M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-François Carenco, ministre délégué. Il me semble que la plupart des propositions présentées dans cet amendement sont déjà inscrites dans le droit de l’Union européenne applicable aux frontières extérieures – information des migrants, accès à une assistance juridique, enregistrement des demandes d’asile, prise en compte des vulnérabilités – ou font l’objet de négociations dans le cadre des discussions sur le pacte européen sur la migration et l’asile proposé par la Commission européenne fin 2020.

Par conséquent, ces éléments, qui ne sont pas infondés, ne me paraissent pas avoir leur place dans un texte portant sur Frontex.

Par ailleurs, il est important de noter que les frontières internes à l’Union européenne ne relèvent pas du mandat de l’agence Frontex. Ce dernier porte seulement sur les frontières extérieures. Or la rédaction de l’amendement pourrait laisser penser que les deux sujets sont mélangés.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Jacques Fernique, pour explication de vote.

M. Jacques Fernique. J’avoue ma perplexité devant les arguments qui nous sont opposés.

Les raisons pour lesquelles la commission et le Gouvernement sont tous deux défavorables à notre amendement semblent contraires.

M. Arnaud de Belenet, rapporteur. Je maintiens les miennes !

M. Jacques Fernique. La commission estime que notre rédaction est antagoniste avec le rôle et les missions de Frontex, quand le Gouvernement indique que nos demandes sont déjà satisfaites dans les faits. Comprenez ma perplexité !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 6.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 7, présenté par MM. Fernique, Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon, Mme M. Vogel et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :

Alinéas 58 à 65

Remplacer ces alinéas par trois alinéas ainsi rédigés :

L’agence Frontex ne doit pas permettre la poursuite de l’externalisation de la politique d’asile par les États membres ni être uniquement centrée sur le contrôle de l’immigration irrégulière ;

La France ambitionne de cesser l’externalisation de la gestion des frontières extérieures de l’Union ; elle plaidera pour mettre un terme aux accords migratoires de sous-traitance avec des pays comme la Turquie et la Libye, maltraitant les personnes réfugiées ;

Elle demande l’abrogation du règlement dit Dublin III et, avec, la logique délétère de tri aux frontières de l’Union. Elle organise un mécanisme de relocalisation des demandes d’asile entre États-membres en tenant compte des liens effectifs (liens familiaux élargis et linguistiques) et des aspirations des demandeurs et demandeuses d’asile et renégocie l’accord migratoire avec le Royaume-Uni ;

La parole est à M. Jacques Fernique.

M. Jacques Fernique. La politique d’externalisation par les États membres de la gestion de leurs frontières leur permet de fait d’échapper, en toute impunité, à leurs obligations internationales.

Une telle sous-traitance a pour conséquence des atteintes fortes au respect des droits fondamentaux, qui se sont aggravées durant les cinq dernières années.

Face à l’échec du règlement de Dublin, la France devrait promouvoir dans les instances européennes une politique d’accueil et de contrôle plus intégrée et solidaire et, plus généralement, un régime commun de l’asile européen.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Arnaud de Belenet, rapporteur. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-François Carenco, ministre délégué. Le Gouvernement comprend les arguments avancés par M. Fernique. D’ailleurs, il n’est pas favorable à une externalisation de type Rwanda.

Pour autant, il ne nous semble pas qu’un tel amendement, de nature avant tout politique – certes, en soi, c’est respectable –, ait sa place dans la présente proposition de résolution.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 7.

(Lamendement nest pas adopté.)

Vote sur l’ensemble

Texte de la proposition de résolution européenne sur l'Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes (FRONTEX)
Dossier législatif : proposition de résolution en application de l'article 73 quinquies du Règlement, sur l'avenir de l'Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes (Frontex)
Explications de vote sur l'ensemble (fin)

M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble de la proposition de résolution européenne, je donne la parole à M. François-Noël Buffet, pour explication de vote.

M. François-Noël Buffet. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la présente proposition de résolution part de l’idée qu’à partir du moment où, sur les questions de migration, s’appliquent à la fois le droit national et le droit européen, nous devons trouver un équilibre entre ces deux sources de droit ; elles ne peuvent pas être antinomiques.

Nous avons bien noté que le Gouvernement entendait renforcer sa politique migratoire : nous en débattrons dans quelques semaines. Mais il est important que les moyens accordés à l’échelon européen pour la protection des frontières extérieures de l’Union soient suffisants.

J’ajoute, puisque plusieurs collègues se sont exprimés sur le sujet, qu’il n’est aucunement question pour nous que les droits fondamentaux de ceux qui arrivent sur le territoire européen ne soient pas respectés.

Tout l’enjeu aujourd’hui est que Frontex retrouve un fonctionnement apaisé et se concentre sur sa mission première, en restant attachée au respect des droits fondamentaux des uns et des autres.

J’ai eu plusieurs fois l’occasion de me rendre compte sur le terrain de la manière dont Frontex travaillait, que ce soit à Lesbos ou à Lampedusa ; je n’avais pas observé alors de difficultés particulières comme celles qui sont apparues plus récemment en Grèce.

Je crois que nous devons faire confiance à l’institution pour remplir correctement sa mission.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.

M. Jean-Yves Leconte. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain votera contre cette proposition de résolution européenne, car nous considérons qu’elle n’affirme pas suffisamment l’indépendance de l’officier. Or c’est cette indépendance qui aurait permis d’éviter la crise que Frontex a connue.

Il existe une difficulté systémique, dont j’en ai parlé lors de la discussion générale : Frontex n’intervient que sous la responsabilité des États membres.

Par conséquent, si des agents de Frontex sont amenés à constater des dysfonctionnements de la part d’un État membre, l’agence peut être tentée de ne pas les dénoncer par crainte de ne pas pouvoir poursuivre sa mission, ce qui serait évidemment dommageable si nous voulons protéger les frontières de l’Union européenne.

C’est la raison pour laquelle nous considérons l’indépendance totale de certains agents comme absolument indispensable. C’était l’objet de notre premier amendement, mais il n’a pas été adopté par le Sénat.

De ce fait, cette proposition de résolution européenne ne permet pas, selon nous, de tracer les pistes d’une sortie de crise pour Frontex.

M. le président. La parole est à M. Jean-François Rapin, pour explication de vote.

M. Jean-François Rapin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je souscris aux propos de François-Noël Buffet.

Je veux d’abord remercier tous les orateurs qui se sont exprimés. Chacun a pu donner son point de vue, ce qui a permis à notre débat de se tenir correctement.

J’espère ensuite que, si le Sénat adopte cette proposition de résolution européenne, comme l’ont fait la commission des affaires européennes, puis la commission des lois, le Gouvernement en tiendra compte.

J’ajoute que les événements des derniers jours montrent que nous devons rester vigilants sur la question migratoire ; Patricia Schillinger en a parlé. Les séismes qu’ont connus la Turquie et la Syrie ont entraîné la mort de nombreuses personnes, mais ils ont aussi détruit beaucoup d’habitations, mettant à la rue des milliers et des milliers de Turcs et de Syriens. Ils risquent ainsi de provoquer un afflux migratoire important.

Mme Esther Benbassa. Un peu de décence !

M. Jean-François Rapin. Je ne vous ai pas interrompue lorsque vous aviez la parole, madame Benbassa.

En tout cas, nous avons plus que jamais besoin des agents de Frontex – je les ai vus travailler ; je ne suis ni un procureur ni un distributeur de bons points – et d’une agence forte, responsable et respectueuse des droits fondamentaux.

Des dispositions ont déjà été prises pour améliorer le fonctionnement de l’agence. Elles sont importantes, si nous voulons protéger efficacement les frontières de l’Union européenne et respecter les droits fondamentaux.

M. le président. Personne ne demande plus la parole ?…

Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l’ensemble de la proposition de résolution européenne sur l’avenir de l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes (Frontex).

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 128 :

Nombre de votants 344
Nombre de suffrages exprimés 344
Pour l’adoption 252
Contre 92

Le Sénat a adopté.

En application de l’article 73 quinquies, alinéa 4, du règlement, la résolution que le Sénat vient d’adopter sera transmise au Gouvernement et à l’Assemblée nationale.

Explications de vote sur l'ensemble (début)
Dossier législatif : proposition de résolution en application de l'article 73 quinquies du Règlement, sur l'avenir de l'Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes (Frontex)
 

11

Ordre du jour

M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à demain, jeudi 9 novembre 2023 :

À dix heures trente :

Vingt-deux questions orales.

À quatorze heures trente :

Débat sur le thème « L’État territorial, entre mirage et réalité ».

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt-trois heures quarante-cinq.)

Pour le Directeur des comptes rendus du Sénat,

le Chef de publication

FRANÇOIS WICKER