M. Roland Lescure, ministre délégué. Mais non, madame la sénatrice, elles ne sont pas toutes en difficulté ! Pour les industries comme pour les collectivités territoriales, nous devons faire du ciblage.

Je dirai quelques mots des filières industrielles.

M. Fabien Gay. Combien y en a-t-il au chômage partiel ?

M. Roland Lescure, ministre délégué. Nous devons produire en France une énergie souveraine et développer des filières, certains d’entre vous l’ont dit, dans le photovoltaïque,…

M. Roland Lescure, ministre délégué. … le nucléaire et l’éolien. À cette fin, vous le savez, nous investissons. France 2030, qui fête aujourd’hui, madame la Première ministre, son premier anniversaire, c’est exactement cela : investir dans l’innovation afin de développer des filières françaises de décarbonation de l’industrie et d’industrie décarbonée.

Grâce à cette mission, à laquelle je suis extrêmement fier de participer, nous nous donnons les moyens notamment – il en a été question ce soir – de produire de petits réacteurs modulaires, mais aussi, monsieur Menonville, de fermer le cycle du combustible nucléaire de manière un peu moins dispendieuse que ne permettait de l’envisager le prototype Astrid, qui s’annonçait mal et risquait de devenir un nouveau gouffre financier.

Mesdames, messieurs les sénateurs, travaillons ensemble à l’avenir de la politique énergétique française. Je suis sûr que nous pouvons y arriver. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, INDEP et RDSE. – M. Pierre Louault applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme la Première ministre.

Mme Élisabeth Borne, Première ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, en conclusion de ce débat, je veux commencer par saluer chacun des orateurs qui se sont succédé à la tribune ce soir. Les interventions que nous avons entendues ont été fortes en idées plutôt qu’en polémiques, et chaque groupe a pu exprimer sa vision des défis qui sont devant nous.

Depuis le choc pétrolier, dans les années 1970, à intervalles réguliers les énergies fossiles reviennent sur le devant du débat public. Elles sont systématiquement synonymes de crise, de montée des prix, de menaces de pénurie et de dégâts climatiques majeurs. Ce constat, nous le partageons, et depuis des années nous avançons pour trouver les moyens de sortir de notre dépendance à ces énergies.

Voilà quelques mois, la guerre en Ukraine a marqué une nouvelle étape. Nous devons accélérer : tel est le consensus qui se dégage du débat de ce soir. Ce consensus, je l’avais déjà observé lors des échanges que j’avais eus avec chacun des présidents de groupe de votre assemblée.

Là n’est pas la seule convergence qui s’est manifestée ce soir : nous sommes tous convaincus que la transition énergétique devra préserver le pouvoir d’achat des Français et conforter la compétitivité de notre économie.

Je puis vous l’assurer, monsieur le sénateur Gay, nous sommes déterminés à lutter contre la précarité énergétique. C’est notamment le sens du chèque énergie exceptionnel, dont le montant peut aller jusqu’à 200 euros, destiné aux 40 % des Français les plus modestes, en complément du bouclier tarifaire.

C’est aussi le sens, monsieur le sénateur Corbisez, de l’augmentation du budget de MaPrimeRénov’ et du maintien d’une prime à la conversion permettant aux Français, notamment les plus modestes, de passer à un véhicule moins énergivore, mesures inscrites dans le projet de loi de finances pour 2023.

Nous nous sommes accordés aussi sur la nécessité de conquérir notre souveraineté énergétique. Nous ne pouvons plus être dépendants d’autres pays, particulièrement de ceux qui rejettent notre modèle démocratique. Nous devons avoir la maîtrise de notre production, ce qui est aussi la meilleure façon de contrôler le niveau des prix.

Je vous confirme, monsieur Retailleau, que nous maintiendrons le bouclier tarifaire sur le gaz au-delà du 1er janvier 2023, le tarif de référence étant prolongé pour les années suivantes.

Je vous confirme également que nous travaillons depuis des semaines à la mise en œuvre de ce modèle ibérique à l’échelle européenne, car, contrairement à l’Espagne, nous ne sommes pas une péninsule. Nous sommes fortement interconnectés avec les autres États membres de l’Union. C’est donc à cette échelle qu’il est nécessaire d’avancer.

Par ailleurs, monsieur le sénateur Gay, je vous confirme que nous voulons une réforme durable du marché de l’électricité et un découplage des prix du gaz et de l’électricité.

M. Fabien Gay. Allons-y, alors !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre. Je reste convaincue que notre souveraineté passe et par la France et par l’Europe.

J’ai aussi entendu, ce soir, quelques caricatures ou procès d’intention. Il n’est pas forcément utile de s’y étendre ni de polémiquer : nous savons que ce n’est pas sur une année ni même sur quelques années que se jouent les transformations de la filière nucléaire, mais sur des dizaines d’années.

Ceux qui, bien avant nous, ont lancé le programme nucléaire français le savaient parfaitement. Personne ne l’ignore ici, il y a eu, au cours des vingt-cinq dernières années, une alternance politique tous les cinq ans, ou presque. Si, au fil de ce chemin, des erreurs ont été commises, mon sentiment est que, à tout le moins, elles sont partagées.

Si nous voulons être lucides, il nous faut l’être jusqu’au bout. La France a fait le choix de préserver son parc nucléaire et d’y investir. Certains de nos grands voisins n’ont pas fait ce choix. Et nous pouvons être fiers de la confiance que nous avons toujours placée dans notre filière nucléaire, ainsi que dans notre grande entreprise nationale, EDF, qu’il ne saurait être question de démanteler.

Au cours de nos débats, c’est sur la question de notre mix énergétique que j’ai entendu s’exprimer la plus forte différence d’approche. Je l’ai dit en ouvrant ce débat et je le répète : ma conviction est qu’un mix diversifié nous protège et garantit notre souveraineté, car il n’existe pas d’énergie sans défaut.

Je le disais, nous croyons fermement au nucléaire. Nous sommes convaincus qu’il s’agit de la voie de l’efficacité, de la souveraineté et de la neutralité carbone. Mais nous ne pouvons pas non plus faire croire qu’il s’agit d’une énergie tout à fait banale – le chantage russe autour de la centrale de Zaporijia nous le rappelle durement. Nous ne pouvons pas nous permettre non plus de tout miser sur une seule source d’énergie : en cas d’avarie, de problème technique ou de défaut, nous serions exposés et démunis.

Nous voulons donc sans hésitation développer aussi les énergies renouvelables. Elles sont décarbonées et bénéfiques pour notre économie. Elles permettent l’émergence de nouvelles filières industrielles. Enfin, leurs apports énergétiques sont déterminants, particulièrement dans les moments de tension.

Nous n’oublions pas néanmoins qu’elles sont intermittentes et posent des questions d’acceptabilité. À cet égard, elles ne sauraient être l’alpha et l’oméga de notre action énergétique, quoiqu’elles puissent aussi constituer, comme l’a souligné Mme la sénatrice Denise Saint-Pé, un complément de revenu pour nos agriculteurs, qu’il s’agisse d’agrivoltaïsme ou de méthanisation. Je crois donc à l’équilibre et à la diversification, qu’avec mon gouvernement nous continuerons à défendre.

Mesdames, messieurs les sénateurs, les échanges de ce soir ouvrent une séquence. Nous posons tout d’abord les termes du débat. Nous aurons ensuite, dans les prochaines semaines, à discuter de deux projets de loi d’urgence visant à accélérer le développement de nos énergies renouvelables et de nos projets nucléaires. Enfin, une fois menés les débats organisés sous l’égide de la Commission nationale du débat public (CNDP), qui commencent actuellement, nous pourrons débattre, en 2023, d’une loi de programmation sur l’énergie et le climat.

Je souhaite que l’esprit de responsabilité et la volonté d’agir dont nous avons fait preuve ce soir nous guident collectivement dans les échanges à venir. Vous pouvez compter sur moi et sur mon gouvernement pour écouter chacun et rechercher des compromis.

Sur l’énergie, en particulier, je suis convaincue que de tels compromis sont à notre portée. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, INDEP et RDSE, ainsi que sur des travées du groupe UC.)

M. le président. Nous en avons terminé avec le débat sur la déclaration du Gouvernement sur la politique énergétique de la France.

5

Ordre du jour

M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à demain, jeudi 13 octobre 2022 :

À dix heures trente et quatorze heures trente :

Suite du projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur (procédure accélérée ; texte de la commission n° 20, 2022-2023).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt-trois heures cinquante.)

Pour le Directeur des comptes rendus du Sénat,

le Chef de publication

FRANÇOIS WICKER