Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 1350 ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. L’année dernière, nous avions déjà souligné l’incohérence que constituait ce transfert de charges ; nous y revenons cette année au travers de cet amendement qui a pour objet de transférer 2 milliards d’euros.

Nous pouvons entendre vos raisons, monsieur le ministre, mais ce que vous proposez et présentez comme le second objectif de votre amendement s’apparente à un tour de passe-passe !

Certes, la branche vieillesse est en difficulté ; pour autant, prélever d’emblée, au profit de la branche vieillesse, les gains issus de la réforme des « bandeaux » famille et maladie prévue à l’article 10 quinquies, alors même que nous n’en avons pas encore débattu, me semble pour le moins cavalier et rapide.

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement. Elle n’avait pas d’autre moyen de souligner que ce transfert de branche à branche n’était pas correct, d’autant qu’un tel débat, je le répète, a déjà eu l’année dernière.

Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. Je souhaite répondre à M. le ministre, qui revient tout de même assez maladroitement sur le transfert des indemnités postnatales.

S’il vous plaît, monsieur le ministre ! Dire que le congé maternité après l’accouchement n’est rien d’autre qu’un congé d’accueil du jeune enfant – au même titre qu’un congé parental, si j’ai bien compris votre analyse – me semble pour le moins éloigné de la réalité.

Vous n’êtes pas ministre de la santé, cela se voit ! (Sourires. – M. le ministre délégué sexclame.)

Je vous rappelle l’importance de la dépression post-partum et sa mauvaise prise en charge en France, sans compter les autres risques associés à l’accouchement et à ses suites, qui, souvent, sont repérés dans l’entretien postnatal.

Monsieur le ministre, on ne parle pas là de l’accueil du jeune enfant ; c’est encore de la santé de la mère et de l’enfant qu’il est question. Si l’on vous suivait, on pourrait même supprimer le congé. Est-il vraiment nécessaire d’accueillir l’enfant ? Ne pourrait-on le mettre à la crèche dès la sortie de la maternité ?

M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Je n’ai pas dit cela ! C’est un peu cavalier pour le coup…

Mme la présidente. La parole est à Mme Michelle Gréaume, pour explication de vote.

Mme Michelle Gréaume. Le transfert en défaveur de la branche famille est une opération comptable qui ampute celle-ci des moyens nécessaires pour mener à bien le projet ambitieux d’un service public de la petite enfance annoncé par le Gouvernement.

Si l’on fait des annonces dans un sens, mais que l’on agit dans un autre, on ne va pas y arriver !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 228.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l’amendement n° 1350 n’a plus d’objet.

L’amendement n° 1316 rectifié, présenté par Mmes M. Vogel, Ollivier, Souyris et Poncet Monge et M. G. Blanc, est ainsi libellé :

I. – Après l’alinéa 12

Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :

…) Le 3° bis est ainsi modifié :

– Au b, le taux : « 0,60 % » est remplacé par le taux : « 0,59 % » ;

– Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« …) À la Caisse des Français de l’étranger, mentionnée à l’article L. 766-4-1, pour la part correspondant à un taux de 0,01 % ».

II. – La perte de recettes pour la Caisse d’amortissement de la dette sociale est compensée à due concurrence par un relèvement du taux mentionné au 2° du I de l’article L. 136-8 du code de la sécurité sociale.

La parole est à Mme Mélanie Vogel.

Mme Mélanie Vogel. Cet amendement s’inscrit dans le droit fil des propos de Bernard Jomier sur la « tuyauterie ». C’est en effet un peu de cela qu’il est question avec cette proposition relative à la Caisse des Français de l’étranger (CFE).

L’une des problématiques majeures des Françaises et des Français établis hors de France est d’avoir une protection sociale. C’est d’ailleurs pour éviter qu’ils ne se retrouvent sans protection sociale à l’étranger que la CFE a été créée en 1978.

L’adhésion y est certes volontaire - elle n’est donc pas obligatoire -, mais de droit.

La CFE souffre depuis de nombreuses années d’un déséquilibre financier, puisque, contrairement à la sécurité sociale, elle est uniquement financée par le biais des cotisations de ses adhérentes et de ses adhérents. Certes, elle reçoit 380 000 euros de l’État – soit, comme je l’ai dit l’année dernière, le prix d’un appartement à Marseille –, mais ce financement sert uniquement à assurer les personnes les plus précaires, celles qui relèvent de la catégorie aidée.

Les cotisations perçues par la CFE ont diminué de 30 millions d’euros entre 2007 et 2022, alors que ses dépenses continuent d’augmenter. Sur le long terme, la situation n’est pas tenable…

C’est la raison pour laquelle nous proposons d’attribuer à la CFE une partie des recettes de la CSG provenant uniquement des placements financiers et des revenus du patrimoine – et ce n’est vraiment qu’une partie, puisqu’il ne s’agit que de 0,01 % du produit total.

Par ailleurs, pour éviter que cette nouvelle affectation n’entraîne une diminution des financements des différentes branches de la sécurité, nous majorons légèrement le taux de la CSG.

Par cet amendement, nous souhaitons surtout alerter le Gouvernement sur la nécessité d’avoir une option viable et pérenne – celle que nous proposons ou une autre – pour financer la protection sociale des Français de l’étranger.

En revanche, si nous ne faisons rien, nous allons droit dans le mur !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Ma chère collègue, vous proposez que, sur le 0,6 point de CSG attribué à la Cades, 0,01 point soit attribué à la CFE.

J’ai dit hier combien il était important que l’on puisse maintenir la capacité de la Cades à régler le problème de la dette. Vous voyez d’ailleurs bien que ce n’est pas suffisant, puisque nous allons sans doute être obligés de reporter son extinction au-delà de 2033.

Certes, vous mettez l’accent sur une caisse qui a des problèmes pour être à l’équilibre, mais la sécurité sociale est, elle aussi, en grave déséquilibre ! Dans ces conditions, pourquoi prendre à la sécurité sociale, au travers de la Cades, pour régler les problèmes de la CFE ?

Je comprends que vous interrogiez le Gouvernement sur cette question. Pour autant, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Madame la sénatrice, la CFE est évidemment un bien très précieux. Vous nous alertez sur sa situation financière, qui a été déficitaire en 2022, mais qui était encore excédentaire en 2021.

De fait, elle n’est pas alarmante… (Mme Mélanie Vogel sexclame.)

Mme Raymonde Poncet Monge. Un peu tout de même !

M. Yan Chantrel. Ça ne va pas s’arrêter là !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué. … et n’exige pas que l’on détourne – c’est bien ce que vous proposez – un pourcentage de ce qui alimente directement la Cades à son profit, alors même que nous avons besoin de rembourser la dette sociale.

Certes, vous ne proposez pas, en contrepartie, de majorer la CSG sur les revenus du capital, mais le fait est que vous entendez bel et bien réaffecter une partie de son produit à la CFE. Or, j’affirme que la Cades est absolument indispensable pour amortir la dette sociale.

Un travail reste à faire sur la situation de la CFE et je suis prêt à le faire conjointement avec le Parlement. J’y suis même favorable, mais cet amendement n’est pas recevable en l’état.

C’est pourquoi le Gouvernement émet un avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. C’était un amendement d’appel, monsieur le ministre. Vous vous engagez à travailler sur cette question et c’est très bien.

Si nous n’avons pas proposé de majorer la CSG sur les revenus du capital, c’est parce que nous nous heurtons à l’article 40 de la Constitution. Cela ne vous a pas échappé ! (Sourires.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Mélanie Vogel, pour explication de vote.

Mme Mélanie Vogel. J’entends les critiques sur le dispositif en tant que tel. Je rappelle à mon tour l’existence de l’article 40 de la Constitution, article qu’il a été proposé de supprimer ici même – en vain. Il nous faut donc faire avec.

J’appelle votre attention sur le fait que le déficit de 2022 est structurel ; sans mode alternatif de financement, il se creusera en 2023, puis en 2024. Le nombre de cotisants baissant et les prestations augmentant – les Françaises et les Français de l’étranger ont de plus en plus besoin de soins –, si vous n’avez pas une meilleure proposition, monsieur le ministre, je ne vois pas comment pérenniser cette caisse et éviter la catastrophe.

Je retiens que le Gouvernement est disposé à travailler avec les parlementaires pour réfléchir à un mode de financement durable de la CFE. Si c’est bien le cas – et j’espère avoir bien compris –, j’en suis très heureuse - je pense que ce sentiment est partagé par mes collègues représentant les Français établis hors de France. Je retire mon amendement.

Mme la présidente. L’amendement n° 1316 rectifié est retiré.

L’amendement n° 810 rectifié bis, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, MM. Parigi et Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :

Alinéas 13 à 17

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.

Mme Raymonde Poncet Monge. Cet amendement d’appel vise à supprimer le transfert par répercussion de la branche maladie à la branche vieillesse au titre des « économies générées par la réforme des retraites », afin d’alerter sur la nécessaire compensation des effets récessifs de la réforme sur l’assurance maladie.

Calculées sur des prévisions macroéconomiques surestimées, les économies permises par la contre-réforme des retraites le sont tout autant. La hausse induite des dépenses de protection sociale à la suite du relèvement de l’âge légal de départ à la retraite n’a jamais été correctement évaluée par le Gouvernement, faute d’étude d’impact réelle.

Selon la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees), le relèvement de l’âge légal de départ de 62 à 64 ans entraînera une hausse des dépenses d’indemnités journalières de sécurité sociale au titre des arrêts maladie, notamment, à ces âges, de longue durée, et des accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP), estimée à de 970 millions d’euros.

C’est sans compter non plus les effets de la hausse des consultations, ainsi que des dépenses de médicaments : une étude de l’Insee démontre que le recul de l’âge légal de départ à la retraite comporte un effet non négligeable sur les dépenses pour des visites chez les médecins ou les kinésithérapeutes, ainsi que sur les dépenses de médicaments. En 2012, des études ont démontré que le report de l’âge légal aux Pays-Bas avait fait s’accroître de 40 % le taux de dépression.

Par un mécanisme de transfert par répercussion de TVA affectée, puis de produits de taxe sur les salaires, l’article 10 transfère de l’État vers la branche maladie environ 1,4 milliard d’euros à l’horizon 2027 pour les verser à la branche vieillesse. Nous proposons d’annuler le transfert entre ces deux branches, afin de prévenir la dégradation des comptes de l’assurance maladie provoquée par la contre-réforme des retraites, en l’attente d’une véritable étude d’impact.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Les alinéas que vous proposez de supprimer au travers de cet amendement d’appel ne correspondent pas aux explications que vous venez d’avancer, ma chère collègue.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. En effet, la suppression des alinéas 13 à 17 entraînera le retrait d’un paragraphe de pure technique juridique, qui ne change donc rien concrètement, mais qui ne fait que rendre compatible avec la loi organique du 28 décembre 2021 relative à la modernisation de la gestion des finances publiques la manière dont la taxe de solidarité additionnelle (TSA) due sur les cotisations des contrats d’assurance maladie complémentaire finance la complémentaire santé solidaire (C2S) et l’allocation supplémentaire d’invalidité (ASI).

Je vous remercie d’avoir exposé vos idées. Reste qu’il y a un décalage entre la suppression de ces alinéas et l’objet que vous vous êtes fixé. C’est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Je partage l’analyse de la rapporteure générale de la commission des affaires sociales.

Au travers de cet amendement, madame la sénatrice, vous touchez à une disposition qui vise à mettre en conformité l’affectation de la taxe de solidarité additionnelle avec la loi organique. Son adoption aurait donc des impacts inattendus.

Au-delà de cet argument de technique juridique, ce transfert de la branche maladie à la branche vieillesse est tout à fait conforme au principe selon lequel la totalité des économies générées par la récente réforme doit être consacrée à rééquilibrer le système de retraite. Cela passe par un mécanisme d’affectation de TVA, qui bascule de la branche maladie à la branche vieillesse, dans la mesure où cette dernière ne peut pas recevoir directement de dynamique de TVA. Je partage vos remarques sur l’extrême complexité des circuits de financement… (Sourires.)

Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

Mme Raymonde Poncet Monge. Je le retire, madame la présidente !

Mme la présidente. L’amendement n° 810 rectifié bis est retiré.

Je suis saisie de cinq amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les trois premiers sont identiques.

L’amendement n° 229 est présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales.

L’amendement n° 1026 rectifié est présenté par M. G. Blanc et Mme Guhl.

L’amendement n° 1213 rectifié est présenté par Mme Lubin, M. Jomier, Mmes Féret et Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès et Conconne, M. Fichet, Mmes Poumirol et Rossignol, MM. Redon-Sarrazy, Kerrouche, Chantrel, Lurel et Michau, Mme Bélim, MM. Jacquin, Ziane et Ouizille, Mmes Bonnefoy et Harribey, MM. Temal et Durain, Mme G. Jourda, MM. Féraud et Cardon, Mme Blatrix Contat, MM. Cozic, P. Joly et Stanzione, Mmes Conway-Mouret et Monier, MM. Chaillou, Tissot et Marie, Mme Artigalas, MM. Mérillou, Gillé et Montaugé, Mme Linkenheld et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

I. – Alinéas 18 et 24 à 31

Supprimer ces alinéas.

II. – Alinéa 33

Remplacer les mots :

, le II et le III

par les mots :

et le II

La parole est à Mme la rapporteure générale, pour présenter l’amendement n° 229.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Parmi les mesures qui sont proposées à l’article 10 figure la neutralisation de la compensation aux départements par la CNSA de la prestation de compensation du handicap (PCH) et de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA).

Monsieur le ministre, cela ne vous aura pas échappé : nous sommes la chambre des territoires ! (Sourires.)

Une telle neutralisation revient à ne pas comprendre le cadre dans lequel s’inscrit la participation de la CNSA aux frais croissants que supportent les départements pour des prestations de plus en plus importantes en nombre et en volume.

Cette neutralisation, que la commission des affaires sociales propose au travers de cet amendement de supprimer, représente 250 millions d’euros de plus pour tous les départements, ce qui n’est pas grand-chose.

À chaque étape de la décentralisation, nous avons insisté pour que l’État compense à l’euro près. S’agissant de ces prestations, nous en sommes loin : la compensation est d’environ 30 %.

L’adoption de cet amendement permettra d’augmenter un peu plus la compensation aux départements, par le transfert de 0,15 point de CSG, soit 2,6 milliards d’euros, ce qui était prévu par la loi de 2020 relative à l’aide sociale et à l’autonomie.

Nous défendons les départements, dont les charges relatives aux personnes âgées et aux personnes handicapées sont de plus en plus importantes, et nous refusons cette neutralisation de la compensation.

Mme la présidente. La parole est à M. Grégory Blanc, pour présenter l’amendement n° 1026 rectifié.

M. Grégory Blanc. Nous sommes en effet face au mur du vieillissement. L’enjeu consiste donc à structurer le futur service public territorial de l’autonomie (SPTA).

Pour relever ce défi, nous avons besoin, d’une part, de stabilité institutionnelle, pour que nos agents soient concentrés sur leurs missions auprès des publics. Évitons par conséquent d’ouvrir des débats ici ou là sur la déstabilisation des collectivités territoriales. Il faut, d’autre part, une prise en charge de la perte d’autonomie qui soit financée autrement que par les droits de mutation à titre onéreux (DMTO), que l’on appelle communément les frais de notaire, c’est-à-dire par le marché de l’immobilier.

Aujourd’hui, les départements financent l’APA à près de 60 % et la PCH à près de 70 %. La Première ministre a annoncé sa volonté de tendre vers une répartition de 50-50 à l’horizon 2030.

Cet amendement vise cet objectif, au moins en garantissant une prise en charge à la hauteur de ce qui a été prévu dans le cadre de la loi de financement de la sécurité pour 2023.

Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Lubin, pour présenter l’amendement n° 1213 rectifié.

Mme Monique Lubin. Comme cela vient d’être rappelé, les départements financent à plus de 60 % l’APA et à plus de 70 % la PCH, ce qui représente environ 8,6 milliards d’euros.

Alors que les départements sont confrontés de plein fouet aux augmentations de leurs dépenses en raison du vieillissement de la population, la stagnation des fonds de concours prévue par cet article se trouve en totale contradiction avec les besoins des collectivités pour mettre en place les politiques publiques de prévention de perte d’autonomie telles que les deux heures de lien social décidées par la précédente loi de financement de la sécurité sociale ou encore la structuration du futur service public territorial de l’autonomie.

Loin d’être un simple « article de tuyauterie » sans conséquence, selon l’expression de la rapporteure générale de l’Assemblée nationale, il s’agit bien d’une volonté d’accroître le poids des dépenses des départements, compte tenu de l’augmentation des besoins de financement pour l’APA et la PCH.

Cet amendement vise à maintenir les taux votés dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 et, de ce fait, à permettre une augmentation significative des fonds de concours de la CNSA aux départements.

L’adoption de cet amendement constituerait également un signal important pour que le Gouvernement reprenne avec les départements une réforme d’ampleur des fonds de concours de la CNSA en vue de compenser à hauteur de 50 % les variations des dépenses de l’APA et de la PCH.

Il est tout de même un peu curieux de constater que le Gouvernement ne prend absolument pas la mesure des difficultés auxquelles sont aujourd’hui confrontés les départements. Ce n’est que le début, puisque le nombre de personnes éligibles à ces allocations ne fera que croître.

Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont également identiques.

L’amendement n° 382 rectifié est présenté par Mme N. Delattre, MM. Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Daubet et Fialaire, Mme Girardin, MM. Gold, Grosvalet et Guérini, Mme Guillotin, MM. Guiol et Laouedj, Mme Pantel et M. Roux.

L’amendement n° 1099 rectifié est présenté par Mme Aeschlimann, M. Sautarel, Mme Micouleau, MM. Khalifé et Paccaud, Mme Belrhiti, M. Reynaud, Mmes Petrus, Gosselin, Jacques et Malet, MM. Bruyen, Tabarot et Cadec, Mme Romagny et MM. H. Leroy, Longeot et Panunzi.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéas 18 et 24 à 31

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour présenter l’amendement n° 382 rectifié.

Mme Véronique Guillotin. Cet amendement s’inscrit dans le même esprit que les amendements identiques précédents.

L’augmentation des recettes de la CNSA devrait entraîner une progression des fonds de concours des départements pour faire face à la dépendance par le biais de l’APA et de la PCH, et non un lissage par la baisse du pourcentage afin d’en rester au statu quo.

Il s’agit donc de supprimer l’alinéa 18, ainsi que les alinéas 24 à 31.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Do Aeschlimann, pour présenter l’amendement n° 1099 rectifié.

Mme Marie-Do Aeschlimann. Mes propos seront dans la même veine que ceux qui viennent d’être tenus.

Ce n’est pas que de la tuyauterie ! D’ailleurs, la tuyauterie provoque parfois des goulets d’étranglement. (Sourires.)

À mon tour, je rappelle que nous sommes la chambre des territoires ; à ce titre, nous sommes certainement nombreux à avoir été sollicités. Pour ma part, j’ai été contactée par Départements de France et cet amendement a été travaillé avec eux.

Au-delà de ce qui a été dit et de l’effet de ciseaux pour les départements entre des ressources et des revenus qui baissent ou, à tout le moins, qui stagnent – c’est ce que provoquera l’adoption de l’article 10 –, et des dépenses qui ne cesseront de croître de manière significative dans les prochaines années, avec des enjeux et des attentes très forts liés au vieillissement de la population et à la prise en charge de la dépendance, je mentionnerai un autre risque, à savoir des interventions différenciées et une rupture d’égalité entre eux.

En effet, si ces fonds de concours diminuent et que les transferts qui sont jusqu’à présent mis en place ne sont pas maintenus, le risque est que les départements qui le pourront proposeront des services de qualité et en nombre, alors que les départements qui seront moins à l’aise, pour le dire ainsi, « ratatineront » leurs interventions. Cela provoquera donc des ruptures d’égalité entre les territoires.

Il faut examiner cette situation avec un peu de hauteur. La stagnation des concours financiers peut entraîner des différenciations d’intervention entre les départements.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur les amendements identiques nos 382 rectifié et 1099 rectifié ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Ces amendements diffèrent des amendements identiques nos 229, 1026 rectifié et 1213 rectifié, en ce que les éléments de coordination manquent. Pour le reste, leur objet est totalement en phase avec la proposition de la commission des affaires sociales.

La commission émet par conséquent un avis défavorable sur ces amendements identiques.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur ces cinq amendements ?

M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Je constate que tous ces amendements témoignent d’une position largement partagée sur l’ensemble des travées.

Néanmoins, le Gouvernement émet un avis défavorable, dans la mesure où ils visent tous à supprimer l’évolution prévue dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 sur la part des recettes de la CNSA, alors que celle-ci permettra de faire monter en puissance la branche autonomie.

Mesdames, messieurs les sénateurs, vous savez que, tel que nous le prévoyons dans ce texte, la branche autonomie bénéficiera de 0,15 point de CSG.

L’adoption de ces amendements remettrait en cause la montée en charge financière de la branche autonomie, elle seule à même d’assurer le recrutement de 50 000 équivalents temps plein dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) d’ici à 2030, la mise en place de 50 000 solutions nouvelles dans le champ du handicap, ainsi que les dotations complémentaires de qualité et le tarif plancher dans les services d’aide à domicile – qui est souvent un objet de discussion.

Pour autant, ce texte contient un certain nombre de mesures qui intéressent directement les départements. Je les rappelle. Ainsi, la Première ministre a annoncé vendredi dernier un geste sur les fonds de concours aux départements en 2024 à hauteur de 150 millions d’euros (M. Bruno Belin sexclame.), ainsi qu’un travail sur la révision desdits fonds en lien direct avec les départements en 2025. On connaît la complexité et la multiplicité de ces fonds de concours : c’est là une demande des départements. En outre, les concours dits « historiques » augmenteront de 150 millions d’euros.

Par conséquent, je considère que la réponse qui est apportée permet d’entendre les demandes des départements, tout en préservant la branche autonomie, dont tout le monde convient ici qu’il est besoin de la renforcer pour accroître les effectifs de nos Ehpad.

Mme la présidente. La parole est à M. Bruno Belin, pour explication de vote.

M. Bruno Belin. Monsieur le ministre, la situation est grave pour les départements. Je vous demande un peu d’attention, parce que les départements, ce sont toutes les politiques sociales de proximité.

Voilà quelques jours s’est tenu à Strasbourg le congrès 2023 de Départements de France. À cette occasion, on s’est même demandé si on n’allait pas encore dire que les départements étaient l’échelon de trop et en profiter pour les…

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Passer à la trappe ! (Sourires.)

M. Bruno Belin. … laisser de côté.

Il faut absolument, ce soir, au moment où l’on parle de fonds de soutien aux politiques sociales des départements, envoyer un message clair.

Vous parlez de 150 millions d’euros, monsieur le ministre, mais cela représente 1,5 million d’euros par département !

M. Bruno Belin. Vous rendez-vous compte ?

Je me rappelle les propos de notre ancien collègue Jean-René Lecerf, qui a été président du conseil départemental du Nord : un jour de RSA, c’est 2 millions d’euros. Il maudissait à l’époque les années bissextiles, parce que le 29 février lui coûtait cher… Aujourd’hui, les départements sont confrontés aux mineurs non accompagnés (MNA) et au vieillissement – tout cela un coût –, ainsi qu’à l’effondrement d’un certain nombre de recettes. C’est le cas des DMTO, qui restaient les seules recettes dynamiques des départements après que vous avez supprimé la taxe d’habitation.

De la même façon que nous avons eu hier un débat sur les Ehpad, la forte responsabilité liée au vieillissement et l’aide qu’il faudrait apporter aux résidences autonomie, il faut aujourd’hui un message de soutien aux collectivités locales, notamment aux collectivités départementales. C’est pour cela que ce débat a le grand mérite d’avoir lieu.