès de cette mesure dans certains territoires, en particulier les Antilles et la Guyane, où la proportion de soignants vaccinés est encore de vingt points inférieure au taux national.

L’amendement n° 62 rectifié, proposé par notre collègue Loïc Hervé, est un amendement de repli sur l’obligation vaccinale des personnels de crèche. Il a pour objet de tirer les conséquences de la décision du Conseil d’État en reportant l’applicabilité d’éventuelles sanctions pour non-respect de l’obligation vaccinale dans les crèches, afin de laisser aux personnels le temps de se mettre en conformité.

Considérant que nous excluons par un autre amendement les personnels de crèche de l’obligation vaccinale, il n’y a pas lieu de reporter les sanctions applicables. L’avis est donc défavorable.

Enfin, l’amendement n° 34 rectifié a pour objet d’exempter de sanctions en cas de non-respect de l’obligation vaccinale les personnels qui peuvent et souhaitent exercer leurs fonctions en télétravail.

Cette disposition entraînerait une rupture d’égalité devant cette obligation entre les personnels des structures concernées. Le vote de cet amendement conduirait à nier la responsabilité collective de ces professionnels dans la protection des plus vulnérables. Il pourrait aussi entraîner des perturbations notables dans l’organisation de ces services.

Le télétravail ne doit pas être utilisé pour échapper à des règles qui s’appliquent à toute la communauté de travail au sein d’une structure. Les téléconsultations ont pour objectif de faciliter l’accès aux soins de certains patients, et non pas de permettre aux professionnels de santé d’échapper à l’obligation vaccinale. L’avis de la commission est donc défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. L’esprit de la loi était d’exclure de l’obligation vaccinale les personnels exerçant leurs fonctions dans les structures d’encadrement des enfants.

Le Gouvernement soutient donc les amendements dont les dispositions vont dans le sens d’une clarification. Aussi, madame Gruny, je me permets de vous demander de retirer l’amendement n° 78 rectifié au profit de l’amendement n° 61 rectifié bis de M. Hervé, qui est plus large et plus précis.

J’y insiste, il n’a jamais été dans l’intention du Gouvernement, eu égard au public accueilli – il n’est pas du tout avéré que les enfants sont susceptibles de développer des formes graves de covid –, de soumettre le personnel des établissements d’accueil du jeune enfant, des établissements ou des services de soutien à la parentalité ou des établissements de services de la protection de l’enfance à la vaccination obligatoire.

Un directeur de crèche n’exerce ainsi pas une profession de santé, même s’il en a le diplôme. Cependant, nous les y encourageons, pour eux-mêmes et pour leurs proches. Je forme donc la même demande de retrait pour l’amendement n° 63 rectifié.

Nous sommes en revanche défavorables aux amendements suivants, à l’exception de l’amendement n° 62 rectifié de M. Hervé, que je lui demande de bien vouloir retirer au profit de son amendement n° 61 rectifié bis.

Pour conclure, je veux apporter des précisions sur des affirmations graves que j’ai entendues. Madame Noël, je le reconnais, il y a des tensions en pédiatrie, mais ces services doivent actuellement faire face à un quadruple choc : le covid de l’enfant ; la bronchiolite ; la santé mentale des enfants, avec des adolescents angoissés ; les lits fermés par manque de ressources humaines.

Je veux être claire : il n’y a pas de tri, notamment dans les urgences. Je ne puis entendre ce genre de propos.

Mme Sylviane Noël. Avez-vous écouté M. Reichardt ?

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Un travail important est réalisé avec les acteurs et les autorités de santé. J’y insiste, il est hors de question de ne pas accueillir un enfant en urgence vitale. Il est grave de prétendre le contraire, et je souhaitais apporter ces précisions pour qu’il en soit fait état dans le compte rendu de la séance.

Mme la présidente. La parole est à Mme le rapporteur pour avis.

Mme Pascale Gruny, rapporteur pour avis. J’ai besoin d’une clarification sur l’amendement n° 61 rectifié bis.

L’obligation vaccinale à laquelle sont soumis les professionnels de santé dépend du lieu où ils exercent leur activité. Ainsi, une infirmière scolaire n’est pas obligée d’être vaccinée, non plus qu’une infirmière exerçant dans un centre de thalassothérapie. Est-ce à dire que l’obligation vaccinale s’applique lorsque ces professionnels travaillent dans un établissement de santé, mais pas dans une autre structure ?

Je le répète, ce point mérite d’être précisé. C’est important, car vous ouvrez une brèche, madame la ministre. Le Conseil d’État s’est, lui, prononcé sur cette question.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Ne sont pas concernés par l’obligation vaccinale les professionnels des secteurs mentionnés dans l’amendement de M. Hervé, qui est précis. Le Gouvernement y est favorable afin de clarifier la situation.

L’instruction de la direction générale de la cohésion sociale (DGCS) a été diffusée dès le 13 août dernier afin d’informer les professionnels. Le juge des référés du Conseil d’État a jugé il y a trois jours que cette lecture des dispositions de l’article 12 de la loi du 5 août 2021 ne ressortait pas suffisamment de la lettre de ce texte.

Le Gouvernement en a pris acte et considère que l’adoption de cet amendement apportera une réponse claire, conforme à son intention de maintenir les personnels du secteur de la petite enfance hors du périmètre de l’obligation vaccinale, dans la mesure où il ne s’agit pas de personnels soignants. En outre, le public concerné n’est pas frappé par cette pathologie.

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Houpert, pour explication de vote.

M. Alain Houpert. La nuit du 4 août 1789 a marqué l’histoire ; la loi du 5 août 2021 a continué de ruiner l’hôpital.

J’ai entendu le ministre des solidarités et de la santé reléguer au rang d’« anecdotes » les vies privées de certains Français et se réjouir d’avoir forcé les soignants à se faire vacciner et de les avoir poussés à céder.

Pour ma part, j’ai reçu dans ma permanence des soignants non vaccinés, privés de toutes ressources, leur contrat de travail ayant été rompu. Ils veulent retourner au travail et acceptent, s’il le faut, d’être testés tous les jours. Un test négatif est en effet le seul moyen de savoir si l’on est porteur ou non d’un virus.

Je pense qu’une telle mesure serait le top du top pour les hôpitaux. On leur refuse cette possibilité au nom d’une politique vaccinale qui n’est plus scientifique, mais est devenue idéologique.

Nous n’avons plus les moyens de laisser notre hôpital dans cet état. Il faut élever le niveau, lever la tête et revenir à des mesures plus rationnelles.

Mme la présidente. La parole est à M. Loïc Hervé, pour explication de vote.

M. Loïc Hervé. J’accède à la demande de Mme la ministre et retire l’amendement n° 62 rectifié.

En revanche, madame la présidente, au nom du groupe Union Centriste, je demande une suspension de séance de quelques minutes, afin de discuter avec Mme le rapporteur pour avis des amendements nos 78 rectifié et 61 rectifié bis.

Mme Éliane Assassi. Pas cinquante minutes ! (Sourires.)

M. Loïc Hervé. C’est promis ! (Nouveaux sourires.)

Mme la présidente. L’amendement n° 62 rectifié est retiré.

Avant la suspension de la séance, je donne la parole à M. Philippe Mouiller, pour explication de vote.

M. Philippe Mouiller. Je ferai une remarque sur l’amendement n° 56 rectifié bis, en réponse à M. Hervé.

Nous recevons tous dans nos permanences des gens qui nous expliquent que le secteur médico-social, entre autres, est en difficulté, notamment parce que les professionnels qui ont fait le choix de ne pas se faire vacciner ne peuvent plus travailler.

Cela étant, soyons très clairs : nous faisons face aujourd’hui à un autre problème de personnel, qui est beaucoup plus important. Il ne faut surtout pas imputer toutes les difficultés au covid.

En ce moment, en tant que rapporteur pour la branche autonomie du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022, je rencontre toutes les associations des secteurs du handicap et des personnes âgées, ainsi que les syndicats. J’en rencontre également en tant que membre des conseils d’administration d’établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes et d’établissements médico-sociaux.

De nombreux salariés de ces établissements ont fait l’effort, pas toujours avec plaisir, de se faire vacciner. Ce que demandent aujourd’hui les familles, c’est que ces établissements soient sécurisés. C’est un point essentiel pour elles. Si l’on permettait aux quelques professionnels réticents à se faire vacciner de venir travailler, on rendrait les établissements moins sûrs. Or, je le répète : pour les familles, la sécurité est un élément essentiel, même si certaines d’entre elles sont en difficulté.

Certes, le covid est un sujet majeur pour les personnels, mais personne n’en parle lors des tours de table que nous organisons. Tous nous parlent du Ségur de la santé et du problème que pose le transfert de personnels résultant de la mise en concurrence des structures. Ils nous parlent de leurs conditions de travail et de l’évolution du secteur médico-social, dont les perspectives sont sombres.

Il ne faut donc pas se tromper de débat.

Pour ma part, je suis extrêmement défavorable à l’amendement de M. Hervé, car je pense qu’il faut être vigilant en matière de sécurité des établissements, même si des difficultés existent par endroits. Le bénéfice de l’obligation vaccinale, notamment pour les familles d’enfants handicapés, est clair et sans équivoque.

Je vous demande donc, mes chers collègues, de ne pas voter cet amendement. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt-deux heures cinquante, est reprise à vingt-deux heures cinquante-cinq.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

Monsieur Hervé, l’amendement n° 61 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Loïc Hervé. La suspension de séance a permis d’éclaircir la situation et, au bénéfice des explications qui m’ont été données, je retire l’amendement n° 61 rectifié bis au profit de l’amendement n° 78 rectifié, dont la rédaction me paraît plus solide juridiquement.

Je profite du temps qui m’est alloué pour revenir sur les arguments avancés par M. Philippe Mouiller.

Dans les six départements où elle était déjà extrêmement tendue, la situation s’est dégradée davantage encore avec l’obligation vaccinale. Lorsque 3 %, 4 % ou 5 % des personnels ne peuvent travailler, puisque cela se joue à si peu, la situation devient critique et je vous assure, mon cher Philippe Mouiller, que, pour les familles, c’est véritablement catastrophique : des personnes de 80 ans doivent reprendre à la maison leur enfant lourdement handicapé. C’est à ces enjeux que nous devons apporter une réponse.

Je connais les problèmes que rencontrent les personnels soignants par ailleurs. Je ne me défausse pas, je mesure la notion de responsabilité, mais ce n’est jamais aux familles de personnes handicapées d’en payer le prix !