Mme la présidente. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, sur l’article.

Mme Émilienne Poumirol. Je le rappelle, cette quatrième année de médecine était inscrite dans la loi du 24 juillet 2019 relative à l’organisation et à la transformation du système de santé, dite loi Buzyn. Pour toutes les spécialités, il était prévu une année socle, deux années d’approfondissement et une année de professionnalisation.

Ce n’est donc pas une nouveauté. C’est seulement à titre dérogatoire que la médecine de spécialité ne durait que trois ans. En réalité, nous revenons sur un dispositif déjà inscrit dans la loi.

Aujourd’hui, le problème est que vous imposez dans cet article 23 la quatrième année de professionnalisation sans véritable concertation avec les étudiants et leurs syndicats. Votre décision est sans doute liée à la proposition de loi de M. Retailleau visant à la consolidation et à la professionnalisation de la formation des internes en médecine générale, qui a été présentée voilà quelques semaines. Or vous l’avez prise avant d’avoir entamé une véritable discussion, et vous avez donné ensuite un ordre de mission à un groupe de travail qui consulte actuellement les étudiants.

Pour notre part, nous croyons que la méthode à suivre est celle de l’écoute, de la concertation et de la coconstruction avec les futurs médecins généralistes. Ces derniers veulent savoir comment s’effectueront les attributions de lieux de stage – il aurait été intéressant d’évoquer votre fameux guichet unique en même temps – et combien ils seront rémunérés. Mon collègue Chasseing vient de le dire, ils sont à bac+9. Or, en tant qu’internes à l’hôpital, ils sont payés 1 800 euros par mois. Ils souhaitent percevoir plus ; c’est normal, puisqu’ils sont thésés. Nous voulons une année non pas de stage, mais de professionnalisation, notamment pour pouvoir leur permettre de se déplacer sur le territoire.

Nous sommes attachés à une méthode qui se résume en trois mots : professionnalisation, clarté sur les rémunérations et sur les lieux de stage, et concertation.

Mme la présidente. La parole est à Mme Véronique Guillotin, sur l’article.

Mme Véronique Guillotin. Mme la rapporteure a souhaité réécrire l’article 23 pour le calquer sur la proposition de loi visant à la consolidation et à la professionnalisation de la formation des internes en médecine générale, que nous avons examinée récemment et qui vise à créer une quatrième année au sein du troisième cycle de médecine générale.

Profitons de ce débat pour clarifier et nous mettre d’accord sur les motivations d’une telle disposition. S’agit-il réellement d’une année supplémentaire de formation ou d’une mesure de lutte contre les déserts médicaux qui ne dirait pas son nom ? C’est précisément le point de blocage avec les étudiants et les jeunes médecins, alors que cette année professionnalisante faisait plutôt consensus, y compris chez les jeunes médecins, voilà quelques années.

Le Gouvernement s’est exprimé clairement contre toute volonté de coercition. Pourtant, de fortes inquiétudes demeurent.

Il sera, je pense, nécessaire de bien rémunérer cette année – Daniel Chasseing l’a souligné –, parce que les médecins juniors consulteront des patients et libéreront du temps médical pour les médecins. Je suis personnellement convaincue que cette année supplémentaire peut être une véritable chance pour les futurs médecins et leur donner l’envie de s’installer durablement dans des territoires, à condition qu’ils soient bien encadrés et que le contenu pédagogique des stages réponde aux besoins de leur projet professionnel. Si nous faisons l’effort de multiplier les maîtres de stage et les lieux de stage agréés, il n’y a aucune raison que cela ne fonctionne pas. Si ces conditions sont réunies, les médecins s’installeront durablement, j’en suis persuadée, dans les territoires où ils ont été accueillis.

La réussite de cette année supplémentaire tient moins à des injonctions législatives qu’aux moyens que nous allons y apporter, ainsi qu’à une concertation entre les principaux intéressés sur son contenu.

Vous l’aurez compris, je ne m’oppose pas à la quatrième année, mais sous réserve d’y apporter certaines précisions, que je défendrai plus tard au travers de deux sous-amendements portant à la fois sur la supervision et sur les lieux de stage.

Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Henno, sur l’article.

M. Olivier Henno. Nous faisons face à une pénurie de médecins ; cela a été longuement rappelé.

Vous nous avez expliqué – à en juger par les votes, vous semblez avoir été convaincants – que la coercition n’était pas une solution et qu’il fallait attendre la convention.

Quelle est la raison profonde de la dixième année de médecine ? A-t-elle pour objet d’améliorer la formation des médecins ou de répondre à la pénurie ? Je sais bien que la situation est compliquée ; la demande de soins est plus importante que l’offre. Quand on chausse du quarante-cinq, il est difficile de mettre son pied dans du trente-huit.

Je salue la fin du numerus clausus. Simplement, j’ai entendu que le nombre de médecins formés n’avait augmenté – certes, le fait qu’il ait augmenté est déjà un premier pas en soi –, que de 16 % ou 17 % seulement, voire moins. C’est assez peu. Quelles sont vos perspectives en la matière ? À l’évidence, cette progression, s’il faut la saluer, ne suffira pas. Certes, nous entendons dire que les professeurs de médecine manquent et que les locaux ne sont pas prêts. Mais je ne peux pas comprendre qu’un grand pays comme la France ne soit pas capable d’adapter ses structures de formation de médecins quand des pays européens plus modestes que le nôtre le sont ! Tel est le cœur de la question ; ce n’est pas avec une progression de 13 %, 15 % ou 16 % que nous allons véritablement résoudre le problème dans les dix années à venir.

Monsieur, le ministre, je suis impatient de vous entendre sur ces questions.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. François Braun, ministre. Je répondrai de manière globale sur l’article 23.

Rassurez-vous, il s’agit d’une réforme pédagogique qui est souhaitable – elle était d’ailleurs souhaitée par les étudiants en médecine voilà encore peu de temps – et qui améliorera la réponse aux besoins de santé de demain. C’est d’autant plus important que les étudiants ont mis en avant un manque de formation en pédiatrie, en gynéco-obstétrique et dans la gestion d’un cabinet. Vu la situation de la pédiatrie et nos difficultés actuelles à propos de la bronchiolite, cela me semble très important.

Aujourd’hui, la médecine générale est la seule spécialité médicale à n’avoir que trois années de formation – cela a été rappelé – et à ne pas pouvoir bénéficier d’une phase de consolidation, qui vise à permettre aux étudiants d’exercer en autonomie supervisée pour renforcer leur insertion professionnelle.

Par ailleurs, les étudiants évoquent un manque de stages en pratique ambulatoire. C’est pour cela que l’exercice s’effectuera prioritairement en ambulatoire, même si nous discuterons d’une possible dérogation tout à l’heure.

C’est également – et cela apparaît peu dans les discussions – la garantie que les étudiants seront thésés avant de commencer la quatrième année. En effet, pour accéder à cette quatrième année de docteur junior, quelle que soit la spécialité, il faut disposer de sa thèse de médecine. Or nous constatons que les étudiants à l’issue de leur formation, la plupart du temps au bout de trois ans, ne sont pas thésés – ils peuvent attendre jusqu’à trois ans pour l’être –, ce qui retarde d’autant plus leur installation. Nous faciliterons l’obtention de la thèse et rendrons ainsi leur installation plus rapide.

J’en viens au contenu de la formation. Mme la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, nous avons confié une mission à quatre personnalités qualifiées et reconnues dans le monde de la médecine générale et parmi les étudiants. Celle-ci rendra au cours du premier trimestre 2023 ses travaux relatifs à la refonte complète des quatre années de formation pour la médecine générale.

Comme je l’ai indiqué, nous aurons un nombre élevé de maîtres de stage ; il s’élèvera à 14 000 l’année prochaine.

J’entends parler d’une « année blanche ». Au contraire, nous allons gagner une année. En effet, aujourd’hui, à l’issue de leur troisième année, les étudiants ne s’installent pas à temps plein, parce qu’ils font des remplacements. Or, pendant cette quatrième année, de jeunes professionnels exerceront à temps plein aux côtés de maîtres de stage. Nous sommes donc loin de perdre une année. Ils auront la possibilité de s’installer encore plus vite après.

Contrairement à ce que j’ai pu entendre, il n’y a pas d’obligation à exercer dans les territoires sous-denses. Cela n’a jamais été le cas. Il y aura simplement une incitation plus forte à leur faire découvrir ces territoires, qu’ils ne connaissent pas la plupart du temps.

Du reste, je me permets de vous alerter sur la rémunération des étudiants. Le statut de docteur junior concerne toutes les spécialités. Il est délicat d’en favoriser une, car cela conduirait à augmenter la rémunération des docteurs juniors de toutes. J’ai entendu parler de 5 000 euros par mois. Cela voudrait dire qu’un docteur junior en fin d’études gagne plus qu’un praticien hospitalier en début de carrière. Vous voyez bien que cela entraînerait un certain nombre de difficultés. Soyons prudents !

Toutefois, la mission doit nous apporter des solutions, en proposant un mode de rémunération différent dès lors que l’exercice est en ambulatoire.

J’ai entendu dire que la progression du numerus clausus, qui est de 13 %, serait insuffisante. C’est sans doute le cas, mais je tiens à vous préciser que nous sommes aujourd’hui incapables de connaître le nombre de médecins dont nous aurons besoin dans quinze ans, vingt-cinq ans ou trente ans. C’est pour moi une préoccupation majeure. J’ai confié à Agnès Firmin Le Bodo le soin de mener cette étude, parce qu’il ne s’agit pas simplement d’une question de chiffres. Il faut tenir compte de l’évolution de la médecine, des techniques et du partage de compétences. Prenons l’exemple de l’ophtalmologie, dont les difficultés sont largement évoquées. Compte tenu de l’arrivée des orthoptistes, qui peuvent réaliser des bilans oculaires, les ophtalmologistes, qui ont réalisé une étude à cet égard, me disent qu’il faudrait peut-être désormais arrêter d’ouvrir trop de postes. Selon eux, dans dix ans, il y aura trop d’ophtalmologistes, et cela posera des problèmes.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Ils peuvent se reconvertir !

M. François Braun, ministre. Il faut évidemment augmenter le nombre de médecins. Mais il est important de savoir dans quelles spécialités. J’attends les résultats de l’étude pour pouvoir être plus précis.

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 873 est présenté par Mmes Cohen et Apourceau-Poly, M. Ouzoulias et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

L’amendement n° 899 est présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Céline Brulin, pour présenter l’amendement n° 873.

Mme Céline Brulin. Nous restons extrêmement sceptiques, même après les explications de M. le ministre. C’est pourquoi nous proposons la suppression de l’article 23.

En préambule, je réponds aux collègues qui nous ont alertés, et je les comprends, sur la nécessité de donner envie aux jeunes de devenir médecin généraliste : ajouter ainsi, sans concertation, une année supplémentaire n’est peut-être pas la meilleure manière de le faire.

Monsieur le ministre, vous évoquez des insuffisances pédagogiques et de formation en prenant l’exemple de la pédiatrie. Mais nous débattons de la médecine générale. Cela n’a rien à voir avec les problèmes qui pourraient se poser en pédiatrie !

Les études de médecine générale sont passées de sept ans à neuf ans, et l’on passerait aujourd’hui à dix ans, dont une année serait – j’insiste – « blanche ». En 2026, les jeunes médecins soumis à cette modification ne pourront pas s’installer. Il faut absolument en tenir compte ; nous ne serons pas sortis de la situation actuelle en 2026.

Par ailleurs, ces jeunes médecins, dont il faudrait améliorer la formation ou pour lesquels il faudrait instaurer une année de professionnalisation, ne vont pas pouvoir être accueillis dans les meilleures conditions dans les zones sous-denses, car ils risquent d’être encadrés par des médecins faisant déjà face à des manques.

Enfin, madame la rapporteure, l’amendement que vous allez présenter en dit long. Vous voulez ouvrir un dispositif qui concernait à l’origine la médecine ambulatoire aux hôpitaux – nous ne méconnaissons pas le problème du manque de médecins dans les hôpitaux –, sur la base du volontariat, dans les zones sous-denses.

Mme la présidente. Il faut conclure, ma chère collègue.

Mme Céline Brulin. Les 13 % de « médecins formés » ne sont en réalité pas des médecins ! Ce sont des étudiants qui passent de première année en deuxième année. Le Conseil d’État a d’ailleurs enjoint aux universités d’ouvrir ces places ; elles ne l’étaient pas d’office !

Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 899.

Mme Raymonde Poncet Monge. L’article 23 tend à créer une dixième année au cursus universitaire de spécialité médecine générale. Sans concertation avec les organisations syndicales et représentatives, l’introduction dans le PLFSS d’une telle disposition a tout d’une décision unilatérale du Gouvernement.

Monsieur le ministre, diriez-vous que les étudiants sont versatiles ? Vous avez dit qu’ils étaient d’accord hier ; pourtant, aujourd’hui, ils sont tous vent debout. Cette disposition, prise dans un contexte national de déficit de médecins généralistes, vise – du moins a-t-elle été majoritairement comprise ainsi – à compenser les difficultés d’accès aux soins dans les zones sous-denses en adaptant le cursus universitaire des futurs médecins généralistes à cet effet. Or la formation n’a pas vocation à répondre de manière non structurelle et, qui plus est, non pérenne à des enjeux de maillage territorial et de lutte contre les zones sous-dotées en praticiens. Il s’agit là d’un dévoiement de la formation des futurs médecins. En outre, les conditions d’encadrement de cette quatrième année restent floues.

À rebours des objectifs de formation qui pourraient ou non justifier une année de professionnalisation supplémentaire – ouvrons le chantier –, une telle disposition est contre-productive au regard de l’objectif implicite de pallier durablement le manque de médecins en zones sous-denses.

Le résultat probable en termes de turnover des médecins généralistes rend impossibles les parcours de soins coordonnés par un médecin référent, garant de la qualité de l’offre. Entendons que les jeunes étudiants et médecins ne veulent pas d’une telle mesure, en raison de ses motivations implicites.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Corinne Imbert, rapporteure. Ces deux amendements ont pour objet de supprimer l’article 23, alors même que nous avons voté le 18 octobre dernier à la majorité la proposition de loi de Bruno Retailleau visant à créer cette quatrième année d’internat de médecine générale.

Mme Corinne Imbert, rapporteure. Effectivement, ma chère collègue ; mais la majorité de cet hémicycle l’a votée.

La commission émet donc un avis défavorable sur ces deux amendements.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Braun, ministre. Je m’étonne de vous entendre prendre la défense des étudiants en médecine, alors qu’il y a peu, vous étiez au contraire en faveur de la coercition.

Mme Laurence Cohen. Nous pouvons vous retourner l’argument !

M. François Braun, ministre. Or les étudiants, dans leur dernier communiqué, écrivent à propos de la quatrième année : « Nous nous opposons avec la plus grande fermeté à toute mesure coercitive. »

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur ces deux amendements.

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.

M. Pierre Ouzoulias. Voilà plusieurs décennies, il a été décidé de réduire l’offre de santé en réduisant la formation. C’est une politique malthusienne qui a très bien réussi ! Je crois même qu’en matière d’enseignement supérieur, c’est la politique qui a le mieux réussi.

Résultat : il faudrait aujourd’hui inverser complètement la stratégie en redonnant aux universités des moyens très importants pour pouvoir satisfaire une offre de formation permettant ensuite de former un plus grand nombre de médecins.

Or vous avez remplacé le numerus clausus par un numerus deceptorius : un numerus trompeur ! Où se trouvent les 13 % de médecins de plus que vous avez évoqués à juste titre, monsieur le ministre ? Voilà pourquoi le numerus est trompeur !

Du reste, je vous renvoie à l’excellent rapport de ma collègue Sonia de La Provôté, qui dit très justement qu’il faudrait « lancer une réflexion sur une approche infrarégionale du numerus apertus afin de prendre en compte la diversité des besoins des territoires ». Vous avez ouvert des postes là où il y a déjà trop de médecins. C’est un problème important !

Il faut absolument réformer tout le cursus. Pourquoi un interne se suicide-t-il toutes les trois semaines ? Vous avez parlé des jeunes que l’on dégoûterait, mais il faut surtout éviter que des jeunes ne se suicident. Or nous sommes en train de débattre d’une nouvelle année… Il faut agir de façon rationnelle en revoyant tout le système.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. En complément des propos de notre collègue Ouzoulias, je voudrais dire que nous faisons l’autruche devant un problème qui va nous revenir en boomerang : nous ne formons pas assez de médecins. Les 13 % de plus, en raison de la prétendue ouverture du numerus clausus, ne sont pas à la hauteur des besoins.

J’entends bien le raisonnement selon lequel on ne sait pas combien de médecins il faut former. Il me semble tout de même que, dans un pays développé, les principes de prédiction, d’évaluation et de réflexion sont à la portée d’un raisonnement fondé permettant de dire ce que pourrait être le créneau du nombre de médecins nécessaires.

Il n’est pas inintéressant de réfléchir, comme l’a dit M. Ouzoulias, à la territorialisation des postes ouverts, car il existe un lien, quoi qu’on en dise, entre le lieu où l’on fait ses études et la tendance que l’on a naturellement à s’installer.

Je me rappelle surtout que ce genre de raisonnement – c’est l’inconvénient d’être un peu plus âgée que les autres – a déjà été utilisé lorsque nous disions que nous n’aurions pas autant besoin de médecins, parce que les nouvelles technologies allaient libérer des places. Or la médecine est aussi un savoir humain. Et quand les technologies et les besoins évoluent, la formation et la reconversion doivent s’opérer.

En vertu du principe de précaution, il vaudrait mieux en former plus que ce dont nous avons que moins ! Je ne comprends toujours pas pourquoi il n’est pas possible de redoubler sa première année de médecine.

Mme la présidente. Il faut conclure.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Je connais de très bons élèves qui redoublent leur année et qui vont faire leurs études en Roumanie et en Belgique. Bravo la France !

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.

M. Bernard Jomier. Nous ne voterons pas les amendements de suppression de nos collègues du groupe CRCE, parce que nous sommes favorables à une réécriture de l’article, dont la rédaction actuelle laisse persister des ambiguïtés. Dire que cet article n’est pas stabilisé n’est pas faire insulte au Gouvernement. L’article a été introduit dans la précipitation, pour faire suite à la proposition de loi de M. Retailleau.

Résultat : entre ce que vous dites, monsieur le ministre, – je pense que, dans vos échanges avec les organisations de jeunes médecins, c’est une vraie base de discussion – et ce que vous écrivez dans le texte, il y a une véritable distorsion. Nous en avons une illustration avec l’amendement qui est présenté.

Vous dites à l’oral qu’après trois années à l’internat, on soutient sa thèse, que l’on n’est donc plus interne – on acquiert un autre statut – et que l’on entre dans une année de professionnalisation, où la rémunération sera autre. Certes, elle ne sera pas forcément de 5 000 euros. Mais, en tout cas, les actes médicaux rapporteront de l’argent. Une discussion peut donc s’ouvrir. Toutefois, ce qui est écrit n’est pas exactement pareil.

De plus, vous ajoutez une disposition visant à permettre aux étudiants de faire un stage à l’hôpital, c’est-à-dire la moitié de l’année – il y a deux stages dans une année –, donc passer dans 50 % du temps à l’hôpital. Nous voyons bien que les hospitaliers sont intervenus pour dire qu’ils veulent garder ces étudiants, évidemment sans trop les payer !

Le texte que vous nous présentez n’est donc pas satisfaisant. Si vous aviez fait les choses dans l’ordre – la négociation d’abord, la loi après –, vous auriez peut-être abouti à un dispositif que nous pourrions approuver.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 873 et 899.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements et de deux sous-amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 57, présenté par Mme Imbert, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

I. – Le premier alinéa du II de l’article L. 632-2 du code de l’éducation est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« II. – La durée du troisième cycle des études de médecine, fixée par le décret mentionné au III en fonction des spécialités, est d’au moins quatre années.

« La quatrième année du troisième cycle de médecine générale est intégralement effectuée en stage en pratique ambulatoire dans des lieux agréés. Les stages ainsi effectués le sont sous un régime d’autonomie supervisée et en priorité dans les zones mentionnées au 1° de l’article L. 1434-4 du code de la santé publique de la région à laquelle appartient la subdivision territoriale de l’étudiant. »

II. – Le III de l’article L. 632-2 du code de l’éducation est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« …° Par dérogation à l’article L. 632-5, les modalités de rémunération propres aux étudiants de la quatrième année de troisième cycle de médecine générale. »

III. – Le I du présent article n’est pas applicable aux étudiants qui, à la date de publication de la présente loi, avaient débuté le troisième cycle des études de médecine.

La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Corinne Imbert, rapporteure. Cet amendement vise à remplacer le dispositif de l’article 23 par celui de la proposition de loi de Bruno Retailleau et de plusieurs de ses collègues, que le Sénat a adoptée le 18 octobre dernier. L’objectif est le même, mais la rédaction est plus précise.

Je crois que ce dispositif sera une réussite, s’il est gagnant-gagnant : gagnant pour les internes en médecine générale, parce qu’ils ne sont pas opposés à avoir une année de professionnalisation ; gagnant par la reconnaissance de leur titre de docteur junior ; gagnant par un engagement plus fort des médecins généralistes installés pour qu’ils soient encore plus nombreux à être maîtres de stage ; gagnant enfin pour les patients, parce que cela dégagera du temps médical supplémentaire.

Il n’y aura pas d’année « blanche » ; je partage l’avis du ministre sur ce point.

Mme la présidente. Le sous-amendement n° 1137, présenté par Mme Guillotin, MM. Fialaire, Artano et Bilhac, Mme M. Carrère, MM. Gold, Guérini et Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux, est ainsi libellé :

Amendement n° 57, alinéa 4, première phrase

Après le mot :

est

rédiger ainsi la fin de cette phrase :

effectuée, dans des lieux agréés, en stage en pratique avancée pour une durée d’un semestre minimum, l’autre semestre constitutif de l’année universitaire étant soumis soit à la poursuite du stage entrepris en milieu ambulatoire, soit à un stage au sein d’un hôpital de proximité tel que mentionné à l’article L. 6111-3-1 du code de la santé publique.

La parole est à Mme Véronique Guillotin.

Mme Véronique Guillotin. Ce sous-amendement vise à laisser aux étudiants la liberté de réaliser un stage en hôpital de proximité durant l’année de professionnalisation.

Je n’ai pas du tout été contactée par les hôpitaux. Je vais juste vous donner les motivations qui m’ont conduite à présenter ce sous-amendement, qui a pour objet d’offrir une possibilité, et non d’imposer une obligation.

Les hôpitaux de proximité – ce ne sont pas des CHU ou de grands centres hospitaliers – manquent tout autant de médecins que la médecine de ville. Du reste, ce sont souvent des médecins généralistes qui y travaillent.

Il y a une cohérence avec l’indispensable décloisonnement que nous appelons tous de nos vœux entre la ville et l’hôpital. Cela répond ensuite aux aspirations des jeunes, qui plébiscitent souvent l’exercice mixte, en ambulatoire et en activité hospitalière. C’est, me semble-t-il, tout simplement une plus-value pour certains parcours professionnels que des jeunes médecins généralistes peuvent choisir. Nous restons d’ailleurs dans des territoires identiques ; l’hôpital de proximité est à côté du cabinet. À mon sens, c’est une bonne chose.

Mme la présidente. Le sous-amendement n° 1136, présenté par Mme Guillotin, MM. Fialaire, Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Gold, Guérini et Guiol, Mme Pantel et M. Requier, est ainsi libellé :

Amendement n° 57, alinéa 4, seconde phrase

Après le mot :

supervisée

insérer les mots :

par des maîtres de stage universitaires

La parole est à Mme Véronique Guillotin.

Mme Véronique Guillotin. Ce sous-amendement vise à garantir un accompagnement de qualité aux docteurs juniors pendant leur stage.

L’expression « autonomie supervisée » restant floue, je propose d’insérer les mots : « par des maîtres de stage universitaires ». En effet, nous avons la chance d’avoir en France cet agrément parfaitement adapté. Il serait regrettable de ne pas poursuivre dans la voie d’une formation de qualité.

J’entends les inquiétudes, légitimes, selon lesquelles il n’y aura pas assez de médecins, il faudrait en appeler d’autres, voire des retraités. Mais je ne crois pas que ce soit un gage de formation.

Je pense utile de préciser que la formation pour devenir maître de stage universitaire (MSU) est à la fois courte, peu contraignante et indemnisée. Il me semble bien plus chronophage de superviser un jeune que de faire une formation d’une demi-journée.

Pour éviter les pénuries, n’interdisons pas au maître de stage universitaire de superviser un docteur junior qui serait sur un autre site. Un système de e-formation peut être aussi tout à fait acceptable et permettre de multiplier les terrains de stage, comme nous l’attendons tous.

Enfin, l’entrée en vigueur de la mesure nous laisse tout de même trois années pour former des maîtres de stages universitaires en nombre suffisant. Ce n’est pas rien.