M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Bérangère Couillard, secrétaire dÉtat auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée de lécologie. Monsieur le sénateur Laménie, je l’ai déjà dit, mais il faut le rappeler, le fonds vert constitue un accompagnement financier pertinent et efficace pour les collectivités territoriales.

Nous devons désormais réfléchir à la montée en puissance de ce type de dispositif pour accompagner encore plus les collectivités dans leur lutte contre la pollution lumineuse et pour la réalisation d’économies d’énergie.

Le nombre de dossiers déposés portant sur des projets de rénovation des parcs d’éclairage public atteste du besoin et de l’envie des collectivités en la matière. Le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires ne peut que s’en réjouir.

Pour cette raison, des réflexions sont en cours afin de pérenniser le fonds en 2024. Dans ce cadre, nous pourrions conditionner l’octroi d’aides au renouvellement du parc d’éclairage public à des critères spécifiques de préservation de la biodiversité. Par ailleurs, nous réfléchissons à orienter certains projets déposés dans le cadre du fonds vert vers d’autres enveloppes existantes, dont le plafond n’a pas encore été atteint.

L’objectif est bien de pouvoir financer d’autres projets via le fonds vert, probablement des projets de rénovation de l’éclairage public.

M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour la réplique.

M. Marc Laménie. Merci, madame la secrétaire d’État, de votre réponse.

Les élus de proximité rencontrent souvent des difficultés pour constituer les dossiers de financement. Ils comptent donc sur l’ensemble des services de l’État dans les départements respectifs pour les aider.

M. le président. La parole est à Mme Laurence Muller-Bronn. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Laurence Muller-Bronn. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, ce débat nous donne l’occasion de revenir sur le sujet, essentiel pour les collectivités locales, de l’éclairage public, et sur l’importance des factures énergétiques dans leur budget global.

La conversion des parcs lumineux vers des systèmes innovants de LED est non seulement indispensable, mais encore urgente : aujourd’hui, 40 % des installations d’éclairage ont plus de vingt-cinq ans et sont particulièrement polluantes et énergivores.

C’est un gain immédiat pour les finances communales, puisqu’elles peuvent faire jusqu’à 80 % d’économies sur leurs factures énergétiques.

C’est aussi un gain pour l’environnement, pour la biodiversité et pour la santé humaine.

Contrairement à d’autres investissements de moyen et long termes, le gain énergétique et environnemental d’une conversion accélérée du parc sur le territoire serait immédiat.

Pourtant, ces projets ne représentent que 28 % des crédits alloués par le fonds vert, comme vous l’avez rappelé, madame la secrétaire d’État, et comme il ressort des chiffres communiqués la semaine dernière par la Première ministre et par vous-même. Certains s’en réjouissent, mais je pense que c’est trop peu.

Pourquoi, madame la secrétaire d’État, avoir choisi d’intégrer les subventions à l’éclairage public dans ce fonds vert, en concurrence avec d’autres projets ? Il y a urgence à éclairer mieux pour réduire les nuisances évoquées ce soir.

Ce potentiel immense de rénovation, dont les bénéfices sont immédiats, aurait dû être prioritaire : la rénovation serait déjà bien engagée à l’heure où nous avons ce débat…

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Bérangère Couillard, secrétaire dÉtat auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée de lécologie. Madame la sénatrice Muller-Bronn, la phase d’instruction des dossiers déposés dans le cadre du fonds vert est en cours et l’un des critères imposés par l’État est l’impact écologique du projet. Autrement dit, les subventions seront octroyées à des projets qui ont une réelle efficacité dans la transition écologique. C’est un point d’attention majeur, qui fait toute la crédibilité du fonds vert, y compris dans la perspective de 2024.

À titre d’exemple, environ 20 % des dossiers déposés pour la rénovation énergétique des bâtiments publics locaux annoncent un gain énergétique inférieur à 30 %, qui est le minimum requis pour l’éligibilité, sachant que l’objectif national est de 40 % de gains. En dessous du seuil, il n’y a pas d’éligibilité au fonds vert, même si les dossiers peuvent avoir leur intérêt par ailleurs.

Pour l’éclairage public, l’objectif était de rénover plus de 10 % des parcs existants et de diminuer les consommations électriques. Cet objectif de 10 % est atteint par les dossiers déposés. Je m’en réjouis. Par ailleurs, les projets de rénovation du parc d’éclairage public pourraient totaliser 414 millions d’euros d’aides, pour 1 milliard d’euros d’investissements, si tous les dossiers sont financés. Cela représente tout de même près d’un quart de l’enveloppe globale.

Le fonds vert permettra de rénover 1 million de points lumineux sur les 4 millions déclarés par les collectivités territoriales comme devant être rénovés. Je crois pouvoir dire que c’est un succès, et je pense qu’on peut s’en réjouir !

M. le président. La parole est à Mme Laurence Muller-Bronn, pour la réplique.

Mme Laurence Muller-Bronn. Ce nouveau fonds vert pour les collectivités territoriales est en réalité un recyclage des crédits du programme 362. On passe simplement d’une gestion centralisée à une gestion pseudodécentralisée. Un plan national ambitieux, avec un guichet unique pour l’accompagnement de l’ensemble des projets, aurait sans doute été plus efficace, plus rapide et son effet sur la prochaine facture d’électricité aurait été plus apprécié par les élus locaux.

Conclusion du débat

M. le président. En conclusion du débat, la parole est à Mme Annick Jacquemet, au nom de l’office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques.

Mme Annick Jacquemet, au nom de loffice parlementaire dévaluation des choix scientifiques et technologiques. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, à l’issue de ce débat, je constate avec satisfaction qu’il se dégage un consensus au sein de notre assemblée pour lutter contre la pollution lumineuse.

J’ai entendu vos propositions, madame la secrétaire d’État, concernant la forfaitisation des sanctions sous forme d’amende, la réduction des périodes d’éclairage intérieur des bâtiments, la généralisation des trames noires dans les espaces protégés ou encore l’engagement volontaire des gares et des aéroports à limiter les publicités lumineuses.

Néanmoins, je n’ai pas obtenu toutes les réponses aux questions que je vous avais posées.

Ainsi, vous ne nous avez pas précisé quand l’arrêté fixant les seuils maximaux de luminance des enseignes et des publicités sera enfin publié ni, surtout, quelles seront ses grandes lignes.

Par ailleurs, vous avez soutenu l’extinction de l’éclairage au cœur de la nuit. Jean-Claude Anglars et moi-même avons souligné la responsabilité qui pèse sur le maire en cas d’accident. Vous avez dit qu’il n’y a pas d’obligation générale à l’éclairage. Toutefois, il semblerait que la jurisprudence fasse la distinction entre la situation où il n’y a jamais eu de lumière – dans ce cas, la responsabilité du maire n’est pas engagée – et le cas où il y avait éclairage et que le maire a décidé de l’éteindre – il semblerait qu’alors, sa responsabilité soit engagée.

J’y insiste donc : il faudrait changer cette règle afin de ne pas compromettre les initiatives des maires pour une plus grande sobriété lumineuse.

Au cours des auditions, on m’a fait remarquer que les trames noires ne figurent pas dans le code de l’environnement, ce qui les rendrait juridiquement fragiles. Faut-il donc les y mentionner ?

Enfin, vous n’avez pas répondu sur les engagements pris dans le quatrième plan national santé environnement, notamment en ce qui concerne les phares des voitures.

Comme vous l’avez souligné, des mesures de deux types doivent être prises.

Il faut d’abord compléter la réglementation et la faire respecter. Je souhaite faire une proposition de loi sur le sujet et ai bien noté votre intérêt pour cette question de la pollution lumineuse et votre volonté de travailler avec le Sénat. J’aurai donc plaisir à continuer à approfondir ce dossier avec vous.

Il faut également éduquer et sensibiliser nos concitoyens, et en particulier les plus jeunes. Au cours de mes auditions, j’ai été marquée par les propos des responsables de l’Association française d’astronomie, qui constataient que le ciel étoilé, avec l’émerveillement qu’il suscite, reste l’un des rares spectacles gratuits à la portée de nos concitoyens.

Pourtant, une grande partie d’entre eux en sont privés, comme cela a été souligné plusieurs fois ce soir, ce qui crée un risque de déconnexion croissante des individus et des sociétés de leur environnement. En effet, la nuit permet à l’homme de s’extraire de sa vision anthropocentrique de l’univers et de faire l’expérience du monde vivant non humain. Il est donc primordial de sauvegarder cet environnement nocturne.

Au niveau local, sa protection doit se faire de manière territorialisée, en tenant compte des besoins, mais également des appréhensions de nos concitoyens, qui varient selon le sexe et les zones habitées – qu’elles soient justifiées ou non scientifiquement. Plusieurs études ont montré que nos concitoyens étaient réellement favorables à une réduction de l’intensité lumineuse et du nombre de points lumineux.

Concrètement, il faut d’abord réfléchir à la finalité des éclairages et à leur réelle utilité, et utiliser des technologies ayant sur la biodiversité le moins d’impact possible. À cet égard, les collectivités territoriales peuvent bénéficier depuis janvier 2023, comme vous l’avez rappelé, des aides du fonds vert, qui visent justement à concilier rénovation des parcs de luminaires d’éclairage public, protection de la biodiversité et réduction de la pollution lumineuse.

Au-delà des pouvoirs publics, tous les acteurs privés participant à la pollution lumineuse doivent se mobiliser à travers une communication massive sur les règles à respecter et les bonnes pratiques en matière d’éclairage. Il s’agit des magasins de bricolage et des fabricants d’ampoules et de lampadaires, qui doivent informer et conseiller leurs clients dans le sens d’une optimisation de l’éclairage dans la durée et en quantité. Il s’agit des syndicats de l’éclairage ou encore des fédérations de commerçants, qui doivent sensibiliser leurs adhérents sur la législation en vigueur.

En conclusion, je voudrais insister sur l’efficacité et la simplicité des mesures à prendre pour lutter contre la pollution lumineuse. Contrairement à d’autres pollutions, comme la pollution chimique par exemple, la pollution lumineuse est très facilement réversible : il suffit d’éteindre la lumière pour protéger la biodiversité et nos écosystèmes – sans oublier les économies d’énergie que cela génère.

Je nous encourage donc tous à prendre notre bâton de pèlerin et à sensibiliser les communes, les acteurs économiques et les citoyens pour protéger notre environnement nocturne et garantir notre cohabitation avec le monde vivant non humain. (Applaudissements.)

M. le président. Nous en avons terminé avec le débat sur la pollution lumineuse.

12

Ordre du jour

M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à demain, jeudi 13 avril 2023 :

À dix heures trente :

Vingt-huit questions orales.

À quatorze heures trente :

Conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi portant fusion des filières à responsabilité élargie des producteurs d’emballages ménagers et des producteurs de papier (texte de la commission n° 486, 2022-2023) ;

Débat sur l’état de la justice dans les outre-mer.

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt-deux heures cinquante-cinq.)

Pour le Directeur des comptes rendus du Sénat,

le Chef de publication

FRANÇOIS WICKER