M. le président. La parole est à M. Michel Masset, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

M. Michel Masset. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, mardi dernier, nous avons achevé l’examen de cette proposition de loi, portée par notre collègue Olivier Rietmann, visant à prévoir les incidences de la norme sur les petites et moyennes entreprises.

Ancien entrepreneur, je connais les difficultés propres à l’arrivée de nouvelles procédures administratives. J’entends bien la détresse de chefs d’entreprise confrontés à un changement de nature législative qui, soudainement, désorganise une structure avant tout humaine et peut compromettre momentanément les métiers de ces entreprises.

C’est la raison pour laquelle j’ai cosigné ce texte dès son dépôt, parce qu’il répond, selon moi, à de vraies inquiétudes et parce qu’il permettra, à l’avenir, d’anticiper l’applicabilité de la législation.

Il revient au législateur de s’interroger sur l’efficience de la loi sur le terrain. Nous ne l’avons que trop constaté, avec la réforme du zéro artificialisation nette (ZAN). L’inflation normative est souvent dénoncée sur nos travées.

Si nous pouvons faire des efforts de simplification, nous n’échapperons pas à la création de nouvelles normes, compte tenu des enjeux environnementaux et des politiques d’adaptation aux changements climatiques que nous allons devoir mener, qu’on le veuille ou non.

Dans notre rapport d’information intitulé Difficultés daccès au foncier économique : lentreprise à terre ?, Christian Klinger et moi-même insistions sur la nécessité de penser plus en amont les conséquences d’intentions louables et tout à fait impérieuses, comme la sobriété foncière, tout en rappelant qu’il faut néanmoins les articuler avec une certaine réalité : renchérissement du foncier disponible, difficultés d’implantation, manque de production dans des territoires en manque d’attractivité et, surtout, nombre de recours sans précédent.

Penser le risque juridique au plus tôt pour les acteurs économiques de notre pays me semble donc un très bon objectif, pour que la loi retombe, si j’ose dire, sur ses pieds.

C’est ce que prévoit ce texte créant un haut conseil à la simplification pour les entreprises, suivant par là une recommandation de l’excellent rapport d’information transpartisan intitulé La sobriété normative pour renforcer la compétitivité des entreprises.

Le haut conseil sera donc composé de représentants des différents types d’entreprises – grandes entreprises, entreprises de taille intermédiaire (ETI), PME, TPE, microentreprises –, de parlementaires et d’un membre du Conseil d’État. Je me félicite de l’augmentation des effectifs issus des PME, car ce sont elles qui rencontrent le plus de difficultés d’adaptation face à la norme.

En outre, la simplification pourrait alléger un climat qui est assez morose dans nos PME et TPE, comme le montre une récente étude de la Banque publique d’investissement (Bpifrance).

Améliorer la visibilité des normes, c’est apporter un niveau de confiance bienvenu, dans le contexte d’incertitude qui pèse sur l’investissement.

Le haut conseil sera consulté en amont des différents projets de législation et rendra des avis comportant un « test PME ». Il aura aussi une mission d’évaluation des normes en aval, ce qui est fondamental ; j’y reviendrai.

Grâce à l’article 1er ter, cette instance bénéficiera d’une dotation pour couvrir ses frais de fonctionnement et ses travaux.

L’article 1er bis, introduit en commission, définit ses compétences. S’agissant du rôle confié au haut conseil en amont de la production normative, ce dernier sera consulté pour trois types de textes : les projets de loi, les projets de texte réglementaire et les projets d’acte de l’Union européenne ayant un impact technique, administratif ou financier sur les entreprises. Il pourra enfin être consulté par le président de chacune des assemblées parlementaires sur certaines propositions de loi.

Le « test PME » inclus dans ces avis sera défini comme « [l’]analyse de l’impact attendu des normes concernées sur les petites et moyennes entreprises », de quoi parfaire les études d’impact de nos projets de loi…

À l’instar de ce qui existe au Conseil national d’évaluation des normes (CNEN), une procédure « d’extrême urgence » est ouverte pour envisager une saisine répondant à des délais contraints.

En aval, la revue régulière des normes législatives et réglementaires en vigueur sera remplacée par une mission d’évaluation précise des normes applicables aux entreprises, effectuée à la demande du Gouvernement, des commissions parlementaires ou sur la propre initiative du haut conseil.

Cette démarche en amont et en aval est confortée par cette nouvelle version du texte. Elle présente l’avantage d’entériner un processus vertueux qui permettra non seulement d’évaluer les normes, mais également de les coconstruire, afin de viser un « mieux de normes ».

Un ajout important en séance, au sujet de la surtransposition des normes européennes, suscite des interrogations. Il ne faudrait pas que cette rhétorique bien connue devienne un leitmotiv pour revoir à la baisse nos engagements environnementaux et sociaux. Certaines évolutions législatives ont leur vertu, ne le perdons pas de vue.

Hormis cette dernière remarque, dans la perspective d’une plus grande efficience de la loi, je crois que nous pouvons nous rassembler pour voter ce texte utile. C’est une première pierre avant un projet de loi de simplification annoncé pour l’été.

C’est donc avec une vraie conviction que, depuis le début de son examen, j’apporte mon soutien à ce texte. Je vous confirme que le groupe du RDSE, à l’unanimité… (Exclamations amusées.) Oui ! Nous prenons des risques ! C’est donc à l’unanimité que le groupe du RDSE votera en faveur de cette proposition de loi tant attendue, et de bonne facture. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE et sur des travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à Mme Nadège Havet, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

Mme Nadège Havet. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, l’excès de normes, leur imprévisibilité, leur complexité pèsent négativement sur l’activité de nos entreprises. Le coût des normes est estimé à 70 milliards d’euros par an, soit 3 % du PIB. Les entreprises vivent cette inflation comme une somme toujours plus grande de contraintes qu’on leur impose, comme un véritable frein pour leur compétitivité.

C’est pourquoi le Président de la République, lors de ses vœux pour l’année 2024, a annoncé vouloir simplifier les normes et réduire les délais et les procédures administratives. Les Français y sont largement favorables.

Devant les entreprises de boulangerie, Bruno Le Maire a ainsi annoncé deux nouvelles mesures de simplification. Après la suppression des formulaires Cerfa à l’horizon de 2030, les entreprises n’auront plus besoin de déclarer les arrêts maladie à la sécurité sociale à partir de 2027. Le dossier d’arrêt de travail, fourni par le salarié et le médecin, suffira.

À partir de 2027 toujours, les employeurs n’auront plus besoin de réimprimer l’attestation d’assurance chômage pour la remettre au salarié. Les informations transmises par le salarié à France Travail suffiront.

Au total, ce sont des dizaines de millions de documents par an qui seront supprimés. Sobriété administrative se conjugue parfois au mieux avec sobriété environnementale.

Madame la secrétaire d’État, vous avez de votre côté confirmé le lancement d’un « test CSRD » (Corporate Sustainability Reporting Directive) pour les PME. Elles « pratiqueront » la norme pour faire part de leurs remarques auprès de l’Union européenne. Cela est fondamental.

Après l’inversion de la courbe du chômage, après l’inversion de la courbe des émissions de CO2, soyons déterminés à inverser la courbe, ressentie comme exponentielle, de la complexité. C’est ce que vous avez proposé, monsieur Rietmann, avec Jean-Pierre Moga et Gilbert-Luc Devinaz, dans un travail remarqué, présenté en juin dernier. La proposition de loi que nous nous apprêtons à adopter en est l’une des traductions.

Avant d’assister à la fin des débats sur le Ceta, les entrepreneurs finistériens qui ont participé jeudi dernier à la journée des entreprises organisée par le Sénat ont beaucoup apprécié les échanges. Nous le savons, les attentes sont fortes, alors qu’une grande loi de simplification arrive bientôt.

Comme cela a déjà été dit, la France se classe au deuxième rang des pays où la bureaucratie est la plus complexe.

Il existe un autre angle lié à la complexification administrative qui n’est pas suffisamment abordé : il s’agit de la souffrance au travail et du sentiment d’inutilité.

Nous avons pu le constater avec mes collègues députés, avec lesquels nous menons un travail sur ces problématiques. De nombreux témoignages nous ont été adressés, tels des appels au secours : « Il faut arrêter de légiférer sans cesse ! », « Tout change en permanence, c’est trop dur pour nous ! », « Ma directrice des affaires financières devient folle. » Les normes que nous édictons emportent des conséquences sociales. Tous les secteurs attendent de nous.

Mais simplifier, c’est compliqué. Les majorités qui nous ont précédés en savent quelque chose. Monsieur Rietmann, c’est la raison pour laquelle vous proposez de changer le cadre, le logiciel de l’administration. Le groupe RDPI soutient totalement cette ambition.

Le texte de loi que nous discutons aujourd’hui doit être vu comme l’étape première du chantier de la simplification.

Trois outils sont mis en avant dans la première version de votre proposition de loi : la réalisation de « tests PME » sur les textes ayant un impact sur les TPE et les PME, l’évaluation des normes par une autorité indépendante et le pilotage de la simplification confié à un haut-commissaire.

En séance, mardi dernier, nous nous sommes prononcés pour la création d’un haut conseil à la simplification pour les entreprises, qui sera non pas une autorité administrative indépendante, mais une commission administrative consultative rattachée au Premier ministre.

Madame la rapporteure, nous saluons votre travail sur ce texte. Vous avez aussi voulu préciser que les membres de ce haut conseil désignés par le Premier ministre le soient sur proposition des organisations professionnelles représentatives, au niveau national et interprofessionnel. Nous y sommes favorables.

Le haut conseil sera consulté sur trois types de textes : les projets de loi, les projets de texte réglementaire et les projets d’acte de l’Union européenne.

Il a également été prévu que le haut conseil alerte en matière de surtransposition de normes européennes dans le droit français. Nous soutenons également cette proposition.

Mes chers collègues, il nous faut, oui, simplifier, mais simplifier sans déréguler, simplifier sans complexifier davantage. Appliquons déjà les règles existantes, de façon homogène, en expliquant les règles que nous adoptons. Formons ceux à qui elles se destinent, avant de faire le procès de leur non- ou mauvaise mise en œuvre. Il faut soigner la relation entre les administrations et les usagers, avec moins de documents et plus de proximité, moins de défiance et plus de confiance.

Monsieur Rietmann, vous avez raison, il nous faut une nouvelle méthode, non pour nous mettre, nous législateurs, sous tutelle, mais pour mieux raisonner. Le groupe RDPI soutiendra donc logiquement ce texte important et attendu. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à M. Simon Uzenat, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Simon Uzenat. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la présente proposition de loi vise à rendre obligatoires les « tests PME » et à simplifier le cadre normatif pour les entreprises, mesures portées depuis de nombreuses années, qui, prises isolément, semblent parées de beaucoup de vertus. Pour autant, leur définition, leurs objectifs opérationnels et leurs conditions de mise en œuvre ne semblent pas suffisamment précis pour répondre aux attentes non seulement des entrepreneurs, mais aussi de toutes les parties prenantes de notre tissu économique.

Dans une vie antérieure, j’ai eu la chance d’accompagner des chefs d’entreprise et des dirigeants d’organisation professionnelle. Comme vous, je peux témoigner de leur engagement résolu en matière de responsabilité sociétale. Mes collègues Brigitte Devésa, Lauriane Josende et moi-même faisons le même constat, dans le cadre du programme de contrôle de la délégation aux entreprises sur le thème « Entreprises et climat ».

Nous sommes tous d’accord pour dire que les entreprises doivent être de véritables partenaires de l’action publique. C’est ce que nous faisons au niveau local, même s’il faut veiller, comme l’ont dit des collègues siégeant à la gauche de l’hémicycle, à respecter les prérogatives du politique. Il faut placer le curseur au bon endroit.

Sans vouloir faire référence à un sketch que beaucoup connaissent, je m’imaginais, dans le Bouchonnois législatif, que l’on pose une question : « Quelle est la différence entre une bonne et une mauvaise norme ? » J’imagine que certains seraient tentés de répondre qu’il n’y en a que de mauvaises. Je crois que ce n’est pas la majorité au sein du Sénat. En tout cas, pour le groupe socialiste, les choses sont très claires : ce n’est pas le « moins de droit » qui nous préoccupe, c’est bien le « mieux de droit », avec l’objectif de simplifier sans déréguler, comme l’ont rappelé Christophe Chaillou et Gilbert-Luc Devinaz lors de la discussion générale.

Pour atteindre ce « mieux de droit », je souhaiterais revenir sur cinq points.

Le premier point consiste à reconnaître la nécessité d’engager une véritable transition législative, comme nous le faisons en matière énergétique, avec les mêmes principes clés.

Le premier principe est celui de la sobriété normative, qui relève de la responsabilité conjointe, madame la secrétaire d’État, du Gouvernement et des parlementaires – nous devons évidemment balayer devant notre porte.

Le second principe, l’efficacité normative, elle, va de pair avec la justice normative. Nous en avons eu l’illustration avec la crise agricole et la demande des acteurs de lutter résolument contre les distorsions de concurrence. Dans le Morbihan, une task force a été mise en place, sur l’initiative des chambres consulaires, des organisations professionnelles et interprofessionnelles. Nous constatons que cette demande est véritablement portée par l’ensemble des acteurs économiques.

Enfin, si le troisième principe de la transition énergétique est le soutien aux énergies renouvelables, sa traduction législative est l’évaluation ; en la matière, la France a beaucoup de retard. Le bilan du Conseil national d’évaluation des normes est extrêmement mitigé, comme l’ont dit un grand nombre de nos collègues qui y ont siégé. Madame la secrétaire d’État, nous nous interrogeons aussi sur le fait que vous n’ayez pas voulu reconduire le conseil de la simplification pour les entreprises, qui existait jusqu’en 2017. Cette absence d’évaluation montre une absence de volonté politique.

Je me tourne maintenant vers M. le président de la délégation : était-il nécessaire de légiférer sur ces « tests PME » ? Votre gouvernement, madame la ministre, a annoncé un « test PME » sur la CSRD, alors même que ce texte n’est pas adopté. J’en profite pour saluer nos collègues Marion Canalès et Anne-Sophie Romagny.

Le deuxième élément important est de travailler a priori plutôt qu’a posteriori. Des sénateurs d’autres sensibilités partagent ce souhait. Le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain l’a d’ailleurs démontré à plusieurs reprises en critiquant la façon dont les études d’impact étaient mises en œuvre. Une proposition de loi organique visant à améliorer la qualité des études d’impact des projets de loi a d’ailleurs été déposée et votée à l’unanimité du Sénat en mars 2018. Cependant, madame la secrétaire d’État, encore une fois, aucune suite ne fut donnée à l’Assemblée nationale, ce que nous regrettons fortement.

Le troisième point est de disposer du temps nécessaire pour engager cette simplification et veiller à la bonne application des mesures que nous pouvons voter. Madame la secrétaire d’État, comme l’ont dit d’autres collègues, que ce soit la généralisation des procédures accélérées ou des commissions mixtes paritaires (CMP), où, en catimini, pendant la nuit, nous faisons la loi et prenons des mesures qui sont votées sans discussion préalable et sans évaluation, tout cela pose problème et remet en cause la qualité même de la loi.

Le sujet des délais est aussi absolument central. Nadège Havet y a travaillé, dans le domaine des commandes publiques. C’est un sujet que je connais plutôt bien. Quand nous nous donnons le temps d’associer les entreprises en amont – je pense par exemple au sourcing –, nous avons la possibilité de faire mieux correspondre les lois que nous votons aux réalités de terrain.

L’avant-dernier point, madame la secrétaire d’État, concerne le rôle des corps intermédiaires et le besoin de différenciation. Le texte permet des avancées, auxquelles, madame la rapporteure, vous avez contribué, en proposant la désignation de représentants des organisations professionnelles. Cet élément est important. La mise en place de mesures d’application différées dans le temps va aussi dans le bon sens.

Pour autant, des questions demeurent, monsieur le président de la délégation aux entreprises, notamment sur la prise en compte des réalités sectorielles. Dans le bâtiment, dans la restauration, dans le secteur de la métallurgie, les réalités diffèrent fortement.

Notre groupe regrette aussi l’absence de représentants du personnel : cela constitue un manque qu’il conviendra de corriger.

Enfin, il faudrait mieux prendre en compte les réalités territoriales. Le conseil de la simplification pour les entreprises dont je parlais incluait des élus locaux. Aujourd’hui les régions et les intercommunalités sont chefs de file sur ces sujets. Encore une fois, les réalités d’application ne sont pas les mêmes. Chacun de tous les sénateurs ici présents pourrait animer un comité local de simplification. Nous devons veiller à cette prise en compte des réalités territoriales.

Monsieur le président de la délégation sénatoriale aux entreprises, madame la rapporteure, j’en viens à mon dernier point. Je tiens à mon tour à saluer l’engagement qui a été le vôtre sur le contenu même du « test PME » ; toutefois, beaucoup d’interrogations demeurent sur sa mise en œuvre opérationnelle, de la même façon que des interrogations subsistent sur les moyens qui seront donnés au haut conseil. Nous constatons qu’un engagement a été pris sur une dotation dédiée, mais au regard de l’enjeu et de l’ampleur des sujets, cela nous semble très nettement insuffisant.

Cette proposition de loi constitue une avancée ; monsieur Rietmann, je tiens à vous le dire au nom de mon groupe. Cependant, elle ne permet pas de faire de la simplification normative une politique publique pleine et entière, contribuant à l’accélération des transitions écologiques et sociales, qui sont des facteurs clés pour la compétitivité de nos entreprises, pour aujourd’hui comme pour demain. Les chefs d’entreprise, qu’ils soient chefs de TPE ou de PME, d’ETI ou de grand groupe, nous le rappellent chaque jour.

Pour l’ensemble de ces raisons, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain s’abstiendra. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. le président. La parole est à M. Olivier Rietmann, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – MM. Loïc Hervé et Vincent Louault applaudissent également.)

M. Olivier Rietmann. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le débat en séance la semaine dernière a mis en lumière une large convergence d’analyse entre les propositions de notre délégation aux entreprises et le Gouvernement.

Cette concorde tient notamment au travail réalisé par la commission des lois, et en particulier par son président, François-Noël Buffet, et par sa rapporteure, Elsa Schalck. Je souhaite tout particulièrement rendre hommage à son travail sérieux et efficace, qui nous a permis d’aboutir à ce consensus. Je tiens à remercier également le président du Sénat, Gérard Larcher, et Bruno Retailleau d’avoir permis l’inscription de ce texte à l’ordre du jour de notre assemblée. (M. Vincent Éblé ironise.) Je remercie également l’ensemble des orateurs, de tous les groupes politiques, de leur soutien. Ce texte est le fruit d’un rapport d’information adopté à l’unanimité par la délégation sénatoriale aux entreprises et d’une initiative parlementaire transpartisane.

Cette convergence est fondée sur un constat partagé : « Notre pays souffre d’une accumulation démesurée de normes ! » J’emprunte cette formule à la ministre Olivia Grégoire, dont je tiens à souligner la disponibilité et l’écoute. (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. François Bonhomme. On lui dira ! (Sourires.)

M. Olivier Rietmann. Loin de moi l’intention de vous froisser, madame la secrétaire d’État, mais je regrette sincèrement son absence aujourd’hui. Je souhaitais la remercier de vive voix pour le travail collaboratif, engagé ensemble, avec simplicité. (Exclamations amusées sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.) Je forme le vœu qu’elle accompagne cette proposition de loi jusqu’à son adoption, le plus rapidement possible, à l’Assemblée nationale.

Certains me diront que les dispositions de notre texte trouveront leur place dans les projets de loi dits « de simplification » annoncés récemment par le Gouvernement. Ce n’est pas la bonne voie, car nous n’avons plus de temps à perdre. C’est dès maintenant que nous devons couper le robinet des normes. Nos ETI, nos PME et TPE souffrent et nous demandent de passer à l’action très concrètement.

C’est dès maintenant que nous devons produire des études d’impact solides et de qualité. Les exemples ne manquent pas d’études d’impact indigentes, voire muettes, dans les différents projets de loi. J’en prendrai un. L’article 23 de la dernière loi Immigration confère aux entreprises la responsabilité de financer les cours de français, pendant les heures de travail, pour les salariés qui ne maîtrisent pas suffisamment notre langue. Une audition récente de la délégation sénatoriale aux entreprises nous informe que cela représente un coût compris entre 24 000 et 33 000 euros par salarié ! (M. André Reichardt sexclame.) Cela ne figure pas dans l’étude d’impact de la loi, parce qu’aucun « test PME » n’a été réalisé. Comment appréhender un texte dans ces conditions ? La méthode n’est ni sérieuse ni respectueuse du travail parlementaire.

C’est dès maintenant, enfin, qu’il faut rendre obligatoire le « test PME ». Il doit concerner toutes les entreprises, de la TPE à la grande entreprise.

Madame la secrétaire d’État, c’est une urgence économique ! Le réarmement de nos entreprises en passe par là. Si nous voulons y parer et observer de rapides résultats, faites que l’examen de cette proposition de loi se poursuive à l’Assemblée nationale.

Mes chers collègues, je vous invite à voter massivement pour ce texte, qui vise à conforter les entreprises dans la guerre économique, au lieu de les asphyxier en les épuisant sous le joug de nos normes et de nos procédures. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC. – MM. Michel Masset et Louis Vogel applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. Christopher Szczurek, pour la réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe.

M. Christopher Szczurek. Monsieur le président, mes chers collègues, le texte qui nous est présenté vise à répondre à une préoccupation majeure pour nos chefs d’entreprise : l’inflation législative qui, depuis des années, complexifie la décision, renchérit les coûts de fonctionnement et laisse le citoyen souvent abandonné dans le brouillard du droit.

Nous partageons tous ici l’attachement à la compétitivité de nos entreprises, dans un monde où la concurrence est féroce et souvent déséquilibrée. Cependant, la proposition de loi qui nous est soumise aujourd’hui, bien qu’elle vise à résoudre un mal français persistant depuis des décennies, ne semble pas être en mesure de régler ce phénomène.

Dès 1991, le Conseil d’État formulait dans son rapport annuel sa profonde inquiétude devant une loi tendant à la logorrhée, de plus en plus incompréhensible pour nos compatriotes et, pour le dire franchement, pour le législateur lui-même.

Depuis 2002, le volume de mots du droit français en vigueur a augmenté de près de 100 %. Derrière ces chiffres, on trouve des entrepreneurs, des élus et des citoyens perdus dans la compréhension de leurs droits. Par ailleurs, ce gouvernement, dont on nous vantait l’expertise et le sérieux, a été celui de tous les records en matière d’inflation législative.

Les conséquences de cette prolifération de lois et de règlements sont désastreuses pour nos entreprises. Le coût macroéconomique de la réglementation est estimé à des dizaines de milliards d’euros chaque année, ce qui pèse lourdement sur la compétitivité et l’innovation.

Notre classement au niveau mondial en matière de performance du secteur public est alarmant, témoignant du fardeau réglementaire qui freine notre potentiel économique.

Les PME en particulier sont les premières victimes de cette norme excessive. Obligées de naviguer dans un océan bureaucratique, elles peinent à se développer et à créer des emplois.

Malgré des initiatives gouvernementales et parlementaires, comme la mission dite « Balai » (Bureau d’abrogation des lois anciennes et inutiles) du Sénat, l’inflation législative demeure et le Gouvernement comme le législateur peinent à mettre leurs actes en adéquation avec leurs promesses.

De plus, l’éphémère conseil de la simplification pour les entreprises, version pilote du projet que nous avons à examiner, n’a vraisemblablement pas répondu au défi de la simplification du droit pour nos entreprises.

La création d’un haut conseil à la simplification pour les entreprises ne nous semble, à première vue, ni nécessaire ni adéquate. On irait ainsi créer un énième comité Théodule, alors qu’existent déjà le Conseil national d’évaluation des normes et de nombreuses instructions réglementaires pour essayer de limiter cette graphomanie irrépressible du législateur.

Nous pensons que c’est par une gouvernance raisonnée et coopérative du ministère de la justice, du ministère de l’économie et des acteurs économiques qu’une législation efficace peut émerger.

S’il nous faut agir pour alléger le fardeau normatif qui pèse sur nos entreprises, cette proposition de loi n’est pas, à nos yeux, nécessaire. Ainsi, les sénateurs issus du Rassemblement national s’abstiendront. (MM. Aymeric Durox et Joshua Hochart applaudissent.)

M. le président. Madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, il va être procédé, dans les conditions prévues par l’article 56 du règlement, au scrutin public solennel sur l’ensemble de la proposition de loi visant à rendre obligatoires les « tests PME ».

Le scrutin sera ouvert dans quelques instants.

Je vous invite à insérer votre carte de vote dans le terminal et à l’y laisser jusqu’au vote.

Si vous disposez d’une délégation de vote, le nom du sénateur pour lequel vous devez voter s’affiche automatiquement sur le terminal en dessous de votre nom. Vous pouvez alors voter pour vous et pour le délégant en sélectionnant le nom correspondant puis en choisissant une position de vote.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)